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09/07/1992 | FRANCE | N°90NC00150;90NC00166;90NC00692;90NC00693;91NC00221

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 09 juillet 1992, 90NC00150, 90NC00166, 90NC00692, 90NC00693 et 91NC00221


1°/ Vu le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel le 20 mars 1990 sous le n° 90NC00150, présenté par le secrétaire d'Etat chargé de l'environnement et de la prévention des risques technologiques naturels majeurs ;
Le secrétaire d'Etat demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 26 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné la S.N.C.F. à verser à la Société SPIE-BATIGNOLLES une indemnité de 245 000 F augmentée des intérêts légaux et de leur capitalisation au 24 juillet 1982 et a décidé que les frais et

honoraires d'expertise liquidés et taxés à la somme de 63 857 F seront suppo...

1°/ Vu le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel le 20 mars 1990 sous le n° 90NC00150, présenté par le secrétaire d'Etat chargé de l'environnement et de la prévention des risques technologiques naturels majeurs ;
Le secrétaire d'Etat demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 26 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné la S.N.C.F. à verser à la Société SPIE-BATIGNOLLES une indemnité de 245 000 F augmentée des intérêts légaux et de leur capitalisation au 24 juillet 1982 et a décidé que les frais et honoraires d'expertise liquidés et taxés à la somme de 63 857 F seront supportés par l'Etat à concurrence de 40 % du montant total, par la S.N.C.F. à concurrence de 10 % et par la Société SPIE-BATIGNOLLES à concurrence de 50 % ;
- subsidiairement de prononcer le sursis à exécution du jugement attaqué ;

2°/ Vu la requête sommaire enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 30 mars 1990 sous le n° 90NC00166, présentée pour la Société SPIE-BATIGNOLLES, dont le siège social est à PUTEAUX (92814) Tour Aujun, 33 quai de Dion Bouton, représentée par son président-directeur général en exercice ;
Elle demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 26 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné la S.N.C.F. à lui verser une indemnité de 245 000 F augmentée des intérêts légaux et de leur capitalisation au 24 juillet 1982 et a décidé que les frais et honoraires d'expertise taxés et liquidés à la somme de 63 857 F seront supportés par l'Etat à concurrence de 40 % du montant total ; par la S.N.C.F. à concurrence de 10 % et par la Société SPIE-BATIGNOLLES à concurrence de 50 % ;
- de condamner solidairement et conjointement l'Etat et la S.N.C.F. à réparer l'intégralité du préjudice subi ;
- subsidiairement, de condamner la S.N.C.F. à réparer l'intégralité du préjudice subi ;
- de fixer à la somme de 4 020 000 F le montant du préjudice, avec intérêts de droit à compter de la demande ;
- d'ordonner la capitalisation des intérêts ;

3°/ Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 29 mars et le 30 juillet 1990 sous le n° 115.764, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 17 décembre 1990 sous le n° 90NC00692, présentés pour la Société SPIE-BATIGNOLLES dont le siège social est à PUTEAUX (92814) Tour Aujun, 33 quai de Dion Bouton, représentée par son président-directeur général en exercice ;
Elle demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 26 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné la S.N.C.F. à lui verser une indemnité de 245 000 F augmentée des intérêts légaux et de leur capitalisation au 24 juillet 1982 et a décidé que les frais et honoraires d'expertise taxés et liquidés à la somme de 63 857 F seront supportés par l'Etat à concurrence de 40 % du montant total ; par la S.N.C.F. à concurrence de 10 % et par la Société SPIE-BATIGNOLLES à concurrence de 50 % ;
- de condamner solidairement et conjointement l'Etat et la S.N.C.F. à réparer l'intégralité du préjudice subi ;
- subsidiairement, de condamner la S.N.C.F. à réparer l'intégralité du préjudice subi ;
- de fixer à la somme de 4 020 000 F le montant du préjudice, avec intérêts de droit à compter de la demande ;
- d'ordonner la capitalisation des intérêts ;

