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26/09/1989 | FRANCE | N°89NC00156

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 26 septembre 1989, 89NC00156


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 15 juin et 15 octobre 1987 sous le numéro 88455 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00156, présentés pour l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de DIJON dont le siège est ..., représenté par son président en exercice, tendant à ce que la cour :
- annule le jugement en date du 14 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de DIJON a, d'une part, rejeté sa demande tendant à ce que M. Paul Y...,

architecte et la société Entreprise PERROUD, représentée par Maître...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 15 juin et 15 octobre 1987 sous le numéro 88455 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00156, présentés pour l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de DIJON dont le siège est ..., représenté par son président en exercice, tendant à ce que la cour :
- annule le jugement en date du 14 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de DIJON a, d'une part, rejeté sa demande tendant à ce que M. Paul Y..., architecte et la société Entreprise PERROUD, représentée par Maître CURE, syndic à sa liquidation de biens, soient déclarés responsables solidairement des désordres affectant l'immeuble situé ... (Côte d'Or) et à ce que la Caisse d'assurance mutuelle du bâtiment et M. Y... soient condamnés solidairement à lui verser la somme de 222 823,42 F avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts échus le 20 mars 1986, d'autre part a mis à sa charge les frais d'expertise ;
- condamne solidairement M. Y..., architecte, et la société Entreprise PERROUD, représentée par son syndic, à lui payer en réparation des désordres litigieux la somme de 222 823,42 F avec intérêts de droit à compter de la demande de première instance et capitalisation des intérêts échus le 20 mars 1986 et le 15 juin 1987 et à supporter les frais d'expertise ;
Vu l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 12 septembre 1989 :
- le rapport de Monsieur FONTAINE, conseiller,
- les observations de Maître X... de la S.C.P. MASSE-DESSEN, GEORGES, avocat de l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de DIJON ;
- et les conclusions de Madame FRAYSSE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'office public d'habitations à loyer modéré de la ville de DIJON a fait édifier en 1976-1977 un immeuble d'habitation de trente logements à CHEVIGNY-SAINT-SAUVEUR ; que l'exécution des travaux a été confiée, suivant marché passé de gré à gré le 31 octobre 1975, à l'entreprise PERROUD FRERES qui a été ultérieurement mise en état de liquidation de biens ; que M. Y..., architecte, a été chargé de la mission de maître d'oeuvre par contrat du 9 juillet 1976 ; que l'office public demande l'annulation du jugement en date du 14 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de DIJON a rejeté sa demande d'indemnité en réparation du préjudice subi à raison des désordres affectant l'étanchéité de la couverture de l'immeuble et la condamnation solidaire des constructeurs à lui verser la somme de 222 823,42 F sur le fondement de la garantie décennale prévue par les articles 1792 et 2270 du code civil et, subsidairement, sur le fondement de leur responsabilité contractuelle ;
Sur la recevabilité des conclusions tendant à la condamnation de l'entreprise PERROUD FRERES :
Considérant que les dispositions de la loi du 13 juillet 1967 relatives à la liquidation de biens, d'où résulte notamment l'obligation, qui s'impose aux collectivités publiques comme à tous autres créanciers, de produire leurs créances dans les conditions et délais fixés, ne comportent aucune dérogation aux dispositions régissant les compétences respectives des juridictions administratives et judiciaires ; qu'il appartient au juge administratif, saisi par une collectivité publique d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat administratif, de prononcer, lorsque la demande est recevable et fondée, la condamnation de l'entreprise cocontractante au versement d'une indemnité, même si cette dernière se trouve en état de liquidation de biens ;
Considérant qu'il résulte de l'examen du dossier de première instance que l'office public d'habitations à loyer modéré de DIJON, se méprenant sur l'étendue des pouvoirs du juge du contrat, a limité ses conclusions dirigées contre l'entreprise PERROUD FRERES à une demande de déclaration de responsabilité, solidairement avec l'architecte ; qu'il n'a pas conclu à ce qu'une condamnation pécuniaire soit prononcée à l'encontre de l'entreprise ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande comme étant irrecevable ; que si, dans ses conclusions présentées en appel, l'office public demande la condamnation de l'entreprise PERROUD FRERES au versement de l'indemnité susmentionnée, de telles conclusions constituent une demande nouvelle qui n'est pas recevable ;
Sur la responsabilité :

