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17/12/1998 | FRANCE | N°94NC01423

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 17 décembre 1998, 94NC01423


(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 septembre 1994, présentée par Mme VILAIN, ès-qualité de représentant légal de la S.A. Pierre VILAIN, domiciliée ... (Grand Duché du Luxembourg), ayant élu domicile chez Me X..., domiciliée ... à La Madeleine (Nord) ;
Mme VILAIN demande à la Cour :
1 ) - d'annuler le jugement en date du 6 juillet 1994 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires au titre de l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes

auxquelles la S.A. Pierre VILAIN a été assujettie au titre des années 1978 à 1982 ...

(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 septembre 1994, présentée par Mme VILAIN, ès-qualité de représentant légal de la S.A. Pierre VILAIN, domiciliée ... (Grand Duché du Luxembourg), ayant élu domicile chez Me X..., domiciliée ... à La Madeleine (Nord) ;
Mme VILAIN demande à la Cour :
1 ) - d'annuler le jugement en date du 6 juillet 1994 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires au titre de l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles la S.A. Pierre VILAIN a été assujettie au titre des années 1978 à 1982 ;
2 ) - de la décharger des impositions contestées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 1998 :
- le rapport de Mme ROUSSELLE, Conseiller,
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre :
Considérant que Mme VILAIN, qui était partie à la première instance, est recevable à interjeter appel du jugement rendu par le tribunal administratif de Lille sur sa demande ; que la fin de non-recevoir soulevée par le ministre doit, dès lors, être écartée ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que la S.A. Pierre VILAIN a été dissoute par anticipation à compter du 15 avril 1984 et radiée du registre du commerce le 26 avril 1985 ; que Mme VILAIN a été président-directeur général de cette société, puis, jusqu'à la radiation du registre du commerce, son liquidateur amiable ; que, en date des 24 décembre 1982 et 16 novembre 1983, l'administration a adressé au président directeur général de la S.A. Pierre VILAIN, deux notifications de redressements portant, d'une part, sur l'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 1978, d'autre part, sur l'impôt sur les sociétés au titre des années 1979 à 1982 et la taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982 ; que des avis d'imposition de l'impôt sur les sociétés pour les cinq années en litige ont été émis, à l'encontre de la S.A. Pierre VILAIN, le 7 décembre 1985 ; que la requête présentée par Mme VILAIN devant le tribunal administratif de Lille a été rejetée comme irrecevable au motif qu'elle n'avait pas été, en tant que président-directeur général de la société, mise personnellement en demeure d'acquitter les impositions mises à la charge de ladite société et que, en l'absence de mandat lui permettant de se pourvoir au nom de cette personne morale, elle n'avait plus qualité pour la représenter ;
Considérant que la personnalité morale d'une société, même radiée du registre du commerce, survit dans la mesure des nécessités de la liquidation de ses droits et obligations ; que, lorsqu'une société liquidée et radiée du registre du commerce a fait l'objet d'un acte d'établissement d'une imposition, la personne chargée des opérations de liquidation qui a été destinataire de l'avis de paiement à ce titre ainsi que de tous les actes de procédure, a qualité pour contester cette imposition ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme VILAIN est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête comme irrecevable ; qu'ainsi, le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 6 juillet 1994 doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme VILAIN devant le tribunal administratif de Lille ;
Sur le complément d'impôt au titre de l'année 1978 :
Considérant qu'en vertu des dispositions, alors applicables, du 1 de l'article 1966 du code général des impôts, les omissions totales ou partielles constatées notamment dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés peuvent être réparées jusqu'à l'expiration de la quatrième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due ; qu'aux termes des dispositions, également applicables en l'espèce, de l'article 1975 du même code : "Les prescriptions sont interrompues par des notifications de redressements ( ...)" ;

