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30/04/1998 | FRANCE | N°94NC00881

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 30 avril 1998, 94NC00881


(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 13 juin 1994 au greffe de la Cour, présentée pour la S.A. SEDIS dont le siège social est ... (Marne), représentée par le président de son conseil d'administration, par la société civile professionnelle Dutoit-Fouques-Carluis et associés, avocats ;
La S.A. SEDIS demande à la Cour :
1° - d'annuler le jugement n 91-424 en date du 29 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie

au titre des exercices clos les 31 juillet des années 1986, 1987 et 1988 ;
2° -...

(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 13 juin 1994 au greffe de la Cour, présentée pour la S.A. SEDIS dont le siège social est ... (Marne), représentée par le président de son conseil d'administration, par la société civile professionnelle Dutoit-Fouques-Carluis et associés, avocats ;
La S.A. SEDIS demande à la Cour :
1° - d'annuler le jugement n 91-424 en date du 29 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 juillet des années 1986, 1987 et 1988 ;
2° - de lui accorder la réduction sollicitée ;
3 - de condamner l'Etat, sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, au remboursement des frais non compris dans les dépens ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 1998 :
- le rapport de M. PAITRE, Président,
- les observations de Me LELIEVRE, avocat de la S.A. SEDIS,
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la S.A. SEDIS, qui exploite un centre commercial Leclerc à Sezanne (Marne) a été assujettie, à la suite d'une vérification de comptabilité, à des compléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1986, 1987 et 1988 ; qu'en particulier, le vérificateur, estimant que l'absence de perception de commissions en rémunération de la souscription d'engagements en faveur d'autres exploitants de centre Leclerc avait le caractère d'un acte anormal de gestion, a réintégré dans les résultats de ces exercices, pour chaque engagement en cours, une commission d'un montant annuel égal à 0,20 % du montant de l'emprunt cautionné, avec, le cas échéant, application d'une réduction prorata temporis, lorsque l'emprunt devait venir à échéance durant l'exercice ;
Considérant, en premier lieu, que le fait pour une entreprise de fournir gratuitement sa caution au profit d'un tiers, constitue en règle générale un acte étranger à une gestion commerciale normale, hormis les cas où la situation des deux sociétés serait telle que la première puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à la seconde ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si les engagements de caution souscrits par la S.A. SEDIS ont concouru à l'expansion économique de l'ensemble, non structuré en groupe, que forment les distributeurs indépendants exerçant leur activité sous l'enseigne "E. Leclerc", ils n'ont eu, pour la société requérante, aucune contrepartie directe, celle-ci ne pouvant être regardée comme constituée par l'absence de perception d'une redevance pour l'usage de l'enseigne, ou par l'amélioration des conditions d'achats résultant de l'appartenance au "mouvement E. Leclerc", alors même que cette amélioration est d'autant plus significative que ce mouvement rassemble davantage de distributeurs ; que, pour combattre la présomption d'acte anormal de gestion qui résulte de cette absence de contrepartie directe, la S.A. SEDIS ne peut se fonder sur les statuts de l'association des centres de distribution E. Leclerc, qui ne la contraignent pas à souscrire des engagements de caution non rémunérés, mais précisent que les obligations pesant sur les associés se limitent à la formation, au parrainage et au respect de certains principes de la profession ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que l'absence de rémunération des engagements de caution souscrits par la S.A. SEDIS présente le caractère d'un acte de gestion anormal ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts : "Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apports et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés ..." ; qu'aux termes de l'article 38-2 bis du code ajouté aux dispositions précitées par l'article 84 de la loi n° 78-1239 du 27 décembre 1978 applicable aux exercices clos à compter du 31 décembre 1978 : " ... Les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix, sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. Toutefois ces produits doivent être pris en compte : pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers et pour les prestations discontinues mais à échéances successives échelonnées sur plusieurs exercices, au fur et à mesure de l'exécution" ; que ces dispositions sont applicables pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 dudit code ;
Considérant que la commission de caution rémunère le service constitué par l'octroi d'une garantie qui permet à son bénéficiaire de signer un contrat d'emprunt ; que, le service assuré devant ainsi être réputé rendu lors de la signature du contrat, ladite commission ne peut être regardée comme rémunérant une prestation continue au sens de l'article 38-2 bis du code général des impôts, et les recettes correspondantes doivent être rattachées en totalité à l'exercice durant lequel le contrat a été signé ;
Considérant qu'il suit de là que la S.A. SEDIS est fondée à soutenir que le vérificateur, après avoir arrêté, pour chaque engagement de caution qu'elle a souscrit, le montant de la commission qu'elle devait réclamer au bénéficiaire, aurait dû rattacher ce montant, en totalité, à l'exercice vérifié au cours duquel a été souscrit l'engagement ; qu'elle peut dès lors prétendre, pour chacun des exercices en litige, à une réduction de la base du complément d'impôt sur les sociétés qui lui a été assigné égale au montant cumulé des rehaussements des résultats de l'exercice qui correspondent à des commissions relatives à des contrats d'emprunt, cautionnés par elle, qui ont été signés au cours d'exercices antérieurs ;
Considérant, en troisième lieu, que les montants des redressements, compatibles avec l'application de la règle de rattachement aux exercices susévoquée, sont, dans tous les cas, inférieurs à ceux qui résulteraient de la détermination des montants des commissions en appliquant un taux annuel ramené à 0,10 % et de la prise en compte de l'amortissement des emprunts cautionnés ; que, par suite, le moyen de la S.A. SEDIS tiré de ce que l'administration aurait dû calculer le montant des commissions suivant ces modalités plutôt que suivant celles qu'elle a retenues, est sans portée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. SEDIS est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la réduction des bases des compléments d'imposition de 150 500 F pour l'exercice clos le 31 juillet 1986, 220 700 F pour l'exercice clos le 31 juillet 1987 et 213 620 F pour l'exercice clos le 31 juillet 1988 ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner l'Etat à verser 7 305 F à la S.A. SEDIS ;
Article 1er : Les bases du complément d'impôt sur les sociétés auquel la S.A. SEDIS a été assujettie au titre des exercices clos les 31 juillet des années 1986, 1987 et 1988 sont réduites, respectivement, de 150 500 F, 220 700 F et 213 620 F.
Article 2 : La S.A. SEDIS est déchargée des droits et pénalités correspondant aux réductions des bases d'imposition définies à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement en date du 29 mars 1994 du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la S.A. SEDIS une somme de 7 305 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A. SEDIS et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94NC00881
Date de la décision : 30/04/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - EVALUATION DE L'ACTIF - CREANCES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - ACTE ANORMAL DE GESTION.


Références :

CGI 38, 209
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 78-1239 du 27 décembre 1978 art. 84


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. PAITRE
Rapporteur public ?: M. COMMENVILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-04-30;94nc00881 ?
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