(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er février 1995, sous le n 95NC00171, présentée pour la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT, dont le siège est ... (Somme), par Me Philippe X..., membre de la société civile professionnelle d'avocats Dutoit-Fouques-Carluis et Associés ;
La S.A. JEUNEMAITRE-ADROT demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n 891218 en date du 28 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1984, 1985 et 1986, mises en recouvrement le 15 avril 1988 ;
- de lui accorder la décharge de ces impositions ;
- de condamner l'Etat à lui rembourser les frais d'instance au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 1999 :
- le rapport de Mme GESLAN-DEMARET, Premier Conseiller,
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT, qui a pour objet le négoce de céréales achetées auprès d'agriculteurs qui s'approvisionnent auprès d'elle en engrais et produits phytosanitaires ou autres, met une partie de ses silos à la disposition de la coopérative agricole de la région de Conty pour y stocker du blé collecté auprès de ses adhérents, moyennant une redevance calculée sur la base du quintal entré et assure également le transport des céréales de ses silos à la SICA portuaire de Rouen ou du Tréport ; qu'elle a consenti au cours des trois exercices vérifiés, deux avoirs annulant des facturations de stockage ainsi que l'absence de facturation de prestations de stockage et de transport, pour des montants s'élevant à 166 320 F au titre de l'exercice clos le 30 juin 1984, 483 543 F au titre de l'exercice clos le 30 juin 1985 et 167 236 F au titre de l'exercice clos le 30 juin 1986 ; que l'administration a estimé que cette renonciation à des recettes constituait un acte anormal de gestion et a procédé à des redressements selon la procédure contradictoire, régulièrement contestés par la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT ; que celle-ci fait appel d'un jugement en date du 28 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1984, 1985 et 1986, procédant desdits redressements ;
Considérant que l'administration fait valoir que les avoirs consentis ne respectaient pas la convention de stockage, que celui du 31 juillet 1984 a été comptabilisé dès le 30 juin par la coopérative avant même d'avoir été créé chez la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT et que les absences de facturation présentent un caractère occulte car elles n'apparaissaient pas en comptabilité et n'ont fait l'objet d'aucune décision sociale ; qu'il ne s'agit donc pas d'abandons de créance régulièrement passés en comptabilité ;
Considérant que la seule circonstance que la coopérative aurait été déficitaire ou n'aurait pu verser à ses adhérents, un complément de prix en fin de campagne si elle s'était acquittée, en 1984, de l'entière facture de stockage de la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT, n'est pas de nature à démontrer l'intérêt propre qu'avait la société requérante à consentir les renonciations à recettes litigieuses ; qu'elle ne justifie pas, notamment, d'un intérêt commercial suffisant à éviter la dissolution de la coopérative, eu égard au faible pourcentage que représentait la coopérative elle-même dans son chiffre d'affaires, en se bornant à soutenir sans autres précisions qu'elle voulait ainsi conserver la clientèle des adhérents de la coopérative, par ailleurs clients à titre individuel de la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT ; que, par suite, en l'absence de contrepartie, l'administration doit être regardée comme établissant que les avoirs et absences de facturation litigieux étaient constitutifs d'un acte anormal de gestion ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 28 novembre 1994, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1984, 1985 et 1986 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions de la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées ;
Article 1er : La requête de la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A. JEUNEMAITRE-ADROT et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.