Considérant que la notification de redressements établie au titre de l'année 1978, datée du 24 décembre 1982, adressée par lettre recommandée avec avis de réception à l'adresse postale de la S.A. Pierre VILAIN à Hénin Beaumont, n'a été réceptionnée que le 3 janvier 1983 ; que, si l'administration soutient que la prescription a été régulièrement interrompue, en ce qui concerne l'année 1978, dès le 27 décembre 1982 par la remise du pli contenant la notification de redressements au service postal auquel la société Pierre VILAIN aurait confié la garde de son courrier, elle ne l'établit pas, en l'absence de production d'un document tel qu'un avis de mise en instance ou toute autre attestation suffisamment précise du service des postes ; qu'il y a lieu, par suite, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés relative à l'année 1978 ;
Sur les compléments d'impôt au titre des années 1979 à 1982 :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne le lieu d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.206 du livre des procédures fiscales : "En ce qui concerne l'impôt sur le revenu et les taxes assimilées et l'impôt sur les sociétés, les contestations relatives au lieu de l'imposition ne peuvent, en aucun cas, entraîner l'annulation de l'imposition" ; qu'il suit de là que la circonstance que les impositions litigieuses ont été établies à Hénin Beaumont alors que, selon la requérante, une partie d'entre elles auraient dû l'être à Paris, est en tout état de cause, sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
En ce qui concerne l'absence de débat oral et contradictoire :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité s'est déroulée au siège de l'entreprise ; que le vérificateur y a rencontré, à plusieurs reprises, Mme VILAIN ; que la requérante n'établit pas qu'il se serait refusé à tout échange de vues avec elle et n'est donc pas fondée à soutenir que la procédure aurait été viciée faute d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les salaires et charges sociales :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans la décision d'admission partielle de la réclamation présentée par Mme VILAIN au nom de la société, en date du 28 décembre 1989, le directeur régional des impôts du Nord a indiqué abandonner les redressements liés à la réintégration des salaires de Mme VILAIN et des charges sociales y afférentes au titre des années 1979 et 1980 et a prononcé les dégrèvements correspondants ; que, par suite, les conclusions de la requête tendant à la décharge des impositions établies initialement de ce chef sont irrecevables, et doivent, dès lors, être rejetées ;
En ce qui concerne les charges dont la déduction n'a pas été admise :
Considérant qu'au terme des dispositions de l'article 39-1 du code général des impôts : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1 les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire" ;

Considérant que, quelle que soit la procédure d'imposition suivie, il appartient toujours au contribuable d'apporter la preuve du principe et du montant des charges dont il entend obtenir la déduction ;
Considérant que le vérificateur a refusé la déduction des frais de téléphone, d'électricité, de fuel domestique et d'entretien de chaudière relatifs à l'immeuble sis ..., passés dans les charges de la société ; qu'en se bornant à soutenir que les dépenses figurant sur ces factures sont celles du siège social de la S.A. Pierre VILAIN, la requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère exclusivement professionnel de ces dépenses dont, en tout état de cause, la facturation a été établie au nom de M. Pierre VILAIN ;
Considérant, par ailleurs, que la S.A. Pierre VILAIN a comptabilisé en charges des indemnités kilométriques versées à Mme VILAIN, au vu de décomptes trimestriels ne comportant que l'indication des lieux de destination ; qu'en alléguant que ces lieux correspondent nécessairement à des implantations de fournisseurs de la société, sans justifier ni des dates, ni de l'objet de ces déplacements, la requérante ne peut être regardée comme apportant la justification du principe et du montant de ces charges ;
Considérant, enfin, que, si la requérante soutient que c'est à tort que le vérificateur a écarté certaines factures comme étant étrangères aux activités de l'entreprise, elle ne produit, à l'appui de ses affirmations, aucune justification de nature à permettre au juge de l'impôt d'en apprécier la pertinence ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. Pierre VILAIN est seulement fondée à demander la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés mise à sa charge au titre de l'année 1978 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 6 juillet 1994 est annulé.
Article 2 : La S.A. Pierre VILAIN est déchargée, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1978.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par Mme VILAIN agissant au nom de la S.A. Pierre VILAIN devant le tribunal administratif de Lille est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme VILAIN, agissant pour le compte de la S.A. Pierre VILAIN et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94NC01423
Date de la décision : 17/12/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - FORMES ET CONTENU DE LA DEMANDE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - REQUETES D'APPEL - FORMES ET CONTENU DE LA REQUETE.

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - QUALITE POUR AGIR - REPRESENTATION DES PERSONNES MORALES.


Références :

CGI 1966, 1975, 39
CGI Livre des procédures fiscales L206


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. COMMENVILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-12-17;94nc01423 ?
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