Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 7 mai 1988 sous le numéro 97 768 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 5 janvier 1989 sous le n° 89NC00589 présentée par la SA PHOTO QUITTOT dont le siège social est ... de la Marne à CHAUMONT (Haute-Marne), représentée par son président-directeur général en exercice ;
La SA PHOTO QUITTOT demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 15 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de CHALONS-SUR-MARNE a rejeté d'une part, sa demande en décharge des compléments de l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1978, 1979, 1980, 1981 et 1982 et, d'autre part, sa demande au sursis de paiement desdites impositions ;
2°) de lui accorder la décharge des sommes de 56 106 F en principal et en pénalités d'assiette ainsi que 56 106 F en pénalités de recouvrement ;
3°) de prononcer en sa faveur le remboursement des frais exposés tant en première instance qu'en appel ;
Vu l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le Président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 1991 :
- le rapport de M. JACQ, conseiller,
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, commissaire du Gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 9 janvier 1990 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la Haute-Marne a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 214 759 F, du complément d'impôt sur les sociétés auquel la société anonyme Photo Quittot a été assujettie au titre des années 1978, 1979, 1980, 1981 et 1982 ; que les conclusions de la requête de la SA Photo Quittot relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour établir les compléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société requérante au titre des années 1978, 1979, 1980, 1981 et 1982, l'administration a suivi la procédure contradictoire définie à l'article L.55 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les impositions contestées auraient été établies selon une procédure de rectification d'office irrégulièrement suivie ne peut être accueilli ; qu'eu égard à la procédure suivie les notifications de redressement n'avaient pas à être visées par l'inspecteur principal ; que si la société conteste la procédure devant la commission départementale des impôts, elle n'assortit ses allégations d'aucun élément permettant de regarder la procédure comme irrégulière ;
Considérant que les impositions litigieuses ayant été établies conformément à l'avis émis le 21 mars 1984 par la commission départementale des impôts, la société requérante a la charge de prouver l'exagération de ses bases d'imposition ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la comptabilité de la SA Photo Quittot ne comportait, hormis le stock d'entrée au 10 mars 1977, date du début de son activité, et le stock de sortie au 28 février 1982, aucun inventaire détaillé des stocks au titre des exercices clos en 1978, 1979, 1980 et 1981 ; qu'aucun brouillard de caisse, livre journal ou document enregistrant les opérations au jour le jour n'a pu être fourni avant le 14 février 1983, date à laquelle un journal de caisse irrégulièrement tenu a été présenté par la société ; que la comptabilisation de la recette journalière était effectuée par différence d'encaisse ; que des omissions de frais, des virements de fonds ont été constatés ainsi que de nombreuses ratures et erreurs ; que, par suite, la société requérante ne peut apporter la preuve qui lui incombe au moyen d'une comptabilité qui, eu égard aux insuffisances mentionnées ci-dessus était irrégulière et dépourvue de valeur ;
Considérant, d'autre part, qu'en l'absence de comptabilité probante, le vérificateur a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires à partir des éléments dont il disposait et notamment des factures d'achats des cinq exercices vérifiés ; qu'il a ventilé ces dernières en sept catégories distinctes en tenant compte des prélèvements personnels de marchandises ; qu'il a déterminé pour chaque catégorie d'articles un coefficient moyen de marge brute résultant de l'examen des prix de vente pratiqués par la société à partir d'un relevé de prix effectué lors de la première visite dans l'entreprise, d'une part, et des tarifs du groupement PHOX auquel est affiliée la société requérante ainsi que des tarifs AGFA, KODAK et ILFORD, d'autre part ; qu'il a, au préalable, pondéré lesdits coefficients par secteur d'activité pour tenir compte de leur importance dans le chiffre d'affaires total ; qu'après examen des opérations entre la société requérante et le studio GLASS, le vérificateur a écarté des achats utilisés pour la reconstitution de plusieurs factures d'un montant de 50 000 F au titre de l'exercice 1979-1980 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise ordonné par le tribunal de grande instance de CHAUMONT, que dans le cadre de la reconstitution par les experts de la partie relative aux travaux exécutés dans le laboratoire couleur de la société, un coefficient multiplicateur moyen de 5,78 applicable aux travaux couleur a été appliqué à un montant d'achats comparable à celui déterminé par le vérificateur ; que l'administration a tiré les conséquences des conclusions des experts, en ce qui concerne l'exagération sur certains points de l'évaluation initiale faite par le vérificateur, en annulant les redressements notifiés pour l'exercice 1980-1981 et en confirmant les redressements pour l'exercice 1981-1982 ; que, pour les exercices antérieurs, elle a réduit le coefficient appliqué dans le cadre des travaux réalisés par le laboratoire en retenant le coefficient de 5,78 pour les travaux couleur et en maintenant le montant global des achats revendus déterminé dans cette rubrique ; qu'elle a maintenu les montants de chiffre d'affaires reconstitués dans la rubrique "laboratoires extérieurs" et réduit à 1,5 le coefficient aux achats de la rubrique "produits et matériels destinés à la vente" ;
Considérant que pour le surplus la société requérante se borne à soutenir que le vérificateur n'aurait pas tenu compte des remises importantes qu'elle accordait aux bons clients ou sur une partie des travaux, qu'il aurait sous-évalué le coefficient retenu pour l'activité couleur ainsi que les pertes dues aux réglages nécessités par la machine pour les photos couleurs, qu'il se serait contenté d'effectuer un travail théorique ; qu'elle n'établit pas par ces allégations l'exagération des évaluations faites par l'administration ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que la SA Photo QUITTOT n'apporte aucune précision à l'appui de ses conclusions tendant au remboursement des frais qu'elle a exposés tant en première instance qu'en appel ; que par suite, celles-ci ne peuvent être accueillies ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 214 759 F, en ce qui concerne les compléments d'impôt sur les sociétés auquel la société anonyme Photo Quittot a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980, 1981 et 1982, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SA Photo Quittot.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA Photo Quittot est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Photo Quittot et au ministre délégué au Budget.