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02/07/1998 | FRANCE | N°93NC00996

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 02 juillet 1998, 93NC00996


(Troisième Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 1993 au greffe de la Cour, présentée pour l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ, dont le siège est ..., représenté par son président en exercice, ayant la SCP Michel et autres pour avocat ;
Il demande que la Cour :
1 ) - "réforme en toutes dispositions" le jugement en date du 30 juillet 1993 du tribunal administratif de Strasbourg lequel, d'une part, n'a fait que partiellement droit à sa demande qui tendait à ce que la société anonyme Guerra Tarcy, la société O.T.H. Est et MM. Y... et

A... soient condamnés solidairement à "remédier à tous les désordres" af...

(Troisième Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 1993 au greffe de la Cour, présentée pour l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ, dont le siège est ..., représenté par son président en exercice, ayant la SCP Michel et autres pour avocat ;
Il demande que la Cour :
1 ) - "réforme en toutes dispositions" le jugement en date du 30 juillet 1993 du tribunal administratif de Strasbourg lequel, d'une part, n'a fait que partiellement droit à sa demande qui tendait à ce que la société anonyme Guerra Tarcy, la société O.T.H. Est et MM. Y... et A... soient condamnés solidairement à "remédier à tous les désordres" affectant les immeubles d'habitation qui ont été construits au lieudit "Les Hauts de Magny" à Metz et, d'autre part, l'a condamné à rembourser à ladite société Guerra Tarcy les sommes de 469 700 F assortie des intérêts à compter du 11 février 1986 et de 774 484 F augmentée des intérêts à compter du 22 novembre 1991 ;
2 ) - lui adjuge le bénéfice des conclusions de première instance ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 1998 :
- le rapport de M. MOUSTACHE, Président ;
- les observations de Me Z..., substituant Me SEGUIN, avocat de la société Guerra Tarcy et de Me X..., substituant Me CLANCHET, avocat de la société O.T.H. Est ;
- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'à la suite des désordres apparus en 1980 dans les différents immeubles dont il est propriétaire à Metz, au lieudit "Les Hauts de Magny", l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement les constructeurs des bâtiments en cause à lui verser une indemnité en réparation de ces désordres, au titre de la garantie décennale ; qu'il fait appel du jugement en date du 30 juillet 1993 par lequel le tribunal, d'une part, n'a condamné solidairement l'entreprise Guerra Tarcy, MM. A... et Y..., architectes, et le bureau d'études O.T.H. Est qu'à lui payer une somme de 356 300 F et, d'autre part, a condamné l'office requérant à rembourser à ladite entreprise des sommes d'un montant global de 1 244 284 F avec intérêts légaux ; que les défendeurs présentent, par la voie de l'appel incident, des conclusions tendant à être déchargés de toute responsabilité, l'entreprise Guerra Tarcy sollicitant, en outre, le remboursement de diverses sommes ainsi que la garantie des autres constructeurs ;
Sur l'appel principal de l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes du jugement attaqué, que pour écarter l'entière responsabilité des constructeurs dans l'apparition des désordres liés aux condensations et moisissures dans une partie des logements en cause, lesquelles, de par leur importance, étaient de nature à rendre les immeubles impropres à leur destination ainsi qu'il ressort du rapport de l'expert commis par les premiers juges, le tribunal administratif s'est fondé sur "une équitable appréciation des responsabilités respectives" des constructeurs et du maître de l'ouvrage et non, contrairement à ce que soutient l'office requérant, sur le fait que les protocoles d'accord conclus les 1er décembre 1986 et 23 février 1985 "excluraient expressément toute reconnaissance de responsabilité" de la part de l'entreprise Guerra Tarcy ; que, dès lors, le moyen tiré par ledit office de ce qu'une telle exclusion serait contraire à l'interprétation qu'il convient de faire desdits protocoles est, en tout état de cause, inopérant ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort du rapport d'expertise que, s'agissant des mêmes désordres, liés à des phénomènes de condensations dans la masse et de "ponts thermiques", de tels désordres sont inhérents au procédé de construction par panneaux préfabriqués du type "Costamagna" utilisés pour la réalisation du modèle dit "évasion 76" ; que, d'une part, il est constant que ce procédé technique avait été imposé aux constructeurs dans le devis descriptif des travaux par le maître de l'ouvrage, alors même que ce dernier ne pouvait ignorer que par un avis technique, en date du 8 septembre 1972, le groupe spécialisé N 1 avait mis en exergue les inconvénients de ce procédé, notamment en raison de l'existence de "ponts thermiques au droit des planchers dans les murs porteurs et portés" ; que, d'autre part, l'homme de l'art a relevé "des défauts d'habitabilité flagrants perturbant le fonctionnement normal des installations de ventilation" ; que de telles "anomalies d'habitation" des occupants des immeubles dont s'agit, lesquelles, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, n'excèdent nullement les contraintes susceptibles d'être imposées aux locataires de logements H.L.M., sont opposables au maître de l'ouvrage ; que, dans ces conditions, en procédant à un partage par moitié des responsabilités dans l'apparition des désordres en cause entre ce dernier et les constructeurs, le tribunal administratif n'a pas fait une appréciation erronée des circonstances de l'affaire ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort clairement du rapport d'expertise susmentionné que les travaux d'isolation des façades extérieures et de renforcement des isolations sous toiture préconisés par l'homme de l'art pour remédier aux phénomènes de condensation et de moisissures, qui n'étaient pas prévus au devis descriptif, constituent "une amélioration par rapport aux pièces contractuelles" ; que, dès lors, l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ n'est pas fondé à soutenir que le montant de tels travaux devrait être mis à la charge des constructeurs et, partant, soustrait des sommes qu'il a été condamné, par le jugement attaqué, à rembourser à la société Guerra Tarcy ;
Considérant qu'aucun des moyens soulevés dans son mémoire d'appel par l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ ne saurait être accueilli et, par suite, la requête de ce dernier ne peut qu'être rejetée ;
Sur les appels incidents des constructeurs :
Considérant, en premier lieu, que pour demander, par la voie de l'appel incident, à être déchargés de toute condamnation prononcée à leur encontre par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg, en date du 30 juillet 1993, MM. A... et Y..., architectes, le bureau d'études O.T.H. Est et la société Guerra Tarcy soutiennent que les désordres allégués par l'office requérant ne sont pas au nombre de ceux qui étaient susceptibles d'être invoqués à l'appui d'une action en garantie du maître de l'ouvrage sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;