4°/ Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 mars et le 15 juin 1990 sous le n° 115.676, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 17 décembre 1990 sous le n° 90NC00693, présentés pour la Société nationale des chemins de fer français (S.N.C.F.) dont le siège est ..., représentée par ses représentants légaux ;
La S.N.C.F. demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 16 septembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Lille a ordonné une expertise afin de déterminer les responsabilités encourues à la suite du débordement des eaux de la Solre les 20 et 21 juillet 1980 ;
- d'annuler le jugement en date du 26 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné la S.N.C.F. à verser à la Société SPIE-BATIGNOLLES une somme de 245 000 F en réparation du préjudice subi par elle à la suite de l'inondation de son usine par les eaux de la Solre ;
- de rejeter les conclusions de la requête de SPIE-BATIGNOLLES dirigées contre elle ;
- subsidiairement de condamner l'Etat à la garantir des condamnations qui seraient prononcées contre elle ;

5°/ Vu l'ordonnance en date du 20 mars 1991 enregistrée au greffe de la Cour le 15 avril 1991 par laquelle le Président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour en application de l'article R.80 du code des tribunaux administratifs et des Cours administratives d'appel la requête présentée par le ministre chargé du l'environnement ;
Vu le recours enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 16 novembre 1987 sous le n° 92.622, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 15 avril 1991 sous le n° 91NC00221, présenté par le ministre délégué chargé de l'environnement ;
Le ministre demande à la Cour :
- d'ordonner le sursis à exécution du jugement en date du 16 septembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Lille a ordonné une expertise à diverses fins dans le cadre d'une procédure relative à des dommages occasionnés par le débordement des eaux de la Solre ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 16 septembre 1807 ;
Vu le code rural ;
Vu le code des communes ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 1992 :
- le rapport de M. LE CARPENTIER , Conseiller,
- les observations de Maître ODENT, avocat de la S.N.C.F.,
- et les conclusions de M. PIETRI , Commissaire du Gouvernement désigné en application du 2ème alinéa de l'article 18 de la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986 ajouté par l'article 5 de la loi n° 90-511 du 25 juin 1990 ;

Considérant que les requêtes n° 90NC00150, 90NC00166, 90NC00692, 90NC00693 et 91NC00221 présentent à juger des questions connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant que la Société SPIE-BATIGNOLLES demande la condamnation solidaire de l'Etat (ministre chargé de l'environnement) et de la S.N.C.F. à lui payer une indemnité de 4 020 000 F en réparation des dommages causés à son établissement industriel de Ferrière La Grande (Nord) à la suite de la crue de la Solre survenue dans la nuit du 20 au 21 juillet 1980 ; que l'Etat et la S.N.C.F. demandent à être dégagés des condamnations prononcées à leur encontre par les jugements attaqués ;
Sur la régularité des jugements attaqués :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article R.229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel que l'appel contre un jugement avant dire droit peut être formé jusqu'à l'expiration des délais impartis pour faire appel du jugement statuant au fond sur le litige ; que dès lors, la société SPIE-BATIGNOLLES ne peut soutenir que le jugement du tribunal administratif de Lille du 26 décembre 1989 aurait méconnu l'autorité de la chose jugée s'attachant au jugement du même tribunal administratif du 16 septembre 1987 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne confère un caractère suspensif aux appels formés contre des jugements avant dire droit ; que par suite, le ministre de l'environnement n'est pas fondé à prétendre que l'appel formé contre son jugement du 16 septembre 1987 interdisait au tribunal administratif de Lille de statuer au fond sur le litige qui lui était soumis ;
Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce que soutient la société SPIE-BATIGNOLLES le jugement du tribunal administratif en date du 16 septembre 1987 a pu, sans contradiction, affirmer dans sa motivation que l'Etat avait commis une faute pour n'avoir pas averti la commune de Ferrière La Grande et écarter dans son dispositif la responsabilité de l'Etat, dans la mesure où le lien de causalité entre la faute ainsi retenue et le préjudice n'était pas établi ;
Considérant, en quatrième lieu, que si le ministre de l'environnement affirme que le jugement du 26 décembre 1989 serait entaché d'irrégularité pour avoir condamné l'Etat au paiement d'une partie des frais d'expertise après avoir écarté sa responsabilité, un tel moyen concerne le bien-fondé du jugement et non sa régularité, le tribunal administratif ayant au demeurant motivé sa décision par la circonstance que la faute imputée à l'Etat justifiait que ce dernier supportât une partie des frais d'expertise ;

