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20/01/2022 | FRANCE | N°21MA04343

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 20 janvier 2022, 21MA04343


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 1er décembre 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de sa destination.

Par un jugement n° 2100346 du 30 avril 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 novembre 2021, Mme A... épou

se C..., représentée par Me Ezzaïtab, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 avril 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 1er décembre 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de sa destination.

Par un jugement n° 2100346 du 30 avril 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 novembre 2021, Mme A... épouse C..., représentée par Me Ezzaïtab, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 avril 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 1er décembre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle et, en cas de non-admission à l'aide juridictionnelle, mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration ne l'a pas mise en mesure de s'exprimer avant de prononcer à son encontre une mesure d'éloignement, en méconnaissance de son droit d'être entendue garanti par les stipulations des articles 41 et 51 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé et méconnaît les dispositions de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux risques qu'elle porte pour son intégrité ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Mme A... épouse C... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 septembre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... épouse C..., de nationalité albanaise, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet du Gard du 1er décembre 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de sa destination.

2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) "

3. En premier lieu, si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre. (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant.

4. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

5. En l'espèce, le préfet s'est prononcé sur une demande de titre séjour présentée par la requérante elle-même, qui a ainsi pu exposer directement les éléments de sa situation qu'elle estimait utiles. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'a été prise qu'en conséquence, et sur le fondement du refus de séjour que le préfet a décidé au vu notamment des éléments exposés par la requérante, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait pas été en mesure, si elle l'avait souhaité, de faire valoir tout élément complémentaire. Le droit de la requérante d'être entendue n'a dès lors pas été méconnu.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

7. La décision, qui vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et énonce les éléments relatifs à a situation personnelle, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Dès lors, le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée doit être écarté.

8. En troisième lieu, termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article ".

9. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est entrée irrégulièrement sur le territoire en 2013, accompagnée de son époux et leurs deux enfants, qu'elle a quitté le territoire en 2014 à la suite d'un rejet de sa demande d'asile, et qu'elle y est revenue en 2015. Mme A... se prévaut de la présence en France de sa famille, notamment de ses enfants, qui suivent leur scolarité dans des établissements français. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que son époux, en situation irrégulière, dispose de la même nationalité et a fait l'objet d'une mesure d'éloignement. Dans ces conditions, rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale puisse être reconstituée en Albanie, ni que leurs enfants, nés en 2004, 2009 et 2013, ne puissent y poursuivre leur scolarité. Par ailleurs, Mme A... verse au débat de nombreuses pièces faisant état de ses activités bénévoles au sein de plusieurs associations, et des témoignages de connaissances rapportant ses efforts d'insertion. Elle produit également des promesses d'embauche en qualité de " dame de compagnie ", " femme de ménage ", " dame d'entretien ", qui ne permettent cependant pas d'apprécier l'étendue des perspectives d'emploi dont elle se prévaut. En outre, si elle produit une promesse d'embauche en qualité d'aide-soignante, et un contrat à durée déterminée à temps partiel en qualité de femme de ménage, datés de juillet et août 2021, ces éléments, sont postérieurs à l'arrêté attaqué. Enfin, si Mme A... se prévaut des risques encourus dans son pays d'origine par elle-même et son mari, en tout état de cause, ses allégations ne sont pas appuyées d'éléments permettant de tenir pour établies la réalité et l'actualité des risques encourus, alors, au demeurant que ses demandes d'asile ont été rejetées par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile. Dès lors, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, Mme A... épouse C..., qui ne justifie pas de circonstances humanitaires exceptionnelles, n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de régulariser sa situation, le préfet du Gard aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation y compris au regard des risques encourus dans son pays d'origine. Pour les motifs qui viennent d'être énoncés, il n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prescrivant que nul ne peut être soumis à des traitements inhumains ou dégradants.

10. Enfin, s'agissant du moyen tiré de la méconnaissance l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, qui avait été précédemment invoqué devant les juges de première instance, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif, aux points 8 et 9 de son jugement.

11. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de Mme A... épouse C..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de Mme A... épouse C... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A... épouse C... et à Me Ezzaïtab.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Fait à Marseille, le 20 janvier 2022

2

N° 21MA04343


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 21MA04343
Date de la décision : 20/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : EZZAÏTAB

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-01-20;21ma04343 ?
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