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05/12/1989 | FRANCE | N°89NC00222

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 05 décembre 1989, 89NC00222


VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 26 décembre 1986 et 13 mars 1987 sous le numéro 84 049 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00222 présentés pour M. François X..., demeurant ... à 67750 SCHERWILLER tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 18 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de STRASBOURG a partiellement rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des ann

ées 1977 et 1978 ;
- lui accorde la décharge demandée ;
VU l'ordon...

VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 26 décembre 1986 et 13 mars 1987 sous le numéro 84 049 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00222 présentés pour M. François X..., demeurant ... à 67750 SCHERWILLER tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 18 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de STRASBOURG a partiellement rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1977 et 1978 ;
- lui accorde la décharge demandée ;
VU l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 21 novembre 1989 :
- le rapport de Monsieur FONTAINE, Conseiller ;
- les observations de Monsieur François X... ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X..., gérant des "établissements X..." depuis le 11 janvier 1978, date de la transformation en société à responsabilité limitée de son entreprise individuelle de vente et de réparation de machines agricoles, a fait l'objet d'une taxation d'office à l'impôt sur le revenu, en application des articles 176 et 179 du C.G.I., au titre des années 1976, 1977 et 1978 ; qu'il demande l'annulation du jugement du 18 novembre 1986 du tribunal administratif de STRASBOURG en tant qu'il ne lui a donné que partiellement satisfaction ; que les bases d'imposition restant en litige s'élèvent à 51 000 F en 1977 et 72 685 F en 1978 ;
Sur la régularité de la vérification de situation fiscale d'ensemble :
Considérant que M. X... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité et d'une vérification de situation fiscale d'ensemble ; que la circonstance que le vérificateur ait emporté des documents comptables sans que l'intéressé en ait personnellement formulé la demande écrite et sans en délivrer reçu, si elle pouvait affecter la régularité de la vérification de comptabilité, n'est pas de nature à vicier la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble ; que, d'autre part, l'engagement d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ne crée pour l'administration aucune obligation de rechercher un débat oral et contradictoire avec le contribuable, régulièrement avisé de cette vérification ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à contester la régularité de la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes de l'article 176 du code général des impôts, applicable en l'espèce : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration vérifie les déclarations de revenu global prévues à l'article 170. Elle peut demander au contribuable des éclaircissements ... Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration. En particulier, si le contribuable allègue la possession de bons ou de titres ... l'administration peut exiger la preuve de la possession de bons ou titres et celle de la date à laquelle ils sont entrés dans le patrimoine de l'intéressé ..." ; qu'en vertu de l'article 179 du même code, est taxé d'office à l'impôt sur le revenu le contribuable qui s'est abstenu de répondre aux demandes de justifications de l'administration ;
Considérant qu'il est constant que les documents emportés par le vérificateur, parmi lesquels figuraient les relevés de comptes bancaires, avaient été restitués à M. X... lorsque l'administration lui a demandé des justifications sur le fondement de l'article 176 précité ; qu'ainsi, le contribuable n'a pas été empêché de faire valoir ses droits ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a établi, pour l'année 1977, une balance entre les dépenses et les recettes en espèces du contribuable et pour l'année 1978, une balance entre les disponibilités employées et les recettes dégagées faisant apparaître des soldes inexpliqués qui s'élevaient respectivement à 80 636 F et 148 333 F ; qu'eu égard aux éléments ainsi recueillis, qui lui permettaient de penser que M. X... disposait de revenus plus importants que ceux qu'il avait déclarés, et même si ce dernier a produit ultérieurement une étude effectuée à sa demande par un expert-comptable, l'administration était en droit de lui adresser, le 17 mars 1980, des demandes de justifications sur l'origine des fonds ayant permis ces emplois ; que dans ses réponses, qui n'étaient pas accompagnées de pièces justificatives, M. X... s'est borné à faire état de remboursements de titres et bons anonymes ; qu'à la suite de nouvelles demandes, qui lui ont été envoyées le 29 mai 1980 pour l'année 1977 et le 30 mai pour l'année 1978, il a répondu que les titres provenaient de la succession de son père, pour laquelle cependant aucune déclaration n'avait été souscrite à son décès en 1962 ; que les photocopies de remboursement de titres ou de bons qu'il a jointes à cette réponse ne comportaient ni la date, ni le mode de remboursement, ni le nom du bénéficiaire ; que compte-tenu du caractère imprécis et invérifiable de ces éléments, les réponses apportées ont été à bon droit regardées par l'administration comme équivalant à un défaut de réponse ; que, par suite, elle a pu régulièrement procéder par voie de taxation d'office, sur le fondement des dispositions de l'article 179 du C.G.I. ;
Considérant que le contribuable régulièrement taxé d'office ne peut obtenir, par la voie contentieuse, la décharge ou la réduction des impositions qu'il conteste qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases retenues ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, que l'état dressé par un expert-comptable à la demande du requérant ne fait que récapituler sous forme de tableaux des "pièces" de dépenses et de recettes, et par suite, ne permet aucune comparaison utile avec les balances d'espèces ou de trésorerie établies par le vérificateur ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'administration soutient sans être contredite que la somme de 42 486,10 F résultant, comme l'atteste une lettre de la Banque populaire en date du 28 avril 1981, du remboursement d'un bon de caisse souscrit en 1975 et des intérêts y afférents, a été retenue dans les disponibilités dégagées de la balance de trésorerie de 1978 ; que, dans ces conditions, ayant réduit à due concurrence le solde de la balance, cette somme n'a pu être soumise à l'impôt ;

