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06/08/1998 | FRANCE | N°94NC01694

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 06 août 1998, 94NC01694


(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er décembre 1994, sous le n°94NC01694, présentée pour M. Jacques X..., demeurant ..., (Oise), par Me Yvan Barthomeuf, avocat associé de la SCP Bernard et Yvan Barthomeuf ;
M. X... demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n° 90818 en date du 28 septembre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1984 et 1985 ;
- de lui accorder la déch

arge desdites impositions s'élevant respectivement à 128 150 F et 97 853 F ;
...

(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er décembre 1994, sous le n°94NC01694, présentée pour M. Jacques X..., demeurant ..., (Oise), par Me Yvan Barthomeuf, avocat associé de la SCP Bernard et Yvan Barthomeuf ;
M. X... demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n° 90818 en date du 28 septembre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1984 et 1985 ;
- de lui accorder la décharge desdites impositions s'élevant respectivement à 128 150 F et 97 853 F ;
- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 20 000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 1998 :
- le rapport de Mme GESLAN-DEMARET, Premier Conseiller,
- les observations de Me Yvan BARTHOMEUF, avocat de M. Jacques X...,
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X... demande la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1984 et 1985, s'élevant respectivement à 128 150 F et 97 853 F ; qu'il conteste, d'une part, la régularité de la procédure d'imposition, d'autre part, le bien-fondé de la réintégration, dans son revenu global au titre des années 1984 et 1985, des déficits fonciers résultant des travaux de rénovation effectués sur l'immeuble dont il est propriétaire sis ...
..., dans le secteur sauvegardé de Bordeaux ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la régularité de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, si l'avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble, en date du 16 septembre 1986, a été remis à M. X... le 22 septembre 1986 à l'occasion d'un rendez-vous avec un inspecteur des impôts, il n'est pas établi que des investigations autres que la demande de communication de ses relevés de comptes bancaires, auraient été effectuées avant la date du 2 octobre, qui doit être regardée comme la date effective du début de la vérification ainsi qu'il ressort de la lettre du vérificateur du 24 septembre 1986 produite par M. X... lui-même, et nonobstant les termes de la notification de redressements ; que M. X... n'est donc pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas disposé d'un délai suffisant pour se faire assister d'un conseil en méconnaissance des dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, que M. X... ne peut utilement se prévaloir, ni sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, ni, en tout état de cause, sur celui de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983, de la note du 30 décembre 1977 (BODGI 13L-10-77) dès lors que cette instruction, qui se borne à inviter les agents des impôts à respecter un délai de 15 jours entre l'envoi de l'avis de vérification et le début des opérations, ne constitue pas une interprétation formelle de la loi fiscale opposable à l'administration, s'agissant de simples recommandations aux services relatives à la procédure d'imposition, et ne comporte aucune règle nouvelle ;
En ce qui concerne la motivation de la notification de redressement :
Considérant que si M. X... soutient que la notification de redressement est insuffisamment motivée en ce qu'elle se réfère aux "documents en possession du service" sans que ceux-ci lui aient jamais été communiqués, alors qu'il a toujours contesté les éléments avancés par l'administration concernant la nature des travaux dont la déduction était refusée, il lui appartenait alors d'en solliciter la communication, ce qu'il n'établit ni même n'allègue avoir fait ; que, dans ces conditions, la procédure n'est pas entachée d'irrégularité ;
En ce qui concerne l'absence de saisine de l'interlocuteur départemental :

