La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/09/1999 | FRANCE | N°96NC02173

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 30 septembre 1999, 96NC02173


(Première Chambre)
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 5 août 1996 sous le n 96NC02173, présentée pour la SOCIETE A 3 C (S.A.R.L.), dont le siège social est ..., représentée par son gérant ayant pour mandataire la SCP Gillard-Cullot, Rance, avocat ;
La SOCIETE A 3 C demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95-969 en date du 6 juin 1996, par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée, en réparation de faits constitutifs d'une contravention de grande voirie, à payer à l'exploitant public France Télécom la somme de cin

q mille cent quatre vingt cinq francs et 4 centimes (5 185,04 F) avec inté...

(Première Chambre)
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 5 août 1996 sous le n 96NC02173, présentée pour la SOCIETE A 3 C (S.A.R.L.), dont le siège social est ..., représentée par son gérant ayant pour mandataire la SCP Gillard-Cullot, Rance, avocat ;
La SOCIETE A 3 C demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95-969 en date du 6 juin 1996, par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée, en réparation de faits constitutifs d'une contravention de grande voirie, à payer à l'exploitant public France Télécom la somme de cinq mille cent quatre vingt cinq francs et 4 centimes (5 185,04 F) avec intérêts moratoires ;
2 ) de rejeter la demande présentée par le préfet de la Marne devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de quatre mille francs (4 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que, en réponse à sa demande de communication des pièces jointes à la saisine, le procès-verbal dressé à son encontre ne lui a pas été communiqué ;
- la copie du procès-verbal dressé le 22 février 1994 qui lui a été notifié est irrégulière ; que ce procès-verbal n'a pas été porté à la connaissance du contrevenant ou de son représentant, en violation de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ;
- que sa responsabilité n'est pas engagée du fait que l'immeuble à l'origine du sinistre est un immeuble en copropriété et que les câbles détériorés étaient situés dans une partie commune ;
- qu'elle ne peut être regardée comme étant l'auteur de la contravention, dès lors qu'étant une entreprise de promotion immobilière, elle n'a procédé à aucun travail de terrassement
- que les travaux litigieux n'étaient que partiellement réalisés pour son compte, et partiellement pour le compte de la société Armand Thierry ;
- que l'agent verbalisateur n'a rien constaté par lui-même et ne l'a pas contactée ;
- que le montant de la facture de réparation est anormal eu égard au coût du câble remplacé par rapport à celui de la main d'oeuvre ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des postes et télécommunications ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n 95-125 du 8 février 1995 ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 1999 :
- le rapport de M. COMMENVILLE, Premier Conseiller,
- et les conclusions de Mme ROUSSELLE, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 141 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, en cas de nécessité reconnue, le président peut autoriser la remise momentanée des pièces jointes à l'appui des requêtes et mémoires, pendant un délai qu'il fixe, entre les mains des avocats ou avoués ou des représentants des administrations publiques ; que cette prescription ne peut toutefois produire son plein effet et assurer le respect du caractère contradictoire de la procédure que si, chaque partie ayant été avisée par le tribunal administratif des différentes productions versées au dossier, l'ensemble des pièces produites, dont la communication a été demandée, est momentanément remis au bénéficiaire de la mesure ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en réponse à la demande de remise momentanée des pièces jointes à la saisine qui lui a été présentée le 7 août 1995 par l'avocat de la SOCIETE A 3 C attraite devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne par le préfet de la Marne pour contravention de grande voirie, le greffe de ce tribunal n'a adressé à cet avocat qu'un extrait hypothécaire et un mémoire de dépenses, en omettant de lui communiquer le procès-verbal de contravention également versé au dossier pour fonder les poursuites ; qu'il ressort du jugement attaqué que le tribunal administratif statuant sur le moyen tiré du défaut de production dudit procès-verbal s'est borné à constater qu'il manquait en fait ; que dans ces conditions, et alors même qu'elle avait eu antérieurement notification personnellement de ce procès-verbal en la forme administrative le 26 avril 1995, la requérante est fondée à soutenir que le jugement attaqué a été rendu sur une procédure irrégulière ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Châlons-enChampagne, en date du 6 juin 1996 doit être annulé ;
Considérant qu'au cours de l'instruction devant la cour administrative d'appel la SOCIETE A 3 C, qui a d'ailleurs versé au dossier son exemplaire personnel du procès-verbal litigieux, a pu prendre connaissance de l'original de ce procès-verbal joint à la saisine du tribunal administratif par le préfet ; que dans les circonstances de l'affaire il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la citation de la SOCIETE A 3 C devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.43 du code des postes et télécommunications alors applicable: "Sans préjudice de l'application des dispositions de l'article L. 66 du présent code, quiconque, de quelque manière que ce soit, détériore ou dégrade une installation du réseau aérien des télécommunications de l'Etat ou de l'exploitant public ou compromet le fonctionnement du réseau sera puni d'une amende de cent soixante francs (160 F) à deux mille francs (2 000 F)" et qu'aux termes de l'article L.71 du même code: "L'exploitant public peut prendre immédiatement toutes les mesures provisoires pour faire cesser les dommages résultant des crimes, délits et contraventions et le recouvrement des frais qu'entraîne l'exécution de ces mesures est poursuivi administrativement, le tout ainsi qu'il est procédé en matière de grande voirie" ;