Considérant, en cinquième lieu, que le ministre de l'environnement ne peut soutenir que l'expertise ordonnée par le jugement du tribunal administratif du 16 septembre 1987 était frustratoire au motif que ledit tribunal administratif n'a pas fait porter l'expertise sur l'existence éventuelle de faits constitutifs d'une force majeure dès lors que les premiers juges se sont estimés suffisamment éclairés par l'instruction pour écarter cette force majeure ; que par ailleurs c'est à tort qu'il fait valoir que le tribunal administratif ne pouvait demander à l'expert de rechercher si la création d'un service d'annonce des crues de la Solre a contribué à réduire le préjudice subi par la Société SPIE-BATIGNOLLES du fait de l'inondation puisque le jugement contesté ne s'était pas encore prononcé sur l'existence de la responsabilité de l'Etat pour défaut de création d'un tel service ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'environnement et la société SPIE-BATIGNOLLES ne sont pas fondés à soutenir que les jugements attaqués seraient entachés d'irrégularité ;
Sur la force majeure :
Considérant qu'il ressort de l'instruction que l'abondance des précipitations qui se sont abattues sur la région du Nord au cours des jours précédant le sinistre en cause laissait prévoir la crue de la Solre ; que ladite rivière avait déjà débordé à plusieurs reprises et causé d'importantes inondations avant 1973 et notamment en 1961 ; que dès lors, la crue survenue dans la nuit du 20 au 21 juillet 1980 n'a pas présenté, malgré son aspect exceptionnel, un caractère imprévisible et irrésistible, constitutif d'un événement de force majeure ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
En ce qui concerne la faute de l'Etat pour défaut de création d'un service d'annonce des crues de la Solre :
Considérant que la responsabilité de l'Etat, en raison du défaut de création d'un service d'annonce des crues ou du fonctionnement défectueux de ce service, ne peut être recherchée que par les communes concernées auxquelles incombe, en vertu du code des communes, la mission de prévention des inondations et que, dès lors, il revient uniquement aux services d'annonce des crues mis en place par l'Etat de faciliter l'exercice par lesdites communes de leur mission de police en leur communiquant toutes informations utiles sur la montée des eaux ; que par suite, la carence imputée à l'Etat au motif qu'il se serait abstenu fautivement de créer un service d'annonce des crues n'est pas susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard des victimes des inondations ; que dès lors, la Société SPIE-BATIGNOLLES n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de l'Etat serait engagée à son égard ; En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat pour défaut de curage de la Solre :

Considérant qu'en vertu des articles 103 et 115 et suivants du code rural, il incombe au préfet de veiller au curage des cours d'eau par les riverains ; que la responsabilité de l'Etat est engagée lorsque le préfet s'est abstenu de faire application des pouvoirs de police qui lui appartiennent en vertu de ces dispositions pour assurer le libre cours des eaux, même en l'absence d'anciens règlements, d'usages locaux ou de création d'une association syndicale, dès lors que cette carence est constitutive d'une faute lourde ;
Considérant qu'il résulte du dossier qu'en raison des caractéristiques hydrographiques de la Solre et notamment des très grandes variations de débit de ce cours d'eau non domanial l'exécution de travaux de curage, qui n'avaient plus été effectués depuis de nombreuses années, présentait un caractère indispensable, compte tenu de l'encombrement du lit ; que d'ailleurs, l'administration a décidé de procéder au curage de la Solre en 1981, soit quelques mois après la crue litigieuse ; qu'il ressort du rapport de l'expert X... que cette absence de curage a contribué à l'aggravation des effets de la crue du 21 juillet 1980 ; que par suite, en intervenant tardivement pour faire procéder à ce curage, l'Etat a commis une faute lourde engageant sa responsabilité à l'encontre de la société SPIE-BATIGNOLLES ; que cependant, compte tenu de ce que le curage n'aurait pas permis d'éviter l'inondation, mais seulement d'en réduire l'intensité, il n'y a lieu de mettre à la charge de l'Etat que l'indemnisation de l'aggravation du préjudice subi par la Société SPIE-BATIGNOLLES du fait du non curage de la Solre ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant l'Etat à payer à la Société SPIE-BATIGNOLLES une indemnité représentant 10 % du préjudice subi par elle ;
Sur la responsabilité de la S.N.C.F. :
Considérant que la responsabilité d'une personne publique est susceptible d'être engagée en raison des dommages provoqués par un ouvrage public lui appartenant même au cas où le dommage résulterait de la seule présence de cet ouvrage ; Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que la présence d'un pont supportant la voie ferrée et appartenant à la S.N.C.F., sis en amont de l'usine de la Société SPIE-BATIGNOLLES, a réduit le débit d'écoulement des eaux et a contribué, de ce fait à la réalisation des dommages ;

