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13/06/1989 | FRANCE | N°89NC00038

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 13 juin 1989, 89NC00038


VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 19 janvier et 19 mai 1987 sous le numéro 84 462 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00038 présentés pour M. Denis Y..., domicilié à DELUZ (Doubs) tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 19 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de BESANCON l'a condamné à verser à la commune de DELUZ la somme de 766 726 F en réparation des conséquences dommageables de l'incendie de bâtiments à usage ind

ustriel ;
- rejette la requête présentée par la commune de DELUZ ;
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VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 19 janvier et 19 mai 1987 sous le numéro 84 462 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00038 présentés pour M. Denis Y..., domicilié à DELUZ (Doubs) tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 19 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de BESANCON l'a condamné à verser à la commune de DELUZ la somme de 766 726 F en réparation des conséquences dommageables de l'incendie de bâtiments à usage industriel ;
- rejette la requête présentée par la commune de DELUZ ;
- lui accorde une indemnité de 500 000 F en réparation du préjudice causé par la commune ;
VU l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 1ère sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des communes ;
VU le code civil ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret 88-707 du 9 mai 1988 et le décret 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 30 mai 1989 :
- le rapport de Monsieur FONTAINE, conseiller ;
- les observations de Maître DE X... de la SCP GUIGUET, BACHELIER, DE LA VARDE, avocat de la Commune de DELUZ ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la compétence :
Considérant qu'en vue de favoriser la création d'emplois, la commune de DELUZ, a passé, le 2 juillet 1980, avec M. Denis Y..., gérant de la société ROSEMONT-MODELAGES, un contrat ayant pour objet la vente, pour le prix symbolique de 1 franc, d'un ensemble immobilier de quatre bâtiments à usage industriel en vue de faciliter une implantation nouvelle sur son territoire ; que le contrat comporte l'engagement d'employer sur place pendant un an au minimum, huit personnes en deux ans, dix personnes en trois ans de la commune de DELUZ ou des communes avoisinantes, en donnant priorité, à classification égale, aux anciens ouvriers des papeteries de la commune de DELUZ ; que ce contrat prévoit, en outre, la résolution de plein droit de la vente en cas de cessation d'activité survenue dans les six ans pour une raison quelconque ; que ces clauses sont exorbitantes du droit commun et confèrent au contrat le caractère d'un contrat administratif ; que, dès lors, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 19 novembre 1986, le tribunal administratif de Besancon s'est estimé compétent pour connaître des difficultés nées de l'exécution de ce contrat ;
Sur l'indeminité due à la commune de DELUZ :
Considérant que si la promesse de vente desdits immeubles à usage industriel, en date du 18 septembre 1979, a été signée par M. Z... en sa qualité de gérant de la société à responsabilité limitée ROSEMONT-MODELAGES et au nom de celle-ci, l'acte de vente notarié a été passé, le 2 juillet 1980, par M. Y... en son nom personnel ; que, dès lors, la commune de DELUZ était recevable à demander au tribunal administratif de BESANCON la condamnation de M. Y... au versement d'une indemnité en se fondant sur la clause résolutoire de ce contrat de vente ;
Considérant qu'aux termes de cette clause résolutoire "En cas de mise en règlement judiciaire ou de liquidation de biens, ou en cas d'inexécution de l'une des obligations mises par les présentes à la charge de l'acquéreur et un mois après une simple mise en demeure restée sans effet contenant déclaration par la commune de DELUZ de son intention de se prévaloir de cette clause, la présente vente sera résiliée de plein droit par la commune, sans qu'il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire... L'acquéreur devra donc restituer immédiatement les lieux et dans ce cas, tous aménagements, travaux, embellissements, etc... resteront acquis à la commune de DELUZ, sans indemnité..." ; qu'il résulte de cette clause et de l'ensemble des stipulations du contrat qu'il était dans la commune intention des parties d'installer la société ROSEMONT-MODELAGES dans les locaux faisant l'objet de la vente et de l'y voir développer son activité industrielle ; qu'ainsi, la mise en règlement judiciaire visée dans la clause résolutoire du contrat doit s'entendre comme étant celle de la société et non celle de M. Y..., acquéreur qui, lors de la vente, n'exerçait pas d'autre activité que celle de gérant de la société ;

