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06/12/2018 | FRANCE | N°18MA04287

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 06 décembre 2018, 18MA04287


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...E...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir et subsidiairement, de réexamin

er sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Par un jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...E...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir et subsidiairement, de réexaminer sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1800931 du 1er juin 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 18MA04287 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 15 septembre 2018, M. G...E..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er juin 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2017 du préfet de l'Aude ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", l'autorisant à travailler, et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C..., qui renoncera au bénéfice de la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle, la somme de 2 000 euros, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est entaché d'irrégularité en tant qu'il n'est pas suffisamment motivé ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- le jugement est entaché d'une dénaturation des pièces du dossier ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée, et ce défaut de motivation suffisante révèle un défaut d'examen complet de sa situation personnelle ;

- le préfet de l'Aude a méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de l'Aude a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

- la décision portant obligation de quitter le territoire ne satisfait pas à l'exigence de motivation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale par exception d'illégalité du refus de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision obligeant les époux E...à quitter le territoire français est contraire aux intérêts supérieurs du jeune A...et méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- l'arrêté attaqué, qui ne vise pas l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas suffisamment motivé en droit ;

- la décision selon laquelle il pourrait être reconduit en Ukraine, pays dont il a la nationalité, méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision selon laquelle il pourrait être reconduit en Ukraine méconnaît les stipulations des articles 3 et 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3 de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, signée à New York le 10 décembre 1984.

M. G...E...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juillet 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention des Nations Unies sur la prévention de la torture du 10 décembre 1984 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. G...E..., ressortissant ukrainien né le 13 juin 1971 à Soumy (Ukraine), relève appel du jugement n° 1800931 du 1er juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...) après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".

Sur la régularité du jugement :

3. Contrairement à ce que soutient M.E..., le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à chacun des arguments des parties, a répondu, par une motivation suffisante, au point 2 du jugement contesté, au moyen tiré du défaut de motivation entachant l'arrêté du préfet de l'Aude du 23 novembre 2017. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité pour ce motif.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, il ressort des termes de l'arrêté attaqué qu'il vise les textes dont le préfet a fait application, précise que l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la cour nationale du droit d'asile (CNDA) lui ont refusé la qualité de réfugié par des décisions des 26 février et 2 septembre 2016, que son épouse a également fait l'objet d'une procédure similaire, qu'il ne démontrait pas la violation des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'il n'est pas dénué de famille en Ukraine et qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté sera écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / (...) ".

6. En l'espèce, il y a lieu d'écarter les moyens soulevés par M. E...tirés de ce que l'arrêté du 23 novembre 2017 méconnaîtrait l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, qui ont été précédemment invoqués dans les mêmes termes devant les juges de première instance, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif aux points 4 à 6 de son jugement, le requérant ne faisant état devant la Cour d'aucun élément distinct de ceux soumis à leur appréciation. En particulier, M. E... ne fait état d'aucun nouvel élément quant aux menaces dont il aurait pu faire l'objet en Ukraine, pour des raisons politiques, et aux menaces et aux injures dont la famille aurait également fait l'objet dans ce pays. En outre, les circonstances que le requérant a consenti des efforts d'intégration, notamment au sein de la communauté religieuse de Saint-Jacques Le Viguiers, ainsi que l'atteste le père Jean Gardey de Soos, que son fils, A..., est bien intégré dans le système scolaire français, celui-ci étant scolarisé au collège Le Bastion à Carcassonne en classe de 6ème, et que le premier fils de Mme F..., son épouse, B...D..., réside sur le territoire français, ne sauraient constituer des motifs d'admission exceptionnels au séjour en France.

7. En troisième lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation qui a été précédemment invoqué dans les mêmes termes devant les juges de première instance, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif au point 3 de son jugement, la circonstance que l'arrêté ne fait pas état de l'existence de son fils, A..., et du fils que son épouse a eu d'une précédente union, M. B... D..., ne signifiant pas que le préfet n'en aurait pas tenu compte pour prendre sa décision.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) ".

9. En l'espèce, par l'arrêté attaqué, le préfet de l'Aude a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par M. E... et a suffisamment motivé cette décision, ainsi qu'il a été dit au point 4. En vertu des dispositions précitées du dernier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Il y a lieu, dès lors, d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision.

10. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède, notamment des points 4 à 7, que le refus de titre de séjour opposé à M. E... n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de ce refus de séjour, notamment au motif qu'il serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, ne peut qu'être écarté.

11. En troisième lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un refus de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

12. En l'espèce, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation du premier paragraphe de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif au point 7 de son jugement, le requérant ne faisant état d'aucune nouvelle considération quant aux difficultés que pourrait causer son retour en Ukraine à son fils, A..., dès lors que la décision n'a pas pour effet de le séparer de sa famille, qu'il n'établit pas que le couple ne pourrait pas poursuivre dans ce pays une vie familiale normale et que leur fils ne pourrait pas y poursuivre sa scolarité.

Sur la décision fixant le pays de destination :

13. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " / (...) L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ".

14. En l'espèce, en relevant, pour fixer le pays de destination, que M. E... n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Ukraine ou dans tout autre pays dans lequel il justifierait être légalement admissible, le préfet du département de l'Aude a suffisamment motivé sa décision. La circonstance qu'il n'a pas visé l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est sans incidence à cet égard.

15. En deuxième lieu, l'arrêté contesté dispose que M. E... sera reconduit vers l'Ukraine ou tout pays pour lequel il établira être légalement admissible. Une décision similaire à la sienne a été prise le même jour à l'encontre de son épouse, MmeF..., également de nationalité ukrainienne. Le requérant n'établit pas que son épouse ne serait pas admissible en Ukraine. Alors que le préfet a également prévu un éloignement à destination des pays pour lesquels M. E... et sa conjointe établiront être légalement admissibles, ces décisions n'impliquent pas, en elles-mêmes, dès lors que ceux-ci n'établissent pas n'être admissibles que dans des pays différents, une séparation, même provisoire, des membres de la cellule familiale et d'un des deux parents avec l'enfant,A.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du premier paragraphe de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

16. Enfin, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait contraire à l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux stipulations des articles 3 et 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, signée à New-York le 10 décembre 1984, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 11 et 12 du jugement de première instance, M. E...ne faisant état en appel d'aucun nouvel élément de nature à remettre en cause la solution adoptée par les premiers juges.

17. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de M. E... est manifestement dépourvue de fondement et doit être rejetée selon la procédure prévue par les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, ensemble ses conclusions en injonction et formulées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. G...E...et à Me C....

Fait à Marseille, le 6 décembre 2018.

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N° 18MA04287


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 18MA04287
Date de la décision : 06/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : KAMENI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-06;18ma04287 ?
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