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29/06/2004 | FRANCE | N°02MA02345

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 29 juin 2004, 02MA02345


Vu I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 21 novembre 2002 sous le n° 02MA02345 présentée pour la COMMUNE D'OTA, représentée par son maire en exercice, par Me B... avocat ;

La COMMUNE D'OTA demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 17 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée à payer au bureau d'études techniques Corse Conseil Coordination la somme de 9.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 1999 ;

2°/ avant dire droit, d'ordonner une expertise

en vue, d'une part, d'évaluer la valeur des prestations effectivement réalisées pa...

Vu I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 21 novembre 2002 sous le n° 02MA02345 présentée pour la COMMUNE D'OTA, représentée par son maire en exercice, par Me B... avocat ;

La COMMUNE D'OTA demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 17 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée à payer au bureau d'études techniques Corse Conseil Coordination la somme de 9.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 1999 ;

2°/ avant dire droit, d'ordonner une expertise en vue, d'une part, d'évaluer la valeur des prestations effectivement réalisées par le bureau d'études Corse Conseil Coordination et, d'autre part, d'apprécier financièrement et économiquement le préjudice qu'elle a subi ;

Elle soutient que le Tribunal administratif de Bastia s'est livré à une appréciation empirique de l'indemnité à laquelle pouvait prétendre le bureau d'études Corse Conseil Coordination ; qu'il appartenait au bureau d'études d'intégrer dans son projet les impératifs de la réglementation en vigueur et les délais d'instruction du dossier compte tenu du caractère exceptionnel du site et de son classement ; que, faute pour celui-ci d'avoir déterminé précisément la nature des actions et démarches nécessaires à l'obtention des autorisations, la réalisation du projet a été retardée ; que seule une expertise est en mesure de déterminer précisément le préjudice financier qu'elle a subi ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe de la Cour le 16 juillet 2003, présenté pour le bureau d'études Corse Conseil Coordination, dont le siège social est situé ..., représenté par son représentant légal, M. Jean-François de A..., domicilié es qualité au dit siège, par Me X..., avocat ;

Le bureau d'études Corse Conseil Coordination demande à la Cour, d'une part, à titre principal, de rejeter la requête et par la voie de l'appel incident de condamner la COMMUNE D'OTA à lui payer la somme de 73.867,50 F, et, d'autre part, de condamner la COMMUNE D'OTA à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'existence d'un contrat est manifeste et sa matérialisation ne peut pas être sérieusement mise en doute ; que ce contrat a été rompu de manière abusive par courrier en date du 3 décembre 1998 ; que la rupture n'est justifiée ni par l'intérêt du service, ni par une faute du titulaire du marché ; que la décision de résiliation n'est pas motivée ; que la procédure de résiliation n'a pas été suivie puisqu'il a été informé de la résiliation par un envoi ordinaire ; que la résiliation valant réception, toutes les conséquences s'y attachant doivent produire leurs effets et, parmi ceux-ci, l'administration doit à son cocontractant les paiement des prestations exécutées ; qu'en outre, l'administration doit indemniser les pertes supportées par le titulaire du marché ainsi que les gains dont il a été privés ; qu'ainsi la commune doit lui payer la partie des travaux qu'il a effectués et correspondant à la phase études de la convention ; qu'à supposer même qu'un motif d'intérêt général justifie la décision litigieuse, la résiliation impliquait nécessairement son indemnisation et, en tout état de cause, le paiement des prestations réalisées ; qu'au surplus le paiement des prestations qu'il a réalisées se justifie sur le terrain de l'enrichissement sans cause et de la responsabilité pour faute ; que le maire a reconnu lui-même l'utilité et la valeur du travail qu'il a réalisé ; que, s'il y a nullité du contrat, celle-ci résulte de la faute commise par le maire de la COMMUNE DE PORTO D'OTA ; que le maire n'a jamais cessé de lui faire croire qu'il était bien titulaire d'une convention ; qu'en refusant de le payer l'administration a fait preuve de mauvais vouloir constitutif d'une faute de nature à engager sa responsabilité ; que la commune ne saurait se prévaloir de sa propre turpitude pour refuser de l'indemniser ; que son préjudice réel doit être évalué à 11.261,03 euros ; que la demande de la requérante tendant à voir nommer un expert est dépourvue de tout intérêt ; que l'expert ne pourrait que constater qu'il a parfaitement rempli ses obligations contractuelles ;

