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27/01/2022 | FRANCE | N°20MA04060

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 27 janvier 2022, 20MA04060


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 11 août 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2003419 du 6 octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistr

ée le 2 novembre 2020, M. A..., représenté par Me Febbraro, demande à la Cour :

1°) de l'admettre a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 11 août 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2003419 du 6 octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 novembre 2020, M. A..., représenté par Me Febbraro, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice du 6 octobre 2020 ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 11 août 2020 ;

4°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile dans un délai de cinq jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) à titre subsidiaire, de suspendre la décision d'éloignement tant que la Cour nationale du droit d'asile n'a pas statué sur son recours contre la décision de refus de demande d'asile prise par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et le condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'un vice de procédure en ce qu'il n'a pas été informé de ses droits dans une langue qu'il comprend, en méconnaissance des articles L. 111-7 et L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en outre, il a été privé de son droit à solliciter un titre de séjour en France sur un autre fondement que l'asile dans les conditions prévues par les articles L. 311-6 et R. 311-37 à 39 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en raison d'un doute sérieux sur la légalité de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, la mesure d'éloignement doit être suspendue dans l'attente de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité bosnienne, relève appel du jugement 6 octobre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 11 août 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".

Sur l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

3. Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle : " L'aide juridictionnelle peut être demandée avant ou pendant l'instance ". Aux termes de l'article 20 de cette loi : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) ".

4. M. A..., déjà représenté par un avocat, ne justifie pas du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle compétent et n'a pas joint à son appel une telle demande. Aucune situation d'urgence ne justifie qu'il soit fait application, en appel, des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991. Sa demande d'aide juridictionnelle provisoire ne peut, dans ces conditions, qu'être rejetée.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 111-7 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'un étranger fait l'objet d'une mesure de non-admission en France, de maintien en zone d'attente, de placement en rétention, de retenue pour vérification du droit de circulation ou de séjour ou de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire. Ces informations sont mentionnées sur la décision de non-admission, de maintien, de placement ou de transfert ou dans le procès-verbal prévu au quatorzième alinéa du I de l'article L. 611-1-1. Ces mentions font foi sauf preuve contraire. La langue que l'étranger a déclaré comprendre est utilisée jusqu'à la fin de la procédure. Si l'étranger refuse d'indiquer une langue qu'il comprend, la langue utilisée est le français. ".

6. M. A..., qui n'a pas fait l'objet d'une mesure de non-admission en France, de maintien en zone d'attente, de placement en rétention, de retenue pour vérification du droit de circulation ou de séjour ou de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, ne peut se prévaloir utilement des dispositions précitées qui ne s'appliquent pas au cas d'espèce.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes mentionnées à l'article L. 111-9 ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger ".

8. M. A... invoque une méconnaissance de ces dispositions. Toutefois, en se bornant à soutenir que " l'intégralité de la procédure et des notifications afférentes a été conduite en langue française ", sans préciser celle des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant qu'une décision ou qu'une information lui soit communiquée dans une langue qu'il comprend, qui aurait été méconnue, il n'apporte pas les précisions permettant d'apprécier le bien-fondé d'un tel moyen.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'un étranger a présenté une demande d'asile qui relève de la compétence de la France, l'autorité administrative, après l'avoir informé des motifs pour lesquels une autorisation de séjour peut être délivrée et des conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements à ce stade, l'invite à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et, dans l'affirmative, l'invite à déposer sa demande dans un délai fixé par décret. Il est informé que, sous réserve de circonstances nouvelles, notamment pour des raisons de santé, et sans préjudice de l'article L. 511-4, il ne pourra, à l'expiration de ce délai, solliciter son admission au séjour ". Selon les termes de l'article R. 311-37 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Lors de l'enregistrement de sa demande d'asile, l'administration remet à l'étranger, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, une information écrite relative aux conditions d'admission au séjour en France à un autre titre que l'asile et aux conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements que ceux qu'il aura invoqués dans le délai prévu à l'article D. 311-3-2 ". Enfin, l'article D. 311-3-2 dispose que : " Pour l'application de l'article L. 311-6, les demandes de titres de séjour sont déposées par le demandeur d'asile dans un délai de deux mois. Toutefois, lorsqu'est sollicitée la délivrance du titre de séjour mentionné au 11° de l'article L. 313-11, ce délai est porté à trois mois. ".

10. Il ressort des pièces du dossier que la notice d'information relative aux possibilités de demander un titre de séjour dès le début de l'examen par la France d'une demande d'asile a été délivrée à M. A... le 5 novembre 2019, sans que l'intéressé ne fasse état d'une difficulté de compréhension du document. En tout état de cause, l'information prévue par l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 44 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018, a pour seul objet, ainsi qu'en témoignent les travaux préparatoires de la loi, de limiter à compter de l'information ainsi délivrée le délai dans lequel il est loisible au demandeur d'asile de déposer une demande de titre de séjour sur un autre fondement, ce délai étant ainsi susceptible d'expirer avant même qu'il n'ait été statué sur sa demande d'asile. Ainsi, le requérant, qui n'a pas déposé de demande de titre de séjour auprès des services de la préfecture avant qu'aux termes de l'arrêté attaqué le préfet ne tire les conséquences sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile du rejet de sa demande d'asile, ne peut donc utilement se prévaloir, contre l'obligation de quitter le territoire français, de son défaut d'information dans les conditions prévues par l'article L. 311-6 du même code.

11. En quatrième lieu, si M. A... fait valoir qu'il dispose de l'ensemble de ses intérêts personnels et familiaux en France, et que la décision porte ainsi une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, ce moyen n'est pas plus assorti en appel qu'en première instance de précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.

12. En dernier lieu, si M. A... soutient que la mesure d'éloignement l'expose à des traitements inhumains ou dégradants dès lors qu'un éloignement à destination du pays dont il a la nationalité porterait atteinte à sa santé mentale en raison des traumatismes auxquels il y a été exposé, il ne produit aucune pièce pour établir cette allégation, alors au demeurant qu'il n'a pas demandé de titre de séjour en raison de son état de santé. Par suite, le moyen tiré de que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que les conclusions principales la requête d'appel de M. A..., qui sont manifestement dépourvues de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées, en application de ces dispositions, y compris les conclusions aux fins d'injonction.

Sur les conclusions subsidiaires aux fins de suspension de l'arrêté contesté :

14. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour ".

15. La Cour nationale du droit d'asile a, par ordonnance du 27 novembre 2020, soit postérieurement à l'enregistrement de présente requête, rejeté le recours formé par M. A... à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 mars 2020. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions du requérant tendant, en application de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suspension de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire dont il fait l'objet.

Sur les frais liés au litige :

14. Il résulte de tout ce qui précède que l'Etat n'étant pas partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. A... tendant à l'application de de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens, ne peuvent qu'être rejetées.

O R D O N N E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la suspension de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et à Me Febbraro.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

N° 20MA04060 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 20MA04060
Date de la décision : 27/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : FEBBRARO

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-01-27;20ma04060 ?
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