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10/11/1993 | FRANCE | N°91NC00371;92NC00732

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 10 novembre 1993, 91NC00371 et 92NC00732


Vu I. sous le numéro 91NC00371, la requête enregistrée le 18 juin 1991 au greffe de la Cour administrative d'appel, présentée pour le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE, représenté par le président du CONSEIL GENERAL dûment autorisé à ester en justice par délibération du bureau du CONSEIL GENERAL en date du 20 août 1988 ;
Le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement du 19 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne l'a déclaré responsable de l'accident survenu le 20 août 1988 à M. X..., l'a condamné à payer

à l'intéressé une somme de 9 277,51 F en réparation des préjudices matériels...

Vu I. sous le numéro 91NC00371, la requête enregistrée le 18 juin 1991 au greffe de la Cour administrative d'appel, présentée pour le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE, représenté par le président du CONSEIL GENERAL dûment autorisé à ester en justice par délibération du bureau du CONSEIL GENERAL en date du 20 août 1988 ;
Le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement du 19 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne l'a déclaré responsable de l'accident survenu le 20 août 1988 à M. X..., l'a condamné à payer à l'intéressé une somme de 9 277,51 F en réparation des préjudices matériels, et ordonné une expertise pour évaluer le préjudice corporel ;
2°/ de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif par M. X... et de condamner celui-ci à verser une somme de 3 000 F au DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE au titre de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 ;
Vu le mémoire enregistré le 1er août 1991, présenté par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES ; la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES conclut au remboursement de ses débours ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 août 1991, présenté pour M. X... demeurant ... 88100 - Saint-Dié ;
M. X... demande à la Cour :
- d'une part, de rejeter la requête ;
- d'autre part, de condamner le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE à lui verser la somme de 5 000 F en application de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu II. sous le numéro 92NC00732, la requête enregistrée le 22 septembre 1992, présentée pour M. Dominique X... demeurant ... 88100 - Saint-Dié ;
M. X... demande à la Cour :
1°/ de réformer le jugement du 7 juillet 1992 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a condamné le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE à lui verser une indemnité de 5 000 F en réparation de son préjudice corporel, qu'il estime insuffisante ;
2°/ de condamner le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE à lui verser une somme de 41 000 F ;
Vu le mémoire enregistré le 29 octobre 1992 par lequel la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES sollicite le remboursement de ses débours, évalués à la somme de 2 149,87 F ;
Vu le mémoire complémentaire enregistré à la Cour le 2 novembre 1992, présenté pour M. X... demeurant ... 88100 - Saint-Dié ;
M. X... demande à la Cour :
- d'une part, de rejeter la requête ;
- et d'autre part, de fixer à 5 000 F la somme que le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE devra lui verser au titre de l'article L. 8-1 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse An VIII ;
Vu le code de la sécurité sociale et notamment son article L. 376-1 nouveau ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 1993 :
- le rapport de M. BONHOMME, Conseiller-rapporteur,
- les observations de Me BAYLER, avocat du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE et de Me ROBINET, avocat de M. X...,
- et les conclusions de M. DAMAY, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la jonction :
Considérant que les requêtes du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE et de M. X... sont relatives aux conséquences d'un même accident ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité des jugements attaqués :
Considérant que, selon les dispositions de l'article L. 317 du code de la sécurité sociale, reprises désormais à l'article L. 376-1 nouveau, l'assuré social ou son ayant droit, victime d'un accident n'entrant pas dans la catégorie des accidents du travail, doit indiquer sa qualité d'assuré social lorsqu'il demande en justice la réparation du préjudice qu'il a subi ; que cette obligation, sanctionnée par la possibilité reconnue aux caisses de sécurité sociale et au tiers responsable de demander pendant deux ans l'annulation du jugement prononcé sans que le tribunal ait été informé de la qualité d'assuré social du demandeur, a pour objet de permettre la mise en cause, à laquelle le juge administratif doit procéder d'office, des caisses de sécurité sociale dans les litiges opposant la victime et le tiers responsable de l'accident ;
Considérant que devant le tribunal administratif, M. X..., qui demandait au DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE réparation des conséquences dommageables de l'accident dont il a été victime le 20 août 1988 sur le chemin départemental 427, a déclaré être assuré social et affilié auprès de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES ; que le tribunal n'a pas mis en cause cet organisme avant l'intervention des jugements du 19 janvier 1991 et 7 juillet 1992 par lesquels il a statué sur la requête de M. X... ; qu'il a ainsi méconnu la portée des dispositions de l'article L. 376-1 nouveau du code de la sécurité sociale qui lui faisaient obligation de procéder à une telle mise en cause ; qu'eu égard au motif qui a conduit le législateur a édicter les prescriptions de l'article L. 376-1 du code précité, la violation de celles-ci constitue une irrégularité que la Cour, saisie des conclusions de l'appel du département dirigées contre le jugement avant dire droit du 19 janvier 1991 et de celles de M. X... dirigées contre le jugement du 7 juillet 1992, doit soulever d'office ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler les jugements attaqués par lesquels le tribunal administratif a retenu l'entière responsabilité du département et l'a condamné à verser à M. X... des indemnités pour un montant total de 14 277,51 F ;
Considérant que la Cour ayant mis en cause la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES à laquelle M. X... était affilié au moment des faits, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande qu'il a présentée devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE devant le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne :

