Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner le centre hospitalier universitaire de Nice à lui verser une somme de 25 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle estime avoir subi en raison du décès de sa mère.
Par un jugement n° 1305070 du 10 avril 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 5 juin 2015, MmeB..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 10 avril 2015 ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Nice à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation du préjudice subi ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Nice la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la responsabilité du centre hospitalier est engagée en raison d'un retard de diagnostic et d'une prise en charge inappropriée de sa mère ;
- en dépit de l'urgence, l'intervention n'a pas été pratiquée dès le consentement donné par la patiente ;
- il n'est pas établi que la patiente se soit rétractée ;
- l'état de santé de sa mère ne permettait pas d'exprimer un consentement éclairé ;
- sa mère n'a pas reçu une information propre à la mettre en mesure d'exprimer un consentement éclairé ;
- elle n'a pas été consultée sur l'opportunité du traitement adapté, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 4127-36 du code de la santé publique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2016, le centre hospitalier universitaire de Nice, représenté par Me C...conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- il n'existe pas de lien de causalité direct et certain entre les fautes alléguées et le décès de la mère de la requérante ;
- aucune faute n'a été commise dans l'établissement du diagnostic, la mise en oeuvre du traitement ou le recueil du consentement.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lafay,
- et les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique.
1. Considérant que Mme B...relève appel du jugement du 10 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande de condamnation du centre hospitalier universitaire de Nice à réparer le préjudice moral résultant des fautes qu'aurait commises l'établissement hospitalier dans la prise en charge de sa mère ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Nice le 26 juin 2013, qu'au moment de son admission au service des urgences de l'hôpital Saint Roch, le 11 juillet 2009 à la suite d'un malaise à son domicile, pour altération de l'état général et troubles de la marche, Paulette Ameglio, consciente et orientée, marchant à petit pas mais de façon stable et ne présentant pas de signes de détresse vitale, a fait l'objet par un interne et un médecin senior d'un examen général et d'un électrocardiogramme qui n'ont pas révélé d'éléments anormaux particuliers qui auraient pu les conduire à pratiquer des investigations complémentaires, notamment une tomodensitométrie, ou à décider d'hospitaliser l'intéressée ; que la décision de renvoyer la patiente à son domicile avec invitation à prendre rendez-vous auprès du service gériatrie pour effectuer un bilan de démence était conforme aux règles de l'art ; que la circonstance qu'une tumeur cérébrale ait été diagnostiquée le 15 juillet 2009 à la clinique Saint George à laquelle Paulette Ameglio avait été adressée par son médecin traitant et un neurologue pour réaliser une tomodensitométrie, compte tenu d'une dégradation de son état de santé les jours suivant son accueil au centre hospitalier universitaire, n'est pas, par elle-même, de nature à démontrer que le service des urgences aurait commis une faute en ne procédant pas à un tel examen ;
4. Considérant, en deuxième lieu que Paulette Ameglio a été hospitalisée à la clinique Saint George jusqu'au 25 juillet, où elle a subi un bilan somatique complet et fait l'objet d'une corticothérapie qui a amélioré son état neurologique, puis a séjourné du 25 juillet 2009 au 14 août 2009 au centre de convalescence La Serena ; qu'à l'initiative son médecin traitant et du neurologue, elle a été reçue le 30 juillet en consultation par un neurochirurgien de l'hôpital Pasteur, relevant du centre hospitalier universitaire, qui a décidé de procéder à une exérèse après que l'IRM réalisée le jour même eût montré la présence d'une lésion tumorale nécrotico-kystique temporale droite ; qu'elle a rencontré le médecin anesthésiste dès le 4 août 2009 ; qu'ainsi, alors que ni l'expertise, ni les pièces du dossier ne révèlent l'existence d'une situation mettant en jeu le pronostic vital de la patiente et nécessitant une opération dans l'urgence, le délai de prise en charge de l'intéressée, de décision et de mise en oeuvre du traitement par les différents médecins du centre hospitalier n'a pas été excessif et est conforme aux règles de l'art ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. " ; qu'aux termes de l'article L. 1111-4 du même code : " Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé. Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre tout traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. Il peut faire appel à un autre membre du corps médical. Dans tous les cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable. Celle-ci est inscrite dans son dossier médical. (...) Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté. Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6 ou la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne, aient été consultés. La décision motivée de limitation ou d'arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical. " ; qu'aux termes de l'article R. 4127-36 du même code : " Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas. Lorsque le malade, en état d'exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences. Si le malade est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin ne peut intervenir sans que ses proches aient été prévenus et informés, sauf urgence ou impossibilité. (... )" ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert et du dossier d'admission dans le service de gériatrie, que Paulette Ameglio est revenue entre le 4 et le 10 août 2009 sur le consentement qu'elle avait initialement donné à l'intervention proposée par le neurochirurgien de l'hôpital Pasteur, et qu'elle a alors été dirigée vers des soins de radiothérapie au service de gériatrie de Cimiez, relevant également du centre hospitalier universitaire ; que les médecins de l'établissement public de santé, qui sont tenus de respecter la volonté du malade en état de l'exprimer, ne pouvaient dès lors réaliser l'intervention proposée ;
7. Considérant que si Mme B... invoque une altération des facultés intellectuelles et une perte d'autonomie de sa mère qui n'aurait dès lors pu exprimer clairement sa volonté lorsqu'elle a refusé d'être opérée, elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations ; qu'il ne résulte au demeurant pas de l'instruction que la patiente, qui avait accepté l'intervention quelques jours auparavant, n'aurait pas disposé de toute sa lucidité lorsqu'elle a refusé de la subir ; que la malade n'ayant pas été hors d'état d'exprimer sa volonté, le centre hospitalier universitaire n'était dès lors tenu ni de consulter Mme B...ainsi qu'elle le soutient, ni même de la prévenir et de l'informer en application des dispositions précitées de l'article R. 4127-36 du code de la santé publique ;
8. Considérant que la nature exacte de la tumeur cérébrale, dont le diagnostic a été posé à la clinique Saint George le 15 juillet 2009, n'a pas été révélée à la patiente, à la demande de sa famille ; que par suite, Mme B...ne peut utilement se prévaloir de ce que sa mère, qui avait été informée de la présence d'un kyste, n'aurait pu prendre de manière éclairée une décision sur l'intervention qui lui a été ensuite proposée à l'hôpital Pasteur, pour rechercher la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Nice ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au centre hospitalier universitaire de Nice et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2017, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- M. Laso, président-assesseur,
- M. Lafay, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 juin 2017.
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N° 15MA02285