La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/04/1996 | FRANCE | N°95NC00037

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 04 avril 1996, 95NC00037


(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 1995 présentée pour la S.A. Y... dont le siège social est ..., par Me X... avocat au barreau d'Epinal ;
La S.A. Y... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice 1985 ;
2°) d'accorder la décharge sollicitée ;
3°) d'accorder le remboursement des frais exposés ;
Vu le j

ugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 22 mai 1995, présenté par le m...

(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 1995 présentée pour la S.A. Y... dont le siège social est ..., par Me X... avocat au barreau d'Epinal ;
La S.A. Y... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice 1985 ;
2°) d'accorder la décharge sollicitée ;
3°) d'accorder le remboursement des frais exposés ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 22 mai 1995, présenté par le ministre du budget ; il conclut au rejet de la requête ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mars 1996 :
- le rapport de Mme FELMY, Conseiller-rapporteur,
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la S.A. Y... dont M. Henry Y... est le président-directeur général a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au terme de laquelle l'administration a réintégré, dans les bénéfices de la société de l'exercice 1985, le montant correspondant au manque à gagner résultant pour celle-ci de sa renonciation à percevoir des intérêts sur les sommes avancées à M. Henry Y... sur son compte courant, renonciation qui a été regardée par les services fiscaux comme constituant un acte anormal de gestion ;
Considérant que la commission départementale des impôts et taxes sur le chiffre d'affaires, saisie du litige, a dans son avis notifié le 23 mai 1989 admis que la matérialité des faits constatés par l'administration était établie et que les opérations litigieuses ne pouvaient être regardées comme ayant été faites dans l'intérêt de l'exploitation ; que, toutefois, en application des dispositions de l'article L.192 du livre des procédures fiscales, il appartient à l'administration d'apporter la preuve que la renonciation aux produits financiers constitue un acte étranger à l'intérêt de l'entreprise ;
Considérant que, pour apporter cette preuve, l'administration invoque les pièces du dossier qui établissaient que la S.A. Y... a consenti à son président-directeur général, M. Henry Y..., par l'intermédiaire d'un compte d'associé, d'importantes avances et a, en outre, supporté sur sa trésorerie diverses dépenses incombant à l'intéressé, à savoir des impôts et charges de téléphone dûs par celui-ci, ainsi que diverses charges personnelles, dépenses qu'elle a portées au débit du compte susmentionné et soutient qu'en s'abstenant de percevoir des intérêts sur les soldes débiteurs que, du fait de ces avances et prises en charge, le compte présentait en cours d'exercice, la société avait adopté une pratique étrangère à l'intérêt de l'entreprise ;
Considérant que les règles qui gouvernent le fonctionnement des comptes d'associés dans une société n'autorisent pas qu'ils puissent présenter, même temporairement, un solde débiteur, sauf pour l'entreprise à percevoir dans ce cas une rémunération normale de l'avantage financier ainsi consenti ;
Considérant que, pour justifier l'absence de perception d'intérêts sur les soldes débiteurs du compte de M. Henry Y..., la société soutient en premier lieu que ce compte présentait un caractère mixte, retraçant à la fois des dépenses personnelles de M. Y..., mais aussi des opérations réalisées avec l'entreprise individuelles de l'intéressé qui lui loue le fonds de commerce qu'elle exploite ; que, toutefois, elle n'apporte à l'appui de ce moyen aucun élément permettant de regarder le compte en cause, qui présente toutes les caractéristiques d'un compte courant, comme fonctionnant, même partiellement, comme un compte de fournisseur dans le cadre de relations commerciales normales, ni de regarder les avances consenties et la prise en charge d'une partie des dépenses de son dirigeant comme un moyen de paiement des prestations de location de fonds de commerce qui lui ont été assurées par l'intéressé ; qu'il suit de là que la totalité des dépenses en cause doit être regardée comme ayant le caractère d'avances de trésorerie accordées à un tiers à l'entreprise ;

Considérant que la société fait valoir en second lieu que la position débitrice du compte courant "H.S." doit être examinée au regard de la position du compte courant de M. Henry Y... ouvert dans une autre entreprise faisant partie du groupe, à savoir la SARL Y..., créancière de la S.A. Y... et dans laquelle son compte courant est créditeur ;
Considérant que la SARL Y... et la S.A. Y... constituent deux entités juridiques distinctes ; que les comptes courants ouverts dans chacune des deux sociétés au nom de M. Henri Y... ne peuvent se compenser entre eux, dès lors qu'ils retracent des opérations qui sont étrangères aux relations commerciales que les deux sociétés ont entre elles et que, notamment, il n'est pas établi qu'ils enregistreraient des opérations effectuées par M. Y... non en son nom propre, mais pour le compte de l'une ou l'autre des deux entreprises ; que la circonstance qu'une société soit créancière d'une autre société dont le président-directeur général est titulaire d'un compte courant débiteur ne saurait justifier que ce dirigeant puisse bénéficier, dans la première société, d'un avantage personnel ;
Considérant que, pour justifier néanmoins l'absence de perception d'intérêts, la société fait valoir que son abstention comportait pour l'entreprise une contrepartie, à savoir l'abandon par M. Henry Y... d'une prime de 150 000 F à laquelle il aurait pu prétendre au titre de l'année 1983 et la renonciation aux salaires qui lui auraient été dûs au titre des années 1984 et 1985 ;
Considérant, toutefois, d'une part, que la contrepartie invoquée au titre des années 1983 et 1984 ne peut justifier en tout état de cause l'avantage ainsi consenti au titre de l'exercice 1985 ;
Considérant, d'autre part, qu'aucune convention fixant le montant des salaires auxquels M. Y... aurait définitivement renoncé n'a été produite ; que la renonciation invoquée qui résulte d'une lettre adressée par M. Y... au conseil d'administration le 18 décembre 1986, par laquelle il rappelait qu'il n'avait pas demandé la fixation de sa rémunération, ne saurait constituer la preuve d'une renonciation définitive auxdits salaires ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration était fondée à considérer que l'abstraction de la société à percevoir des intérêts sur les avances accordées à son dirigeant était pour elle dépourvue de contrepartie et à réintégrer le montant desdits intérêts dans les bénéfices imposables de l'entreprise ; que la S.A. Y... n'est par suite pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la requête tendant à la réduction du complément d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l'exercice 1985 ;
Sur les frais irrépétibles :

Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante, il n'y a pas lieu d'accorder à la Société Anonyme
Y...
le bénéfice de la demande ;
Article 1er : La requête de la S.A. Y... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A. Y... et au ministre de l'économie, des finances et du plan.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95NC00037
Date de la décision : 04/04/1996
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-082 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - ACTE ANORMAL DE GESTION


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L192


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme FELMY
Rapporteur public ?: M. COMMENVILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1996-04-04;95nc00037 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award