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15/05/1990 | FRANCE | N°89NC00727

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 15 mai 1990, 89NC00727


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 8 octobre 1987 et 8 février 1988 sous le n° 91886 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 4 janvier 1989 sous le n° 89NC00727, présentés pour M. Jean B..., demeurant ..., tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 25 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de LILLE l'a condamné à payer à la ville de DOUAI la somme de 864 222,08 F. en remboursement des frais de réfection du mur pignon de l'immeuble appartenant aux consorts Z..., à gar

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Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 8 octobre 1987 et 8 février 1988 sous le n° 91886 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 4 janvier 1989 sous le n° 89NC00727, présentés pour M. Jean B..., demeurant ..., tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 25 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de LILLE l'a condamné à payer à la ville de DOUAI la somme de 864 222,08 F. en remboursement des frais de réfection du mur pignon de l'immeuble appartenant aux consorts Z..., à garantir la ville, d'une part, de la condamnation à verser la somme de 50 421 F à Mme X..., locataire de l'immeuble, en réparation du préjudice qu'elle a subi et, d'autre part, des frais d'expertise s'élevant à 8 215 F, et a rejeté l'appel en garantie qu'il a formé à l'encontre de la société SOCOTEC et de la société Louis DORCHIES ;
- subsidiairement, réduise le montant desdites condamnations et condamne la société SOCOTEC et la société DORCHIES à le garantir des condamnations prononcées à son encontre ;
Vu le mémoire en défense, formant appel provoqué, enregistré le 30 décembre 1988, présenté pour la commune de DOUAI, tendant au rejet de la requête et, subsidiairement, à ce que la société SOCOTEC, la société DORCHIES et M. B... soient condamnés solidairement à lui verser la somme de 864 222,08 F avec intérêts de droit capitalisés et la garantissent de toute condamnation prononcée à son encontre au profit de Mme X... ;
Vu l'ordonnance du 10 janvier 1989 par laquelle le Président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse au VIII ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le décret n° 64262 du 14 mars 1964 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 02 mai 1990 :
- le rapport de M. PIETRI, Conseiller,
- les observations de Me A..., de la S.C.P. MASSE-DESSEN-GEORGES, avocat de M. B...,
- et les conclusions de Mme FELMY, Commissaire du Gouvernement ;

En ce qui concerne les conclusions de la requête de M. B... :
Sur le responsabilité :
Considérant qu'en vue de procéder à l'élargissement de la rue Fortier la commune de DOUAI a fait exécuter par la société DORCHIES, en 1977, sous la direction de M. B... architecte, des travaux de démolition de l'immeuble situé 5 bis place Carnot et, par l'entreprise MARTIN, des travaux de consolidation du mur pignon de l'immeuble contigu situé 7, place Carnot où Mme X... exploitait une pharmacie ; qu'il n'est pas contesté que les graves désordres qui sont apparus en 1980, postérieurement à la réception définitive des travaux, sur ce mur pignon étaient de nature à affecter la solidité de l'ouvrage et, par suite, permettaient de mettre en jeu la garantie décennale des constructeurs ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que ces désordres découlent d'une étude insuffisante de la composition du mur pignon et de la structure porteuse de l'immeuble endommagé qui constitue un vice de conception imputable à l'architecte ; que, dès lors, sa responsabilité étant recherchée en application des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, ce dernier n'est pas fondé à se prévaloir vis-à-vis de la commune de DOUAI, maître de l'ouvrage, pour s'exonérer de la responsabilité qu'il encourt, de l'imputabilité de tout ou partie des désordres litigieux à la société SOCOTEC , à la société DORCHIES et à l'entreprise MARTIN ; que si la commune a remis à M. B..., préalablement à l'exécution des travaux, une étude que la société SOCOTEC avait réalisée en 1975 en vue, d'ailleurs, de la démolition de l'immeuble litigieux et non de la consolidation de son mur pignon, cette circonstance ne pouvait induire en erreur l'architecte, qui était chargé d'une mission générale de maîtrise d'oeuvre, sur la consistance de ce mur dont le renforcement s'imposait après la démolition de l'immeuble contigu ; qu'ainsi, la commune de DOUAI n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'il suit de là que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de LILLE l'a déclaré entièrement responsable vis-à-vis de la commune de DOUAI des conséquences dommageables des désordres litigieux subis tant par celle-ci que par Mme X... ;
Sur la réparation :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'alignement de la rue Fortier prévu par le plan d'alignement communal avait pour effet d'atteindre l'immeuble occupé par Mme X... sur une grande profondeur et de rendre malaisée son utilisation selon sa destination à la date des dommages ; que, dès lors, l'immeuble n'étant pas légalement soumis à la servitude de reculement visée à l'article 14 du décret n° 64262 du 14 mars 1964, la commune pouvait, comme elle l'a fait, procéder à la réfection de son mur pignon endommagé ;

