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15/05/2012 | FRANCE | N°09MA03385

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 15 mai 2012, 09MA03385


Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2009 par télécopie, régularisée par courrier le 7 septembre 2009, présentée pour la SARL SOL (SETE ORGANISATION LOISIRS), dont le siège est 17 quai du Général Durand à Sète (34200), représentée par son gérant en exercice, par Me Degryse ; la SARL SETE ORGANISATION LOISIRS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703879, 0703901 du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de c

ontribution à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes, qui lui s...

Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2009 par télécopie, régularisée par courrier le 7 septembre 2009, présentée pour la SARL SOL (SETE ORGANISATION LOISIRS), dont le siège est 17 quai du Général Durand à Sète (34200), représentée par son gérant en exercice, par Me Degryse ; la SARL SETE ORGANISATION LOISIRS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703879, 0703901 du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes, qui lui sont réclamées au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003, ainsi qu'à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes, qui lui sont assignés pour la période de janvier 2001 à décembre 2003, et à la décharge de l'amende de 5 % de l'article 1840 N sexies du code général des impôts mise à sa charge pour 3 413 euros au titre de l'année 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2012,

- le rapport de Mme Haasser, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Considérant que la société requérante exploitait un restaurant, Quai du Général Durand à Sète, sous l'enseigne Le Porto Pollo, et a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2001 à 2003, au terme de laquelle le service des impôts a écarté la comptabilité comme non probante, a reconstitué le chiffre d'affaires de l'entreprise et a notifié les rappels correspondants ; qu'il a, en outre, rectifié le taux de TVA applicable aux ventes qualifiées de ventes à emporter, et a appliqué la majoration pour mauvaise foi ainsi que l'amende de 5 % de l'article 1840 N sexies du code général des impôts pour paiement de factures en espèces ; que la société relève appel du jugement du Tribunal administratif de Montpellier du 23 juin 2009 qui a rejeté l'ensemble de ses demandes en décharge des rappels à l'exception d'un rappel en base de 3 049 euros qualifié de passif non justifié de l'exercice 2001 ;

Sur la fin de non recevoir opposée par l'administration :

Considérant que la réclamation de la SARL SOL du 13 avril 2006, si elle développait des moyens sur l'ensemble de la période vérifiée, ne présentait des conclusions que sur les années 2001 et 2003 ; qu'en application des termes de l'article R. 200-2 alinéa 2 du livre des procédures fiscales, selon lesquels " Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration ", ses conclusions portant sur l'année 2002 sont irrecevables, cette fin de non recevoir pouvant être soulevée à tout moment de la procédure, et invoquée d'office par le juge ; qu'en tout état de cause, suite à l'avis de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires notifié le 20 octobre 2005 que l'administration a décidé de suivre, ainsi qu'elle en a informé le contribuable et le juge judiciaire dans le cadre de la procédure pénale, les suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée notifiés pour l'année 2002 n'ont pas été mis en recouvrement, ce que la société admet en réplique ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires restaurant :

S'agissant de l'année 2001 :

Considérant que le vérificateur a, en l'absence de comptabilité régulière et de conservation du détail des ventes, reconstitué le chiffre d'affaires théorique de l'année 2001 désormais seule en litige, par la méthode dite " des vins ", consistant à calculer le taux de marge sur les vins consommés en effectuant le rapport entre leur prix de vente et leur prix d'achat, soit selon les données comptables, 5 pour 2001, puis à identifier les achats revendus de vins, fixés à 101 328 F après correction par les stocks, et sous déduction des achats de bières, alcools, champagnes, puis de la consommation du gérant M. A et du personnel - calculée sur la base de 33 cl par personne d'un vin à 12 F pour deux repas sur trois cent soixante jours - enfin du vin utilisé pour les préparations de plats, tous éléments soumis au débat contradictoire ainsi qu'il figure dans la notification non contestée sur ce point ; que le chiffre d'affaires des vins, 101 328 F X 5 = 506 640 F, a servi à calculer les recettes totales par application du rapport de 15,55 trouvé entre les recettes telles que dépouillées sur les notes clients entre mi-juillet et fin décembre 2001, soit 506 640/15,55 X 100 = 3 258 153 F soit 496 703 euros ; qu'une telle méthode tient compte au maximum des données propres de l'entreprise ;