Considérant que M. X... était recevable à rechercher, devant le tribunal administratif, la responsabilité du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE, maître d'ouvrage du chemin départemental sur lequel s'est produit l'accident, alors même que les conclusions dirigées contre ce dernier ne seraient pas fondées ; que si M. X... a en fait désigné comme défendeur le Conseil général de la Haute-Marne, l'usage d'une telle impropriété n'est pas de nature à faire obstacle à ce que la demande soit regardée comme dirigée contre le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE, collectivité territoriale dont le Conseil général est l'organe délibérant ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non recevoir opposée par le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE ;
Au fond :
Sur la responsabilité du département :
Considérant que l'accident dont M. X... a été victime le 20 août 1988 vers 16 H 30 alors qu'il circulait à motocyclette sur le chemin départemental 427 en direction d'Aillianville (Haute-Marne) a été provoqué par la présence, de gravillons dans une courbe à droite ; que s'il n'est pas contesté qu'un panneau mobile destiné à informer les usagers de la présence de gravillons avait bien été installé et était encore en place la veille du jour de l'accident, ce même panneau était, au moment de l'accident et bien qu'une visite de surveillance ait eu lieu 24 heures auparavant, renversé sur l'herbe de l'accotement, et de ce fait, invisible de la part d'un conducteur normalement attentif ; qu'il suit de là que le département n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de l'ouvrage et que sa responsabilité est, dès lors, engagée à l'égard de la victime ;
Considérant, d'une part, que le département n'établit pas que l'insuffisance de signalisation constatée au moment des faits, était due à des vents d'une force telle qu'ils auraient présenté le caractère d'un événement de force majeure ; que d'autre part, aucune faute n'est susceptible d'être reprochée à la victime qui ne roulait pas à une vitesse excessive et qui n'a perdu le contrôle de son véhicule qu'en raison du manque d'adhérence provoqué par la présence des gravillons ; qu'enfin le département n'est pas fondé à se prévaloir d'un cas fortuit ou du fait d'un tiers ; que, par suite, le département doit être déclaré entièrement responsable de l'accident dont il s'agit ;
Sur le préjudice matériel :
Considérant que M. X... justifie un préjudice matériel de 9 277,51 F ; qu'il y a lieu de condamner le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE à lui verser cette somme ;
Sur le préjudice corporel :

Considérant qu'il résulte des conclusions du rapport de l'expert désigné par les premiers juges que M. X... n'a subi aucun préjudice d'agrément et a enduré des souffrances physiques qualifiées de "faibles" ; que le requérant, en demandant la condamnation du département à lui verser une somme de 5 000 F à titre d'indemnité provisionnelle, sans parfaire sa demande malgré l'invitation qui lui a été faite après le dépôt du rapport de l'expert, n'a pas fait une évaluation exagérée du préjudice subi par lui ; que si devant la Cour M. GEOFFROY sollicite la réparation complète de son préjudice, cette demande, présentée pour la première fois en appel, n'est pas recevable ;
Sur les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES :
Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES demande le remboursement de ses débours évalués à 2 149,87 F ; qu'il y a lieu de condamner le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE à payer à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES ladite somme de 2 149,87 F ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre ces frais à la charge du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE ;
Sur l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que le bien-fondé de ces conclusions doit être apprécié au regard des dispositions applicables à la date du présent arrêt ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais des exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE à verser à M. X... une somme de 5 000 F au titre de l'article L. 8-1 précité ;
Article 1er : Les jugements en date du 19 janvier 1991 et 7 juillet 1992 sont annulés.
Article 2 : Le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE est condamné à verser à M. X... une somme de 14 277,51 F.
Article 3 : Le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE est condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES une somme de 2 149,87 F.
Article 4 : Le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE est condamné à verser à M. X... une somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 5 : Le surplus des conclusions de M. X... et du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-MARNE est rejeté.
Article 6 : Les frais d'expertise exposés en première instance sont mis à la charge du DEPARTEMENT DE LA HAUTE MARNE.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. X..., au DEPARTEMENT DE LA HAUTE MARNE, à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES VOSGES, au MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME, et à M. Y... JACQUES, expert.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 91NC00371;92NC00732
Date de la décision : 10/11/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-05-04-01 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DEBITEURS DE L'INDEMNITE, AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SECURITE SOCIALE - DROITS DES CAISSES DE SECURITE SOCIALE - IMPUTATION DES DROITS A REMBOURSEMENT DE LA CAISSE


Références :

Code de la sécurité sociale L376-1
Code de la sécurité sociale ancien L397


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BONHOMME
Rapporteur public ?: M. DAMAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1993-11-10;91nc00371 ?
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