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26/01/2006 | FRANCE | N°02MA01315

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 26 janvier 2006, 02MA01315


Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002, présentée pour la Société Civile Immobilière (SCI) METACHA, représentée par son représentant légal, et dont le siège social est ..., par la SCP d'avocats Ferrari-Tourral ;

La SCI METACHA demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 98-1358 en date du 7 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Villeuneuve-les-Béziers à lui verser :

- la somme de 167.775,62 francs (soit 25.577,23 euros), augmentée des intérêts au taux l

gal majoré de cinq points à compter du 8 octobre 1996, correspondant au montant de la p...

Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002, présentée pour la Société Civile Immobilière (SCI) METACHA, représentée par son représentant légal, et dont le siège social est ..., par la SCP d'avocats Ferrari-Tourral ;

La SCI METACHA demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 98-1358 en date du 7 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Villeuneuve-les-Béziers à lui verser :

- la somme de 167.775,62 francs (soit 25.577,23 euros), augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 8 octobre 1996, correspondant au montant de la participation exigée des constructeurs indûment versée en application d'un permis de construire délivré le 11 juin 1992,

- la somme de 42.440,10 francs (soit 6.469,95 euros) au titre du préjudice subi lors de la dation en paiement à perte de la parcelle de 1.761 m² dont elle était propriétaire,

- la somme de 50.000 francs au titre du préjudice résultant de la dation en paiement forcée de la parcelle en cause,

2°/ de condamner la commune de Villeneuve-les-Béziers à lui verser lesdites sommes, le préjudice résultant de la dation en paiement forcée de la parcelle en cause étant réactualisé à la somme de 7.600 euros ;

3°/ de condamner la commune de Villeneuve-les-Béziers à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2006,

- le rapport de M. Laffet, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SCI METACHA relève appel du jugement en date du 7 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Villeneuve-les-Béziers soit condamné, d'une part, à lui rembourser à hauteur de 167.775,62 francs le montant de la participation au titre du programme d'aménagement d'ensemble de La Montagnette mise à sa charge par le permis de construire qui lui a été délivré le 11 juin 1992, somme augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 8 octobre 1996, d'autre part, à lui verser la somme de 42.440,10 francs au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi lors de la dation en paiement d'une partie du terrain dont elle est propriétaire et, enfin, à lui verser une somme de 50.000 francs au titre du préjudice résultant de ladite dation ;

Sur les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance par la commune de Villeneuve-les-Béziers :

Considérant, d'une part, qu'en vertu de l'article XIII des statuts de la SCI METACHA, cette société est administrée par un gérant qui exerce toutes actions judiciaires tant en demandant qu'en défendant ; que, dès lors, ce dernier était habilité à introduire, au nom de la SCI, une action dirigée contre la commune de Villeneuve-les-Béziers en vue d'obtenir la condamnation de cette collectivité à lui rembourser des sommes qui, selon elle, auraient été mises indûment à sa charge ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R.102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur à la date d'enregistrement de la demande devant le Tribunal administratif de Montpellier : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans le délai de deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; qu'il résulte de cette disposition que le délai de deux mois qu'elle fixe ne s'applique pas aux demandes dirigées contre les actes relatifs à la perception ou à la répétition de tout ou partie des sommes nécessaires au financement de travaux publics ; que la participation mise à la charge de la SCI METACHA en application de la délibération du 12 décembre 1988 du conseil municipal de Villeneuve-les-Béziers instituant un programme d'aménagement d'ensemble était destinée au financement de travaux publics ; qu'ainsi, la demande, enregistrée devant le Tribunal administratif de Montpellier le 9 avril 1998, présentée par la SCI METACHA en vue d'obtenir la restitution de la participation à laquelle elle a été assujettie au titre du programme d'aménagement d'ensemble du secteur de La Montagnette était recevable, bien que formée plus de deux mois après la notification du permis de construire délivré le 11 juin 1992 mettant à sa charge la participation en litige ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Villeneuve-les-Béziers n'est pas fondée à soutenir que la demande présentée par la SCI METACHA devant le Tribunal administratif de Montpellier était irrecevable ;

Au fond :

Sur l'exigibilité de la participation :

