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30/03/1999 | FRANCE | N°94NC01704

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 30 mars 1999, 94NC01704


(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 décembre 1994, sous le N 94NC01704, présentée pour la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER dont le siège social est ..., par MetR, avocats ;
La S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER, venant aux droits de la S.A. "I.C.P.", demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement n 892432 en date du 4 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la S.A. "I.C.P." en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités afférentes auxquels elle a été assujettie

au titre des exercices 1983/1984, 1984/1985 et 1985/1986 ;
2 / de prononc...

(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 décembre 1994, sous le N 94NC01704, présentée pour la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER dont le siège social est ..., par MetR, avocats ;
La S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER, venant aux droits de la S.A. "I.C.P.", demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement n 892432 en date du 4 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la S.A. "I.C.P." en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1983/1984, 1984/1985 et 1985/1986 ;
2 / de prononcer les décharges demandées ;
3 / de condamner l'Etat, en tant que de besoin, au remboursement des frais de garantie constitués ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 1999 :
- le rapport de M. PAITRE, Président,
- les observations de Me Y... de la SCP MARCHESSOU, avocat de la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER,
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification générale, des compléments d'impôt sur les sociétés ont été assignés à la S.A. "I.C.P." au titre des exercices clos le 31 août des années 1985 et 1986, en conséquence, notamment, d'une part, de la réduction de la valeur inscrite à l'actif du bilan de la société des bâtiments à usage industriel édifiés sur un terrain d'une superficie de 8811 m, partie qu'elle acquise le 13 décembre 1984 d'un ensemble immobilier sis à Champigny-sur-Marne appartenant à la société Johnson et Johnson, d'autre part, de la remise en cause de la comptabilisation, à la clôture de l'exercice 1984/1985 d'amortissements et d'une perte afférents aux bâtiments susmentionnés démolis durant le premier trimestre de 1985 ; que la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER, venant aux droits de la S.A. "I.C.P.", fait appel d'un jugement en date du 4 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la S.A. "I.C.P." tendant à la décharge de ces impositions complémentaires ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'à l'appui de sa contestation du chef de redressement relatif aux amortissements et à la perte comptabilisés à la clôture de l'exercice 1984/1985, relatifs aux bâtiments démolis au début de l'année 1985, la S.A. "I.C.P." s'était notamment prévalue, devant le tribunal, sur le fondement de l'article L.80A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle faite à M. X..., député, le 14 novembre 1969 ; que le tribunal a rejeté cette contestation sans répondre à ce moyen ; que, dès lors, la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer, et à demander, pour ce motif, son annulation en tant qu'il s'est prononcé sur ce chef de redressement ; qu'il y a lieu d'évoquer les conclusions de la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER dirigées contre ce chef de redressement, et de statuer, par effet dévolutif de l'appel, sur la contestation des autres chefs de redressement ;
Sur le chef de redressement relatif aux amortissements et à la perte comptabilisés au titre des bâtiments démolis :
Sur l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts : "Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé, au passif, par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées" ; que le 4 de l'article 39 duodecies du même code dispose que : "Le régime des moins-values à court terme s'applique : ... b. Aux moins-values subies lors de la cession de biens amortissables, quelle que soit la durée de leur détention ..." ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la S.A. "I.C.P." a procédé à l'acquisition susmentionnée en vue de réaliser, après démolition de la plus grande partie des bâtiments existants, la construction d'immeubles à usage industriel et de bureau ; que, dès lors, les démolitions auxquelles elle a procédé durant le premier semestre de l'année 1985, qui n'impliquaient pas une diminution de l'actif immobilisé, ne pouvaient être regardées comme ayant le caractère de "cessions" au sens des dispositions précitées du 4 de l'article 39 duodecies du code général des impôts ; que le coût d'acquisition des bâtiments démolis devait être regardé comme un élément du prix de revient des constructions ultérieurement édifiées, susceptible d'être amorti dans les mêmes conditions que les nouveaux bâtiments après leur achèvement ; qu'ainsi, la S.A. "I.C.P." ne pouvait, sur le fondement des dispositions précitées, être admise, à la clôture de l'exercice 1984/1985, d'une part, à pratiquer un amortissement sur ce coût d'acquisition, d'autre part, à comptabiliser une perte égale à la valeur comptable résiduelle des bâtiments démolis ;
Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :
Considérant, en premier lieu, que la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER ne peut, en tout état de cause, se prévaloir utilement de l'interprétation donnée dans la documentation 4 B 123 aux termes de laquelle : "Le retrait définitif d'un élément usagé de l'actif immobilisé en vue de sa mise hors service ou sa destruction doit être assimilé à une cession de cet élément", dès lors que cette documentation a été établie le 15 juin 1991, postérieurement à la mise en recouvrement du complément d'imposition en litige ;
