Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SAS Tequila Rapido et la SCI Dusens Immo ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice de prescrire une expertise aux fins de constater les désordres qui affectent les bureaux dont elles sont respectivement locataire et propriétaire, situés 6 place Garibaldi à Nice, résultant de la réalisation de la station Garibaldi dans le cadre de la construction de la ligne 2 du tramway niçois qui relie l'aéroport au port de Nice-Lympia.
Par une ordonnance n° 1900585 du 6 mai 2019, cette demande a été rejetée.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés les 24 mai, 21 et 25 juin 2019, les sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo représentées par Me E..., demandent à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 6 mai 2019 ;
2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande.
Elles soutiennent que la réalisation de la station de tramway souterraine Garibaldi a occasionné des désordres dans leurs locaux ; que, si leurs locaux n'ont pu être visités par l'expert désigné au titre d'un constat préventif, parce que la convocation leur avait été envoyée à une mauvaise adresse, les travaux de rénovation qu'elles ont réalisés après le début du chantier attestent de l'état des locaux, à cette date, ainsi qu'en témoigne l'attestation de la décoratrice d'intérieur.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2019, la métropole Nice Côte d'Azur représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge des sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que, de par le fait des sociétés requérantes, aucun constat préalable au début des travaux n'a été réalisé ; que les pièces qu'elles produisent ne permettent pas de pallier cette carence d'autant qu'il résulte des autres constats dressés par l'expert que l'immeuble présentait, dans son ensemble, des désordres antérieurement aux travaux, inhérents à son état de vétusté ; qu'aucun autre copropriétaire n'a formulé de réclamations à la suite des travaux ; que la mesure d'instruction demandée ne présente donc pas de caractère d'utilité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2019, la société Egis Rail représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que les dépens soient réservés.
Elle soutient que l'immeuble sis 6 place Garibaldi présentait déjà des fissures avant le démarrage des travaux tant dans les parties communes que dans les parties privatives qui ont pu être visitées par l'expert désigné en référé préventif ; que les requérantes ne sont pas en mesure de justifier l'état de leur local professionnel avant travaux.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 2 juillet 2019, la société Compagnie Axa France Iard, assureur de la SAS Tequila Rapido et de la SCI Dusens Immo, et l'agence Niddam, agent général d'assurance Axa, représentées par Me C..., demandent que soit mise hors de cause l'agence Niddam et que soit accueillie l'intervention volontaire de la société Compagnie Axa France Iard.
Elles soutiennent que l'agence Niddam, agent général niçois de la société Compagnie Axa France Iard, n'a pas vocation à représenter la compagnie ou à participer à une expertise judiciaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2019, la société Bouygues Travaux Publics, représentée par la SCP De Angelis - Semeidei - Vuillquez - Habart-Melki - Bardon, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge des sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les appelantes ne justifient pas le lien entre les dommages allégués et les travaux de construction de la station Garibaldi.
La requête a également été communiquée à la SAS Immo de France Côte d'Azur qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.
2. Les sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice de prescrire une mesure d'expertise aux fins de constater les désordres qui affectent les bureaux dont elles sont respectivement locataire et propriétaire, situés 6 place Garibaldi à Nice, qu'elles imputent aux travaux de réalisation de la station Garibaldi dans le cadre de la construction de la ligne 2 du tramway niçois entre l'aéroport et le port de Nice-Lympia. Par l'ordonnance attaquée du 6 mai 2019, le juge des référés a refusé de faire droit à leur demande, au motif que la mesure d'expertise sollicitée ne présentait pas de caractère utile au sens des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, dès lors que les sociétés requérantes n'étaient pas en mesure d'établir l'état de leurs locaux avant le commencement du chantier.
Sur l'intervention de la société Compagnie Axa France Iard :
3. La société Compagnie Axa France Iard, assureur des sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo, a un intérêt au prononcé de la mesure d'expertise demandée par les sociétés requérantes. Ainsi son intervention est recevable.
