Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille de prescrire une expertise médicale sur les conditions de sa prise en charge au centre hospitalier de Digne-les-Bains, à compter du 11 juillet 2014, à la suite d'une chute accidentelle sur la voie publique et de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier de Digne-les-Bains et de son assureur, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), une provision d'un montant de 2 200 euros.
Par une ordonnance n° 1704306 du 8 janvier 2018, le juge des référés a condamné le centre hospitalier de Digne-les-Bains et la société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à Mme A...une provision de 2 200 euros mais a rejeté ses conclusions tendant à ce que soit ordonnée une expertise.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 février et 7 mars 2018, MmeA..., représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 8 janvier 2018 en tant que ses conclusions tendant à ce que soit ordonnée une expertise ont été rejetées ;
2°) statuant en référé, de faire droit à cette demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier de Digne-les-Bains et de la société hospitalière d'assurances mutuelles la somme de 2 500 euros à verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Elle soutient que la circonstance que deux expertises réalisées par des experts mandatés par des compagnies d'assurance ont déjà été réalisées ne prive pas d'utilité le prononcé d'une mesure d'expertise judiciaire confiée à un expert dont l'impartialité et la compétence ne sauraient être suspectées, au moins pour l'évaluation de son préjudice corporel.
Par un mémoire, enregistré le 22 février 2018, le centre hospitalier de Digne-les-Bains et la société hospitalière d'assurances mutuelles, représentés par MeB..., concluent au rejet de la requête.
Ils soutiennent que les deux expertises déjà réalisées ont conclu à une erreur de diagnostic imputable au centre hospitalier ; qu'elles ne divergent quelque peu que sur l'évaluation du préjudice corporel, ce qui n'empêche pas le juge administratif de trancher le différend ; que, par suite, en l'absence d'éléments nouveaux, une nouvelle expertise ne présenterait aucune utilité.
La requête a également été communiquée à l'agence du régime social des indépendants (RSI) de Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.
2. Mme A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille de prescrire une expertise médicale sur les conditions de sa prise en charge au centre hospitalier de Digne-les-Bains, à compter du 11 juillet 2014, à la suite d'une chute accidentelle sur la voie publique et de condamner le centre hospitalier de Digne-les-Bains et son assureur, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), à lui verser une provision d'un montant de 2 200 euros, à valoir sur l'indemnisation due en réparation de son préjudice corporel. Par l'ordonnance attaquée du 8 janvier 2018, le juge des référés a fait droit à ses conclusions tendant au versement d'une provision mais a rejeté ses conclusions tendant au prononcé d'une mesure d'expertise, au motif que cette mesure ne présentait pas le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative dès lors qu'elle avait le même objet que les deux expertises amiables versées au dossier et que la requérante ne se prévalait et ne produisait aucun élément nouveau.
3. Il résulte de l'instruction que les deux expertises versées au dossier, réalisées respectivement par le docteur Gérard Bremond, désigné par la compagnie d'assurances M.A.A.F, assureur de Mme A...au titre de la protection juridique, et par le docteur Jacques Pagliuzza, désigné par la société hospitalière d'assurances mutuelles, font état de conclusions convergentes sur l'erreur de diagnostic commise lors de l'admission de MmeA..., le 11 juillet 2014, au centre hospitalier de Digne-les-Bains, s'agissant de la fracture de la tête fémorale de sa hanche droite, laquelle n'a finalement été diagnostiquée que le 2 septembre suivant. En conséquence, et alors qu'aucune des parties ne contestait les conclusions de ces expertises, c'est à bon droit que le juge des référés a estimé que le prononcé d'une mesure d'expertise ne présentait pas le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative s'agissant de l'examen des conditions de prise en charge de Mme A...par le centre hospitalier de Digne-les-Bains et la recherche des causes des complications qu'elle a, par la suite, endurées, quand bien même l'expert ainsi désigné aurait nécessairement présenté des garanties apparentes d'impartialité que des experts mandatés par des compagnies d'assurances ne sauraient présenter.
