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15/09/2021 | FRANCE | N°21MA02764

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 15 septembre 2021, 21MA02764


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Terideal FPB Simeoni a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins de constater les insuffisances du dossier de consultation des entreprises afférent au marché relatif à l'extension et à la rénovation du musée des Beaux-arts de Draguignan ainsi que les travaux supplémentaires à réaliser.

Par une ordonnance n° 2003600 du 8 juillet 2021, il n'a pas été fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête, enregistrée le 16 juillet 2021, la société Terideal FPB Simeoni, représentée par Me Roumen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Terideal FPB Simeoni a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins de constater les insuffisances du dossier de consultation des entreprises afférent au marché relatif à l'extension et à la rénovation du musée des Beaux-arts de Draguignan ainsi que les travaux supplémentaires à réaliser.

Par une ordonnance n° 2003600 du 8 juillet 2021, il n'a pas été fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2021, la société Terideal FPB Simeoni, représentée par Me Roumens, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 8 juillet 2021 ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de première instance.

Elle soutient que l'ordonnance est irrégulière, faute de visa de son mémoire enregistré le 3 février 2021 et communiqué aux défendeurs le même jour ; que la commune de Draguignan ne s'était pas opposée à la tenue d'une expertise ; qu'elle a toujours soutenu que les difficultés rencontrées sur le chantier ne lui étaient pas imputables ; que les trois critères présidant à l'utilité d'une mesure d'expertise, à savoir la possibilité d'une action contentieuse, l'intérêt pour cette action et la nécessité pour établir les faits de la cause, sont, en l'espèce, remplis ; que l'expert aura à se prononcer, d'une part, sur les manquements du dossier de consultation des entreprises qu'elle dénonce et, d'autre part, sur la réalité des travaux supplémentaires qu'elle devait réaliser.

Par un mémoire, enregistré le 9 août 2021, la société Ingerop Conseil et Ingénierie, représentée par Me Jeambon, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la société Terideal FPB Simeoni, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la circonstance que le mémoire du 3 février 2021 n'ait pas été visé par l'ordonnance ne suffit pas à vicier la régularité de l'ordonnance, dès lors que ce mémoire ne comportait pas de conclusions nouvelles et qu'il a été répondu aux moyens qu'il contenait ; que la mesure d'expertise sollicitée ne présente aucun caractère d'utilité ; que la société Terideal a admis sa responsabilité et la sous-évaluation de son offre ; que la résiliation du marché résulte de son refus d'exécuter le marché et non des insuffisances du dossier de consultation des entreprises ; qu'un expert judiciaire ne peut se voir confier une mission d'audit ; que l'expertise devrait nécessairement être limitée aux insuffisances alléguées par la société Terideal ; que le chef de mission portant sur les travaux supplémentaires n'a pas de sens dès lors que l'exécution et le prix ont été acceptés librement aux termes d'un avenant.

La requête a également été communiquée à la commune de Draguignan et à la société Agence d'architecture BLP et Associés qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.

2. La société Terideal FPB Simeoni a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins de constater les insuffisances du dossier de consultation des entreprises afférent au marché relatif à l'extension et à la rénovation du musée des Beaux-arts de Draguignan ainsi que les travaux supplémentaires qu'elle devait réaliser. Par l'ordonnance attaquée du 8 juillet 2021, le juge des référés a refusé de faire droit à sa demande, au motif que la mesure d'expertise demandée ne présente pas un " caractère suffisant d'utilité ", au sens de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, dès lors qu'il " ne résulte pas de l'instruction que (les) éléments relatifs aux conditions d'exécution du marché ayant fait l'objet le 14 août 2020 d'une résiliation aux torts exclusifs de la requérante par la commune de Draguignan ainsi que du rejet du décompte final ne pourraient être recherchés que par un homme de l'art. ".

3. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher (cf. CE, 14.02.2017, n° 401514).