Sur la demande d'expertise :
4. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise permettant d'évaluer un préjudice, en vue d'engager la responsabilité d'une personne publique, en l'absence manifeste de lien de causalité entre le préjudice à évaluer et la faute alléguée de cette personne (cf. CE, 14.02.2017, n° 401514).
5. Les désordres dont se plaignent les sociétés requérantes, qui tiennent en des fissures murales accompagnées par endroit de décollements de l'enduit, ont été précisément décrits par deux constats d'huissier établis respectivement les 27 juillet 2016 et 3 mars 2017. Ces documents suffisent à établir l'existence de ces désordres. Le prononcé d'une mesure d'expertise ne présenterait, en conséquence, un caractère d'utilité que pour déterminer leur origine et fournir tous éléments tenant notamment au coût de la remise en état, de nature à être invoqués, le cas échéant, dans le cadre d'une mise en cause du tiers responsable.
6. Il résulte de l'instruction que, par ordonnance du 28 août 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Nice avait, à la demande de la métropole Nice Côte d'Azur, désigné, en application de l'article R. 531-1 du code de justice administrative, plusieurs experts pour procéder au constat de l'état des immeubles riverains de l'opération de travaux de la section enterrée de la ligne 2 du tramway, dans la zone de l'interstation Garibaldi - Durandy sur le territoire de la commune de Nice. Ainsi, M. D... a procédé les 19 et 21 octobre 2015 à la visite de l'immeuble situé 6 place Garibaldi. Les locaux situés aux 1er et 2ème étages de l'immeuble, dont est propriétaire la SCI Dusens Immo et qui sont loués par la SAS Tequila Rapido, aux termes d'un bail en date du 4 février 2011, n'ont pu être visités par l'expert, faute de présence des occupants, la SCI Dusens Immo ayant été convoquée par une lettre recommandée de l'expert envoyée à l'adresse qui était connue du syndic de la copropriété mais qui n'était plus celle de son siège social depuis le 28 septembre 2011. Toutefois, ce rapport atteste, pour les locaux voisins appartenant au même immeuble, la présence de multiples fissures dues à la vétusté de l'immeuble et à son mode de construction. La métropole Nice Côte d'Azur soutient, sans être contestée, qu'aucun autre copropriétaire n'a formulé de réclamations à la suite de la réalisation des travaux du tramway. Dans ces conditions, et eu égard à la nature des désordres constatés, leur imputabilité aux travaux de construction de la ligne 2 du tramway niçois entre l'aéroport et le port de Nice-Lympia, réalisés en 2016, ne pourrait être analysée par un expert que pour autant qu'il puisse disposer d'un état des lieux précis, antérieur aux travaux. Il résulte de l'instruction qu'en dépit d'une clause du bail commercial en date du 4 février 2011 le prévoyant, aucun état des lieux n'a a été réalisé à l'occasion de l'entrée en jouissance de la SAS Tequila Rapido. Si des travaux de peinture et de pose de papier peint ont été réalisées par la société locataire en mai 2016, les attestations émanant d'une décoratrice d'intérieur et de l'entrepreneur qui a réalisé les travaux ainsi que les factures produites par les sociétés requérantes, ne permettent pas d'établir l'état structurel des murs qui ont ainsi fait l'objet de ce traitement de surface.
7. Il résulte de ce qui précède que les sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande, en considérant que la mesure d'expertise demandée ne présentait pas le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative.
8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo les sommes que demandent la métropole Nice Côte d'Azur et la SAS Bouygues Travaux Publics, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
Article 1er : L'intervention de la société Compagnie Axa France Iard est admise.
Article 2 : La requête des sociétés Tequila Rapido et Dusens Immo est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par la métropole Nice Côte d'Azur et par la société Bouygues Travaux Publics sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la SAS Tequila Rapido, à la SCI Dusens Immo, à la métropole Nice Côte d'Azur, à la société Bouygues Travaux Publics, à la SAS Immo de France Côte-d'Azur, à la société Egis Rail, à la société Compagnie Axa France Iard ainsi qu'à l'agence Niddam.
Fait à Marseille, le 25 septembre 2019
N° 19MA023512
LH