Vu II, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 juillet 2003 sous le n° 03MA002201, présentée pour le bureau d'études Corse Conseil Coordination par Me X..., avocat ;

Le bureau d'études Corse Conseil Coordination demande à la Cour, d'une part, d'enjoindre à la COMMUNE D'OTA d'exécuter le jugement rendu par le Tribunal administratif de Bastia le 17 octobre 2002, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard au delà du délai de huit jours courant à compter de la date de notification de la décision à intervenir et, d'autre part, de condamner la COMMUNE D'OTA à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les dispositions de la décision du Tribunal administratif de Bastia du 17 octobre 2002 demeurent inappliquées malgré la mise en demeure qu'il lui a adressée ; que le silence gardé par l'administration sur cette demande justifie son action ; que le comportement de la COMMUNE D'OTA, qui refuse manifestement d'exécuter le jugement rendu par le Tribunal administratif de Bastia, justifie qu'une astreinte soit prononcée à son encontre ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 2004 :

- le rapport de M. Firmin, Rapporteur,

- les observations de Me X... pour le bureau d'études Corse Conseil Coordination ;

- et les conclusions de M. Bédier, Commissaire du gouvernement.

Considérant que le bureau d'études Corse Conseil Coordination a établi, le 8 novembre 1996, à la demande de la COMMUNE D'OTA qui l'avait chargé d'apporter une réponse architecturale, technique et économique à son projet de construction d'un aquarium à la marine de Porto, une convention de maîtrise d'oeuvre d'un montant de 175.000 F hors taxes ; que, sur la base de cette convention, le bureau d'études Corse Conseil Coordination a produit le dossier de consultation d'appel d'offres, rédigé le texte de l'annonce légale d'appel à candidature, a participé, comme membre à voix consultative, à la commission d'appel d'offres qui a désigné, le 21 mars 1997, l'adjudicataire provisoire et a ensuite assuré le suivi des opérations ; que, toutefois, la COMMUNE D'OTA a mis un terme à cette collaboration par courrier du 3 décembre 1998 par lequel elle demandait au bureau d'études Corse Conseil Coordination de lui remettre toutes les pièces relatives à l'opération précédemment décrite ; que le bureau d'études Corse Conseil Coordination ayant pris acte de cette rupture a, par courrier du 6 décembre 1998, adressé à la COMMUNE D'OTA sa note d'honoraires pour les missions qu'il avait remplies ; que la COMMUNE D'OTA ayant refusé de régler intégralement cette note d'honoraires, le bureau d'études Corse Conseil Coordination a saisi le Tribunal administratif de Bastia d'une demande tendant à la condamnation de la COMMUNE D'OTA à lui payer la somme de 73.867 F majorée des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 1999 ; que, dans la première instance, la COMMUNE D'OTA relève appel du jugement du 17 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a partiellement fait droit à cette demande tandis que, dans la deuxième instance, le bureau d'études Corse Conseil Coordination demande à la Cour d'enjoindre à la COMMUNE D'OTA d'exécuter le jugement rendu par le Tribunal administratif de Bastia le

17 octobre 2002, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard au delà du délai de huit jours courant à compter de la date de notification de la décision à intervenir ;

Sur l'appel de la COMMUNE D'OTA et l'appel incident du bureau d'études Corse Conseil Coordination :

Considérant que pour critiquer le jugement du Tribunal administratif de Bastia du 17 octobre 2002 la COMMUNE D'OTA soutient que les premiers juges se sont livrés à une appréciation empirique des droits du bureau d'études Corse Conseil Coordination et n'ont pas tenu compte de la faute que celui-ci aurait commise en négligeant la réglementation en vigueur et les délais d'instruction du dossier ce qui aurait entraîné un retard dans l'exécution du projet tandis que le bureau d'études Corse Conseil Coordination se prévaut du contrat qui, selon lui, le lierait à la commune et, subsidiairement, de la faute que celle-ci aurait commise en passant un contrat nul et de nul effet ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la convention de maîtrise d'oeuvre du 8 novembre 1996 dont se prévalent également les parties n'a jamais été signée par la collectivité ; qu'au surplus cette convention n'a pas été élaborée dans les conditions fixées par l'article 314 bis du code des marchés publics alors applicable ; qu'ainsi, aucune obligation contractuelle n'ayant pu naître à la charge de l'une ou l'autre partie, ni la COMMUNE D'OTA, ni le bureau d'études Corse Conseil Coordination ne sont fondés à invoquer un fondement contractuel pour obtenir la condamnation de l'autre partie ;

