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22/11/2021 | FRANCE | N°21MA04168

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 22 novembre 2021, 21MA04168


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a retiré sa carte de résident, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2103149 du 20 septembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 30 avril 2021 en tant qu'il fait obligation à Mme D... de quitter le territoire français dans un délai

d'un mois et fixe le pays à destination duquel elle sera renvoyée, a enjoint au préfet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a retiré sa carte de résident, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2103149 du 20 septembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 30 avril 2021 en tant qu'il fait obligation à Mme D... de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixe le pays à destination duquel elle sera renvoyée, a enjoint au préfet de l'Hérault de procéder au réexamen de la situation de Mme D... dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et dans cette attente de la munir d'une autorisation provisoire de séjour et a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2021, Mme D..., représentée par Me Balestie, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement du 20 septembre 2021 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 30 avril 2021 portant retrait du titre de séjour ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de l'Hérault de lui délivrer une carte de résident, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de lui délivrer un titre de séjour mention " salarié " ou " vie privée et familiale " ou au titre de l'admission exceptionnelle au séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et en tout état de cause de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de 24 heures à compter de la notification de la décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont entaché leur jugement d' erreurs en ce qui concerne l'appréciation de la preuve de la fraude à la charge du préfet, les conséquences du retrait et le droit à disposer d'une carte de résident ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en refusant de répondre au moyen de la prescription liée à la fraude ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

- les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ont également été méconnues ;

- elle remplit les conditions pour se voir attribuer une carte de résident sur le fondement des dispositions des articles L. 314-8 et L.313-11- 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Congo relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Brazzaville le 31 juillet 1993 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., née en 1982 et de nationalité congolaise, relève appel du jugement en date du 20 septembre 2021 en tant que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 30 avril 2021 prononçant le retrait de sa carte de résident.

2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les premiers vice-présidents (...) des cours, (...) peuvent, par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En première instance, la requérante a soulevé le moyen de l'erreur de droit tiré de la prescription liée à la fraude. Contrairement à ce qui est affirmé, le tribunal a répondu à ce moyen aux points 3 et 6 de son jugement et n'était pas tenu de répondre à l'argument invoqué au soutien de ce moyen et tiré de ce que la décision portant retrait de la carte de résident doit intervenir dans un délai déraisonnable. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer.

4. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Mme D... ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de droit, de fait et d'appréciation qu'auraient commises le tribunal pour obtenir l'annulation du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " La carte de résident peut être accordée : (...) / 2° A l'étranger qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France et titulaire depuis au moins trois années de la carte de séjour temporaire mentionnée au 6° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il remplisse encore les conditions prévues pour l'obtention de cette carte de séjour temporaire et qu'il ne vive pas en état de polygamie. / L'enfant visé au présent article s'entend de l'enfant ayant une filiation légalement établie (...) ".

6. La décision par laquelle l'autorité administrative accorde un titre de séjour à un étranger est un acte individuel créateur de droit au profit de l'intéressé. Toutefois, le préfet peut légalement faire usage du pouvoir général qu'il détient, même en l'absence de texte, pour retirer à tout moment une décision individuelle créatrice de droits obtenue par fraude. L'administration doit, cependant, rapporter la preuve de la fraude et non le requérant, dont la bonne foi se présume.

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme D..., entrée en France le 29 octobre 2009, n'a pas obtenu l'asile et s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire national en dépit de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre le 17 août 2011. L'intéressée a résidé régulièrement sur le territoire français entre le 21 juin 2013 et le 26 mars 2016 sous couvert de la carte de séjour qui lui a été délivrée sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle a ensuite bénéficié, le 17 juin 2016, d'une carte de résident en qualité de parent d'enfant français. Mais, le préfet a, par la décision en litige, procédé au retrait de sa carte de résident en raison de la fraude entachant le lien de filiation de son enfant avec un ressortissant français. Pour l'établir, l'autorité préfectorale s'est fondée, d'une part, sur les procès-verbaux d'audition de Mme D... et de M. B... établis le 26 novembre 2019 par un officier de police judiciaire et d'autre part, sur l'ouverture d'une enquête devant le tribunal judiciaire de Montpellier à l'encontre de M. B... pour obtention frauduleuse de document administratif, escroquerie aux organismes sociaux et autres. Il ressort de ce procès-verbal que M. C... B... a fait l'objet d'un signalement pour " suspicion de multiples reconnaissances frauduleuses de paternité " par les services de la préfecture auprès du procureur de la République, qui relève notamment que ce dernier aurait reconnu onze enfants de onze mères différentes. Lors de son audition, le 26 novembre 2019, la requérante a reconnu expressément que M. B... n'était pas le père de son enfant et que, grâce à la reconnaissance de paternité de M. B..., cette dernière a pu solliciter un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Ces allégations sont corroborées par le fait, constant, que M. B... n'a jamais vécu avec la requérante, qu'il ne contribue pas à l'entretien et à l'éducation de son enfant et qu'un test de paternité réalisé le 4 juin 2021 par un laboratoire anglais concernant la fille de Mme D... conclut à la paternité de M. F... G... à 99, 99 %. Dans ces conditions, ainsi que l'ont jugé à juste titre les premiers juges, le préfet doit être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de ce que la reconnaissance de l'enfant de la requérante par un ressortissant français a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention d'un titre de séjour. Ainsi, le préfet, à qui il appartenait de faire échec à cette fraude, était légalement fondé à procéder au retrait de l'acte.

8. En deuxième lieu, les moyens portant sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne et des articles L.314-8 et L.313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés par adoption des motifs appropriés du tribunal figurant aux points 7 et 8 du jugement, la requérante n'apportant pas d'éléments de nature à infirmer leur-bien-fondé.

9. En troisième lieu, la décision de retrait n'a pas pour effet en elle-même de la séparer de ses enfants. A... s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de Mme D..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme H... D..., à Me Balestie et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Fait à Marseille, le 22 novembre 2021.

2

N° 21MA04168


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 21MA04168
Date de la décision : 22/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : BALESTIE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-11-22;21ma04168 ?
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