4. En revanche, les deux expertises versées au dossier comportent des conclusions contradictoires, en particulier sur la date de consolidation de son état, et, au demeurant, lacunaires sur le préjudice corporel subi par Mme A...du fait de ce retard de diagnostic. Par suite, la requérante est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés a refusé de faire droit à sa demande d'expertise, dans cette mesure.
5. Il résulte de ce qui précède que l'ordonnance du 8 janvier 2018 doit être annulée en tant que les conclusions de Mme A...tendant au prononcé d'une mesure d'expertise sur l'évaluation de son préjudice corporel ont été rejetées et qu'il y a lieu d'ordonner la mission d'expertise ainsi demandée, dans les limites ci-après définies.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier de Digne-les-Bains et de la société hospitalière d'assurances mutuelles une somme de 1 000 euros à verser à MmeA..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de ce même article font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Mme A...qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
O R D O N N E :
Article 1er : L'article 3 de l'ordonnance n° 1704306 du 8 janvier 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée en tant que les conclusions de Mme A...tendant au prononcé d'une mesure d'expertise sur l'évaluation de son préjudice corporel ont été rejetées.
Article 2 : M. F...D..., demeurant à ...- avenue des Savels, est désigné avec pour mission de :
- se faire communiquer tous les documents médicaux utiles à sa mission, examiner Mme C...A...et décrire son état actuel ;
- préciser dans quelle mesure l'état actuel de Mme A...est imputable au retard avec lequel a été diagnostiquée la fracture de la tête fémorale de sa hanche droite, provoqué par la chute accidentelle dont elle a été victime le 11 juillet 2014 ;
- déterminer la date de consolidation de l'état de MmeA..., la durée de l'incapacité temporaire totale, le taux de l'incapacité permanente partielle dont elle resterait atteinte, le préjudice esthétique, les souffrances physiques et le préjudice d'agrément subis par Mme A..., en distinguant, pour chacun de ces chefs de préjudice, la part imputable aux conséquences dommageables de sa chute accidentelle et la part imputable au retard avec lequel a été diagnostiquée la fracture de la tête fémorale de sa hanche droite ou en précisant, le cas échéant, la perte de chance que ce retard lui aurait fait subir au regard de ces chefs de préjudice.
Article 3 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues aux articles R. 621-1 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il ne pourra recourir à un sapiteur sans l'autorisation préalable du président de la cour administrative d'appel.
Article 4 : L'expertise aura lieu en présence de MmeA..., du centre hospitalier de Digne-les-Bains, de la société hospitalière d'assurances mutuelles et de l'agence du régime social des indépendants (RSI) de Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Article 5 : Préalablement à toute opération, l'expert prêtera serment dans les formes prévues à l'article R. 621-3 du code de justice administrative.
Article 6 : L'expert avertira les parties conformément aux dispositions de l'article R. 621-7 du code de justice administrative.
Article 7 : L'expert déposera son rapport au greffe en deux exemplaires dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente ordonnance. Des copies seront notifiées par l'expert aux parties intéressées. Avec leur accord, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique. L'expert justifiera auprès de la cour de la date de réception de son rapport par les parties.
Article 8 : Les frais et honoraires de l'expertise seront mis à la charge de la ou des parties désignées dans l'ordonnance par laquelle le président de la cour liquidera et taxera ces frais et honoraires.
Article 9 : Le centre hospitalier de Digne-les-Bains et la société hospitalière d'assurances mutuelles verseront solidairement à Mme A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 10 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...est rejeté.
Article 11 : Les conclusions du centre hospitalier de Digne-les-Bains et de la société hospitalière d'assurances mutuelles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 12 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme C...A..., au centre hospitalier de Digne-les-Bains, à la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), à l'agence du régime social des indépendants (RSI) de Provence-Alpes-Côte d'Azur et à M.D..., expert.
Fait à Marseille, le 11 mai 2018
N° 18MA004802
LH