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14/12/1994 | FRANCE | N°93NC00711

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 14 décembre 1994, 93NC00711


VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 juillet 1993, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE CREIL (Oise) représenté par son directeur autorisé à cette fin par délibération du conseil d'administration en date du 10 juin 1993, par Me Hervé CASSEL, avocat à la Cour de Paris ;
Le CENTRE HOSPITALIER DE CREIL demande à la Cour :
1°) - d'annuler :
- le jugement en date du 11 mai 1993 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'infection articulaire contractée par M. X..., a ordonné

une expertise médicale et l'a condamné à verser à M. X... une indemnité pro...

VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 juillet 1993, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE CREIL (Oise) représenté par son directeur autorisé à cette fin par délibération du conseil d'administration en date du 10 juin 1993, par Me Hervé CASSEL, avocat à la Cour de Paris ;
Le CENTRE HOSPITALIER DE CREIL demande à la Cour :
1°) - d'annuler :
- le jugement en date du 11 mai 1993 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'infection articulaire contractée par M. X..., a ordonné une expertise médicale et l'a condamné à verser à M. X... une indemnité provisionnelle de 100 000 F ;
- par voie de conséquence, l'ordonnance en date du 4 juin 1993 par laquelle le président du tribunal administratif d'Amiens a désigné M. Y... pour procéder à cette expertise ;
2°) - de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif d'Amiens ;
3°) - de condamner M. X... au remboursement de toute somme qui aurait pu lui être versée au titre du jugement attaqué ;
4°) - subsidiairement, de réformer ledit jugement en ramenant à la somme de 50 000 F la provision à verser à M. X... ;
5°) - de condamner M. X... au paiement d'une somme de 5 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU le jugement et l'ordonnance attaqués ;
VU le mémoire en défense, enregistré au greffe de la Cour le 20 août 1993, présenté pour la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de BEAUVAIS ;
La Caisse conclut au rejet de la requête et à ce que le CENTRE HOSPITALIER DE CREIL soit condamné à lui verser :
* au titre des prestations, la somme de 1 066 032,86 F avec intérêts au taux légal à concurrence de 373 690,34 F à compter de l'enregistrement de son mémoire n° 1 et avec intérêts à compter du jour de l'enregistrement du présent mémoire pour le surplus ;
* la somme de 135 666,25 F au titre des arrérages de la rente versée du 3 octobre 1987 au 15 janvier 1993, avec les intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement du présent mémoire ;
* au fur et à mesure de leur échéance, les arrérages de la rente dont le capital représentatif au 16 janvier 1993 s'élève à 336 086,38 F ;
VU le mémoire en défense enregistré le 13 avril 1994, présenté pour M. Yvon X..., tendant au rejet de la requête et à ce que le CENTRE HOSPITALIER de CREIL soit condamné à lui payer une somme de 5 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU l'ordonnance en date du 15 septembre 1994 par laquelle le président de la formation de jugement a, en application des dispositions de l'article R.154 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, fixé la date de clôture de l'instruction de la présente affaire au 7 octobre 1994 à 16 heures ;

VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 et le décret n° 92-245 du 17 mars 1992 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 1994 :
- le rapport de M. LAPORTE, Président,
- les observations de Me CORNETTI, avocat de M. Yvon X...,
- et les conclusions de M. LEDUCQ , Commissaire du Gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant que M. X..., atteint d'une entorse du genou gauche consécutive à un accident du travail en date du 5 juillet 1984, a subi au CENTRE HOSPITALIER de CREIL le 27 septembre 1984 un parage du cartilage de cette articulation et le 24 janvier 1985 une spongialisation de la rotule ; qu'à la suite de ces interventions, s'est déclarée une infection articulaire par staphylocoques dorés ayant entraîné des complications multiples qui ont nécessité de nouvelles interventions chirurgicales et l'amputation de la jambe gauche le 19 février 1993 ; que rien ne permet de présumer que l'intéressé ait été porteur, avant ces opérations, d'un foyer infectieux qui pourrait être à l'origine de cette complication, quand bien même l'un des experts désignés dans le cadre de l'instance pénale aurait estimé que la présence d'un tel germe dans l'organisme est fréquente et inévitable et peut entraîner des complications lorsque les défenses immunitaires de cet organisme sont affaiblies ; que, dans ces conditions, le CENTRE HOSPITALIER de CREIL ne peut utilement soutenir que l'introduction de staphylocoques dorés dans l'organisme du patient n'est pas la conséquence des interventions pratiquées pour traiter l'entorse du genou gauche dont souffrait M. X... lors de son hospitalisation ;
Considérant que, s'il résulte des constatations des experts commis par l'autorité judiciaire, qu'aucune faute médicale, notamment en matière d'asepsie, ne peut être reprochée aux praticiens et que la stérilisation du matériel chirurgical a été effectuée dans les conditions habituelles sans que d'autres accidents septiques aient été observés, le fait qu'une telle infection ait pu néanmoins se produire révèle à lui seul une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier à qui il incombe de fournir au personnel médical un matériel et des produits stériles ; que, dès lors, le CENTRE HOSPITALIER de CREIL n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens l'a déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'infection articulaire contractée par M. X... ;
Sur le montant de l'indemnité provisionnelle accordée à M. X... :
Considérant que le CENTRE HOSPITALIER de CREIL, qui demande subsidiairement à la Cour de ramener à 50 000 F le montant de l'indemnité provisionnelle accordée par le jugement attaqué à M. X..., n'apporte aucun élément de nature à établir que les premiers juges auraient fait une évaluation exagérée du montant de cette provision en le fixant à 100 000 F, alors que les complications infectieuses subies par M. X... ont entraîné l'amputation de sa jambe gauche ;
Sur les conclusions de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Beauvais :

Considérant que le jugement attaqué, qui a ordonné par ailleurs une expertise médicale avant de statuer sur la demande d'indemnité de M. X..., a réservé jusqu'en fin d'instance "tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent jugement", et s'est ainsi conformé aux principes édictés par l'article L.397 du code de la sécurité sociale qui détermine les conditions dans lesquelles les dépenses exposées par la caisse d'assurance maladie peuvent s'imputer sur le montant de l'indemnité dûe à la victime par l'auteur du dommage ; que, dès lors, en l'absence de toute décision juridictionnelle statuant sur les droits de M. X..., la demande de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Beauvais tendant au remboursement de ses débours est prématurée, ses droits devant être réservés jusqu'à l'intervention d'une telle décision ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que le bien-fondé de ces conclusions doit être apprécié au regard des dispositions applicables à la date du présent arrêt ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que M. X... n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; que, dès lors, la demande du CENTRE HOSPITALIER de CREIL tendant à ce qu'il soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'il a exposés doit être rejetée ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées, de condamner le CENTRE HOSPITALIER de CREIL à payer à M. X... la somme de 5 000 F ;
Article 1 : La requête du CENTRE HOSPITALIER de CREIL est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées devant la cour administrative d'appel par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Beauvais sont rejetées et ses droits et moyens restent réservés jusqu'à l'intervention du jugement du tribunal administratif d'Amiens.
Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER de CREIL paiera à M. X... une somme de 5 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER de CREIL, à M. Yves X..., à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Beauvais et au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 93NC00711
Date de la décision : 14/12/1994
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-02-01-01-01 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE SIMPLE : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DU SERVICE HOSPITALIER


Références :

Code de la sécurité sociale L397
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. LAPORTE
Rapporteur public ?: M. LEDUCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1994-12-14;93nc00711 ?
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