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22/12/2016 | FRANCE | N°15MA02506

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 22 décembre 2016, 15MA02506


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 14 août 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1407732 du 29 décembre 2014 le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juin 2015, M.C..., représenté par MeB..., deman

de à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 décembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 14 août 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1407732 du 29 décembre 2014 le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juin 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 décembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 14 août 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- le signataire de l'arrêté était incompétent ;

- le refus de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination sont insuffisamment motivés ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation ;

o Sur le refus de titre :

- il méconnait les dispositions de l'article 6-2 de l'accord franco algérien ;

- il méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

o Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- il a été privé de son droit d'être entendu, en méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne du droit de la défense ;

o Sur le pays de destination :

- la décision est illégale par exception d'illégalité de celles portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lafay a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.C..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 29 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 août 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort du point 4 du jugement attaqué que les premiers juges ont expressément répondu au moyen tiré du défaut d'examen par le préfet de la situation personnelle du requérant ; que, dès lors, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité pour avoir omis de répondre à un moyen ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 14 août 2014 :

3. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que l'arrêté contesté a été signé par M. A..., chef du bureau des mesures administratives, du contentieux et des examens spécialisés relevant du service de l'immigration et de l'intégration de la préfecture des Bouches-du-Rhône, dont le nom figure sur l'acte, qui disposait à cet effet d'une délégation de signature par arrêté n° 2014115-0005 en date du 25 avril 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n° 102 de la préfecture des Bouches-du-Rhône du 29 avril 2014 ; que par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté ;

4. Considérant que l'arrêté vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le règlement (CE) n° 562-2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes entré en vigueur le 13 octobre 2006, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la loi du 11 juillet 1979 ; que l'arrêté mentionne également le fondement de la demande d'admission au séjour, la date, les modalités et l'absence de régularité de l'entrée en France, la situation personnelle et familiale du requérant, l'absence d'atteinte aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aux dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi cet arrêté comporte l'indication des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne saurait être accueilli ; que, par ailleurs, cette motivation est suffisante pour établir que les services préfectoraux ont procédé à un examen particulier et complet de la situation du requérant ;

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ;

6. Considérant que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; que l'article 9 de l'accord impose que les ressortissants algériens venant en France pour un séjour inférieur à trois mois présentent un passeport en cours de validité muni d'un visa délivré par les autorités françaises ; que, toutefois, les stipulations de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, introduite dans l'ordre juridique interne par la loi du 30 juillet 1991 et le décret du 21 mars 1995, qui ne sont pas incompatibles avec ces règles, instituent un visa uniforme pour le territoire de l'ensemble des parties contractantes pour un séjour de trois mois au maximum ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 22 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 et des articles L. 531-1, L. 531-2 alinéa 2, R. 211-32 et R. 212-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que M. C..., auquel l'article 9 de l'accord franco-algérien faisait obligation de disposer d'un visa pour entrer en France pour un séjour inférieur à trois mois, n'était pas dispensé de la déclaration prévue à l'article 22 de la convention de Schengen ;

8. Considérant que si M. C...soutient qu'il est entré en France le 23 janvier 2012 en provenance d'Espagne, muni d'un passeport revêtu d'un visa C Schengen délivré par les autorités espagnoles valable du 21 janvier 2012 au 20 février 2012, il ne l'établit pas, faute pour lui d'avoir satisfait à l'obligation de la déclaration d'entrée sur le sol français ; que le préfet, qui a pu à bon droit relever qu'il ne justifiait pas d'une entrée régulière sur le territoire français, n'a pas, en prenant la décision contestée, méconnu les stipulations du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 qui subordonnent la délivrance d'un certificat de résidence d'un an à une entrée régulière sur le territoire français même en cas de mariage du demandeur avec un ressortissant français ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant que l'étranger qui invoque son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ; qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., âgé de vingt-neuf ans à la date de la décision contestée n'est marié avec une ressortissante française que depuis le 4 mai 2013 et ne justifie pas d'une vie commune antérieure ; que les documents et les attestations produits sont insuffisants à établir l'existence en France d'une vie privée stable et ancienne ; qu'il ne justifie pas ne pas avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans ; que, par suite, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France de l'intéressé, la décision par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a dès lors pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ce refus sur la situation personnelle et familiale du requérant ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant que le droit d'être entendu dans toute procédure, tel qu'il s'applique dans le cadre de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, et, notamment, de l'article 6 de celle-ci, ne s'oppose pas à ce qu'une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision ; qu'ainsi, la seule circonstance que le préfet n'ait pas, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé M. C... qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder ce dernier comme ayant été privé de son droit à être entendu, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que la décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégale, M. C... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de celle fixant le pays de destination ; que, comme indiqué au point 10, eu égard aux conditions de son séjour en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision contestée, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er: La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au ministre de l'intérieur et à Me B....

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2016, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président,

- M. Laso, président-assesseur,

- M. Lafay, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 décembre. 2016

2

N° 15MA02506


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02506
Date de la décision : 22/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Louis-Noël LAFAY
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : LEONARD

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-22;15ma02506 ?
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