Considérant que si la S.N.C.F. soutient que le pont lui appartenant permettait, à la date de sa construction, un écoulement complet des eaux, même en période de crue, et que seul l'accroissement du débit de la Solre serait à l'origine des difficultés d'écoulement, alors que ledit pont était conçu à l'origine en fonction d'un débit moindre, elle n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de cette allégation ; que dès lors, la Société SPIE-BATIGNOLLES est fondée à soutenir que la présence du pont en cause a aggravé les dommages subis par son établissement industriel ; que cette aggravation doit être évaluée à 10 % du préjudice subi par la Société requérante ; que par suite, il y a lieu de maintenir à ce taux la part de responsabilité incombant à la S.N.C.F. ;
Sur la demande de condamnation solidaire de l'Etat et de la S.N.C.F. :
Considérant que si la Société SPIE-BATIGNOLLES a demandé que l'Etat et la S.N.C.F. soient solidairement condamnés au paiement des indemnités qui lui sont dues, il résulte de ce qui a été dit plus haut que les responsabilités respectives de l'Etat et de la S.N.C.F. ont des fondements distincts ; que dès lors, la requête de la Société SPIE-BATIGNOLLES doit sur ce point être rejetée ;
Sur le préjudice :
Considérant que la Société SPIE-BATIGNOLLES estime le montant global du préjudice qu'elle a subi du fait de la crue litigieuse à 4 020 000 F, dont 2 742 000 F représentant le coût de la main-d'oeuvre qu'elle a utilisée pour procéder à des travaux de nettoyage des locaux, de réfection du matériel endommagé et de reconstitution des documents détériorés ; que toutefois la Société requérante, qui n'a pas eu recours à des personnels extérieurs à son entreprise, ne produit aucun élément justifiant de la charge représentée par l'utilisation de son propre personnel pour effectuer les travaux de remise en état ; que dans ces conditions, il y a lieu de retenir comme montant du préjudice subi par cette société, l'évaluation faite par l'expert X..., dont la méthode n'a pas été utilement contestée par la société SPIE-BATIGNOLLES, soit 2 450 000 F ; que dès lors, il y a lieu de condamner l'Etat et la S.N.C.F. à verser chacun respectivement une somme de 245 000 F à la Société SPIE-BATIGNOLLES ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts ne peut, conformément aux dispositions de l'article 1254 du code civil, être accordée à la partie qui le demande qu'à compter de la date de sa demande et s'il est dû au moins une année d'intérêts ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte des pièces du dossier que la Société SPIE-BATIGNOLLES a demandé pour la première fois la capitalisation des intérêts dans son mémoire enregistré le 17 novembre 1989, devant les premiers juges ; que c'est par conséquent à compter de cette date du 17 novembre 1989 qu'il y a lieu de faire droit à la demande de la Société SPIE-BATIGNOLLES ; que dès lors, la S.N.C.F. est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a accordé à la Société SPIE-BATIGNOLLES, la capitalisation des intérêts échus à compter du 24 juillet 1982 ;