Considérant que l'administration apporte, par cette méthode, la preuve, dont la charge lui incombe pour l'année 2001, du bien-fondé de la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise ; qu'une telle méthode n'est ni viciée dans son principe, ni excessivement sommaire ; que la requérante n'apporte pas la preuve d'erreurs dont elle serait entachée, notamment au niveau du " coulage ", en affirmant simplement que les explications en sont multiples, ou que la " méthode ne présente pas la rigueur nécessaire pour en conclure que ces recettes n'ont pas été déclarées " ; qu'au demeurant, le vérificateur n'a pas appliqué un taux forfaitaire de 30 % au titre de la consommation du personnel, mais a chiffré les deux postes retenus à ce titre à 23 000 F et 20 000 F, soit 6 550 euros, montant ayant expressément reçu l'agrément de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

S'agissant de l'année 2003 :

Considérant que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de l'année 2003 en ajoutant aux achats comptabilisés de 68 628 euros les achats effectués chez le fournisseur Promocash par le gérant de la société au nom de l'association " L'avenir des jouteurs sétois " à hauteur de 68 260 euros, et en appliquant à la totalité des achats ainsi dénombrés, soit 136 888 euros, le taux de marge brute globale de 3,71 issu de la reconstitution de l'année 2002, aboutissant à un chiffre d'affaires reconstitué de 136 888 X 3,71 = 507 854 euros ; que le rappel de TVA à ce titre s'élève à 25 848 euros, auquel il faut ajouter le rappel de taxe sur ventes à emporter non justifiées de 1 947 euros et retrancher le crédit de taxe constaté sur 2003 de 10 305 euros, soit au total un rappel de 17 490 euros et non 25 848 euros ;

Considérant que la société soutient que les achats Promocash non comptabilisés n'ont pas été effectués pour son compte, et que le Tribunal de grande instance de Montpellier, dans son jugement du 9 février 2009 devenu définitif, a relaxé M. A en jugeant que les factures établies au nom de cette association n'avaient aucun caractère probatoire ; que, toutefois, cette relaxe concerne la procédure de faux (altération frauduleuse de la vérité dans un écrit) et usage de faux en écriture et n'est motivée que par le fait que les factures n'avaient pas été opposées aux clients tiers victimes de la fausse facturation ; que le Tribunal a constaté, par ailleurs, que les auditions effectuées dans le cadre de la commission rogatoire avaient établi que M. A avait fait des achats chez le grossiste Promocash " sur le compte de l'association l'Avenir des Jouteurs Sétois et les Footeux de la Corniche " (celle-ci n'ayant pas d'existence légale) alors qu'il " ne détenait pas la carte de ces clients " et que le jugement poursuit en affirmant que " l'information a révélé que (ces fausses indications faites par Promocash) permettaient pour des raisons fiscales à deux autres clients, dont M. A, de s'approvisionner en matières premières pour leurs activités commerciales " ; que ce jugement a également établi en sa page 10 que ces achats étaient faits en espèces ; qu'un autre jugement correctionnel du même jour sur plainte de l'administration pour fraude fiscale suite à avis conforme de la commission des infractions fiscales du 1er février 2006, devenu définitif, a condamné M. A pour omission de passation d'écritures comptables et a spécifié " qu'une partie des achats n'a pas été comptabilisée, les témoignages des caissières et des employées de la société Promocash établissant sans ambiguïté que M. A s'est procuré des achats alimentaires destinés à l'établissement Le Porto Pollo auprès de ce grossiste qui lui a facturé ces achats sous une autre identité, ce que les vérifications comptables ont permis de confirmer puisque les achats comptabilisés (de denrées) figurant aux menus et les achats de glace ont fortement baissé en 2003 par rapport à 2001 et 2002 " ; que ce jugement poursuit ainsi : " l'intention frauduleuse est pleinement caractérisée à travers la matérialité de ces actes dont la teneur n'a d'autre but que de fausser des éléments comptables " ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la contestation de la requérante est démentie par la procédure judiciaire diligentée à l'encontre du gérant, dont les faits s'imposent au juge administratif, ainsi que par les données de la comptabilité, qui dégagent une hausse importante et inexpliquée du taux apparent de marge brute en 2003, 5,10 au lieu de 3,27 et 3,16 ;

