La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/12/1989 | FRANCE | N°89NC00232

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 29 décembre 1989, 89NC00232


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 31 juillet et 19 novembre 1986 sous le n° 80809 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 02 janvier 1989 sous le n° 89NC00232, présentés pour M. Marc X... domicilié à FROTEY LES VESOUL, tendant à ce que la Cour :
1°) annule le jugement en date du 04 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1978, 1979 et

1983 pour les montants respectifs de 45 586 F, 17 211 F et 28 819 F ;...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 31 juillet et 19 novembre 1986 sous le n° 80809 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 02 janvier 1989 sous le n° 89NC00232, présentés pour M. Marc X... domicilié à FROTEY LES VESOUL, tendant à ce que la Cour :
1°) annule le jugement en date du 04 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1978, 1979 et 1983 pour les montants respectifs de 45 586 F, 17 211 F et 28 819 F ;
2°) lui accorde la décharge demandée ;
Vu l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu l'ordonnance en date du 15 novembre 1989 par laquelle le président de la cour administrative d'appel a rouvert l'instruction ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 09 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 02 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 19 décembre 1989 :
- le rapport de M. BONNAUD, Conseiller ;
- les observations de Me BRIARD, substituant Me CHOUCROY, avocat de M. Marc X... ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la société en nom collectif "Levage-Manutention-Vesoul" a acquis le 15 mars 1978, au terme d'un contrat de crédit-bail souscrit le 15 mars 1973, une grue PPM dont le prix était à l'origine de 587 950 F hors taxe et dont la valeur résiduelle à l'expiration dudit contrat, qui était fixée à 6 % de la valeur d'achat soit 35 277 F hors taxe, a été portée à 115 512 F par suite d'une notification de redressements du 23 octobre 1979 ; que la société a acquis en 1979, au terme d'un second contrat de crédit-bail souscrit en 1975, une grue GH 13 dont la valeur neuve hors taxe était de 220 000 F et dont la valeur résiduelle au jour de la levée de l'option était fixée également à 6 % du prix d'achat, soit 13 200 F hors taxe ; qu'antérieurement à la cessation de son activité intervenue le 03 septembre 1982, la société L.M.V. a cédé la grue PPM le 31 mai 1982 moyennant un prix de 340 000 F et la grue GH 13 le 20 avril 1982 pour 140 000 F ; que l'administration a estimé qu'il y avait lieu de remettre en cause la valeur vénale des grues PPM et GH 13 déterminée par les contrats à la date de levée de l'option de rachat et, par suite, a constaté un accroissement d'actif de 224 488 F et 126 800 F au titre des années 1978 et 1979 correspondant à la différence entre le prix de cession des matériels en 1982 et la valeur résiduelle telle qu'elle était prévue au contrat de crédit-bail pour la grue GH 13 à la date de levée de l'option et telle qu'elle a été rehaussée par l'administration en 1979 pour la grue PPM ; qu'en conséquence, l'administration a substitué à l'imposition au taux réduit de 15 % de la plus value à long terme initialement déclarée par l'entreprise, au titre de l'année 1982, une plus value à court terme d'un montant de 351 288 F ; que ces sommes ont été réintégrées dans les revenus de M. Marc X... au titre des années 1978, 1979 et 1982 à concurrence de 25 % des parts qu'il détenait dans la société L.M.V. ; que M. X... ayant contesté les compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti, le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa requête par jugement en date du 04 juin 1986 dont il est fait appel ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'omission de signature qui entachait la requête de M. X... a été régularisée en cours d'instance ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée par le ministre ne saurait être accueillie ;
Considérant qu'il ressort de l'examen de la requête sommaire de M. X..., aux termes de laquelle l'intéressé demande la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1978, 1979 et 1983, pour les montants respectifs de 45 586 F, 17 211 F et 28 819 F, que c'est par une simple erreur matérielle que l'année 1983 a été substituée à l'année 1982 ; qu'ainsi, le requérant doit être regardé comme contestant, notamment, le complément d'impôt mis à sa charge, au titre de l'année 1982, pour un montant de 28 819 F ;
Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies B du C.G.I., repris à l'article L.64 du L.P.F., "Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses ... qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ... L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. Si elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit ou ne s'est pas rangée à l'avis de ce comité, il lui appartient d'apporter la preuve du bien-fondé du redressement" ; que lorsque l'administration use des pouvoirs qu'elle tient de ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle doit, pour pouvoir écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, établir que ces actes ont un caractère fictif ou, à défaut, qu'ils n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les contrats de crédit-bail dont la société en nom collectif L.M.V. a bénéficié pour les deux grues de levage litigieuses étaient, tant par leur durée que par les montants des loyers pratiqués et le taux fixé pour la levée de l'option d'achat en fin de bail, conformes aux usages pratiqués dans la profession pour ce type d'outillages ; qu'ainsi, et bien que la durée des contrats soit inférieure à la durée normale d'utilisation retenue pour l'amortissement de tels matériels, ces actes ne peuvent être tenus pour fictifs ;
Considérant, en second lieu, que, pour démontrer comment ces outillages avaient acquis, trois et quatre ans après la fin des contrats de crédit-bail, une valeur vénale très supérieure à leur valeur lors de la levée d'option telle qu'elle était fixée par les contrats, le requérant fait valoir, d'une part, qu'un entretien régulier de ces matériels leur a permis d'avoir une durée d'utilisation supérieure à la durée habituellement constatée et, d'autre part, que le marché de l'occasion a connu à l'époque, dans ce domaine, une forte progression due à la fois à l'accroissement de la demande et à une augmentation importante des prix des matériels neufs ; que ces explications sont plausibles et ne sont pas sérieusement contestées par l'administration ; qu'en tout état de cause, cette dernière ne saurait établir une disproportion marquée entre la valeur résiduelle susmentionnée des grues à la date de la levée d'option et leur valeur vénale à la même date en comparant ladite valeur résiduelle de ces matériels à leur valeur de revente trois et quatre ans plus tard ; qu'une telle disproportion n'est pas mieux établie par la circonstance que le requérant a retenu dans ses déclarations la valeur résiduelle de la grue PPM telle qu'elle avait été rehaussée par l'administration en 1979 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les contrats de crédit-bail litigieux ne pouvaient être inspirés par un motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer l'impôt sur le revenu normalement dû au titre des années en cause ; que M. Marc X... est dès lors fondé à demander la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti, au titre des années 1978, 1979 et 1982, pour les montants respectifs de 45 586 F, 17 211 F et 28 819 F et l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de BESANCON en date du 04 juin 1986 est annulé.
Article 2 : M. Marc X... est déchargé, en droits et pénalités, du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1978, 1979 et 1982 sous les articles 161, 162 et 163, pour les montants respectifs de 45 586 F, 17 211 F et 28 819 F.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre délégué, chargé du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00232
Date de la décision : 29/12/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - ABUS DE DROIT


Références :

CGI 1649 quinquies B
CGI Livre des procédures fiscales L64


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: BONNAUD
Rapporteur public ?: FRAYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-12-29;89nc00232 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award