Considérant qu'il est constant que la société ROSEMONT-MODELAGES a été mise en règlement judiciaire le 6 octobre 1980 ; que, dès lors, la commune de DELUZ était en droit de se prévaloir devant le juge du contrat, sur le fondement de la clause résolutoire susmentionnée, de la résiliation "de plein droit" de cette vente ; que si, en raison de la poursuite de l'activité de la société, la commune n'a pas décidé de faire jouer, dans l'immédiat, cette clause résolutoire, elle ne se trouvait pas, de ce seul fait, privée de l'exercice de ses droits ; que, par suite, M. Y... ne peut utilement soutenir, ni qu'il aurait respecté la clause relative à l'embauche d'un nombre minimum de personnes ou qu'il aurait été empêché de le faire par suite d'agissements de la commune à son égard et de la destruction partielle des locaux cédés par deux incendies survenus les 8 juillet et 18 août 1981, ni qu'il a lui-même continué d'exercer l'activité industrielle de la société dans le cadre d'une entreprise personnelle, ni que l'action de la commune n'aurait eu d'autre motif, ce qui n'est d'ailleurs pas établi, que de tenter de s'approprier l'indemnité qu'il a perçue en remboursement du préjudice causé par les sinistres ; que si la lettre que l'avocat de la commune lui a adressée, le 18 novembre 1981, ne pouvait, à défaut de mandat exprès et régulier, tenir lieu de la mise en demeure prévue par la clause résolutoire, cette circonstance est seulement susceptible d'ouvrir droit à l'intéressé, le cas échéant, à une indemnité en réparation du préjudice que lui aurait causé l'irrégularité constituée par l'absence de mise en demeure valablement établie ;
Considérant que, sauf stipulation contraire, la résolution d'un contrat de vente d'immeuble a pour effet de remettre les choses au même état que celui où elles étaient lors de la passation du contrat ; qu'il suit de là que la commune de DELUZ est en droit d'obtenir une indemnité représentative de la valeur des biens détruits par les incendies survenus en 1981 ; que si M. Y... soutient qu'il a restauré les immeubles endommagés, il n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations ; que dans la mesure où il a entendu se prévaloir des travaux et aménagements effectués avant les sinistres, les stipulations précitées du contrat font obstacle à tout versement d'indemnité à ce titre ; que, dans ces conditions, le tribunal administratif a fait une exacte évaluation de l'indemnité due à la commune par M. Y... en la fixant à la somme de 766 726 F correspondant au préjudice résultant de l'incendie des bâtiments litigieux, tel qu'il a été évalué par l'assureur du requérant ;
Considérant qu'en vertu de l'article 1153 du code civil les intérêts au taux légal sur cette somme courent à compter de la sommation de payer ; que, dès lors, ils sont dûs à compter du 9 juillet 1982, date à laquelle la commune de DELUZ a demandé au tribunal de grande instance de BESANCON, qui s'est déclaré incompétent, le paiement d'une indemnité d'un égal montant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamné à verser à la commune de DELUZ la somme de 766 726 F assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 juillet 1982 ;
Sur la demande d'indemnité de M. Y... :

Considérant, d'une part, que si la résolution du contrat par la commune de DELUZ sans avoir, au préalable, adressé au cocontractant une mise en demeure régulière, est de nature à engager sa responsabilité, il résulte de l'instruction que la commune n'a cependant pas fait valoir ses droits immédiatement et que, par des négociations qui ont duré plusieurs mois, elle a tenté en vain d'aboutir à un accord ; que, dans ces conditions M. Y... ne peut être regardé comme justifiant d'un préjudice particulier résultant de l'absence de mise en demeure régulière ;
Considérant, d'autre part, que la commune, en demandant en justice l'exécution d'une mesure conservatoire relative au paiement de l'indemnité d'assurance due à M.
Y...
en vue de sauvegarder ses droits à récupération de ses biens en leur état originel, n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, commis une faute de nature à engager sa responsabilité vis-à-vis du requérant ; qu'enfin, M. Y... ne conteste pas que la commune a mis à sa disposition, après les deux incendies, d'autres locaux afin de permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise ; qu'il n'apparaît pas, dans ces conditions, que la commune l'aurait empêché, par "ses agissements", d'exécuter son contrat ; qu'en tout état de cause, il n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune, que c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de BESANCON a rejeté les conclusions reconventionnelles de M. Y... tendant à l'allocation d'une indemnité de 500 000 F ;
ARTICLE 1 : La requête de M. Denis Y... est rejetée.
ARTICLE 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et à la commune de DELUZ.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00038
Date de la décision : 13/06/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-04-02-03 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FIN DES CONTRATS - RESILIATION - DROIT A INDEMNITE


Références :

Code civil 1153


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: FONTAINE
Rapporteur public ?: FRAYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-06-13;89nc00038 ?
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