Considérant, en deuxième lieu, que la réponse ministérielle en date du 14 novembre 1969 faite à M. X..., député, concerne exclusivement les démolitions d'immeubles ou de parties d'immeubles qui ont été utilisés par des entreprises pour les besoins de leur exploitation ; qu'il est constant que la S.A. "I.C.P." n'a pas utilisé pour les besoins de son exploitation les bâtiments qu'elle a fait démolir en 1985, trois mois après avoir acquis l'ensemble immobilier dont ils faisaient partie, et ne se trouvait donc pas dans la situation prévue par cette réponse ministérielle, dont la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER ne peut dès lors invoquer, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice de l'interprétation qu'elle contient ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en ayant rehaussé la plus-value comptabilisée par la société à la suite de la destruction par un incendie d'une partie des bâtiments et du versement, en conséquence, d'une indemnité d'assurance d'un montant supérieur à la valeur inscrite à l'actif de ces bâtiments, l'administration ne saurait être regardée comme ayant formellement pris, sur l'appréciation de la situation de fait, différente, à l'origine du redressement ici en cause, une position dont la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER pourrait se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER n'est pas fondée à demander la décharge des compléments d'impôt sur le revenu qui ont été assignés à la S.A. "I.C.P." en conséquence de la réintégration dans les résultats de l'exercice clos en 1985 des amortissements et de la perte comptabilisés au titre des bâtiments démolis ;
Sur les chefs de redressements assignés en conséquence de la remise en cause de la valeur des bâtiments comptabilisée à l'actif du bilan de la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER :
Considérant qu'à la suite de l'acquisition susmentionnée, pour un montant de 2 640 000 F, la S.A. "I.C.P." a inscrit à l'actif de son bilan les bâtiments pour un montant de 1 753 416 F, soit 588 F par m, et le terrain pour un montant de 886 584 F, soit 100,62 F par m ; que, sans remettre en cause le principe de cette ventilation comptable, l'administration a réévalué la valeur du terrain à 1 762 200, soit 200 F par m, et en a déduit une valeur des bâtiments ramenée à 877 800 F, soit 294 F par m ; qu'elle a, en conséquence, rectifié à la baisse le montant des amortissements pratiqués sur les bâtiments, durant les deux exercices en litige, et rehaussé le montant de la plus-value réalisée en conséquence de l'indemnisation, en 1985, de la destruction d'une partie des bâtiments par un incendie, pour un montant supérieur à la valeur résiduelle de ces bâtiments ;
Considérant que l'administration fait état de huit ventes de terrains constructibles intervenues à Champigny entre 1982 et 1986, pour un prix du m compris entre 214 F et 300 F ; que, contrairement à ce que soutient la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER, les caractéristiques de ces ventes, qu'il s'agisse de la localisation des terrains concernés, de leur superficie, ou de la destination des constructions devant y être édifiées, n'apparaissent pas telles que les prix convenus ne puissent être retenus comme éléments de comparaison pour déterminer la valeur du terrain d'assiette de l'ensemble immobilier litigieux ; que la valeur d'assurance des bâtiments, arrêtée à un montant de 7 165 000 F représentant plus de 2,7 fois le prix d'acquisition de l'ensemble immobilier, ne saurait être regardée comme significative de la valeur réelle de ces bâtiments ; que la vente à la société Interbail, réalisée concomitamment à celle en litige, de l'autre partie, d'une superficie de 7953 m, de l'ensemble immobilier de la société Johnson et Johnson moyennant un prix global de 2 500 000 F sans ventilation entre le terrain d'assiette et les bâtiments, ne saurait, davantage, par elle-même, servir de terme de comparaison, non plus que les conditions du contrat de crédit-bail immobilier, qui ne peut être assimilé à une vente, que la société Interbail a ultérieurement conclu, à propos de cet immeuble, avec la société A.C.D.S. ; que, par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, dont la charge lui incombe, que le terrain de l'ensemble immobilier acquis par la S.A. "I.C.P." en décembre 1984 ne pouvait être inscrit à l'actif du bilan de cette société pour un montant inférieur à 1 762 200 F, et que, par voie de conséquence, les bâtiments existant sur ce terrain ne pouvaient être valorisés pour un montant supérieur à 877 800 F ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les conclusions de la demande de la S.A. "I.C.P." dirigées contre les chefs de redressements assignés en conséquence de la remise en cause de la valeur comptabilisée à l'actif de son bilan des bâtiments de l'ensemble immobilier qu'elle a acquis en décembre 1984 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 4 octobre 1994 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de la S.A. "I.C.P." tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés en conséquence de la réintégration dans les résultats de l'exercice clos en 1985 des amortissements et de la perte relatifs aux bâtiments démolis au début de l'année 1985.
Article 2 : Les conclusions de la demande dont la S.A. "I.C.P." a saisi le tribunal administratif de Strasbourg qui sont mentionnées à l'article 1er sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A. FINANCIERE CARTON-PAPIER, et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94NC01704
Date de la décision : 30/03/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - EVALUATION DE L'ACTIF


Références :

CGI 38, 39 duodecies
CGI Livre des procédures fiscales L80 A, L80 B


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. PAITRE
Rapporteur public ?: M. STAMM

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1999-03-30;94nc01704 ?
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