Considérant en deuxième lieu, que, eu égard à la structure originelle de ce mur, sa reconstitution telle qu'elle a été réalisée par la commune en 1982, pour un coût de 864 222,08 F, s'imposait dès la démolition, en 1977, de l'immeuble contigu ; qu'ainsi, la dépense correspondante aurait dû, en tout état de cause, être supportée par la commune ; que le dommage que celle-ci a subi en réalité comprend, d'une part, le coût des travaux d'exécution d'un "radier-poussoir" et de ragréage du mur réalisés en 1977 et qui se sont avérés insuffisants et, d'autre part, l'aggravation du coût des travaux nécessaires due à leur exécution tardive en 1982 ; qu'il sera fait une exacte appréciation du préjudice subi par la commune en condamnant M. B... à lui verser la somme de 345 688,83 F correspondant à 40 % du coût de réfection complète du mur pignon ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, le montant du préjudice subi par Mme X... n'étant pas contesté, il y a lieu de ramener de 864 222,08 F à 345 688,83 F le montant de l'indemnité que M. B... a été condamné à verser à la commune de DOUAI par l'article 4 du jugement attaqué et, par conséquent, de réformer en ce sens le jugement ;
Sur les appels en garantie formés par M. B... :
Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, l'étude réalisée en 1975 par la société SOCOTEC portait, sur l'indication de la commune, non sur le renforcement du mur pignon de l'immeuble occupé par Mme X... mais sur la démolition de cet immeuble ; qu'aucune faute de conception ne pouvant dès lors être retenue à l'encontre de la société SOCOTEC, M. B... n'est pas fondé à demander que cette société le garantisse des condamnations prononcées contre lui ;
Considérant que la société anonyme DORCHIES était uniquement chargée des travaux de démolition de l'immeuble contigu, les travaux de renforcement et de ragréage du mur pignon litigieux ayant été confiés par la commune à l'entreprise MARTIN ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société DORCHIES ait commis, dans l'exécution de ses travaux de démolition, une faute de nature à engager sa responsabilité vis-à-vis de l'architecte ; que, dès lors que ce dernier a également fondé son appel en garantie sur l'application des stipulations de l'article 5 du cahier des prescriptions spéciales annexé au marché relatif à la démolition de l'immeuble contigu, suivant lesquelles l'entrepreneur restait responsable de tous dommages causés aux immeubles voisins par les travaux de démolition, la société DORCHIES était en droit, comme elle l'a fait, de se prévaloir de la réception définitive de ces travaux prononcée sans réserve, qui a eu pour effet de mettre fin à ses obligations contractuelles ; qu'ainsi, et en tout état de cause, M. B... n'est pas fondé à invoquer ladite clause contractuelle ; qu'il résulte de ce qui précède que l'appel en garantie qu'il a formé contre la société DORCHIES ne saurait être accueilli ;
En ce qui concerne les conclusions de la commune de DOUAI :

Considérant que le présent arrêt n'a pas pour effet d'aggraver la situation de la commune de DOUAI, telle qu'elle résulte du jugement attaqué, en ce qui concerne l'indemnité qu'elle a été condamnée à verser à Mme X... ;que, par suite, la commune n'est pas recevable à demander, par voie d'appel provoqué, après l'expiration du délai de recours contentieux, la condamnation des sociétés SOCOTEC et DORCHIES, solidairement avec M. B..., à la garantir des condamnations prononcées contre elle et au profit de Mme X... ; que sa situation étant par contre aggravée en ce qui concerne la réparation des désordres affectant le mur pignon de l'immeuble occupé par Mme X..., la commune est recevable à demander la condamnation de ces sociétés, solidairement avec l'architecte, au remboursement du coût des réparations qu'elle a fait exécuter en 1982 ;
Considérant que l'étude confiée par la commune à la société SOCOTEC en 1975 n'avait pas pour objet de déterminer les travaux nécessaires au renforcement du mur pignon après la démolition de l'immeuble contigu mais prévoyait, au contraire, comme l'avait demandé la commune, la démolition des deux immeubles ; qu'ainsi, aucune part de responsabilité ne pouvant être retenue à l'encontre de cette société dans la survenance des désordres, la commune de DOUAI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande de condamnation de ladite société ;
Considérant que la commune met en cause la responsabilité contractuelle de la société DORCHIES en se fondant sur les stipulations de l'article 5 du cahier des prescriptions spéciales susmentionné ; que la société se prévaut de la réception définitive des travaux de démolition qui a eu pour effet de mettre fin aux rapports contractuels qui étaient nés du marché ; que, dès lors, la demande de la commune tendant à la condamnation de la société DORCHIES ne saurait être accueillie ;
Considérant, enfin, que la commune de DOUAI a demandé, le 30 décembre 1988, la capitalisation des intérêts dus ; qu'à cette date, au cas où le jugement n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1 : L'indemnité de 864 222,08 F que M. Jean B... a été condamné à verser à la commune de DOUAI par le jugement du tribunal administratif de LILLE, en date du 25 juin 1987, est ramenée à la somme de 345 688,83 F. Les intérêts dus sur cette somme et échus le 30 décembre 1988 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de LILLE, en date du 25 juin 1987, est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... et des conclusions présentées par la commune de DOUAI est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B..., à la commune de DOUAI, à la société SOCOTEC, à la société DORCHIES, à la société MARTIN représenté par M. HENNION administrateur judiciaire, à Mme X..., à Mlle Marie-Louise Z... et à M. Y....


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