4. Il résulte de l'instruction que la commune de Draguignan a confié, par acte d'engagement du 13 août 2018, à la société Terideal FPB Simeoni le lot n° 2 " démolition, gros œuvre - charpente " du marché public de travaux portant sur la rénovation du musée des Beaux-arts. Ce marché a fait l'objet de deux avenants notifiés respectivement le 19 avril 2019 et le 6 février 2020, le premier pour intégrer des prestations supplémentaires, le second pour prolonger le délai d'exécution des travaux. Après l'avoir mis en demeure, le 12 juin 2020, d'exécuter dans le délai de trente jours une liste de prestations dûment énumérées, la commune a procédé, par lettre du 14 août 2020 réceptionnée au plus tard le 24 août suivant, à la résiliation simple du marché, aux torts de son cocontractant, en application de l'article 46.3 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable. Il ne résulte pas de l'instruction que le maître d'ouvrage aurait, depuis lors, notifié à la société Terideal FPB Simeoni le décompte de liquidation du marché, en application de l'article 47.2 dudit CCAG. La société conteste l'imputabilité de la résiliation du contrat à ses torts exclusifs ainsi que les conséquences qui s'en inféreront sur l'établissement du décompte de liquidation, en faisant notamment valoir que les insuffisances affectant le dossier de consultation des entreprises ont eu pour effet de vicier les termes de l'offre qu'elle a présentée, l'état réel du bâtiment à rénover s'étant révélé nécessiter des prestations supplémentaires. Contrairement à ce qu'a retenu le juge des référés, l'appréciation d'une telle contestation nécessite des constatations et des avis techniques qui peuvent être utilement apportés par un expert. La circonstance que, dans les échanges qu'elle a eus avec le maître d'œuvre, la société Terideal FPB Simeoni a admis être partiellement responsable de l'inexécution du marché et avoir sous-estimé le montant des travaux à réaliser, reconnaissance qui ne constitue pas, en tout état de cause, un engagement à renoncer à toute action à l'encontre du maître d'ouvrage, ne saurait ôter à la mesure d'expertise sollicitée son caractère d'utilité. Enfin, la circonstance que, par un avenant, des travaux supplémentaires ont été contractuellement acceptés ne saurait davantage faire obstacle à ce qu'il soit recherché si d'autres travaux supplémentaires ne s'avéraient pas techniquement indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité de l'ordonnance attaquée, que la société Terideal FPB Simeoni est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande et il y a lieu d'ordonner la mission d'expertise définie comme suit.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Terideal FPB Simeoni qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

O R D O N N E :

Article 1er : L'ordonnance n° 2003600 du 8 juillet 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Toulon est annulée.

Article 2 : M. B... A..., demeurant au 68, boulevard des Alpes - Galerie d'activités, à Marseille (13012), est désigné avec pour mission de :

- se rendre sur les lieux et se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera nécessaires à l'accomplissement de sa mission ;

- examiner le dossier de consultation des entreprises sur la base duquel les entreprises candidates au lot n° 2 " démolition, gros œuvre - charpente " du marché public de travaux portant sur la rénovation du musée des Beaux-arts de Draguignan ont déposé leur offre ; rechercher si ce dossier présentait des insuffisances qui ont pu être de nature à induire les entreprises en erreur sur la nature ou le volume des prestations à réaliser ;

- donner un avis technique sur la nature et le volume des prestations indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art qui, le cas échéant, n'auraient pas été prévues par le marché conclu par la société Terideal FPB Simeoni tel que modifié par son avenant n° 1,

- donner, le cas échéant, un avis technique sur le coût de ces prestations tel qu'évalué par cette société.

Article 3 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues aux articles R. 621-1 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il ne pourra recourir à un sapiteur sans l'autorisation préalable du président de la cour administrative d'appel.

Article 4 : L'expertise aura lieu en présence de la société Terideal FPB Simeoni, la commune de Draguignan, la société Ingerop Conseil et Ingénierie et la société Agence d'architecture BLP et Associés.

Article 5 : Préalablement à toute opération, l'expert prêtera serment dans les formes prévues à l'article R. 621-3 du code de justice administrative.

Article 6 : L'expert avertira les parties conformément aux dispositions de l'article R. 621-7 du code de justice administrative.

Article 7 : Avec leur accord, l'expert pourra assurer une mission de conciliation afin de permettre aux parties de trouver un accord sur le litige qui les oppose.

Article 8 : L'expert déposera son rapport au greffe en deux exemplaires dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente ordonnance. Des copies seront notifiées par l'expert aux parties intéressées. Avec leur accord, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique. L'expert justifiera auprès de la cour de la date de réception de son rapport par les parties.

Dans le cas où la conciliation conduit à un accord entre les parties, son rapport peut se borner, après avoir indiqué les diligences qu'il a effectuées, à rendre compte de cet accord, en y joignant la transaction qu'elles auront conclue ou, à défaut, le procès-verbal de conciliation qui aura été établi, et en précisant si cet accord règle le montant et l'attribution de la charge des frais d'expertise.

Article 9 : Sous réserve d'un éventuel accord, les frais et honoraires de l'expertise seront mis à la charge de la ou des parties désignées dans l'ordonnance par laquelle le président de la cour liquidera et taxera ces frais et honoraires.

Article 10 : Les conclusions de la société Ingerop Conseil et Ingénierie présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 11 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Terideal FPB Simeoni, à la commune de Draguignan, à la société Ingerop Conseil et Ingénierie, à la société Agence d'architecture BLP et Associés et à M. B... A..., expert.

Fait à Marseille, le 15 septembre 2021

N° 21MA027645

LH


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 21MA02764
Date de la décision : 15/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCPA COURTEAUD-PELLISSIER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-09-15;21ma02764 ?
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