Considérant, en deuxième lieu, que la COMMUNE D'OTA ne discute pas la réalité des prestations exécutées par le cabinet d'études Corse Conseil Coordination pour le paiement desquelles elle avait d'ailleurs proposé, par courrier du 19 mars 1999, de payer la somme de 36.750 F HT mais l'évaluation qui en a été faite par les premiers juges ; qu'en se bornant à contester le montant de l'indemnité allouée par les premiers juges sans produire aucun justificatif de nature à remettre en cause l'appréciation à laquelle ceux-ci se sont livrés la COMMUNE D'OTA ne met pas le juge du fond en état d'apprécier la portée de ses allégations ;

Considérant, en troisième lieu, que si le bureau d'études Corse Conseil Coordination fonde également ses conclusions incidentes sur la faute qu'a commise la COMMUNE D'OTA en le laissant exécuter les prestations, objets du projet de convention du 8 novembre 1996, sans conclure de marché, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu à son encontre la faute qu'il a commise en exécutant des prestations de maîtrise d'oeuvre sur le fondement d'une convention en l'état de projet et élaborée dans des conditions irrégulières, ce qu'il ne pouvait ignorer en sa qualité de professionnel ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise demandée par la COMMUNE D'OTA que ni cette dernière, ni le bureau d'études Corse Conseil Coordination ne sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges l'ont condamnée à payer au bureau d'études techniques Corse Conseil Coordination la somme de 9.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 1999 ; qu'il y a donc lieu de rejeter sa requête ;

Sur les conclusions du bureau d'études Corse Conseil Coordination à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-4 du code de justice administrative : En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. ; qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ; qu'enfin l'article L.911-3 du même code dispose que : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L.911-1 et L.911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ;

Considérant que, sur le fondement des dispositions ci-dessus rappelées, le bureau d'études Corse Conseil Coordination présente des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte à la COMMUNE D'OTA de lui payer les sommes auxquelles elle a été condamnée en application du jugement du Tribunal administratif de Bastia du 17 octobre 2002 ; que l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Bastia, confirmé par le présent arrêt, implique nécessairement une telle mesure ; qu'il ressort des pièces du dossier que la COMMUNE D'OTA n'y a pas procédé ; qu'il y a lieu, par suite, de prescrire ce paiement et, compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire, de prononcer contre la commune, à défaut pour elle de justifier de l'exécution du jugement attaqué et du présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une astreinte de 100 euros par jour jusqu'à la date à laquelle le jugement précité et le présent arrêt auront reçu exécution ;

Sur les conclusions du bureau d'études Corse Conseil Coordination tendant, dans les deux instances, à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées du bureau d'études Corse Conseil Coordination et de condamner la COMMUNE D'OTA à lui payer la somme globale de 1.000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la COMMUNE D'OTA, enregistrée sous le

n° 02MA002345 et l'appel incident du bureau d'études Corse Conseil Coordination sont rejetés.

Article 2 : Il est enjoint à la COMMUNE D'OTA de payer au bureau d'études Corse Conseil Coordination la somme de 9.000 euros (neuf mille euros) majorée des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 1999 ainsi que la somme de

1.000 euros (mille euros) en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La COMMUNE D'OTA paiera au bureau d'études Corse Conseil Coordination la somme de 1.000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Une astreinte est prononcée à l'encontre de la COMMUNE D'OTA si elle ne justifie pas avoir, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, exécuté le jugement du Tribunal administratif de Bastia du

17 octobre 2002, ensemble le présent arrêt et jusqu'à la date de cette exécution. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros (cent euros) par jour à compter de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 5 : La COMMUNE D'OTA communiquera à la Cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter le jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'OTA, au cabinet d'études Corse Conseil Coordination et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 15 juin 2004, où siégeaient :

M. Bernault, président de chambre,

M. Y... et M.Firmin, premiers conseillers,

Prononcé à Marseille, en audience publique le 29 juin 2004.

Le rapporteur

signé

Jean-Pierre Firmin

Le président,

signé

François Bernault

Le greffier,

signé

Danièle Z...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Classement CNIJ : 39-01-01

C

N° 02MA02345, 03MA02201 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA02345
Date de la décision : 29/06/2004
Sens de l'arrêt : Condamnation astreinte
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre FIRMIN
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : SALASCA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-29;02ma02345 ?
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