Considérant, d'autre part, que si la Société SPIE-BATIGNOLLES a effectué une nouvelle demande de capitalisation des intérêts le 29 mars 1990 une telle demande doit être rejetée dès lors qu'il ne s'était pas écoulé une année depuis la précédente demande de capitalisation ;
Sur l'appel en garantie de l'Etat par la S.N.C.F. :
Considérant que pour demander la garantie de l'Etat, la S.N.C.F. fait valoir que le sinistre dont la responsabilité lui est en partie imputable aurait pu être atténué si les services concernés avaient procédé à l'annonce de la crue litigieuse ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, l'Etat ne peut être tenu pour responsable à l'égard des victimes du défaut de création d'un service d'annonce des crues ; qu'au demeurant, il appartenait à la S.N.C.F. de procéder elle-même au curage de la rivière sous le pont dont elle est propriétaire en vue d'assurer le libre cours des eaux ; que dès lors la S.N.C.F. n'est pas fondée à demander que l'Etat soit condamné à la garantir des condamnations prononcées contre elle ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'aux termes de l'article R.217 du code des tribunaux administratifs et des Cours administratives d'appel : "Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction. Ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties" ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de faire supporter la charge des frais d'expertise liquidés et taxés à 63 857 F à part égale entre l'Etat, la S.N.C.F. et la Société SPIE-BATIGNOLLES, soit 21 285,66 F chacun ;
Article 1 : L'Etat et la S.N.C.F. sont condamnés chacun respectivement à payer à la Société SPIE-BATIGNOLLES la somme de 245 000 F. Les sommes ainsi versées porteront intérêt à compter du 24 juillet 1981. Les intérêts échus le 17 novembre 1989 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes du ministre de l'environnement, de la Société SPIE-BATIGNOLLES et de la S.N.C.F. ainsi que de leurs appels incidents, est rejeté.
Article 3 : Les frais et honoraires d'expertise liquidés et taxés à 63 857 F seront supportés à part égale entre l'Etat, la S.N.C.F. et la Société SPIE-BATIGNOLLES soit 21 285,66 F chacun.
Article 4 : Les jugements du tribunal administratif de Lille des 16 septembre 1987 et 26 décembre 1989 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre chargé de l'environnement, à la Société SPIE-BATIGNOLLES et à la Société Nationale des Chemins de Fer français.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 90NC00150;90NC00166;90NC00692;90NC00693;91NC00221
Date de la décision : 09/07/1992
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 EAUX - OUVRAGES - RESPONSABILITE DU FAIT DES OUVRAGES - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - Responsabilité partielle de la S - N - C - F - du fait de l'entrave causée par un pont ferroviaire à l'écoulement d'un cours d'eau en crue (1).

27-02-04-01, 49-05-035, 60-02-03-01-02 Ont contribué à la réalisation des dommages subis par une entreprise, lors de la crue d'une rivière, cours d'eau non domanial, et en sont donc partiellement responsables, d'une part, l'Etat à raison de la faute lourde commise par le préfet qui n'a pas fait usage des pouvoirs de police qui lui sont conférés par les articles 103 et 115 et suivants du code rural en s'abstenant depuis de nombreuses années de faire procéder au curage de la rivière que ses caractéristiques hydrographiques et son encombrement rendaient indispensable et d'autre part la S.N.C.F. propriétaire d'un pont qui a ralenti le débit d'écoulement de la rivière. (Mise à la charge de l'Etat et de la S.N.C.F. du dixième chacun du dommage).

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICES SPECIALES - POLICE DES EAUX ET DE LA NAVIGATION INTERIEURE - Abstention du préfet d'user de ses pouvoirs en matière de police des eaux (art - 103 et 115 et suivants du code rural) - Abstention de faire procéder par les riverains au curage d'un cours d'eau non domanial - Conséquence - Responsabilité de l'Etat dans les dommages causés par le débordement de ce cours d'eau en crue.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE POLICE - SERVICES DE L'ETAT - ABSTENTION DES FORCES DE POLICE - Abstention du préfet d'user de ses pouvoirs en matière de police des eaux (art - 103 et 115 et suivants du code rural) - Abstention de faire procéder par les riverains au curage d'un cours d'eau non domanial - Conséquence - Responsabilité de l'Etat dans les dommages causés par le débordement de ce cours d'eau en crue.


Références :

Code civil 1254
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R229, R217
Code rural 103, 115

1.

Cf. CE, 1984-03-02, syndicat intercommunal de l'Huveaune et autre, p. 93. 2.

Cf. CE, 1968-07-13, Jouan et entreprise Razel Frères, n° 66395-66437, T. p. 956


Composition du Tribunal
Président : M. Woehrling
Rapporteur ?: M. Le Carpentier
Rapporteur public ?: M. Pietri

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1992-07-09;90nc00150 ?
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