La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/07/1990 | FRANCE | N°89NC01042

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 10 juillet 1990, 89NC01042


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 17 juillet et 10 novembre 1987 sous le numéro 89506, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 17 février 1989 sous le numéro 89NC01042, présentés pour la Commune de FERE-EN-TARDENOIS (Aisne) représentée par son maire en exercice, tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 19 mai 1987 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condamnée à verser à M. DEVOS les intérêts légaux afférents aux arriérés de traitements pour la période

du 5 décembre 1984 au 7 novembre 1985, la somme de 30 653,25 F avec int...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 17 juillet et 10 novembre 1987 sous le numéro 89506, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 17 février 1989 sous le numéro 89NC01042, présentés pour la Commune de FERE-EN-TARDENOIS (Aisne) représentée par son maire en exercice, tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 19 mai 1987 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condamnée à verser à M. DEVOS les intérêts légaux afférents aux arriérés de traitements pour la période du 5 décembre 1984 au 7 novembre 1985, la somme de 30 653,25 F avec intérêts légaux pour la période du 7 avril 1981 au 16 avril 1985 et capitalisation des intérêts, la somme de 34 750 F avec intérêts légaux à compter du 6 juin 1985 et capitalisation des intérêts échus le 16 avril 1987, et a rejeté les appels en garantie qu'elle avait formés contre l'Etat et le syndicat de communes pour le personnel ;
- subsidiairement, condamne le syndicat de communes pour le personnel et l'Etat, solidairement ou chacun en ce qui le concerne, à garantir la commune de toutes les condamnations prononcées contre elle ;
Vu l'ordonnance du 10 février 1989 par laquelle le Président de la 3ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 26 juin 1990 :
- le rapport de M. PIETRI, conseiller,
- et les conclusions de Mme FELMY, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article R 200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Les jugements contiennent les noms et conclusions des parties, les visas des pièces et des dispositions législatives ou réglementaires dont ils font application" ; qu'au nombre des mentions devant apparaître sur les jugements doit figurer notamment l'analyse des moyens des parties ;
Considérant qu'il résulte de l'examen des pièces du dossier, et notamment de la minute du jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 19 mai 1987 dont il est relevé appel par la commune de Fère-en-Tardenois, que ce jugement ne comporte pas les visas des mémoires de la commune ; qu'il est ainsi entaché d'un vice de forme ; qu'il y a lieu de l'annuler en tant qu'il concerne la commune de Fère-en-Tardenois, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. DEVOS devant le tribunal administratif et sur les appels en garantie formés par la commune ;
Sur les conclusions de la requête de M. DEVOS :
Considérant, en premier lieu, qu'à la suite de l'annulation par un jugement en date du 3 mai 1984 devenu définitif, de l'arrêté du 5 janvier 1978 modifiant l'échelonnement indiciaire de M. DEVOS, secrétaire général de la mairie, tel qu'il avait été fixé par un arrêté du 2 août 1977, M. DEVOS a demandé que la commune de Fère-en-Tardenois soit condamnée à lui verser les intérêts moratoires sur les arriérés de traitement à compter de la date où chacun des arriérés mensuels aurait dû lui être versé ; que les intérêts des sommes dues par l'administration, en vertu de l'article 1153 du code civil, ne courent qu'à compter de la date où la demande de paiement du principal est parvenue à l'autorité administrative compétente ; qu'ainsi, les intérêts au taux légal sur les arriérés de traitement versés à M. DEVOS ne sont dûs que pour la période du 5 décembre 1984, date de réception par la commune de la demande tendant au versement desdites sommes, au 7 novembre 1985, date de leur paiement ; qu'en outre, la capitalisation de ces intérêts ayant été demandée le 6 avril 1985, date à laquelle il n'était pas dû au moins une année d'intérêts, il y a lieu de rejeter cette demande par application de l'article 1154 du code civil ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. DEVOS a demandé que lui soient alloués des intérêts moratoires sur la somme de 30 653,25 F ayant fait l'objet d'une saisie-arrêt pour la période du 10 avril 1980 au 16 avril 1985, ainsi que la capitalisation des intérêts à compter du 16 avril 1985 ; que M. DEVOS ayant demandé au tribunal de le décharger du paiement de la somme litigieuse le 7 avril 1981, les intérêts sont dûs à compter de cette date jusqu'au 16 avril 1985, date de restitution de ladite somme ; que les dispositions de l'article 1154 du code civil ont pour objet de limiter la capitalisation des intérêts échus au cours de la période pendant laquelle, le principal de la créance n'ayant pas encore été payé, les intérêts continuent de courir ; qu'elles ne s'appliquent pas au cas