Considérant, d'une part, que s'agissant des désordres causés par les infiltrations dans les vides sanitaires, il résulte de l'instruction que si celles-ci s'étaient déjà manifestées avant la réception définitive et avaient même donné lieu à des opérations de pompage, de tels désordres n'étaient pas apparents lors de ladite réception et, en outre, ni leur étendue ni leurs conséquences ne s'étaient encore révélées dans toute leur ampleur au maître de l'ouvrage à la date de cette réception ; que, dès lors, les constructeurs ne sont pas fondés à soutenir qu'en procédant à la réception définitive, sans y inclure de réserves au sujet de ces infiltrations, l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ s'est privé de la possibilité de mettre en jeu leur responsabilité décennale ; que, d'autre part, si les "anomalies d'habitation" relevées par l'expert ont concouru, ainsi qu'il a été dit ci-avant, à l'apparition des désordres liés aux phénomènes de condensations et moisissures, c'est dans une proportion que ledit expert évalue à 50 % de l'étendue de ces désordres ; que, dans ces conditions, les constructeurs ne sauraient se prévaloir desdites anomalies pour soutenir que les fautes commises par les occupants des logements concernés seraient de nature à les exonérer totalement de la responsabilité qu'ils encourent à l'égard du maître de l'ouvrage sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Considérant, en second lieu, que si la société Guerra Tarcy demande à la Cour, par la voie incidentaire, de condamner l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ à lui rembourser une somme de 1 276 711,99 F augmentée des intérêts légaux et correspondant aux frais qu'elle soutient avoir engagés pour "préfinancer" les travaux de réfection des immeubles en ce qui concerne les condensations et moisissures, il est constant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné, du chef susmentionné, ledit office à verser à la société Guerra Tarcy des sommes s'élevant à 1 244 184 F au total ; que, d'une part, la demande de celle-ci est, dans ces conditions, sans objet et, par suite, irrecevable à concurrence de cette dernière somme ; que, d'autre part, s'agissant de la différence, soit une somme de 32 527 F, la société Guerra Tarcy ne met pas le juge d'appel à même d'apprécier le bien-fondé de cette demande, laquelle ne peut, en conséquence, qu'être rejetée ;
Considérant, en troisième lieu, que si la société appelante demande que l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ soit condamné à lui payer les sommes de 32 907,55 F au titre des infiltrations dans les vides sanitaires et de 1 995,30 F au titre de la remise en état des réseaux, ces conclusions qui sont dépourvues de toute motivation permettant au juge d'appel d'en apprécier le bien-fondé, doivent être rejetées ;

