Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 13 août 1993, présentée par la SNC du Moulin de Lesquin, représentée par ses dirigeants en exercice, dont le siège social est ... (Nord), ayant pour mandataire la SCP CELICE-BLANCPAIN, avocat au Conseil d'Etat ;
La SNC du Moulin de Lesquin demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 27 mai 1993 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté en date du 19 octobre 1992 par lequel le maire de la commune de FACHES-THUMESNIL lui a accordé un permis de construire modificatif d'un permis de construire délivré le 24 juillet 1990 pour la construction d'un centre commercial ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... et autres devant le tribunal administratif de Lille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ensemble le décret n° 92-245 du 17 mars 1992 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juin 1995 :
- le rapport de M. BONHOMME, Conseiller,
- les observations de Me BLANCPAIN, avocat de la SNC du Moulin de Lesquin, de M. C... pour l'association protection de VENDEVILLE et des environs, de M. X... pour l'association urbanisme et environnement et de M. B... pour l'association Acor,
- et les conclusions de M. LEDUCQ, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si la société en nom collectif du Moulin de Lesquin soutient que les premiers juges ont soulevé d'office un moyen qui n'était pas d'ordre public en estimant que "l'aménagement interne du bâtiment a été modifié ... et que cette modification a des conséquences en matière de sécurité", il ressort des pièces du dossier que la circonstance que les modifications susvisées auraient une incidence sur la sécurité constitue l'un des arguments invoqués par le demandeur de première instance à l'appui du moyen tiré de ce que les modifications autorisées par le permis annulé étaient d'une ampleur telle qu'elles en bouleversaient la conception et l'économie ; qu'ainsi, les premiers juges n'ont pas soulevé d'office un moyen tiré des conséquences de la modification litigieuse en matière de sécurité et n'ont fait que répondre de manière circonstanciée à l'un des arguments développés dans le cadre du moyen susanalysé ; que, dès lors la SNC du Moulin de Lesquin n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier ;
Sur les fins de non recevoir opposées par la SNC du Moulin de Lesquin à la demande de première instance :
Considérant qu'en vertu de l'article R.92 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, une requête, présentée par plusieurs personnes, qui n'est pas signée par un avocat ou un avoué doit comporter la désignation d'un représentant unique sauf à ce que le greffier en chef désigne le premier signataire comme représentant unique ; que ces dispositions qui n'ont, en tout état de cause, pas pour effet de rendre irrecevables les requêtes collectives ne comportant pas la désignation d'un représentant unique, n'étaient plus applicables dès l'instant où comme, en l'espèce, la désignation d'un représentant unique devenait sans objet par la production, avant la clôture de l'instruction, d'un mémoire reprenant les conclusions et moyens des parties signé par un avocat ; que, par suite, la SNC du Moulin de Lesquin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a écarté cette fin de non recevoir opposée par elle à la requête de première instance ;
Sur l'unique moyen tiré de ce que le permis modificatif annulé ne peut être regardé comme un nouveau permis et n'avait pas, de ce fait, à respecter les dispositions en vigueur à la date de sa délivrance :
Considérant que, par arrêté du 24 juillet 1994, le maire de la commune de FACHES-THUMESNIL a délivré à la SCI du Moulin de Lesquin un permis de construire un centre commercial de plus de 1 000 m2 sur le territoire de cette commune ; que les modifications que la société issue de la transformation de la SCI du Moulin de Lesquin a ensuite proposées consistaient, d'une part, en un déplacement d'une soixantaine de mètres du centre commercial projeté dont l'orientation était également totalement changée par le pivotement du bâtiment sur lui-même, d'autre part, en une modification de la desserte routière et des voies comprises dans le projet ainsi qu'une augmentation de la capacité d'accueil de l'aire de stationnement portée de 2 145 places à 2 482 places ; qu'ainsi, elles étaient d'une nature et d'une importance telles que la demande de l'intéressée ne pouvait être sanctionnée par une simple autorisation de modification du projet initialement autorisé, mais impliquait la délivrance d'un nouveau permis de construire ; qu'il suit de là que l'arrêté du 19 octobre 1992 par lequel le maire de FACHES-THUMESNIL a approuvé le nouveau projet de la SNC du Moulin de Lesquin a le caractère d'un nouveau permis de construire qui ne pouvait se substituer à celui du 24 juillet 1990 prorogé pour une durée supplémentaire d'un an le 20 juillet 1992 et dont la validité doit être appréciée au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date de sa délivrance ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du décret n° 85-453 du 23 avril 1985 pris pour l'application de la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement, la délivrance des permis autorisant la construction, pour un immeuble à usage de commerce, d'une superficie hors oeuvre nette nouvelle supérieure à 10 000 m2 doit être précédée d'une enquête publique ; qu'il résulte de la demande de permis modificatif en date du 11 juillet 1990 que la surface hors oeuvre nette est supérieure à 30 000 m2 ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le maire de FACHES-THUMESNIL ne pouvait accorder le permis dit "modificatif" en date du 19 octobre 1992 sans qu'il ait été procédé à une nouvelle enquête publique ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SNC du Moulin de Lesquin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté en date du 19 octobre 1992 par lequel le maire de la commune de FACHES-THUMESNIL lui avait délivré un permis modificatif ;
Sur les conclusions des défendeurs tendant à l'allocation d'une somme au titre des frais non compris dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'affaire, de faire application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner la SNC du Moulin de Lesquin à verser à MM. Y..., A... et Z..., à l'association "Protection de Vendeville et des environs", à l'association pour la lutte contre la construction d'un centre commercial à Faches-Thumesnil, à l'association ARCOFATH, à l'association ACOR, à l'association "Urbanisme et Environnement" la somme demandée par ladite société au titre des frais irrépétibles ;
Article 1 : La requête de la société en nom collectif du Moulin de Lesquin est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de MM. Y..., A..., Z..., l'association "Protection de Vendeville et des environs", l'association pour la lutte contre la construction d'un centre commercial à Faches-Thumesnil, l'association ARCOFATH, l'association ACOR, l'association "Urbanisme et Environnement" tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société en nom collectif du Moulin de Lesquin, à MM. Y..., A..., Z..., à l'association "Protection de Vendeville et des environs", à l'association pour la lutte contre la construction d'un centre commercial à Faches-Thumesnil, à l'association ARCOFATH, à l'association ACOR, à l'association "Urbanisme et Environnement", et au ministre de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports. Copie en sera adressée à la commune de FACHES-THUMESNIL et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lille.