Considérant qu'en application de la délibération en date du 12 décembre 1988 du conseil municipal de Villeneuve-les-Béziers instituant un programme d'aménagement d'ensemble, et à l'occasion de la délivrance d'un permis de construire en date du 11 juin 1992 portant sur la réalisation d'un entrepôt industriel de 750 m² de surface hors oeuvre nette, la commune de Villeneuve-les-Béziers a mis à la charge de la SCI METACHA, propriétaire d'un terrain d'une superficie de 4.800 m², une participation de 364.128 francs dans des conditions à fixer par une convention à intervenir ; qu'une convention a été conclue le 3 mai 1995 entre les deux parties concernées pour arrêter, en définitive, le montant de la participation à 221.321,03 francs toutes taxes comprises (TTC), dont la SCI METACHA devait s'acquitter, d'une part, par une dation en paiement de 1.761 m² de terrain au prix de 178.500 francs TTC et, d'autre part, par le versement d'une somme résiduelle de 42.821,03 francs TTC ; qu'il est constant que cette somme a été payée le 12 septembre 1995 et que la dation est intervenue par acte dressé devant notaire les 7 et 8 octobre 1996 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.332-9 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date d'approbation par le conseil municipal de Villeneuve-les-Béziers du programme d'aménagement d'ensemble du secteur de La Montagnette : Dans les secteurs du territoire de la commune où un programme d'aménagement d'ensemble a été approuvé par le conseil municipal, celui-ci peut mettre à la charge des bénéficiaires d'autorisations de construire tout ou partie des dépenses de réalisation des équipements publics correspondant aux besoins des habitants actuels ou futurs du secteur concerné et rendus nécessaires par la mise en oeuvre du programme d'aménagement. Dans les communes où la taxe locale d'équipement est instituée, les constructions édifiées dans ces secteurs sont exclues du champ d'application de la taxe. Le conseil municipal détermine le secteur d'aménagement, la nature, le coût et le délai prévus pour la réalisation du programme d'équipements publics. Il fixe, en outre, la part des dépenses de réalisation de ce programme qui est à la charge des constructeurs, ainsi que les critères de répartition de celle-ci entre les différentes catégories de constructions, qu'aux termes de l'article L.332-28 du code de l'urbanisme en vigueur à la date de la convention signée le 3 mai 1995 : Les contributions mentionnées ou prévues (…) à l'article L.332-9 sont prescrites, selon le cas, par l'autorisation de construire, l'autorisation de lotir, l'autorisation d'aménager un terrain destiné à l'accueil d'habitations légères de loisirs ou l'acte approuvant un plan de remembrement. Cette autorisation ou cet acte en constitue le fait générateur. Il en fixe le montant, la superficie s'il s'agit d'un apport de terrains (…) ; qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L.332-9 et L.332-28 du code de l'urbanisme que, si les participations exigibles au titre d'un programme d'aménagement d'ensemble ont pour objet de couvrir la part des dépenses de réalisation de ce programme fixé par le conseil municipal, la participation exigible de chaque bénéficiaire d'une autorisation de construire ne doit pas être sans lien avec l'importance de la construction autorisée ;

Considérant que, par délibération du 12 décembre 1988, le conseil municipal de Villeneuve-les-Béziers a approuvé le programme d'aménagement d'ensemble du secteur de La Montagnette ; qu'après avoir arrêté la liste des équipements publics à réaliser et fixé le délai de réalisation de la première tranche, il s'est borné à constater que le coût global de l'opération était de 14.232.000 francs TTC, soit un coût d'équipements moyens au mètre carré de 83 francs TTC, dont 80 % du montant seraient mis à la charge des bénéficiaires des autorisations de construire, les 20 % restant étant pris en charge par la commune ; qu'ainsi, en se bornant à prendre exclusivement en compte la superficie du terrain constructible sans prendre en considération l'importance des constructions effectivement autorisées pour fixer le montant de chaque participation, le conseil municipal de Villeneuve-les-Béziers a méconnu les dispositions des articles L.332-9 et L.332-28 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, les dispositions relatives à la participation financière contenue dans la convention conclue le 3 mai 1995, prévue par le permis de construire délivré le 11 juin 1992 à la SCI METACHA par le maire de Villeneuve-les-Béziers manquent de base légale ; que, par suite, la société appelante est fondée à soutenir que cette participation a été mise indûment à sa charge, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif de Montpellier ;

Sur le montant des sommes à restituer :