d'espèce où le débiteur s'est acquitté de sa dette en principal, interrompant ainsi le cours des intérêts, mais n'a pas payé en même temps les intérêts dont il était redevable, obligeant ainsi le créancier à former une nouvelle demande pour le paiement de ces intérêts ; que, dans ce cas, les intérêts qui étaient dûs au jour du paiement du principal constituent une créance productive d'intérêts dans les conditions de l'article 1153 du code civil selon lequel "les intérêts sont dûs à compter du jour de la sommation de payer" ; que, par suite, les intérêts dûs sur la somme de 30 653,25 F à la date du 16 avril 1985 constituent une créance productive d'intérêts au taux légal ; que les intérêts portant sur la créance constituée par les intérêts dûs à cette date sur ladite somme, qui ont été demandés par M. DEVOS au tribunal administratif, courent à compter du 6 juin 1985, date de sa requête introductive d'instance ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. DEVOS a demandé le remboursement des frais et honoraires qu'il a dû supporter à la suite de la procédure de saisie-arrêt et validité de saisie-arrêt diligentée sur l'ordre de la commune, et dont le montant s'élèverait à 4 749,45 F, ce chef de préjudice ne figurait pas dans la demande préalable qu'il a adressée au maire de Fère-en-Tardenois et n'a donné lieu à aucun rejet au fond de la part de la commune au cours de la procédure contentieuse ; qu'ainsi, le contentieux n'étant pas lié, ces conclusions ne sont pas recevables ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la commune de Fère-en-Tardenois a, malgré les demandes réitérées de l'intéressé, attendu plus de neuf mois avant d'entamer la procédure permettant de reconstituer la carrière de M. DEVOS en exécution du jugement susmentionné du 3 mai 1984 ; que ce retard dans l'exécution d'une décision juridictionnelle constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune et à justifier l'allocation à M. DEVOS d'une indemnité en réparation du préjudice subi et dont il sera fait une juste appréciation en condamnant la commune à lui verser la somme de 20 000 F ; que la capitalisation des intérêts dûs sur cette somme a été demandée le 16 avril 1987 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a lieu par suite, en vertu de l'article 1154 du code civil, de faire droit à cette demande ;
Sur les conclusions de la commune :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le retard avec lequel a été exécuté le jugement susmentionné soit en tout ou partie imputable à l'Etat ou au syndicat de commune pour le personnel du département de l'Aisne ; que, dès lors la commune de Fère-en-Tardenois n'est pas fondée à appeler en garantie l'Etat et ce syndicat ;
Considérant que dans la mesure où elle aurait, en exécution du jugement attaqué, versé à M. DEVOS la somme de 14 749,45 F dont elle se trouve déchargée par la présente décision, ce que d'ailleurs elle n'établit pas, la commune n'est pas fondée à demander la condamnation de l'intéressé à la réparation, sous la forme d'intérêts au taux légal, du préjudice subi du fait de ce versement auquel elle était tenue en raison du caractère exécutoire de ce jugement ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 19 mai 1987 est annulé en tant qu'il concerne la commune de Fère-en-Tardenois.
Article 2 : Les arriérés de traitement versés à M. Jean DEVOS par la commune de Fère-en-Tardenois porteront intérêts au taux légal du 5 décembre 1984 au 7 novembre 1985.
Article 3 : La somme de 30 653,25 F que la commune de Fère-en-Tardenois a reversée, le 16 avril 1985, à M. DEVOS portera intérêts au taux légal du 7 avril 1981 au 16 avril 1985. Les intérêts dûs sur cette somme au jour de son paiement formeront eux-mêmes une créance productive d'intérêts au taux légal, lesquels seront dus par la commune à compter du 6 juin 1985, date de la requête introductive d'instance.
Article 4 : La commune de Fère-en-Tardenois est condamnée à verser à M. DEVOS la somme de 20 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 6 juin 1985. Les intérêts échus le 16 avril 1987 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. DEVOS devant le tribunal administratif d'Amiens contre la commune de Fère-en-Tardenois est rejeté.
Article 6 : Les appels en garantie formés par la commune de Fère-en-Tardenois contre l'Etat et le syndicat de communes pour le personnel du département de l'Aisne sont rejetés.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fère-en-Tardenois, à M. DEVOS, au centre de gestion de la fonction publique territoriale du département de l'Aisne et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC01042
Date de la décision : 10/07/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - ASTREINTE (LOI DU 16 JUILLET 1980) - CONDAMNATION DE LA COLLECTIVITE PUBLIQUE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - MODALITES DE LA REPARATION - INTERETS.


Références :

Code civil 1154, 1153


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: PIETRI
Rapporteur public ?: FELMY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1990-07-10;89nc01042 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award