Considérant, en troisième lieu, que des ressources d'origine inexpliquée ne peuvent être valablement justifiées par le remboursement de bons anonymes qu'à la condition que les attestations bancaires produites précisent l'identité du souscripteur et du bénéficiaire du remboursement qui doivent être la même personne, la date de souscription antérieure à l'année d'imposition et la date de remboursement au cours de ladite année ; que le document établi le 21 novembre 1980 par le Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine n'identifie pas le souscripteur et le bénéficiaire des opérations anonymes qu'il recense ; que, par contre, l'avis de crédit du 28 juin 1978 joint à sa réclamation par le contribuable, confirmant un avis de crédit manuscrit du même jour remis au vérificateur et dont les mentions sont corroborées par l'attestation délivrée le 30 octobre 1980 par la Banque populaire de la région économique de STRASBOURG, doit en l'espèce être regardé, eu égard aux précisions qu'il comporte, et même si l'administration n'a pu, comme elle le soutient, obtenir auprès de cet établissement bancaire confirmation de l'opération, comme permettant à M. X... d'établir qu'il a bénéficié en 1978 du remboursement, pour la somme de 22 361,11 F, du bon de caisse n° 4 505 de ladite banque qu'il avait souscrit le 12 mai 1976 en remploi d'un bon également souscrit par lui le 10 avril 1974, soit antérieurement à la période vérifiée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant est seulement fondé à obtenir une réduction de 22 361,11 F de la base imposable à l'impôt sur le revenu de l'année 1978 ; qu'il y a lieu de réformer en ce sens le jugement attaqué ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'en vertu de l'article 81-III de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986, modifié par l'article 93 de la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987, le contribuable peut faire valoir tout moyen nouveau, présenté depuis le 1er janvier 1987, tant devant le tribunal administratif qu'en appel, jusqu'à la clôture de l'instruction ; qu'il résulte de ces dispositions que M. X... est recevable à présenter le moyen tiré de ce que l'administration fiscale n'a pas établi l'absence de bonne foi, qu'il a soulevé dans sa requête en appel et repris dans son mémoire enregistré le 13 mars 1987 ;
Considérant que, dans les cirscontances de l'affaire, l'administration n'établit pas que la bonne foi du contribuable ne puisse être retenue ; qu'il convient, dès lors, de substituer à la majoration, prévue à l'article 1729 du C.G.I., qui a été appliquée à tort, l'intérêt de retard visé à l'article 1728 ; qu'il y a lieu de réformer en ce sens le jugement attaqué ;
Article 1 : La base supplémentaire d'imposition de M. François X... à l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti, au titre de l'année 1978, est réduite de 22 361,11 F.
Article 2 : M. X... est déchargé de la différence entre le montant des droits supplémentaires qui lui ont été assignés au titre de l'année 1978 et celui résultant de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Dans la limite des pénalités primitivement assignées à M. X..., le complément d'impôt sur le revenu auquel il reste assujetti, au titre des années 1977 et 1978, est assorti de l'intérêt de retard prévu à l'article 1728 du C.G.I..
Article 4 : M. X... est déchargé de la différence entre le montant des pénalités qui lui ont été assignées au titre des années 1977 et 1978 et celui résultant de l'article 3 ci-dessus.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de STRASBOURG, en date du 18 novembre 1986, est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision ;
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre délégué, chargé du Budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00222
Date de la décision : 05/12/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-01-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION APPROFONDIE DE SITUATION FISCALE D'ENSEMBLE


Références :

CGI 1728, 1729, 176, 179
Loi 86-1317 du 30 décembre 1986 art. 81 par. III Finances pour 1987
Loi 87-1060 du 30 décembre 1987 art. 93 Finances pour 1988


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: FONTAINE
Rapporteur public ?: FRAYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-12-05;89nc00222 ?
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