Considérant que, selon l'article L.332-10 du code de l'urbanisme, la participation prévue à l'article L.332-9 précité de ce même code est exigée sous forme de contribution financière ou, en accord avec le demandeur de l'autorisation, sous forme d'exécution de travaux ou d'apports de terrains ; qu'ainsi, la dation en paiement que la SCI METACHA a effectuée dans les conditions susanalysées au profit de la commune de Villeneuve-les-Béziers fait partie de la participation exigée d'elle au titre du programme d'aménagement d'ensemble ; que, dès lors, ladite société est en droit d'en obtenir la restitution ;

Considérant que la participation mise à la charge de la SCI METACHA par la convention qu'elle a signée le 3 mai 1995 avec la commune de Villeneuve-les-Béziers s'élève à la somme de 221.321,03 francs (33.740,17 euros) toutes taxes comprises ; qu'il résulte de l'instruction que cette somme a été acquittée sous forme d'une dation en paiement et du versement d'un solde de 42.821,03 francs (6.528,02 euros) ; que dès lors que la participation exigée par la commune est irrégulière, la SCI METACHA est fondée à en obtenir intégralement sa restitution ;

Considérant, en revanche, que le préjudice qu'allègue également avoir subi la société requérante du fait qu'elle aurait pu négocier la partie du terrain ayant fait l'objet de la dation à un prix supérieur en la cédant à une société propriétaire de deux parcelles voisines permettant ainsi le raccordement de ces dernières pour former un seul tènement revêt un caractère purement éventuel qui ne saurait être indemnisé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la commune de Villeneuve-les-Béziers à restituer à la SCI METACHA la somme de 33.740,17 euros au titre de la participation indûment mise à sa charge dans le cadre du programme d'aménagement d'ensemble du secteur dit de La Montagnette ;

Sur les intérêts :

Considérant qu'aux termes de l'article L.332-30 du code de l'urbanisme dans sa rédaction résultant de la loi du 29 janvier 1993 : Les taxes et contributions de toute nature qui sont obtenues ou imposées en violation des dispositions des articles L.311-4 et L.332-6 sont réputées sans cause ; les sommes versées ou celles qui correspondent au coût des prestations fournies sont sujettes à répétition. L'action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l'obtention des prestations indûment exigées (…). Les sommes à rembourser au titre des deux alinéas précédents portent intérêt au taux légal majoré de cinq points ;

Considérant que, si la SCI METACHA sollicite le versement des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 8 octobre 1996, date de la dation en paiement, en vertu du principe dont s'inspirent les dispositions de l'article 1378 du code civil, il n'y a lieu de fixer le point de départ des intérêts au jour de paiement que lorsqu'il y a eu mauvaise foi de la part de celui qui a reçu les sommes dont il est demandé répétition ; que l'instruction du dossier ne permet pas d'établir la mauvaise foi de la commune de Villeneuve-les-Béziers ; que dès lors le point de départ des intérêts doit être fixé à la date de réception par la commune de Villeneuve-les-Béziers de la demande préalable formée le 17 février 1998 par la SCI METACHA ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SCI METACHA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler ledit jugement et de condamner la commune de Villeneuve-les-Béziers à payer à la SCI METACHA la somme de 33.740,17 euros (221.321,03 francs), augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter de la date de réception par la commune de la demande préalable en répétition formée le 17 février 1998 par la SCI METACHA ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner la commune de Villeneuve-les-Béziers à payer à la SCI METACHA une somme de 1.500 euros ;

Considérant, en revanche, que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la SCI METACHA, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Villeneuve-les-Béziers la somme qu'elle demande à ce même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 98-1358 en date du 7 mai 2002 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La commune de Villeneuve-les-Béziers est condamnée à payer à la SCI METACHA la somme de 33.740,17 euros (trente-trois mille sept cent quarante euros dix-sept centimes). Ladite somme portera intérêt au taux légal majoré de cinq points à compter de la date de réception par la commune de la demande préalable en répétition formée le 17 février 1998 par la SCI METACHA.

Article 3 : La commune de Villeneuve-les-Béziers versera une somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) à la SCI METACHA en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCI METACHA est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Villeneuve-les-Béziers tendant au bénéfice de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI METACHA, à la commune de Villeneuve-les-Béziers et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 02MA01315

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA01315
Date de la décision : 26/01/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. Bernard LAFFET
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : SCP FERRARI-TOURRAL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-01-26;02ma01315 ?
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