Considérant que si M. X... fait valoir qu'il a sollicité à deux reprises, par lettres des 3 novembre et 22 décembre 1987, une entrevue avec l'interlocuteur départemental, sans que ces demandes aient eu de suites, il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait réitéré lesdites demandes après le 1er janvier 1988, date à laquelle les dispositions de la "Charte du contribuable vérifié" sont devenues opposables à l'administration sur le fondement de l'article L.10 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, il ne peut utilement se prévaloir du non respect des dispositions de ladite Charte, non applicables à l'espèce ;
En ce qui concerne l'absence de saisine de la commission départementale des impôts :
Considérant que la circonstance que l'administration n'a pas donné suite à sa demande de saisine de la commission départementale des impôts est sans influence sur la régularité de la procédure dès lors qu'il est constant que ladite commission n'était effectivement pas compétente en matière de revenus fonciers ;
En ce qui concerne la substitution de motif :
Considérant que la circonstance que l'administration s'est fondée, dans sa décision de rejet de sa réclamation, sur un motif nouveau sur lequel M. X... n'a pu formuler ses observations, ne constitue pas une méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure dès lors que celle-ci était close par la mise en recouvrement des impositions ; que l'administration peut invoquer, à tout moment de la procédure contentieuse, un motif nouveau pour fonder les impositions, dès lors que, comme en l'espèce, elle ne prive pas le contribuable d'une garantie de procédure à laquelle il pouvait prétendre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité et à solliciter pour ce motif, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1984 et 1985, s'élevant respectivement à 128 150 F et 97 853 F ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la détermination des revenus fonciers :
Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce : "I- Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1 pour les propriétés urbaines : a) les dépenses de réparation et d'entretien ... b) les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ..." ; que doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou des travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux effectués sur l'immeuble sis ...
..., dans le secteur sauvegardé de Bordeaux, ont constitué des travaux de rénovation destinés à mettre l'immeuble aux normes du confort moderne sans que le gros oeuvre soit affecté ; qu'en particulier, l'escalier ancien du XVIII ème siècle a fait l'objet d'une simple restauration ; que, contrairement aux allégations de l'administration, aucun agrandissement de l'immeuble n'en est résulté puisque les combles n'ont pas été modifiés et que le local commercial du rez-de-chaussée a été conservé ; que, dans ces conditions, l'administration n'était pas fondée à contester le caractère déductible des revenus fonciers au titre des dispositions précitées de l'article 31 du code général des impôts, de la quote-part des dépenses mises à la charge de M. X..., et, par voie de conséquence, l'imputation desdits déficits sur le revenu global ;
En ce qui concerne la détermination du revenu global :
Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce : "L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé ... sous déduction : I- Du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ... Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation ... 3 Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des cinq années suivantes ... ; cette disposition n'est pas applicable aux propriétaires d'immeubles ayant fait l'objet de travaux exécutés dans le cadre d'une opération groupée de restauration immobilière faite en application des dispositions des articles L.313-1 à L.313-15 du code de l'urbanisme ..." ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'initiative des travaux litigieux revient bien aux propriétaires groupés au sein de l'AFUL Saint-François dès lors que celle-ci, créée le 31 août 1984, a demandé et obtenu le permis de construire et assuré la maîtrise d'ouvrage de l'opération, nonobstant la circonstance que le marchand de biens ait été à l'origine du projet de rénovation et de la création de l'association foncière ; que, par ailleurs, M. X... a acquis son lot le 28 septembre 1984 et adhéré simultanément à l'AFUL ;
Considérant, en second lieu, que la seule circonstance que les travaux ont été entrepris avant l'approbation du secteur sauvegardé de Bordeaux par décret en Conseil d'Etat le 25 octobre 1988 alors que ledit secteur sauvegardé avait été créé dès le 21 novembre 1966, n'est pas de nature à faire obstacle à la faculté pour les propriétaires d'imputer les déficits fonciers résultant des travaux de rénovation de l'immeuble, effectués en conformité avec le plan de sauvegarde et de mise en valeur, sur leur revenu global sur le fondement des dispositions susrappelées de l'article 156 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 28 septembre 1994, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1984 et 1985 en tant qu'elles procèdent de la réintégration, dans son revenu global, des déficits fonciers résultant des travaux de rénovation effectués sur l'immeuble dont il est propriétaire sis ...
..., dans le secteur sauvegardé de Bordeaux, s'élevant en dernier lieu respectivement à 137 178 F et 106 307 F ;
Sur la demande de remboursement des frais exposés
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat qui succombe dans la présente instance, à verser à M. X... une somme de 22 830,41 F au titre des frais qu'il justifie avoir exposés en appel ; que, pour le surplus, la demande de remboursement des frais afférents à la procédure de première instance étant nouvelle en appel, est irrecevable et doit être rejetée ;
Article 1er : La base d'imposition de M. X... à l'impôt sur le revenu au titre des années 1984 et 1985 est réduite des sommes respectives de 137 178 F et 106 307 F .
Article 2 : Il est accordé à M. X... la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1984 et 1985 procédant de la réduction des bases d'imposition décidée à l'article 1er ci-dessus .
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. X... une somme de 22 830,41 F au titre des frais exposés sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté .
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 28 septembre 1994 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt .
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie .


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94NC01694
Date de la décision : 06/08/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - DETERMINATION DU REVENU IMPOSABLE - CHARGES DEDUCTIBLES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - REVENUS FONCIERS.


Références :

CGI 31, 156
CGI Livre des procédures fiscales L47, L80 A, L10
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur public ?: M. COMMENVILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-08-06;94nc01694 ?
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