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22/08/2019 | FRANCE | N°19MA02371

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 22 août 2019, 19MA02371


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... G... et Mme C... D... épouse G... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins de déterminer l'origine et la cause des désordres constatés sur leur propriété située 258 rue de la Cheylanne à La Londe-les-Maures (Var) à la suite des accidents climatiques survenus en 2014 et de décrire les moyens propres à remédier à ces désordres.

Par une ordonnance n° 1803744 du 14 mai 2019, cette demande a été rejetée.

Procédure

devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mai 2019, M. et Mme G... représentés par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... G... et Mme C... D... épouse G... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins de déterminer l'origine et la cause des désordres constatés sur leur propriété située 258 rue de la Cheylanne à La Londe-les-Maures (Var) à la suite des accidents climatiques survenus en 2014 et de décrire les moyens propres à remédier à ces désordres.

Par une ordonnance n° 1803744 du 14 mai 2019, cette demande a été rejetée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mai 2019, M. et Mme G... représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 14 mai 2019 ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande.

Ils soutiennent que la recherche de la cause de deux sinistres catastrophiques est une demande légitime, le fait que le cours d'eau qui a débordé ne relève pas de la domanialité publique étant sans lien avec la recherche de cette cause ; que l'article L. 215-4 et les dispositions de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 prévoient la compétence des collectivités publiques pour assurer l'entretien des cours d'eau non domaniaux ; que la mesure d'expertise sollicitée qui ne préjuge en rien la responsabilité des parties entre donc dans le champ des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 18 juin 2019, la commune de La Londe-les-Maures, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme G..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les sinistres dont s'agit sont des catastrophes naturelles ; que la responsabilité de ces catastrophes ne saurait lui être imputée ; que Le Maravenne est un cours d'eau non domanial, son lit appartenant ainsi aux propriétaires des deux rives ; qu'aucune responsabilité ne saurait donc lui être imputée de ce chef ; que l'article L. 215-14 du code de l'environnement est relatif à l'entretien et à l'aménagement d'un cours d'eau et non aux travaux de sécurisation d'une construction édifiée en bordure de ce cours d'eau ; qu'au surplus, on ne voit pas l'utilité de désigner un expert pour des travaux que la collectivité aurait simplement la faculté de réaliser, aux frais avancés des propriétaires privés.

Par un mémoire, enregistré le 3 juillet 2019, le département du Var, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que le préjudice n'est en lien avec aucune faute commise par le département du Var ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'engager la responsabilité du département du Var.

La requête a également été communiquée au préfet de département du Var, qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances,

- le code de l'environnement,

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.

2. M. et Mme G... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins de déterminer l'origine et la cause des désordres constatés sur leur propriété située 258 rue de la Cheylanne à La Londe-les-Maures (Var), " et notamment de dire s'il existe un lien de causalité entre ces désordres et les accidents climatiques survenus en 2014 ", et de décrire les moyens propres à remédier à ces désordres. Par l'ordonnance attaquée du 14 mai 2019, le juge des référés a refusé de faire droit à leur demande, au motif que la mesure d'expertise sollicitée ne présentait pas de caractère utile au sens des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, dès lors que deux expertises, l'une émanant du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), l'autre émanant de leur assureur, la MAAF, ont déjà analysé les causes des désordres qu'ils ont subis et proposé des travaux propres à y remédier, que leur contestation de la pertinence de la solution proposée par leur assureur ne ressort manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative et qu'ils ne font état d'aucune faute ou carence fautive qui aurait pu être commise par une personne publique dans la survenue de ces désordres.

3. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l'appui de prétentions qui ne relèvent manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative (cf. CE, 14.02.2017, n° 401514).

