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13/05/2019 | FRANCE | N°19MA01090

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 13 mai 2019, 19MA01090


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C...épouse A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice de condamner la commune de Menton, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de provision sur les sommes qui lui seraient dues en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de la chute dont elle a été victime le 7 juin 2017.

Par une ordonnance n° 1803514 du 28 février 2019, le juge des référés du

tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C...épouse A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice de condamner la commune de Menton, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de provision sur les sommes qui lui seraient dues en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de la chute dont elle a été victime le 7 juin 2017.

Par une ordonnance n° 1803514 du 28 février 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 mars 2019 et les 23 et 26 avril 2019, Mme A..., représentée par la SELARL Capponi-Lanfranchi, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 28 février 2019 ;

2°) statuant en référé, de condamner la commune de Menton à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de provision ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Menton la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'accident est imputable à une défectuosité importante et non signalée de l'ouvrage public ;

- la commune ne rapporte pas la preuve de l'entretien normal de l'ouvrage public ;

- une provision lui est due dans l'attente du dépôt du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Nice.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2019, la commune de Menton, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'avait pas connaissance de la défectuosité causée à l'ouvrage public par un tiers ;

- l'excavation n'excédait pas cinq centimètres ;

- la chute est imputable à l'inattention de la victime ;

- son obligation ne présente pas un caractère non sérieusement contestable ;

- la réalité et l'étendue des préjudices ne sont pas établies.

La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de Dijon qui n'a pas produit de mémoire et la Mutuelle générale de l'éducation nationale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la Cour a désigné M. Vanhullebus, président, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude.

2. Il résulte de l'instruction et notamment des attestations émanant de témoins, que Mme A... a été victime d'une chute, le 7 juin 2017, en raison de la présence d'une ornière sur le trottoir bordant l'avenue du Général de Gaulle à Menton. Compte tenu de ses dimensions, qui sont suffisamment établies par les pièces jointes à la requête, cette défectuosité de l'ouvrage public excède les risques que les usagers de la voie publique doivent normalement s'attendre à rencontrer et contre lesquels il leur appartient de se prémunir eux-mêmes en prenant les précautions nécessaires. La commune, maître de l'ouvrage, si elle justifie de la fréquence du nettoyage de l'avenue, n'apporte toutefois aucun élément de nature à établir l'entretien normal de l'ouvrage public. Eu égard aux caractéristiques de la défectuosité qui ne présente pas un caractère récent au vu des photographies versées au dossier, la commune, dont les agents balaient au demeurant la voie tous les deux jours, ne peut raisonnablement prétendre qu'elle en ignorait l'existence.

3. Toutefois, cette ornière, qui n'occupait pas toute la largeur du trottoir, ne pouvait, en plein jour et compte tenu de son étendue, échapper à un usager de la voie publique normalement attentif. L'imprudence de Mme A... est de nature à exonérer la commune de Menton d'une partie de sa responsabilité. Dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de laisser à la charge de la requérante la moitié des conséquences dommageables de l'accident.

4. Le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant.

5. Mme A... a été victime à l'occasion de sa chute, d'une fracture du col fémoral gauche ayant nécessité la pose d'une prothèse de hanche totale au centre hospitalier La Palmosa de Menton, où elle a été hospitalisée du 7 au 22 juin 2017. Elle a été transférée à cette date au centre de soins de suite et de réadaptation de La Menaudière à Montrichard (Loir-et-Cher) où elle a séjourné jusqu'au 22 juillet 2017. Il ressort du certificat médical émanant du service de chirurgie du centre hospitalier que la durée du déficit fonctionnel temporaire total présenté par l'intéressée ne sera pas inférieure à deux mois à compter du 21 juin 2017. Des souffrances en lien direct et certain avec l'accident ont en outre inévitablement été endurées par la victime. Il suit de là que, alors même que n'a pas encore été déposé le rapport de l'expertise prescrite par l'ordonnance n° 1803513 du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 4 février 2019, l'obligation de la commune de Menton présente un caractère suffisamment certain à hauteur de la somme de 3 000 euros, après application du partage de responsabilité fixé au point 3.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Menton demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Menton une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens.

ORDONNE

Article 1er : La présente ordonnance est déclarée commune à la caisse primaire d'assurance maladie de Dijon et à la Mutuelle générale de l'éducation nationale.

Article 2 : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 28 février 2019 est annulée.

Article 3 : La commune de Menton est condamnée à verser à Mme A... une provision de 3 000 euros.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La commune de Menton versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions de la commune de Menton présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... C...épouseA..., à la caisse primaire d'assurance maladie de Dijon, à la Mutuelle générale de l'éducation nationale et à la commune de Menton.

Fait à Marseille, le 13 mai 2019.

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