Considérant, enfin, que les conclusions de la société Guerra Tarcy, tendant à ce que les architectes et le bureau d'études O.T.H. Est soient condamnés à lui verser diverses sommes assorties des intérêts de droit, ont été provoquées par les conclusions de ces derniers demandant à être déchargés de toute condamnation ; que de telles conclusions, qui ont été présentées après l'expiration du délai de recours contentieux, ne seraient recevables qu'au cas et dans la mesure où les autres intimés obtiendraient eux-mêmes une réduction de la part de l'indemnité qui doit rester définitivement à leur charge et aggraveraient ainsi l'indemnité que devrait payer la société Guerra Tarcy par l'effet de la solidarité ; que le présent arrêt, rejetant tant l'appel principal que les appels incidents des architectes et du bureau d'études O.T.H. Est, les conclusions susanalysées de ladite société ne sont pas recevables ;
Sur les autres conclusions de la société Guerra Tarcy :
Considérant, d'une part, que si la société Guerra Tarcy demande que la somme que l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ a été condamné à lui rembourser "soit actualisée en fonction des variations de l'indice BT 01 entre le mois de décembre 1989 et le mois du prononcé de l'arrêt à intervenir", une telle demande, au demeurant non motivée, n'est pas fondée dans la mesure où ladite somme ne correspond pas à des travaux à réaliser dans le cadre d'un marché de travaux publics mais à un remboursement du montant des travaux de réfection qui ont été effectués par la société demanderesse et dont le coût a été correctement évalué à la date de leur réalisation ;
Considérant, d'autre part, que même en l'absence de demande tendant à l'allocation d'intérêts, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts du jour de son prononcé jusqu'à son exécution, au taux légal puis, en application des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1975, au taux majoré s'il n'est pas exécuté dans les deux mois de sa notification ; que, par suite, les conclusions de la société Guerra Tarcy tendant à ce que les sommes qui lui ont été allouées portent intérêts à compter de la date du présent arrêt, lequel confirme en tous ses chefs la condamnation prononcée par les premiers juges, sont dépourvues de tout objet et doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;.

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ à verser, sur le fondement des dispositions précitées, une somme de 7 000 F chacun à MM. A... et Y..., au bureau d'études O.T.H. Est et à la société Guerra Tarcy au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1ER La requête de l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ et les conclusions présentées par voie d'appel incident, par MM. A... et Y..., le bureau d'études O.T.H. Est et la société Guerra Tarcy sont rejetées.
Article 2 : L'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ versera une somme de 7 000 F chacun à MM. A... et Y..., au bureau d'études O.T.H. Est et à la société Guerra Tarcy.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'OFFICE PUBLIC d'AMENAGEMENT et de CONSTRUCTION de METZ, à MM. A... et Y..., au bureau d'études O.T.H. Est et à la société Guerra Tarcy.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 93NC00996
Date de la décision : 02/07/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-06-01-04 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE


Références :

Code civil 1792, 2270
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 75-619 du 11 juillet 1975 art. 3


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. MOUSTACHE
Rapporteur public ?: M. VINCENT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-07-02;93nc00996 ?
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