Considérant qu'en réplique, la SARL SOL soutient que l'abandon de la rectification des recettes de 2002 rétablit la situation initiale telle que déclarée et que les achats revendus reconstitués de 2003 de 136 888 euros ne doivent pas être multipliés par le coefficient global de 3,71 dégagé par la reconstitution faite pour 2002, mais par le coefficient initial déclaré de 3,27 ; que le coefficient de 3,71 résultant d'un chiffre d'affaires reconstitué de 586 806 euros exagéré et finalement abandonné, il y a lieu de faire droit à ce moyen et d'appliquer le coefficient de 3,27, soit un chiffre d'affaires reconstitué de 2003 de 136 888 X 3,27 = 447 624 euros au lieu de 507 854 euros ; que la décharge de TVA s'élève à 9 870 euros et la minoration de recettes à 447 624 euros TTC - 350 129 euros TTC = 97 495 euros TTC soit 81 518 euros HT, et, après soustraction des achats non comptabilisés de 68 261 euros, une minoration de recettes ramenée à 13 257 euros ; qu'il y a lieu d'accorder la décharge d'impôt sur les sociétés et de la contribution à l'impôt sur les sociétés correspondant à la différence entre les recettes omises imposées de 63 616 euros et les recettes omises recalculées de 13 257 euros ;

En ce qui concerne le taux de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'aux termes de l'article 278 du code général des impôts : " Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 19,60 % " ; qu'aux termes de l'article 278 bis du même code : " La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % En ce qui concerne les opérations d'achats... portant sur les produits suivants ... 2° Produits destinés à l'alimentation humaine... " ;

Considérant que la société requérante, qui exploitait un restaurant et offrait donc des ventes à consommer sur place passibles du taux normal de 19,60 %, ne prouve pas, par de simples allégations de principe, la réalité de ventes à emporter, non comptabilisées comme telles, qui seraient passibles du taux réduit de la taxe ; qu'en particulier, elle n'a pu fournir les cahiers de recettes qui, selon elle, mentionnaient les ventes à emporter, ni n'a pu justifier acheter des récipients jetables qui auraient été un indice de l'existence de telles ventes, élément que le vérificateur a cité dans le but d'en faciliter la preuve et qui ne peut être qualifié d'" élément non pertinent " ;

Sur les majorations de 40 % pour mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ... " ;

Considérant que l'administration établit en l'espèce la mauvaise foi de la société par l'absence de conservation voire la destruction volontaire de documents comptables informatiques et l'existence jointe à l'importance des achats non comptabilisés ; que la mauvaise foi est également patente pour la déduction abusive d'une taxe sur la valeur ajoutée sur des loyers non assujettis à la taxe et acquittés auprès d'une société civile immobilière dirigée par le même gérant que la redevable, ce dernier ne pouvant ignorer ses obligations et ces pratiques ne pouvant être imputées à de simples erreurs mais révélant une volonté manifeste d'éluder l'impôt ; que les majorations de 40 % appliquées par le service ne sont donc pas privées de base légale ;

Sur l'amende de 5 % pour paiements d'achats en espèces :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 112-7 du code monétaire et financier dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les infractions aux dispositions de l'article L. 112-6 (paiements en espèces) sont constatées par des agents désignés par arrêté du ministre chargé du budget. Les contrevenants sont passibles d'une amende fiscale dont le montant ne peut excéder 5 % des sommes indûment réglées en numéraire. Cette amende, qui est recouvrée comme en matière de timbre, incombe pour moitié au débiteur et au créancier ; mais chacun d'eux est solidairement tenu d'en assurer le règlement total " ; que l'article 1840 N sexies du code général des impôts reprend ces dispositions en précisant " Conformément à l'article L. 112-7 du code monétaire et financier, les infractions aux dispositions de l'article L. 112-6 du code précité sont passibles d'une amende fiscale ne pouvant excéder 5 % des sommes indûment réglées en numéraire... " ;

Considérant qu'ainsi qu'il l'a été dit ci-dessus, l'administration apporte la preuve d'achats effectués par le gérant de la société pour le compte de cette dernière auprès du fournisseur Promocash à hauteur de 68 260 euros durant l'année 2003 ; que ces achats ayant été payés en espèces, ainsi que l'établit le jugement pénal, c'est à bon droit que l'administration a fait application de l'amende prévue par les dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL SETE ORGANISATION LOISIRS n'est que partiellement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'accorder à la SARL SETE ORGANISATION LOISIRS une quelconque somme en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La SARL SETE ORGANISATION LOISIRS est déchargée des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont réclamés au titre de l'année 2003 à hauteur du montant de 9 870 euros et des pénalités correspondantes. Elle est déchargée également au titre de l'exercice 2003 des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de la contribution sur l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes, correspondant à une base de 63 616 euros - 13 257 euros = 50 359 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 23 juin 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL SETE ORGANISATION LOISIRS et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

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N° 09MA03385 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA03385
Date de la décision : 15/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-03-01-02 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal. Vérification de comptabilité.


Composition du Tribunal
Président : Mme NAKACHE
Rapporteur ?: Mme Anita HAASSER
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : SCP ARQUE et DEGRYSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-05-15;09ma03385 ?
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