Considérant que la réception provisoire des travaux de couverture de l'immeuble en cause est intervenue le 13 juillet 1977 sans réserves ; que l'office public a pris possession des locaux et, sans émettre aucune réserve sur les travaux, a soldé le compte de l'entreprise PERROUD conformément au décompte général et définitif arrêté par l'architecte le 12 décembre 1977 ; qu'aucun défaut d'étanchéité n'ayant alors été constaté, la commune intention des parties était, dans les circonstances de l'affaire, de procéder ainsi à la réception définitive des travaux, qui doit donc être regardée comme acquise à la date du 12 décembre 1977 ; que, par suite, l'office public est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé qu'il ne pouvait rechercher la responsabilité décennale de l'architecte ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert commis en référé le 30 octobre 1984 par le président du tribunal administratif, que d'importantes infiltrations d'eau résultant du défaut d'étanchéité de la toiture de l'immeuble sont apparues en 1983, endommageant les locaux d'habitation ; que ces désordres ont, en raison de leur importance, rendu l'immeuble impropre à sa destination ; que le procédé utilisé pour assurer l'étanchéité de la couverture s'est révélé être la cause des désordres ; que sa mise en oeuvre est, par suite, bien qu'elle ait été conforme aux normes techniques admises à l'époque, de nature à donner lieu à la garantie qu'impliquent les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil et à engager, vis-a-vis du maître de l'ouvrage, la responsabilité de l'architecte ;
Sur la réparation :
Considérant que le préjudice subi par l'office public d'H.L.M. de DIJON correspond au coût des travaux de couverture et de réfection des locaux préconisés par l'expert ; que ce dernier, contrairement à ce que prétend M. Y..., a bien évalué à 93 764,61 F, somme incluant 7 187,23 F hors taxes "d'imprévus et divers", le montant des "travaux intérieurs" ; qu'au total, l'office public justifie d'un préjudice s'élevant à la somme de 222 823,42 F ; qu'il y a lieu, toutefois, d'appliquer à ce montant un abattement de 30 % pour tenir compte de la vétusté de l'ouvrage ; qu'ainsi la somme due par M. Y... est réduite à 155 976,40 F ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, les frais de l'expertise ordonnée en première instance seront mis à la charge de M. Y... ;
Considérant que de tout ce qui précède il résulte que l'office public d'H.L.M. de DIJON est fondé à demander l'annulation des articles 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de DIJON en date du 14 avril 1987 et la condamnation de M. Y... à lui verser une indemnité d'un montant de 155 976,40 F ; que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 1984, date d'enregistrement de sa requête introductive d'instance ; que les intérêts échus respectivement les 20 mars 1986 et 15 juin 1987, dates auxquelles il était dû au moins une année d'intérêts, seront capitalisés à ces dates pour porter eux-mêmes intérêt ;
Article 1 : Les articles 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de DIJON en date du 14 avril 1987 sont annulés.
Article 2 : M. Paul Y... est condamné à verser à l'office public d'H.L.M. de la ville de DIJON la somme de 155 976,4O F avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 1984. Les intérets échus les 20 mars 1986 et 15 juin 1987 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l'office public d'H.L.M. de la ville de DIJON est rejeté.
Article 4 : Les frais de l'expertise ordonnée en première instance sont mis à la charge de M. Y....
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'office public d'H.L.M. de la ville de DIJON, à M. Y..., à la Caisse d'assurance mutuelle du bâtiment et à l'entreprise PERROUD FRERES représentée par Maître CURE, syndic de la liquidation de biens.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00156
Date de la décision : 26/09/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - QUESTIONS GENERALES - RECEPTION DES TRAVAUX - RECEPTION DEFINITIVE.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - CONCLUSIONS RECEVABLES EN APPEL - CONCLUSIONS NOUVELLES.


Références :

Code civil 1792, 2270
Loi 67-563 du 13 juillet 1967


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: FONTAINE
Rapporteur public ?: FRAYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-09-26;89nc00156 ?
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