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15/06/2004 | FRANCE | N°00MA00591

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 15 juin 2004, 00MA00591


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 mars 2000, sous le n° 00MA00591 présentée pour la SOCIETE GENIE PUBLIC (GEP) dont le siège social est 96, Val Carei, à Menton (06500), par Me D'Aietti, avocat ;

La SOCIETE GENIE PUBLIC demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 7 décembre 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, qui lui avaient été réclamées au titre des exercices clos en 1989, 1

990, et 1991, ainsi que des pénalités y afférentes, et de l'amende qui lui a été ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 mars 2000, sous le n° 00MA00591 présentée pour la SOCIETE GENIE PUBLIC (GEP) dont le siège social est 96, Val Carei, à Menton (06500), par Me D'Aietti, avocat ;

La SOCIETE GENIE PUBLIC demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 7 décembre 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, qui lui avaient été réclamées au titre des exercices clos en 1989, 1990, et 1991, ainsi que des pénalités y afférentes, et de l'amende qui lui a été infligée, en application de l'article 1763 A du code général des impôts ;

2°/ de la décharger des impositions litigieuses ;

3°/ de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10.000 F, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient :

- que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté son argumentation relative à la réintégration d'intérêts, pour une avance consentie à M. X ; qu'en effet, le solde créditeur du compte courant de M. X dans les écritures de la société s'élevait à 182.449,04 F au 31 décembre 1989, et à 676.425,27 F au

31 décembre 1991, ce qui est significatif des relations commerciales étroites entre les deux entreprises ; que sur ce point, le tribunal administratif a procédé à un renversement de la charge de la preuve ;

- que, contrairement à ce qu'a énoncé le tribunal, les frais de remise à neuf de l'engin de terrassement ne pouvaient en aucune manière prolonger notablement la durée d'utilisation de ce bien, et que l'administration n'établit nullement ce fait ;

- que contrairement à ce que soutient le jugement, la comptabilisation d'une provision pour frais à payer à la clôture d'un exercice fait obstacle au redressement opéré sur l'exercice qui comptabilise la charge ;

- que contrairement à ce qui est soutenu, c'est à tort qu'ont été rejetées les charges, dont elle est en mesure d'établir le caractère nécessaire pour l'obtention des marchés ;

- que les amendes étant consécutives aux réintégrations litigieuses, devront être déchargées par voie de conséquence ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le

7 août 2000, le présenté par le ministre de l'économie des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la Cour de rejeter la requête de la SOCIETE GENIE PUBLIC ;

Il soutient :

- que le fait pour une entreprise de consentir une avance sans intérêt constitue un acte étranger à la gestion normale, et que c'est au contribuable qu'il appartient, en cas de litige, de justifier de l'intérêt pour la société de cet acte ; que la circonstance que les deux sociétés soient en relations étroites ne suffit pas pour justifier cette avance ; que, de plus, le compte courant de M. X n'est devenu important qu'à compter du mois de novembre 1991, et qu'auparavant, le solde moyen de compte courant, environ 200.000 F, était inférieur à la créance détenue par la société anonyme sur son directeur ;

- que l'engin de terrassement étant totalement amorti, le fait de remettre à neuf son radiateur et son moteur constituait un accroissement de l'actif ;

- que la société contribuable a comptabilisé en 1989, des frais engagés en 1988, pour un montant de 40.410 F, en infraction avec les dispositions suivant lesquelles les frais généraux doivent être comptabilisés dans les résultats de l'exercice au cours duquel ils ont été engagés ; que si la société soutient qu'elle avait inscrit une provision pour frais à payer, au cours de l'exercice 1988, elle n'établit pas avoir réintégré cette somme dans les produits de l'exercice clos en 1989 ;

- que les dépenses de restauration, de réparations de véhicules personnels du contribuable, et d'achat des bijoux, ainsi que celles de déplacement et de restauration dans des pays dans lesquels la société n'exerce aucune activité, ne peuvent être considérées comme ayant été engagées dans le cadre de l'activité de l'entreprise ;

- que l'amende est justifiée, la société n'ayant pas répondu dans les trente jours à la demande de désignation des bénéficiaires, contenue dans la notification de redressements du 17 décembre 1992 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2004 :

- le rapport de Mme Paix, Rapporteur,

- et les conclusions de M. Bédier, Commissaire du gouvernement.

Considérant que la SOCIETE GENIE PUBLIC a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1989, 1990, et 1991 ; qu'à l'issue de cette procédure, des redressements lui ont été notifiés et qu'une amende a été mise à sa charge en application de l'article 1763 A du code général des impôts ; que la société interjette régulièrement appel du jugement, en date du 7 décembre 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, qui lui avaient été réclamées au titre des exercices clos en 1989, 1990, et 1991, ainsi que des pénalités y afférentes, ainsi que de l'amende litigieuse ;

S'agissant des avances consenties sans intérêt :

Considérant que les prêts sans intérêt ou l'abandon de créances accordées par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages que l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêt consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficiée en retour de contrepartie ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE GENIE PUBLIC a consenti, le 30 novembre 1989, un prêt à l'entreprise individuelle de son président-directeur général, M. X pour un montant de 365.290 F, créance qui n'était pas encore recouvrée au 31 décembre 1991 ; que l'administration fiscale a réintégré dans chacun des exercices clos en 1989, 1990, et 1991, les intérêts, au taux de 9 %, afférents aux sommes prêtées ; qu'en se bornant à soutenir que le compte courant de M. X dans l'entreprise la SOCIETE GENIE PUBLIC serait créditeur, ce qui témoignerait des liens étroits existant entre la société anonyme GEP et l'entreprise individuelle de son président-directeur général, la société appelante ne justifie pas des contreparties dont elle a bénéficié du fait de cet octroi de prêt sans intérêt ; que dès lors, et contrairement à ce que soutient la société, le Tribunal administratif de Nice n'a pas inversé la charge de la preuve et qu'elle n'est pas fondée à solliciter la décharge des sommes réintégrées à ce titre, dans chacun des exercices 1989, 1990, et 1991 ;

