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29/06/2021 | FRANCE | N°21MA01765

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 29 juin 2021, 21MA01765


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... et M. F... C... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté les arrêtés du 4 décembre 2020 de la préfète de l'Aude leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2005892, 2005893 du 3 février 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête,

enregistrée le 10 mai 2021, Mme E... et M. C..., représentés par Me B..., demandent à la Cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... et M. F... C... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté les arrêtés du 4 décembre 2020 de la préfète de l'Aude leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2005892, 2005893 du 3 février 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2021, Mme E... et M. C..., représentés par Me B..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Montpellier du 3 février 2021 ;

2°) d'annuler les arrêtés de la préfète de l'Aude du 4 décembre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude d'examiner leur demande de titre de séjour au titre d'étranger malade ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- les arrêtés contestés sont entachés d'incompétence de leur signataire dès lors que la délégation de signature octroyée par la préfète est trop générale ;

- ils sont insuffisamment motivés ;

- la préfète s'est cru à tort liée par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ;

- les arrêtés contestés sont entachés d'un vice de procédure dès lors que la procédure contradictoire n'a pas été respectée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- ils méconnaissent la directive n° 2008/115, les stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et le droit à un procès équitable, Mme E... et M. C... n'ayant pas pu exposer aux services préfectoraux les menaces dont elle a été victime dans son pays d'origine ;

- la préfète a commis une erreur d'appréciation dès lors que l'état de santé de Mme E... ne lui permet pas de de retourner dans son pays d'origine, et que sa fille bénéficie d'un titre de séjour en France ;

- ils sont exposés à un risque réel de violences en cas de retour dans leur pays d'origine ;

- ils ont fixé en France le centre de leurs intérêts privés et familiaux.

Mme E... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mars 2021.

La demande d'aide juridictionnelle de M. C... a été rejeté par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 26 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite du rejet de la demande d'asile de Mme E... et de M. C..., ressortissants russes, par deux décisions du 24 janvier 2020 de l'OFPRA confirmées par la CNDA le 23 septembre 2020, la préfète de l'Aude a pris deux arrêtés le 4 décembre 2020 par lesquels elle leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme E... et M. C... relèvent appel du jugement du 3 février 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".

3. En premier lieu, ainsi que l'a retenu à bon droit le premier juge, par arrêté n° DPPPAT-BCI-2020-033 du 1er juillet 2020, régulièrement publié au recueil des actes de la préfecture du 1er juillet 2020, la préfète de l'Aude a donné délégation à M. Simon Chassard, secrétaire général de la préfecture de l'Aude et signataire des arrêtés contestés, délégation à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Aude, à l'exception des réquisitions de la force armée ainsi que des arrêtés de conflit. En vertu d'une telle délégation, le secrétaire général était nécessairement compétent pour une mesure d'obligation de quitter le territoire français, sans qu'il fut nécessaire que l'arrêté portant délégation de signature le mentionne expressément. Dès lors, cette délégation, limitée dans son objet, ne revêt pas un caractère général contrairement à ce que soutiennent les requérants. Par suite, le moyen tiré de ce que les arrêtés contestés auraient été signés par une autorité incompétente doit être écarté.

4. En deuxième lieu, les arrêtés contestés comportent dans leurs visas et motifs toutes les considérations de droit et de fait sur lesquelles ils se fondent. Dès lors, le moyen tiré de ce que ces décisions seraient insuffisamment motivées doit être écarté.

5. En troisième lieu, il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français et fixe le pays de destination. Dès lors, les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de l'article L. 211-2 du même code, ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre de l'arrêté contesté.

6. En quatrième lieu, si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre. (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article par une autorité d'un Etat membre est inopérant.

7. Par ailleurs, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. À l'occasion du dépôt de sa demande d'asile, l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit reconnue la qualité de réfugié et à produire tous les éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande qui doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter toutes les précisions qu'il juge utile. Il lui est, en outre, loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux.

8. En l'espèce, s'il est constant que Mme E... et M. C... n'ont pas été invités par l'administration à présenter, préalablement à l'édiction de la décision attaquée, leurs observations écrites ou orales sur la perspective d'une mesure d'éloignement, ils ne pouvaient ignorer qu'ils étaient susceptibles de faire l'objet d'une telle mesure après le rejet définitif de leur demande d'asile. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils ont été privés de la possibilité de présenter des observations écrites ou orales ou qu'ils auraient demandé en vain un entretien avec les services préfectoraux. Il suit de là que le moyen tiré du non-respect du droit d'être entendu doit être écarté. Le même moyen, fondé sur la directive n° 2008/115 du 16 décembre 2008 est dépourvu de la moindre précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. En tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à un " procès équitable ", ne peut qu'être écarté, un tel droit n'étant pas utilement invocable à l'égard de la procédure administrative préalable à l'édiction d'une mesure d'éloignement

9. En cinquième lieu, il ne ressort pas des arrêtés ni des autres pièces du dossier que le préfet s'est cru lié par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA pour obliger Mme E... et M. C... à quitter le territoire français.

10. En dernier lieu, les moyens tirés de ce que les arrêtés sont entachés d'une erreur d'appréciation au regard de l'état de santé de Mme E... et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des violences encourues en cas de retour des requérants dans leur pays d'origine et de ce qu'ils ont fixé en France le centre de leurs intérêts privés et familiaux, qui ont été présentés dans les mêmes termes en première instance, ne peuvent qu'être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le magistrat désigné aux points 9 et 10 de son jugement, les requérants ne faisant état devant la Cour d'aucun élément distinct de ceux soumis à son appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de Mme E... et M. C... qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de Mme E... et M. C... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... E..., à M. F... C..., et à Me D... B....

Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.

Fait à Marseille, le 29 juin 2021

N° 21MA017654


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 21MA01765
Date de la décision : 29/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : BIDOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-29;21ma01765 ?
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