(Première Chambre)
VU le recours, enregistré le 19 avril 1994 au greffe de la Cour, présenté par le MINISTRE de l'ECONOMIE ;
Le MINISTRE de l'ECONOMIE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 24 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Besançon a, d'une part, annulé la décision en date du 7 janvier 1992 par laquelle le sous-directeur de la gestion administrative au ministère de l'économie, des finances et du budget a refusé à Mme X... le bénéfice du supplément familial de traitement au titre de la période allant du 1er janvier 1987 à la date d'entrée en vigueur de la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 et, d'autre part, condamné l'Etat à verser à cette dernière le montant dudit supplément pour la période sus-mentionnée ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Besançon ;
VU le mémoire en défense, enregistré le 17 juin 1994, présenté par Mme Mireille X... demeurant ... (Haute-Saône) ; elle demande à la Cour de rejeter le recours en soutenant que l'avis rendu le 29 mai 1992 par le Conseil d'Etat justifie sa demande de versement du supplément familial de traitement, son mari n'étant pas fonctionnaire ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 1995 :
- le rapport de M. MOUSTACHE, Conseiller ;
- et les conclusions de M. PIETRI, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que l'article 97 de l'acte dit loi du 14 septembre 1941, modifié par l'article 1er de la loi du 25 septembre 1942, s'il a été abrogé par l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental, a été rétabli par l'ordonnance n° 45-14 du 6 janvier 1945 ; que les dispositions de cet article selon lesquelles "dans un ménage de fonctionnaires, les avantages prévus au présent article ne se cumulent pas ..." n'ont été abrogées, expressément ou implicitement, ni par l'article 31 de la loi du 19 octobre 1946 relative au statut général des fonctionnaires ni par l'article 22 de l'ordonnance du 4 octobre 1959 relative au statut général des fonctionnaires, ni par l'article 20 de la loi 13 juillet 1993 actuellement en vigueur, ni par aucune disposition antérieure à la loi du du 26 juillet 1991 susvisée ; que, par suite, cette règle, applicable aux agents titulaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, est restée en vigueur jusqu'à l'intervention de l'article 4 de ladite loi du 26 juillet 1991, même si les dispositions relatives aux modalités de calcul et au taux du supplément familial de traitement ont été modifiées depuis l'ordonnance susvisée du 6 janvier 1945, notamment par la loi du 26 septembre 1948 relative à diverses dispositions d'ordre financier ;
Considérant que les dispositions de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires aux termes desquelles "les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire", doivent être interprétées comme ouvrant à l'ensemble des fonctionnaires de l'administration de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics, y compris hospitaliers, un droit au supplément familial de traitement dans les conditions où cet élément de rémunération avait été précédemment défini pour les fonctionnaires de l'Etat, notamment en ce qui concerne le non-cumul dans un ménage de fonctionnaires ; qu'il en va de même pour les magistrats, pour les militaires à la solde mensuelle et pour les agents non titulaires de la fonction publique de l'Etat et de la fonction publique territoriale dont la rémunération est fixée par référence aux traitements des fonctionnaires ou évaluée en fonction des variations de ces traitements, auxquels le bénéfice du supplément familial de traitement a été accordé dans les mêmes conditions ; que, par suite, pour l'ensemble desdits agents, le bénéfice du supplément familial de traitement ne peut être accordé qu'une fois au titre d'un même enfant ;
Considérant que si Mme X..., adjoint de contrôle principal des services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du ministère de l'économie, a la qualité de fonctionnaire de l'Etat, il est constant que son mari, employé de la Société Nationale des Chemins de Fer Français (S.N.C.F.), qui est un établissement à caractère industriel et commercial, n'est pas au nombre des agents publics énumérés ci-dessus pour lesquels le bénéfice du supplément familial de traitement ne peut être accordé qu'une fois au titre d'un même enfant ; que, dès lors, la circonstance que M. X... a perçu de son côté, en application du régime de rémunération propre à l'établissement dont il relève, un avantage dit "allocation familiale supplémentaire" de même nature que ledit supplément familial de traitement, ne saurait faire obstacle, en l'absence de toute disposition législative interdisant un tel cumul antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 1991, au versement de ce supplément à Mme X... ; que, dès lors, le MINISTRE de l'ECONOMIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a, d'une part, annulé la décision du sous-directeur de la gestion administrative en date du 7 janvier 1992, refusant à Mme X... le bénéfice du supplément familial de traitement au titre de la période du 1er janvier 1987 à la date d'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 1991 et, d'autre part, condamné l'Etat à verser l'intéressée le montant dudit avantage pour la période considérée ;
Article 1 : Le recours du MINISTRE de l'ECONOMIE est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE de l'ECONOMIE et des FINANCES ainsi qu'à Mme X....