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19/12/1989 | FRANCE | N°89NC00009

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 19 décembre 1989, 89NC00009


Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 juin 1986 sous le n° 79253, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le n° 89NC00009, présentée pour la Société AIR UK LIMITED dont le siège social est à Cayzer House, 2/4 St Mary axe, à LONDRES et tendant :
- à l'annulation du jugement en date du 10 avril 1986 par lequel le tribunal administratif de STRASBOURG a rejeté sa requête tendant à ce que la chambre régionale de commerce et d'industrie d'Alsace, la chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg, la chambre

de commerce et d'industrie de Mulhouse, la chambre de commerce et ...

Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 juin 1986 sous le n° 79253, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le n° 89NC00009, présentée pour la Société AIR UK LIMITED dont le siège social est à Cayzer House, 2/4 St Mary axe, à LONDRES et tendant :
- à l'annulation du jugement en date du 10 avril 1986 par lequel le tribunal administratif de STRASBOURG a rejeté sa requête tendant à ce que la chambre régionale de commerce et d'industrie d'Alsace, la chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg, la chambre de commerce et d'industrie de Mulhouse, la chambre de commerce et d'industrie de Colmar et la chambre de commerce et d'industrie de Belfort soient condamnées à réparer le préjudice qu'elle a subi à l'occasion du règlement judiciaire et de la liquidation de biens de la société Air Alsace ;
- à l'annulation des décisions de la chambre de commerce et d'industrie d'Alsace en date du 5 mai 1983, et des chambres de commerce et d'industrie de Strasbourg, de Belfort, de Mulhouse et de Colmar respectivement en date des 3 mai, 5 mai et 10 juin 1983, rejetant ses demandes d'indemnités ;
- à ce que les chambres de commerce susmentionnées soient condamnées conjointement et solidairement à lui payer la contrevaleur en francs français au jour du paiement effectif de 745 565,27 livres sterling et 41 516 couronnes norvégiennes en principal, de 11 563,17 livres sterling en intérêts contractuels au 15 août 1982, avec les intérêts de droit et les intérêts des intérêts ;
Vu le mémoire ampliatif enregistré le 9 octobre 1986, présenté pour la société AIR UK LIMITED et tendant à la condamnation conjointe et solidaire desdits établissements publics au versement de la somme de 8 millions de francs avec tous intérêts de droit et les intérêts des intérêts ;
Vu l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratifs d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 07 novembre 1989 :
- le rapport de M. LAPORTE, Conseiller ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la société "AIR UK LIMITED" a donné à bail à la société anonyme "Air Alsace", en 1980, pour la durée de trois années, deux appareils Fokker et un moteur "Rolls Royce" de rechange ; que la liquidation des biens de cette dernière société ayant été prononcée le 17 septembre 1982, la société requérante s'est trouvée créancière de loyers impayés pour la somme de 8 millions de francs ; qu'elle demande, dans le dernier état de ses conclusions, la condamnation solidaire de la chambre régionale de commerce et d'industrie d'Alsace et des chambres de commerce et d'industrie de Strasbourg, Mulhouse, Colmar et Belfort à lui verser cette somme sur le fondement, à la fois, de la responsabilité civile de ces établissements publics en qualité de "dirigeants de fait" de la société Air Alsace, par application des articles 1382 et 1383 du code civil, de leur responsabilité pour diverses fautes de service, de leur responsabilité sans faute et de leur responsabilité subsidiaire résultant de l'insolvabilité de la société Air Alsace ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les chambres de commerce et d'industrie de Strasbourg, Mulhouse, Colmar et Belfort étaient actionnaires minoritaires de la société anonyme Air Alsace dont, à partir de 1977, le président-directeur général était le secrétaire général de la chambre de commerce et d'industrie de Colmar ; que, pour soutenir l'activité de transports aériens de cette société qui connaissait de sérieuses difficultés d'exploitation depuis plusieurs années, la chambre de commerce et d'industrie de Colmar a cautionné un emprunt de 25 millions de francs contracté par ladite société en 1978, et la chambre régionale de commerce et d'industrie d'Alsace lui a loué en 1980 des avions et du matériel de rechange qu'elle avait acquis à cet effet en souscrivant un emprunt de 50 millions de francs ; que les difficultés d'exploitation de la société Air Alsace se sont aggravées au point de la contraindre à déposer son bilan et d'entraîner sa mise en règlement judiciaire, le 10 mars 1982, puis sa liquidation de biens qui a été prononcée le 17 septembre 1982 par jugement du tribunal de grande instance de Colmar ; qu'en décidant, dans ces conditions, de ne pas continuer de soutenir ladite activité, ces établissements publics ne sauraient être regardés comme ayant abusé de leur pouvoir, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'ils aient agi dans un autre but que celui du développement économique de l'ensemble des régions concernées, qui entre dans leur mission d'intérêt général ; qu'en outre la société AIR UK LIMITED n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'elle aurait reçu de leur part des assurances verbales sur le maintien de leur soutien à cette entreprise en difficulté pendant au moins la durée de ses contrats de location d'aéronefs ;

Considérant, en deuxième lieu, que, pour obtenir la réparation du préjudice constitué par la perte de loyers consécutive à la mise en règlement judiciaire et en liquidation de biens de la société Air Alsace, la société requérante ne peut utilement invoquer la responsabilité civile desdites chambres de commerce et d'industrie en se fondant sur les dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil, les principes établis dans ce code ne régissant que les rapports de particulier à particulier ; que, si elle soutient que ce préjudice est la conséquence directe d'agissements des chambres de commerce et d'industrie qui seraient intervenues dans la gestion de la société Air Alsace, se seraient comportées comme des "dirigeants de fait" lui donnant une apparence de solvabilité et auraient ensuite provoqué sa faillite en cessant de la soutenir financièrement, elle n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations ; qu'en réalité, le préjudice invoqué résulte de l'exécution des conventions passées par la société AIR UK LIMITED avec la société Air Alsace, dont les aléas sont inhérents au cadre habituel des relations commerciales ; que, dès lors, en l'absence de lien de causalité entre les activités de ces établissements et le préjudice allégué, la société requérante ne saurait se voir reconnaître un droit à indemnité sur le fondement de la responsabilité pour faute de service ou sur le fondement de la responsabilité sans faute et du principe de l'égalité devant les charges publiques ;
Considérant, enfin, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société Air Alsace ait exploité ses lignes de transports aériens en qualité de concessionnaire d'un service public ; qu'ainsi et en tout état de cause, la société requérante ne peut utilement soutenir que la responsabilité subsidiaire des chambres de commerce et d'industrie serait engagée à son égard par suite de l'insolvabilité de ladite société ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société AIR UK LIMITED n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement, en date du 10 avril 1986, par lequel le tribunal administratif de STRASBOURG a rejeté sa demande d'indemnité ;
Article 1 : La requête de la société AIR UK LIMITED est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société AIR UK LIMITED, à la chambre régionale de commerce et d'industrie d'Alsace et aux chambres de commerce et d'industrie de Belfort, de Colmar, de Mulhouse et de Strasbourg.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00009
Date de la décision : 19/12/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-04-01-03 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE DIRECT DU PREJUDICE


Références :

Code civil 1382, 1383


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: LAPORTE
Rapporteur public ?: FRAYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-12-19;89nc00009 ?
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