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21/11/1989 | FRANCE | N°89NC00037

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 21 novembre 1989, 89NC00037


Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 29 juillet 1987 sous le numéro 89932 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 02 janvier 1989 sous le numéro 89NC00037, présentée pour Mme Veuve X..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale de ses filles mineures Nathalie et Katia, M. Z... DE MURCIA, Messieurs Philippe et David X..., Melle Anne X... demeurant à FESCHES LE CHATEL (25490) 1 cité Voironnes, tendant à ce que la Cour :
1) annule le jugement en date du 18 février 1987 par lequel le tribunal admini

stratif de BESANCON a rejeté leur demande tendant à ce que la c...

Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 29 juillet 1987 sous le numéro 89932 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 02 janvier 1989 sous le numéro 89NC00037, présentée pour Mme Veuve X..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale de ses filles mineures Nathalie et Katia, M. Z... DE MURCIA, Messieurs Philippe et David X..., Melle Anne X... demeurant à FESCHES LE CHATEL (25490) 1 cité Voironnes, tendant à ce que la Cour :
1) annule le jugement en date du 18 février 1987 par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté leur demande tendant à ce que la commune de BETHONCOURT et sa compagnie d'assurances ABEILLE-PAIX soient condamnées à leur verser la somme totale de 952 359,36 F en réparation de leurs préjudices matériels et moraux consécutifs au décès de M. Claude X... ;
2) condamne la commune et sa compagnie d'assurances à leur verser la somme de 952 359,36 F majorée des intérêts au taux légal à compter du 07 mars 1986 et de la capitalisation des intérêts ;
Vu le nouveau mémoire en réplique, enregistré le 24 mai 1989, présenté pour les Consorts X..., tendant à la capitalisation des intérêts échus à cette date et, en outre, à la reprise de l'instance, en son nom personnel, par Melle Nathalie X... devenue majeure ;
Vu les écritures du greffe de la Cour, desquelles il résulte que la procédure a été communiquée, le 11 mai 1989, à la caisse primaire d'assurance maladie de MONTBELIARD, laquelle n'a présenté aucune demande de remboursement de prestations servies ;
Vu l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 3ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu l'ordonnance du 11 mai 1989 par laquelle le Président de la Cour administrative d'appel a rouvert l'instruction ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 07 novembre 1989 :
- le rapport de M. BONNAUD, Conseiller ;
- les observations de Me Y... de la SCP COUTARD- MAYER, avocat de la Commune de BETHONCOURT et de la C.A.A.P. ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, le 14 juillet 1980, M. X... qui participait à un concours de pêche organisé par la société de pêche de BETHONCOURT, au bord de l'étang aménagé par la commune de BETHONCOURT, est décédé par électrocution en heurtant avec sa canne à pêche les fils d'une ligne électrique à haute tension qui surplombait la berge de l'étang ; qu'à la suite de cet accident, Mme Veuve X... et ses enfants ont, par une demande au tribunal administratif de BESANCON rejetée par le jugement attaqué en date du 18 février 1987, recherché la responsabilité de la commune de BETHONCOURT et celle de son assureur, la compagnie ABEILLE-PAIX ;
Sur les conclusions dirigées contre l'assureur :
Considérant que la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître de la responsabilité d'une société d'assurances vis-à-vis de la victime d'un accident dont l'auteur aurait souscrit auprès d'elle un contrat d'assurances ; qu'il y a lieu de rejeter comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître les conclusions de la requête dirigées contre la compagnie ABEILLE-PAIX, assureur de la commune de BETHONCOURT ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de BETHONCOURT a fait procéder en 1976 à l'aménagement d'un étang à proximité des installations d'une ligne électrique de 63 000 volts surplombant l'une des berges à 7,50 m de hauteur et à 5 m en retrait du bord de l'étang ; que la commune l'ayant donné en location pour un franc symbolique à la société de pêche de BETHONCOURT, il lui incombait, en sa qualité de maître de l'ouvrage public constitué par l'étang aménagé, de signaler aux usagers de ce dernier le danger exceptionnel résultant de la présence de cette ligne à haute tension ; que l'absence de toute signalisation constitue un défaut d'entretien normal de l'ouvrage de nature à engager la responsabilité de la commune de BETHONCOURT ;
Considérant toutefois que M. X... a commis une imprudence en ne s'assurant pas, après avoir déplié sa canne à pêche, qu'il pouvait la déplacer sans risque sous la ligne à haute tension qui était parfaitement visible ; qu'il sera fait une exacte appréciation des circonstances de l'espèce en laissant à la charge des ayants-droits de la victime la moitié des conséquences dommageables de l'accident ; que ces derniers sont, dans cette mesure, fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de BESANCON a rejeté leur demande d'indemnité ;
Sur la réparation :
- En ce qui concerne le préjudice subi par Mme X... :

