(Première Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 8 février 1996 sous le N 96NC00483, présentée pour M. Maurice X... domicilié ... à Marly (Moselle) ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) - d'annuler le jugement en date du 5 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet des Vosges du 2 septembre 1994 en tant qu'il déclare cessibles au profit du département des Vosges, trois parcelles appartenant au requérant, situées en bordure de la route départementale N 60 à La Chapelle devant Bruyères ;
2 ) - d'annuler l'arrêté de cessibilité susmentionné en tant qu'il concerne les parcelles cadastrées A N 161-165 et 167 à La Chapelle devant Bruyères ;
3 ) - de condamner le département des Vosges et l'Etat à lui payer solidairement une somme de 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code de la voirie routière ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 1999 :
- le rapport de M. BATHIE, Premier Conseiller,
- les observations de Me MARCHEGAY, avocat de M. X...,
- et les conclusions de Mme BLAIS, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, que les ordonnances de clôture ou de réouverture d'instruction ne sont pas au nombre des mentions, dont l'article R.200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, dans sa rédaction en vigueur à la date où les premiers juges ont statué, exigeait qu'elles figurent dans tout jugement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier en raison de l'omission, dans ses visas, des ordonnances de clôture puis de réouverture de l'instruction intervenues successivement les 22 février puis 4 mai 1995, doit être rejeté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R.157 du code précité : "Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours ... Les mémoires qui auraient été produits pendant la période comprise entre la clôture et la réouverture de l'instruction sont communiqués aux parties ..." ; que, par application de ces dernières dispositions, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'un vice de procédure, en tant que le tribunal a notamment statué au vu d'un mémoire déposé par le département des Vosges entre les deux ordonnances de clôture puis de réouverture de l'instruction sus-évoquées, doit également être écarté ;
Sur la légalité externe de l'arrêté de cessibilité :
Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des dispositions de l'article R.11-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, que les documents d'arpentage rendus éventuellement nécessaires à la suite de divisions de parcelles, doivent obligatoirement être établis avant que le préfet signe l'arrêté de cessibilité ; que, d'autre part, l'absence de ce document d'arpentage relatif aux parcelles cédées par le requérant n'a pu, au cas d'espèce, caractériser un vice de forme de l'arrêté de cessibilité dès lors qu'il ressort des plans et états parcellaires joints au dossier que l'emprise et le tracé de la nouvelle voie départementale, permettaient une identification précise des parties de la propriété riveraine, devant être transférées à la collectivité expropriante ; qu'il résulte de ces éléments que le moyen tiré de ce que l'arrêté de cessibilité serait entaché d'un vice de forme en tant qu'il n'aurait pas été précédé d'un document d'arpentage, en méconnaissance des dispositions de l'article R.11-28 précité, n'est pas fondé ;
Sur la légalité interne de l'arrêté de cessibilité :
Considérant en premier lieu qu'il ressort de l'article 1er de l'arrêté du 3 décembre 1993 du préfet des Vosges, qui a déclaré d'utilité publique l'opération ayant justifié l'expropriation des parcelles appartenant à M. X..., que celle-ci consiste en des " ... travaux de renforcement de la route départementale 60 entre la route départementale 423 et la route départementale 81 ..."que l'objet de cette opération, tel qu'il se trouve précisé par le dossier soumis à enquête publique, inclut notamment l'aménagement du carrefour entre les routes départementales 60 et 81 ; qu'il ressort clairement de la planche N 7 du plan parcellaire joint à ce dossier, que l'emprise prévue sur trois parcelles appartenant au requérant est rendue nécessaire par l'implantation du nouveau carrefour des deux voies sus-mentionnées ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté de cessibilité aurait illégalement prévu la cession de terrains ne correspondant pas à l'objet de l'opération déclarée au préalable d'utilité publique au profit du département, n'est pas fondé ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir d'apprécier l'opportunité du tracé choisi pour l'emprise du nouveau carrefour ; qu'aucune disposition du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ni aucun principe général du droit, n'imposent à la collectivité qui rectifie l'emprise de voies publiques, de prévoir systématiquement des prélèvements similaires sur toutes les propriétés riveraines, procédé qui, au demeurant, se heurterait fréquemment à diverses impossibilités techniques ;
Considérant, en troisième lieu, que, compte-tenu de l'objet et de l'ampleur des travaux entrepris par le département des Vosges, c'est à bon droit que cette collectivité a engagé la procédure régie par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; que le moyen, tiré de ce que le département aurait dû mettre en oeuvre une procédure d'alignement, telle que prévue par le code de la voirie routière, dont il n'est au demeurant pas établi qu'elle aurait permis de réaliser l'opération envisagée, est, dès lors, inopérant ;
Considérant, en quatrième lieu, que, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, la circonstance qu'un différent opposait M. X... à une société voisine au sujet de l'évacuation des eaux pluviales ne pouvait avoir aucune incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté de cessibilité du 2 septembre 1994 du préfet des Vosges ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que M. X..., qui est partie perdante dans la présente instance, ne peut obtenir à son profit la mise en oeuvre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : La requête d'appel de M. X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X..., au département des Vosges et au ministre de l'intérieur.