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30/03/1999 | FRANCE | N°94NC00331

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 30 mars 1999, 94NC00331


(Deuxième Chambre)
Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 18 mars 1994 sous le numéro 94NC00331, le recours présenté par le MINISTRE DU BUDGET, porte parole du gouvernement ;
Le ministre demande à la Cour :
1 - d'annuler le jugement en date du 14 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la société de secours minière A XI la décharge des cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 1987, 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, et des droits de taxe d'apprentissage mis à sa charge au titre des années 1987 et 1988 ;r> 2 - de remettre intégralement à la charge de la société de secours miniè...

(Deuxième Chambre)
Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 18 mars 1994 sous le numéro 94NC00331, le recours présenté par le MINISTRE DU BUDGET, porte parole du gouvernement ;
Le ministre demande à la Cour :
1 - d'annuler le jugement en date du 14 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la société de secours minière A XI la décharge des cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 1987, 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, et des droits de taxe d'apprentissage mis à sa charge au titre des années 1987 et 1988 ;
2 - de remettre intégralement à la charge de la société de secours minière A XI les cotisations concernées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 1999 :
- le rapport de Mme ROUSSELLE, Conseiller,
- et les conclusions de M. STAMM , Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société de secours minière A XI, régie par les dispositions du décret n 46-2769 portant organisation de la sécurité sociale dans les mines, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er janvier 1984 au 31 décembre 1987 ; qu'au titre de ces années ainsi que des années ultérieures jusqu'à l'année 1992, l'administration a notifié à la société de secours minière A XI des redressements en matière de taxe professionnelle et de taxe d'apprentissage ; que, compte tenu des mesures de dégrèvement d'office intervenues, seules demeurent en litige devant la Cour, s'agissant de la taxe professionnelle, les années 1987 à 1992, et, s'agissant de la taxe d'apprentissage, les années 1987 et 1988 ;
Sur l'application de la loi fiscale :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts "La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent, à titre habituel, une activité professionnelle non salariée" ;
Considérant, d'autre part, que l'article 224 du même code dispose : "1. Il est établi une taxe, dite taxe d'apprentissage, dont le produit est inscrit au budget de l'Etat pour y recevoir l'affectation prévue par la loi. 2. Cette taxe est due : ... 2 par les sociétés, associations et organismes passibles de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 206" ;
Considérant, enfin, que l'article 206 du code général des impôts prévoit que "sont passibles de l'impôt sur les sociétés toutes personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif" ; qu'aux termes de l'article 207-1 du code général des impôts : "Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : ... 5.bis Les organismes sans but lucratif mentionnés à l'article 261-7-1 pour les opérations à raison desquelles ils sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée" ; et qu'aux termes de l'article 261 du même code : "Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : ... 7. 1 a. Les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif, et dont la gestion est désintéressée. ( ...) ; b. Les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des oeuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient" ;
Considérant que, pour accorder à la société de secours minière A XI la décharge des impositions contestée, le tribunal administratif a considéré que la seule circonstance que la société de secours minière offre les services de ses pharmacies et centres d'optique mutualistes à des tiers ne suffit pas à conférer un caractère lucratif à ces opérations et que, par suite, l'administration ne pouvait se fonder sur ce seul moyen pour refuser à la requérante le bénéfice des exonérations de taxe professionnelle et de taxe d'apprentissage ;

Considérant, en premier lieu, que si la société de secours minière A XI est un organisme à but non lucratif, il résulte toutefois de l'instruction que les prestations assurées par le centre d'optique et les pharmacies mutualistes qu'elle exploite sont comparables à celles des opticiens et pharmaciens indépendants du secteur commercial et ne sont pas fournies à des prix inférieurs à ceux pratiqués par ces derniers ; que ces opérations présentent dès lors un caractère lucratif au sens de l'article 206 précité du code général des impôts ;
Considérant, en second lieu, que les prestations assurées par la société requérante dans ses centres d'optique et pharmacies mutualistes ne présentant pas les caractéristiques d'un service de caractère social eu égard à leur nature commerciale, ladite société ne saurait prétendre au bénéfice de l'exonération d'impôt sur les sociétés en application des dispositions combinées des articles 207-1-5.bis et 261-7-1.a du code général des impôts précitées ; qu'il résulte en outre de ce qui a été dit ci-dessus qu'elle ne peut davantage utilement se prévaloir des dispositions de l'article 261-7-1.b qui visent des opérations non couramment réalisées, à des prix comparables, par des entreprises commerciales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les opérations en cause étaient, en raison de leur caractère lucratif, soumises par la loi à l'impôt sur les sociétés et dès lors à la taxe d'apprentissage ainsi qu'à la taxe professionnelle ; que, dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a accordé à la société de secours minière A XI la décharge des cotisations de taxe d'apprentissage et de taxe professionnelle au titre des années en litige ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen présenté par la société de secours minière A XI devant le tribunal administratif de Lille, tiré de l'application de la doctrine administrative ;
Considérant, d'une part, que l'instruction du 17 mai 1976 ne contient que des recommandations à usage du service et n'est donc pas opposable à l'administration ; qu'en outre, les autres instructions, relatives à l'exonération des organismes à but non lucratif ne peuvent utilement être invoquées par la société requérante en raison de la nature lucrative de l'activité exercée en l'espèce ;

Considérant, d'autre part, que la société de secours minière A XI se prévaut également d'une réponse ministérielle à M. X..., député, en date du 3 septembre 1960, qui indique qu'une "société de secours minière qui gère une pharmacie mutualiste ( ...) doit être assujettie à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun, à raison des bénéfices nets provenant des ventes effectuées à des personnes non affiliées au régime spécial de la sécurité sociale" ; que, toutefois, cette prise de position n'implique pas l'exonération d'impôt à raison de bénéfices provenant de ventes faites à des personnes affiliées à ces régimes spéciaux ; que, de même, la réponse ministérielle à MM. Y..., Lory et Reymond, du 15 décembre 1986, qui indique que les exonérations de taxe professionnelle et d'impôt sur les sociétés ne peuvent être accordées à une société mutualiste qui offrirait ses services à des non-adhérents ou qui réaliserait des opérations non conformes à son objet statutaire, ne prévoit pas l'exonération de sociétés mutualistes de l'impôt sur les sociétés à raison des ventes réalisées à des personnes adhérentes d'une autre société mutualiste ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a déchargé la société de secours minière A XI de la taxe professionnelle au titre des années 1987 à 1992 et de la taxe d'apprentissage au titre des années 1987 et 1988 ; qu'il y a lieu de remettre ces impositions à la charge de la société de secours minière A XI ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 14 octobre 1993 est annulé.
Article 2 : Les cotisations de taxe professionnelle auxquelles la société de secours minière A XI a été assujettie au titre des années 1987 à 1992 et les cotisations de taxe d'apprentissage qui lui ont été réclamées pour les années 1987 et 1988 sont intégralement remises à sa charge.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la société de secours minière A XI.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94NC00331
Date de la décision : 30/03/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-03-04-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - PROFESSIONS ET PERSONNES TAXABLES


Références :

CGI 1447, 224, 206, 207, 261
Décret 46-2769 du 01 janvier 1984
Instruction du 17 mai 1976


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. STAMM

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1999-03-30;94nc00331 ?
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