Considérant, en premier lieu, que les revenus que M. X... apportait à son ménage s'élevaient à une somme de 42 400 F par an ; que, compte tenu de l'âge de M. X... au moment de son décès et de la part de ses revenus destinée à Mme X... et évaluée à 35 %, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par la requérante, au titre de la perte de revenus, en l'évaluant à 270 000 F ; que Mme X... justifie de frais funéraires s'élevant à 16 492,54 F, de frais de transport restés à sa charge pour 616,83 F et de 1 199,99 F de frais matériels, soit au total 18 309,36 F ; que l'ensemble de ces chefs de préjudice s'élève à la somme de 288 309,36 F ; qu'ainsi, compte tenu du partage de responsabilité prononcé, le montant de l'indemnité due par la commune est de 144 154,68 F ;
Considérant, en second lieu, qu'il sera fait une juste appréciation de la douleur morale éprouvée par Mme X... par suite du décès de son mari en évaluant ce chef de préjudice à 60 000 F ; que compte tenu du partage de responsabilité la somme due à ce titre par la commune est de 30 000 F ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de BETHONCOURT doit être condamnée à verser à Mme X... la somme de 174 154,68 F en réparation du préjudice qu'elle a subi par suite du décès de son mari ;
- En ce qui concerne les préjudices subis par Mesdemoiselles Nathalie et Katia X... :
Considérant que, compte tenu de la part de ses revenus que M. X... consacrait à ses deux filles mineures, évaluée à 15 % pour chacune, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par celles-ci au titre de la perte de revenus en l'évaluant à 60 000 F pour Melle Nathalie X... née en 1969 et à 80 000 F pour Melle Katia X... née en 1972 ; que le préjudice moral subi par les intéressées par suite du décès de leur père doit être évalué à 40 000 F pour chacune ; qu'il résulte de ce qui précède que, eu égard au partage de responsabilité prononcé, l'indemnité due par la commune de BETHONCOURT à Melle Nathalie X..., devenue majeure en cours d'instance, s'élève à 50 000 F, celle due à Mme X... en qualité de tutrice légale de sa fille mineure Katia étant de 60 000 F ;
- En ce qui concerne les préjudices subis par les autres requérants :
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation de la douleur morale éprouvée par les enfants majeurs de la victime Melle Anne X..., MM. Philippe et David X... et par M. Z... DE MURCIA, élevé depuis son plus jeune âge par M. X..., en évaluant individuellement ce chef de préjudice à 20 000 F ; que, compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnité due à ce titre par la commune de BETHONCOURT doit être fixée à 10 000 F pour chacun d'entre eux ;
Sur les intérêts et leur capitalisation

Considérant que les requérants ont droit aux intérêts au taux légal, sur les sommes qui leur sont allouées à compter du 07 mars 1986 date d'enregistrement de la requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de BESANCON ; que la capitalisation des intérêts a été demandée les 29 juillet 1987 et 24 mai 1989 ; qu'à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de BESANCON en date du 18 février 1987 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la requête dirigées contre la compagnie d'assurances ABEILLE-PAIX sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 3 : La commune de BETHONCOURT est condamnée à payer à Mme X... la somme de 234 154,68 F dont 60 000 F en sa qualité de tutrice légale de sa fille mineure Katia, à Melle Nathalie X... la somme de 50 000 F, ainsi que les sommes de 10 000 F à Melle Anne X..., 10 000 F à M. Philippe X..., 10 000 F à M. David X... et 10 000 F à M. Z... DE MURCIA. Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 07 mars 1986. Les intérêts échus les 29 juillet 1987 et 24 mai 1989 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X..., à Melle Nathalie X..., à Melle Anne X..., à M. Philippe X..., à M. David X..., à M. Z... DE MURCIA, à la compagnie d'assurances ABEILLE-PAIX et à la commune de BETHONCOURT.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00037
Date de la décision : 21/11/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

67-03-03-02 TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES CAUSES PAR L'EXISTENCE OU LE FONCTIONNEMENT D'OUVRAGES PUBLICS - CONCEPTION ET AMENAGEMENT DE L'OUVRAGE


Références :

Code civil 1154


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: BONNAUD
Rapporteur public ?: FRAYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-11-21;89nc00037 ?
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