S'agissant des immobilisations passées en charges :

Considérant que, pour l'application du premièrement du 1 de l'article 39 du code général des impôts, seuls peuvent être prises en compte dans les frais généraux et constituer des charges d'un exercice déterminé, les travaux de réparations et d'entretien qui concourent à maintenir en état d'usage et de fonctionnement les différents éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise ; que tel n'est pas le cas des dépenses qui ont eu pour objet de prolonger de manière durable la durée probable d'utilisation du bien en cause, alors même que cet élément d'actif est entièrement amorti ; que, pour l'application de ces dispositions, qui portent sur les charges de l'entreprise, il appartient au contribuable de justifier non seulement du montant des sommes correspondantes, mais de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE GENIE PUBLIC a déduit en charges des résultats de l'exercice clos en 1991, des sommes de 2.300 F, et 41.075 F, pour la remise à neuf d'un moteur et d'un radiateur d'un engin de terrassement, sommes que le vérificateur a réintégré comme constituant des immobilisations non déductibles ; que toutefois il ne résulte pas de l'instruction que ces dépenses d'ailleurs inférieures à 50.000 F et réalisées sur un engin d'une valeur de 633.000 F, aient, dans les circonstances de l'espèce, alors que le moteur de l'engin n'a pas été remplacé, eu pour effet de prolonger notablement l'utilisation du bien ; que par conséquent elles doivent être regardées comme ne constituant que des travaux de réparation et d'entretien ayant pour objet de le maintenir en état de fonctionnement ; que, dans ces conditions, la société est fondée à demander la décharge du redressement issu de la réintégration de ces sommes, pour un montant total de 43.375 F et donc la réduction de la base de l'impôt sur les sociétés pour l'exercice clos le 31 décembre 1991 de ce montant ;

S'agissant des charges sur exercices antérieurs :

Considérant que la société conteste la réintégration, au titre de l'exercice 1989, d'une somme de 40.410 F, comptabilisée par elle au titre de cet exercice, mais relative à des frais engagés au titre de l'exercice clos en 1988 ; qu'il est constant que les charges dont s'agit n'ont pas été engagées au titre de l'exercice 1989 ; que, par ailleurs, si la société soutient qu'il s'agirait de charges ayant fait l'objet de provisions au titre de l'exercice antérieur, elle établit nullement avoir régularisé, dans ses écritures, cette opération ; que ses prétentions sur ce point ne peuvent donc également qu'être rejetées ;

S'agissant des charges estimées par le service comme non engagées dans l'intérêt de l'entreprise :

Considérant qu'aux termes de l'article 39-5 du code général des impôts : Sont déductibles les dépenses suivantes : les frais de voyage de déplacement, les dépenses des charges afférentes aux véhicules, les cadeaux, les frais de réception, y compris les frais de restaurants... Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise. ;

Considérant qu'au cours de la vérification de comptabilité ont été réintégrées au titre de chacun des trois exercices concernés, diverses dépenses de la nature de celles énumérées ci-dessus ; que, pas davantage en appel devant les premiers juges, la SOCIETE GENIE PUBLIC n'établit que les frais de déplacement et de restauration, engagés dans des pays dans lesquels elle n'était pas présente, auraient été engagés dans l'intérêt de l'entreprise ; qu'il en est de même d'achat de bijoux, au titre des exercices 1990 et 1991 ainsi que de frais de réparations des véhicules personnels, au titre de l'exercice 1991 ; que, dans ces conditions, ces charges ne peuvent être admises pour la détermination du bénéfice de la société ;

S'agissant de l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société contribuable n'a pas répondu à la demande de désignation des bénéficiaires des revenus considérés comme distribués contenue dans la notification de redressement qui lui a été adressée le 16 décembre 1994 ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que cette amende en ce qui concerne ceux des bénéfices maintenus comme imposables par la présente décision lui a été appliquée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE GENIE PUBLIC est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice ne lui a pas accordé la décharge de la fraction de l'impôt sur les sociétés, et des pénalités y afférentes, résultant de la réintégration dans ses résultats imposables au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1991 d'un montant de 43.375 F, représentant les frais de réparations effectuées sur un engin de terrassement de la société ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; qu'il y a lieu de condamner le ministre de l'économie des finances et de l'industrie à payer à la SOCIETE GENIE PUBLIC la somme de 1.000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Les bases de l'impôt sur les sociétés dû par la SOCIETE GENIE PUBLIC au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1991 sont réduites de la somme de 43.375 F (quarante-trois mille trois cent soixante-quinze francs), soit 6.612,48 euros (six mille six cent douze euros et quarante-huit centimes).

Article 2 : Il est accordé à la SOCIETE GENIE PUBLIC décharge de l'impôt et des pénalités correspondantes et de l'amende correspondant à la différence entre la base d'imposition calculée conformément à l'article 1er ci-dessus et celle servant d'assiette à l'imposition contestée.

Article 3 : Le jugement susvisé de Tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat est condamné à verser à la SOCIETE GENIE PUBLIC la somme de 1.000 euros (mille euros).

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE GENIE PUBLIC est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE GENIE PUBLIC et au ministre de l'économie des finances et de l'industrie.

N° 00MA00591 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00591
Date de la décision : 15/06/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : D'AIETTI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-15;00ma00591 ?
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