(Deuxième Chambre)
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 28 avril 1995, et les mémoires ampliatifs enregistrés les 22 mai 1995 et 17 juillet 1995, présentés pour M. Robert X..., domicilié ... à Saint Saulve (Nord), par Me Y..., avocat ;
M. X... demande à la Cour :
1° - d'annuler l'article 4 du jugement en date du 31 janvier 1995 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus des conclusions de sa requête tendant à la réduction des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1983 et des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2° - de prononcer la réduction demandée ;
3° - de condamner l'Etat à lui verser une somme de 40 000 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 1999 :
- le rapport de Mme ROUSSELLE, Conseiller,
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décisions en date des 22 avril 1996 et 17 février 1997, postérieures à l'introduction de la requête, le directeur régional des impôts de Lille a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 147 779 F, du complément d'impôt sur le revenu et de 34 097 F de droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels M. X... a été assujetti au titre de l'année 1983 ; que les conclusions de la requête de M. X... relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la circonstance que, dans ses visas, le jugement analyse les demandes de M. X... comme tendant à la décharge de la totalité des compléments et de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 1981 à 1983, alors que ses demandes tendaient à la réduction de ces compléments, est, par elle-même, sans influence sur la régularité dudit jugement ; qu'il résulte par ailleurs des motifs de celui-ci qu'en rejetant, dans son article 4, le surplus des conclusions des demandes de M. X..., il n'a pas statué au delà des conclusions dont il était effectivement saisi ;
Sur les impositions au titre des années 1981 et 1982 :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation" ;
Considérant que la notification de redressement du 1er octobre 1985, après avoir rappelé les règles qui gouvernent le rattachement des créances aux exercices se borne à indiquer qu'au titre de l'exercice 1981, une somme globale de 71 228 F ne peut être admise au titre des créances imputables, sans identifier les créances concernées ; que cette notification ne satisfait pas, sur ce point, aux prescriptions des dispositions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ; que la circonstance que M. X... a donné son accord à ce redressement par lettre du 3 décembre 1985 n'a pas eu pour effet de couvrir cette irrégularité ; que M. X... est par suite fondé à prétendre à la décharge des droits et pénalités correspondants ;
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X..., les redressements notifiés en matière de taxe sur la valeur ajoutée ont toujours été fondés sur les dispositions des articles 266 et 267 du code général des impôts, sans que l'administration procède à aucune substitution de base légale susceptible de priver le contribuable d'une garantie prévue par la procédure d'imposition ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : 1° les frais généraux de toute nature ..." ; que la déduction de tels frais n'est cependant admise que s'ils constituent une charge effective, ont été exposés dans l'intérêt direct de l'entreprise et sont appuyés de justifications suffisantes ;
Considérant que si M. X... soutient que les usages de sa profession l'obligeaient à prendre en charge certaines dépenses lors de l'organisation de spectacles, et en particulier, à indemniser des personnes recrutées sur place en fonction de besoins occasionnels, il n'apporte à l'appui de ces allégations, aucun élément établissant l'effectivité de ces dépenses ;
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 266 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978, la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée "est constituée : a) pour les livraisons de biens et les prestations de services, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de la livraison ou de la prestation ..." ; qu'aux termes, toutefois, du II de l'article 267 du même code, dans la même rédaction : "Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : ... 2°) les sommes remboursées aux intermédiaires ... qui effectuent des dépenses sur l'ordre et pour le compte de leurs commettants dans la mesure où ces intermédiaires rendent compte à leurs commettants et justifient auprès de l'administration des impôts de la nature et du montant exact de ces débours" ;
Considérant que si M. X... soutient que des sommes correspondant à des débours au sens de l'article 267 ont été à tort incluses dans ses bases d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, il n'apporte, à l'appui de ces affirmations, aucun élément de nature à justifier qu'il aurait agi en qualité d'intermédiaire et aurait procédé au reversement des sommes imposées ;
Sur la demande de compensation présentée par l'administration :
Considérant qu'aucun dégrèvement n'a été accordé à M. X... au titre de l'année 1982 ; que l'administration ne peut, dès lors et en tout état de cause, demander sur le fondement de l'article L.203 du livre des procédures fiscales que les bénéfices industriels et commerciaux de cette année soient rehaussés de 16 371 F, montant que le vérificateur avait déduit, par correction symétrique des bilans, et en application des règles gouvernant le rattachement des créances aux exercices ;
Sur les impositions au titre de l'année 1983 :
Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, M. X... demande à la Cour de le décharger du surplus, n'ayant pas été dégrevé en cours de procédure, des impositions qui lui ont été assignées au titre de l'année 1983 ; que ces conclusions, qui excèdent le quantum de l'imposition contesté dans la réclamation préalable du contribuable, sont irrecevables ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la réduction de 71 228 F de la base, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux de l'impôt sur le revenu qui lui a été assigné au titre de l'année 1981 ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X... une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 145 779 F en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu auquel M. X... a été assujetti au titre de l'année 1983 et 34 097 F au titre de la taxe sur la valeur ajoutée pour cette même année, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X....
Article 2 : La base de l'impôt sur le revenu assignée à M. X... au titre de l'année 1981 est réduite d'une somme de 71 228 F.
Article 3 : M. X... est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 2.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 31 janvier 1995 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera à M. X... une somme de 5 000 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.