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16/06/1994 | FRANCE | N°93NC00601

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 16 juin 1994, 93NC00601


Vu l'arrêt en date du 16 juin 1993, enregistré au greffe de la cour le 28 juin 1993, par lequel le Conseil d'Etat a transmis à la cour la requête présentée pour M. Philippe X... ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 14 août 1991 sous le n° 128792 présentée pour M. Philippe X... demeurant ... (Dordogne), par Me Hennuyer, avocat aux Conseils ;
M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 89-877 en date du 23 avril 1991 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa dema

nde tendant à la condamnation de l'Etat à lui restituer la somme de 514.6...

Vu l'arrêt en date du 16 juin 1993, enregistré au greffe de la cour le 28 juin 1993, par lequel le Conseil d'Etat a transmis à la cour la requête présentée pour M. Philippe X... ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 14 août 1991 sous le n° 128792 présentée pour M. Philippe X... demeurant ... (Dordogne), par Me Hennuyer, avocat aux Conseils ;
M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 89-877 en date du 23 avril 1991 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui restituer la somme de 514.607,33 F qu'il avait versée pour l'acquisition d'un massif boisé cadastré D N° 361 sur le territoire de la commune de Donjeux ;
2°) de lui accorder la restitution sollicitée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du domaine de l'Etat ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 1994 :
- le rapport de M. Darrieutort, Président-Rapporteur ;
- les observations de Me Hennuyer, avocat de M. Philippe X...,
- et les conclusions de M. Damay, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X... a été déclaré adjudicataire, le 13 avril 1983, d'un massif boisé d'une contenance de 93 hectares situé sur la commune de Donjeux (Haute-Marne), appartenant au domaine privé de l'Etat ; qu'en vertu du cahier des charges de l'adjudication, le prix de la vente, soit 1.510,000 F, était payable en trois fractions les 13 mai, 13 juillet et 13 octobre 1983 ; que, M. X... ne s'étant acquitté, outre les frais de la vente, que du premier acompte, soit 503.333,33 F et n'ayant donné aucune suite à un avis de mise en recouvrement du 21 décembre 1983, le préfet de la Haute-Marne l'a déclaré déchu du bénéfice de l'adjudication par un arrêté du 9 février 1987 ; que M. X... conteste la mise à sa charge d'une somme de 570.213,74 F à titre de restitution des fruits courus durant la période du 13 avril 1983, date de l'adjudication, au 4 avril 1987, date de la reprise de possession du bien par l'Etat ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du code du domaine de l'Etat, relatif à l'aliénation des biens du domaine privé : "A défaut de paiement du prix aux échéances, les acquéreurs sont déchus de plein droit s'ils ne sont pas libérés dans la quinzaine de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; ils ne sont point tenus à la folle enchère mais ils doivent payer, à titre de dommages et intérêts, une amende égale au dixième du prix de l'adjudication dans le cas où ils n'auraient encore fait aucun paiement, et au vingtième s'ils ont versé un ou plusieurs acomptes, le tout sans préjudice de la restitution des fruits" ;
Considérant que si l'article 27 du cahier des charges de l'adjudication, qui constitue l'un des éléments du contrat, a pu, sans méconnaître les dispositions législatives précitées, prévoir que les fruits seraient liquidés, sans égard au produit réel, en appliquant le taux de l'intérêt légal au prix de la vente, il ne pouvait en revanche les rendre exigibles selon ce mode forfaitaire à raison de la période courue entre la date de la déchéance de l'adjudicataire et celle de la reprise de possession des biens par l'Etat ; qu'en effet, la déchéance privant l'ancien adjudicataire de tout droit sur les fruits, leur éventuel accaparement par celui-ci ne saurait engager sa responsabilité que sur un fondement extra-contractuel, à raison de la preuve d'un tel agissement, et ne pourrait donner lieu à restitution que pour le montant réel des produits indûment perçus ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement notifié le 21 décembre 1983 à M. X... rappelait à l'intéressé que sa déchéance interviendrait de plein droit à défaut de paiement dans un délai de quinze jours des sommes restant dues ; que le requérant, qui ne s'est pas acquitté dans ce délai des sommes réclamées, a ainsi été déchu des droits qu'il tenait de l'adjudication dès le 6 janvier 1984, nonobstant les circonstances, d'une part, que le préfet a cru devoir attendre le 9 février 1987 pour prendre l'arrêté prévu par l'article R. 132 du code du domaine de l'Etat, d'autre part que l'article R. 133 du même code n'autorise l'Etat à reprendre la possession du bien qu'un mois après la notification dudit arrêté ;
Considérant qu'il n'est pas allégué que M. X... ait tiré des profits quelconques de l'immeuble postérieurement au 6 janvier 1984 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa requête et à demander que la somme dont il est redevable à raison des fruits que lui a procuré le bien dont il a été déclaré adjudicataire soit calculée sur la période du 13 avril 1983 au 6 janvier 1984, et limitée ainsi à un montant de 105.327,67 F ; que, par suite, eu égard à l'acompte versé par le requérant (503.333,33 F) et au montant non contesté de l'amende appliquée (75.500 F), il y a lieu de condamner l'Etat à lui verser une somme de 322.505,66 F et de prononcer la décharge de la somme de 136.106,41 F dont il a été constitué débiteur par un avis de mise en recouvrement du 24 septembre 1987 ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne en date du 23 avril 1991 est annulé.
Article 2 : Il est accordé décharge de la somme de 136.106,41 F dont M. X... a été constitué débiteur par un avis de mise en recouvrement du 24 septembre 1987.
Article 3 : L'Etat (ministre du budget) est condamné à verser à M. X... une somme de 322.505,66 F.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 93NC00601
Date de la décision : 16/06/1994
Sens de l'arrêt : Annulation décharge condamnation de l'état
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-02-02-01 DOMAINE - DOMAINE PRIVE - REGIME - ALIENATION -Adjudication d'un immeuble - Défaillance de l'acquéreur - Déchéance (article L.55 du code du domaine de l'Etat) - Restitution des fruits.

24-02-02-01 En vertu de l'article L. 55 du code du domaine de l'Etat relatif à l'aliénation des biens du domaine privé, les adjudicataires qui ne se sont pas libérés dans la quinzaine de la notification d'un avis de mise en recouvrement sont déchus de plein droit et doivent payer une amende à titre de dommages et intérêts, sans préjudice de la restitution des fruits. Si le cahier des charges de l'adjudication peut, sans méconnaître ces dispositions, prévoir une liquidation des fruits selon un mode forfaitaire, tel que l'application des taux de l'intérêt légal au prix de la vente, ce mode de calcul ne peut être légalement retenu que pour la période comprise entre la date de l'adjudication et celle à laquelle intervient de plein droit la déchéance. Au-delà de cette date et jusqu'à la reprise de possession du bien par l'Etat, qui intervient dans les conditions prévues à l'article R. 133 du même code, l'administration peut seulement réclamer à l'intéressé, sur un fondement extra-contractuel, la restitution du montant réel des fruits, en établissant que celui-ci les a indûment perçus.


Références :

Code du domaine de l'Etat L55, R132, R133


Composition du Tribunal
Président : M. Léger
Rapporteur ?: M. Darrieutort
Rapporteur public ?: M. Damay

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1994-06-16;93nc00601 ?
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