Considérant qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 22 février 1994 à l'encontre de la SOCIETE A 3 C (S.A.R.L.) regardée comme étant responsable, à l'occasion de travaux de rénovation effectués dans un immeuble lui appartenant sis ..., de l'arrachement survenu le même jour de quatre câbles du réseau public des télécommunications installés dans cet immeuble ;
En ce qui concerne l'amende :
Considérant que l'article 6 de la loi du 3 août 1995, portant amnistie, dispose que : "Sont amnistiées les contraventions de grande voirie lorsqu'elles ont été commises avant le 18 mai 1995" ; que l'infraction pour laquelle la SOCIETE A 3 C s'est vue dresser procès-verbal entre dans les prévisions de cette disposition ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer, en tout été de cause, sur l'application de l'amende prévue par l'article R.43 précité ;
En ce qui concerne la réparation des dommages :
Sur la régularité des poursuites :
Considérant en premier lieu que, ainsi qu'il ressort de ce qui a été dit ci-dessus, le moyen tiré du défaut de production du procès-verbal de contravention par le préfet à l'appui de sa saisine du tribunal administratif manque en fait ;
Considérant en deuxième lieu qu'aucune disposition n'impose que le procès-verbal constatant une contravention de grande voirie soit établi contradictoirement; que le procès-verbal dressé contre la requérante n'est donc pas entaché d'irrégularité faute d'avoir été contresigné par le contrevenant ou son représentant, sans qu'y fassent obstacle en tout état de cause à cet égard les stipulations de l'article 6, paragraphe 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui ne trouvent pas à s'appliquer lorsque le juge, comme en l'espèce, ne statuant ainsi qu'il est dit ci-dessus que sur l'action en réparation des dommages causés au domaine public, ne connaît pas d'une accusation en matière pénale au sens de ladite convention ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'un procès-verbal fondé sur des faits dont l'agent ver-balisateur n'a pas été personnellement témoin ou dont les constatations ne sont pas suffisamment précises ne peut servir de base à une condamnation que si ses énonciations sont confirmées par l'instruction ou ne sont pas contestées par la défense ;

Considérant, cependant, que si l'arrachement des câbles téléphoniques a été constaté dans les parties communes d'un immeuble appartenant en copropriété à la société Foncier Bail (SA) et la SOCIETE A 3 C (S.A.R.L.), il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que la détérioration est apparue à un moment où la SOCIETE A 3 C , dont l'objet est la promotion et la construction immobilière, avait entrepris, conformément aux intentions exprimées dans l'acte d'acquisition de ses lots, d'y procéder à des aménagements intérieurs qui par leur importance équivalent à une reconstruction ; que, par suite, et alors même que l'agent verbalisateur a pris en considération le témoignage recueilli hors les formes requises par le code de procédure civile de l'exploitant d'un commerce situé dans le même immeuble, qui effectuait lui-même des travaux dans son magasin, et bien que l'accusé de réception de la notification du procès-verbal n'emporte pas par elle-même, en effet, reconnaissance de sa responsabilité, ces circonstances ne font pas obstacle à ce que la SOCIETE A 3 C soit regardée comme étant l'auteur de cette détérioration et soit en conséquence condamnée à supporter le coût de sa réparation ;
Sur la condamnation pécuniaire :
Considérant que la SOCIETE A 3 C n'établit pas qu'en l'espèce, alors même que le coût des câbles remplacés est inférieur au coût de la main d'oeuvre, que les frais exposés par l'administration pour réparer les dommages causés par elle, estimés à cinq mille cent quatre vingt cinq francs et quatre centimes (5 185,04 F), y compris le montant des frais de rédaction du procès-verbal, présentent un caractère anormal ; que, dès lors, il y a lieu de condamner la SOCIETE A 3 C à payer à France Télécom la somme susmentionnée de cinq mille cent quatre vingt cinq francs et quatre centimes (5 185,04 F), assortie des intérêts au taux légal de ladite somme à compter du 19 mai 1995, qui correspond à la date d'enregistrement au greffe de la saisine du tribunal administratif par le préfet ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la SOCIETE A 3 C la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Lejugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 23 mai 1996 est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur l'amende encourue par la SOCIETE A 3 C.
Article 3 : La SOCIETE A 3 C est condamnée à payer à France Télécom la somme de cinq mille cent quatre vingt cinq francs et quatre centimes (5 185,04 F) avec intérêts moratoires au taux légal à compter du 19 mai 1995.
Article 4 : Les conclusions de la SOCIETE A 3 C tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE A 3 C, à France Télécom et au ministre délégué à la Poste.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96NC02173
Date de la décision : 30/09/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

24-01-03-01 DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - PROTECTION DU DOMAINE - CONTRAVENTIONS DE GRANDE VOIRIE


Références :

Code des postes et télécommunications R43, L71
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R141, L8-1
Loi 95-884 du 03 août 1995 art. 6


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. COMMENVILLE
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1999-09-30;96nc02173 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award