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les désordres subis par la propriété de M. et Mme G... édifiée en bordure du cours d'eau Le Maravenne sur le territoire de la commune de La Londe-les-Maures et en zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation, ont été provoqués par le débordement de ce cours d'eau, à l'occasion des inondations et des coulées de boue survenues respectivement les 18 et 19 janvier 2014 et les 25, 26 et 27 novembre 2014 qui ont été reconnues comme des catastrophes naturelles par arrêtés interministériels des 31 janvier et 3 décembre 2014. Au surplus, le rapport établi par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), en juin 2015, à la demande de la direction départementale des territoires et de la mer, décrit précisément le contexte géologique et hydrologique du site, cette description n'étant pas, quant à elle, remise en cause par l'expertise réalisée par l'assureur des requérants. Ainsi, en l'état de l'instruction, la prescription d'une mesure d'expertise n'apparaît pas susceptible d'apporter des éléments d'analyse supplémentaires quant à l'origine et aux causes des dommages subis par la propriété de M. et Mme G... et ne présente pas, à cet égard, de caractère d'utilité, au sens des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 125-1 du codes des assurances : " Les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l'Etat et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, dont ceux des affaissements de terrain dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens faisant l'objet de tels contrats. / (...). / Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises ". Aux termes de l'article L. 125-4 du même code : " Nonobstant toute disposition contraire, la garantie visée par l'article L. 125-1 du présent code inclut le remboursement du coût des études géotechniques rendues préalablement nécessaires pour la remise en état des constructions affectées par les effets d'une catastrophe naturelle ".

6. Si, s'agissant des travaux propres à remédier aux désordres qu'ils ont subis, les requérants se prévalent, pour justifier l'utilité de la mesure d'expertise sollicitée, de la contradiction qui existerait entre les solutions envisagées par l'expert de leur assureur et les préconisations du rapport de la CEREMA, le litige qui, sur ce point, est susceptible de les opposer à leur compagnie d'assurance ne relève manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative et ne justifie donc pas qu'une mesure d'expertise soit ordonnée par le juge des référés de cet ordre de juridiction.

7. Enfin, d'une part, eu égard à l'origine des dommages subis par M. et Mme G... rappelée au point 4, la responsabilité d'une collectivité publique dans leur survenue n'apparaît, en l'état de l'instruction, manifestement pas susceptible d'être mise en cause et, du reste, les requérants ne s'en prévalent pas. D'autre part, Le Maravenne étant un cours d'eau non domanial dont, en vertu de l'article L. 215-2 du code de l'environnement, " le lit (...) appartient aux propriétaires des deux rives ", aucune obligation ne pèse sur les collectivités publiques, et notamment sur les communes, d'assurer la restauration ou la confortation d'une rive appartenant à un propriétaire privé. A cet égard, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 215-16 du code de l'environnement qui ne prévoient que la faculté pour les communes de se substituer aux propriétaires défaillants, aux frais de ces derniers, au demeurant aux seules fins d'assurer l'entretien du cours d'eau, au sens de l'article L. 215-14 du même code, soit " de maintenir le cours d'eau dans son profil d'équilibre, de permettre l'écoulement naturel des eaux et de contribuer à son bon état écologique ou, le cas échéant, à son bon potentiel écologique, notamment par enlèvement des embâcles, débris et atterrissements, flottants ou non, par élagage ou recépage de la végétation des rives ". En conséquence, en l'état de l'instruction, la mesure d'instruction demandée par les requérants n'apparaît se rattacher à aucune action qu'ils seraient susceptibles d'engager soit à l'encontre de la commune de La Londe-les-Maures, soit à l'encontre du département du Var, propriétaire de terrains situés sur l'autre rive du cours d'eau Le Maravenne, soit encore de l'Etat, pour obliger l'une de ces collectivités à exécuter les travaux d'aménagement de la rive dont ils sont propriétaires, objets du litige qui les oppose à leur compagnie d'assurance, ou pour en obtenir la prise en charge.

8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme G... la somme demandée par la commune de La Londe-Les-Maures, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de M. et Mme G... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de La Londe-Les-Maures présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. et Mme G..., à la commune de La Londe-les-Maures, au département du Var ainsi qu'au préfet du Var.

Fait à Marseille, le 22 août 2019

N° 19MA023712

LH


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 19MA02371
Date de la décision : 22/08/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : VATIER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-08-22;19ma02371 ?
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