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06/07/1989 | FRANCE | N°89NC00195

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 06 juillet 1989, 89NC00195


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 22 décembre 1986 et le 21 avril 1987 sous le N° 83933 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le N° 89NC00195, présentés pour MM. Olivier Y..., Rémi Y..., Mme Andrée Y... et Mlle Véronique Y... demeurant ..., tendant à ce que la Cour :
1) annule le jugement en date du 29 octobre 1986 par lequel le Tribunal administratif de BESANCON a rejeté leur requête tendant à la condamnation du centre hospitalier de MONTBELIARD à leur verser divers

es indemnités en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait du...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 22 décembre 1986 et le 21 avril 1987 sous le N° 83933 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le N° 89NC00195, présentés pour MM. Olivier Y..., Rémi Y..., Mme Andrée Y... et Mlle Véronique Y... demeurant ..., tendant à ce que la Cour :
1) annule le jugement en date du 29 octobre 1986 par lequel le Tribunal administratif de BESANCON a rejeté leur requête tendant à la condamnation du centre hospitalier de MONTBELIARD à leur verser diverses indemnités en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait du décès de Monsieur Antoine Y... survenu dans les locaux de l'hôpital ;
2) leur accorde les indemnités qu'ils ont sollicitées avec intérêts de droit capitalisés ;
VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 27 juin 1989 :
- le rapport de Monsieur JACQ, Conseiller ;
- les observations de Maître X... de la SCP X..., M. Z..., avocat duCentre Hospitalier de MONTBELIARD ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant que M. Y... a été hospitalisé le 6 juin 1983 dans le service de réanimation du centre hospitalier de MONTBELIARD à la suite d'une tentative de suicide par absorption de somnifères ; qu'après avoir été transféré dans la soirée du 7 juin dans le service de médecine pour traiter et équilibrer son diabète, il est décédé le 8 juin 1983 en se jetant dans le vide par la fenêtre de la chambre où il avait été placé ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la tentative de suicide récente de M. Y... était connue du personnel médical et soignant du service de médecine où il se trouvait le jour de l'accident ; que, dès le début de la journée, le chef de service, conscient de l'état nerveux très fragile du patient, avait ordonné de le transférer dans le service psychiatrique ; que, dans ces circonstances, et bien que M. Y... soit apparu calme lors du passage d'une infirmière quelques minutes avant l'accident, le fait qu'il ait été laissé sans surveillance spéciale dans une chambre située à 15 mètres du sol et dont la fenêtre était dépourvue de dispositif de sécurité a constitué une faute dans l'organisation du service de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de BESANCON a rejeté leur demande d'indemnité ;
Sur l'évaluation du préjudice :
Considérant que les requérants ont demandé, en réparation de la diminution sensible de leurs moyens d'existence consécutive au décès de leur époux et père, le versement des sommes de 342 115,20 F pour Mme Y..., 28 385 F pour Olivier, 18 023 F pour Véronique et 6 343 F pour Rémi Y... ; que ces chiffres, qui ne sont pas contestés, n'apparaissent pas exagérés en égard au montant du salaire annuel perçu par M. Y... en 1983, de son âge et de la part de ses rémunérations qui pouvait être regardée comme affectée à l'entretien de ses ayants-cause ; que ces derniers ont subi un préjudice moral en réparation duquel il est demandé 50 000 F pour Mme Y... et 30 000 F pour chacun des trois enfants, sommes qui ne sont pas contestées et doivent être admises ; qu'il y a lieu d'ajouter une somme de 700 F demandée au titre des frais d'obsèques ;
Sur les droits de Mme Y... :
Considérant que même en l'absence de conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de MONTBELIARD devant la cour administrative d'appel tendant au remboursement de la somme de 9 682,20 F qu'elle a versée à Mme Y... au titre du capital décès, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L.397 du code de la sécurité sociale, de défalquer cette somme de la part de la condamnation duCentre hospitalier réparant la perte de revenus de l'intéressée ; qu'ainsi l'indemnité à laquelle a droit Mme Y..., qui comprend 332 433 F au titre de la perte de revenus, 700 F de frais d'obsèques et 50 000 F en réparation du préjudice moral, s'élève à la somme globale de 383 133 F ;
Sur les intérêts et leur capitalisation :

Considérant que Mme Y..., Olivier, Véronique et Rémi Y... ont droit aux intérêts au taux légal des sommes respectives de 383 133 F, 58 385 F, 48 023 F et 36 343 F à compter du 5 novembre 1984, date d'enregistrement de leur requête introductive d'instance ;
Considérant que la capitalisation des intérêts échus a été demandée le 22 décembre 1986 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de BESANCON en date du 29 octobre 1986 est annulé.
Article 2 : Le centre hospitalier de MONTBELIARD est condamné à verser :
- à Mme Andrée Y... la somme de 383 133 F ;
- à M. Olivier Y... la somme de 58 385 F ;
- à Mle Véronique Y... la somme de 48 023 F ;
- à M. Rémi Y... la somme de 36 343 F ;
Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 1984. Les intérêts échus le 22 décembre 1986 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Andrée Y..., à M. Olivier Y..., à Mlle Véronique Y..., à M. Rémi Y..., au centre hospitalier de MONTBELIARD et à la caisse primaire d'assurance maladie de MONTBELIARD.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00195
Date de la décision : 06/07/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-02-01-01-01-01-06 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DU SERVICE HOSPITALIER - EXISTENCE D'UNE FAUTE - DEFAUTS DE SURVEILLANCE


Références :

. Code civil 1154
Code de la sécurité sociale L397


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: JACQ
Rapporteur public ?: FRAYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-07-06;89nc00195 ?
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