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25/05/2004 | FRANCE | N°99MA02355

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 25 mai 2004, 99MA02355


Vu I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 21 décembre 1999, sous le n° 99MA02355, présentée pour Mme Anne-Marie X, demeurant ..., par Me GUINARD, avocat ;

Mme X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 14 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le directeur de la comptabilité publique sur son recours, tendant au retrait de la décision en date du 12 octobre 1995 l'affectant à Marse

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2°/ d'annuler la décision en cause ;

La requérante soutient :

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Vu I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 21 décembre 1999, sous le n° 99MA02355, présentée pour Mme Anne-Marie X, demeurant ..., par Me GUINARD, avocat ;

Mme X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 14 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le directeur de la comptabilité publique sur son recours, tendant au retrait de la décision en date du 12 octobre 1995 l'affectant à Marseille ;

2°/ d'annuler la décision en cause ;

La requérante soutient :

- que le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'a pas analysé l'ensemble des mémoires, conclusions et moyens présentés par les parties ;

- qu'en se bornant à faire référence aux pièces du dossier, les premiers juges ont insuffisamment motivé leur position ;

- que les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier en estimant notamment que la décision de mutation ne revêtait pas un caractère disciplinaire et qu'elle était motivée par l'intérêt du service ;

Vu, enregistré le 26 février 2001, le mémoire présenté pour Mme X, qui relève que les droits de la défense n'ont pas été respectés dans la mesure où il n'a pas été tenu compte de ses dernières écritures, enregistrées au greffe du tribunal le 13 septembre 1999, invoquant l'absence de commencement de preuve des griefs formulés à son encontre ; qu'il s'agit bien d'une sanction disciplinaire et que la commission administrative paritaire aurait dû être consultée ;

Mme X demande, en outre, la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 10.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu II, la requête enregistrée au greffe le 23 décembre 1999 sous le n° 99MA02370, présentée pour Mme X ;

Mme X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 14 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en annulation de la décision du directeur de la comptabilité publique en date du 21 février 1997 rejetant sa demande d'affectation à Alger ;

2°/ d'accueillir sa demande ;

Mme X soutient :

- que le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'a pas visé l'ensemble des mémoires et moyens et est insuffisamment motivé ;

- que c'est en dénaturant les pièces du dossier que les premiers juges ont estimé que le refus de la réaffecter à Alger ne présentait pas un caractère disciplinaire et ne portait pas une atteinte excessive à sa vie privée et familiale ;

Vu, enregistré le 26 février 2001, le mémoire présenté pour Mme X qui fait notamment valoir qu'elle a en Algérie une fille adoptive et la majorité de sa famille ;

Elle demande également la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 10.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 12 juillet 2002, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'économie, finances et de l'industrie qui conclut au rejet des requêtes n° 99MA02355 et 99MA02370, en faisant valoir que les jugements attaqués sont suffisamment motivés, que le mémoire de Mme X enregistré au greffe du tribunal administratif le 13 septembre 1999 a été pris en compte, que la circonstance que les extraits de jugements notifiés ne comportait pas l'intégralité des visas est sans incidence, et que l'intéressée a été entendue lors de l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2004 :

- le rapport de Mme GAULTIER, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant que, par requête enregistrée sous le n° 99MA02355, Mme Anne-Marie X, agent principal de recouvrement de la paierie générale de France en Algérie, fait appel du jugement n° 964870 en date du 14 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en annulation de la décision de rejet implicite de son recours gracieux tendant au retrait de la décision du directeur de la comptabilité publique, en date du 12 octobre 1995, décidant de l'exclure des rotations sur le site d'Alger et de l'affecter uniquement sur le site de Marseille ;

Considérant que, par requête enregistrée sous le n° 99MA02370, Mme X fait également appel du jugement n° 973500 en date du 14 octobre 1999 par lequel le même tribunal administratif a rejeté sa demande en annulation de la décision du directeur de la comptabilité publique en date du 21 février 1997 rejetant explicitement sa demande de ré-affectation sur le site d'Alger ;

Considérant que ces affaires étant relatives à la situation administrative d'un même fonctionnaire et ayant fait l'objet d'une instruction commune en appel, il y a lieu de les joindre pour statuer par un même jugement ;

En ce qui concerne la requête d'appel n° 99MA02355 :

Sur la régularité du jugement n°964870 attaqué :

Considérant qu'il résulte de l'examen des pièces du dossier de première instance que Mme X a déposé un mémoire en réplique, enregistré au greffe du tribunal administratif le 13 septembre 1999, dans lequel elle soutenait que les accusations portées à son encontre par sa hiérarchie n'étaient pas justifiées et apportait un nouveau témoignage en sa faveur ; que ce mémoire, reçu avant clôture de l'instruction et qui comportait des éléments nouveaux, n'a pas été communiqué, n'est pas visé dans les minutes du jugement, lequel ne s'est pas expressément prononcé sur le moyen tiré de l'absence de justification des faits reprochés à l'intéressée ; que, dès lors, Mme X est fondée à soutenir que le jugement attaqué est intervenu en violation des articles R.611-1 et R.741-2 du code de justice administrative ; qu'il suit de là que le jugement attaqué est entaché d'irrégularités et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Marseille ;

Sur la légalité de la décision implicite de rejet du recours gracieux tendant au retrait de la décision du directeur de la comptabilité publique en date du 12 octobre 1995 et sans qu'il soit besoin d'examiner tous les moyens de la requête :

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la résidence administrative des services de la paierie générale de France en Algérie avait été fixée, à compter de 1994, pour des raisons de sécurité, à Marseille, certains agents continuant cependant à effectuer des rotations sur Alger , sans que l'administration précise clairement en quoi consistait cette situation pour les dits agents ; qu'après que le Payeur général de France en Algérie eût informé la requérante de ce que le Consul général de France en Algérie s'était plaint des interventions (de l'intéressée) au profit de ses relations algériennes désireuses d'obtenir un visa , le directeur de la comptabilité publique a, par la décision attaquée, décidé qu'il ne lui était plus possible de maintenir l'intéressée sur le site d'Alger et l'a affectée dans l'intérêt du service, pour ordre à la Trésorerie générale pour l'Etranger, pour servir à la Paierie générale auprès de l'Ambassade de France en Algérie en résidence administrative à Marseille ; que, pour se défendre de cette accusation, émanant des services consulaires, Mme X s'est bornée tant en première instance qu'en appel, à produire des témoignages établissant dans quelles conditions elle aurait effectué ces interventions ; que, ce faisant, la requérante n'apporte pas d'élément précis, sérieux et concordant, de nature à établir que la mesure litigieuse ne serait pas motivée par les dites interventions , mais par le motif personnel, constitutif d'un détournement de procédure, qu'elle allègue ; que, dans le contexte de tensions existant tant en Algérie que dans les relations diplomatiques franco-algériennes au cours de la période concernée, le comportement de Mme X était particulièrement inopportun et pouvait être regardé comme compromettant le fonctionnement des services administratifs concernés ; que, par suite, la décision litigieuse n'a, en tout état de cause, pas le caractère d'une mesure disciplinaire, allégué par la requérante, mais celui d'une décision de mutation prise dans l'intérêt du service ;

Considérant, toutefois, qu'il n'est pas contesté que Mme X, qui effectuait en réalité l'intégralité de son service à Alger, s'est vu affecter, pour la totalité de son service, à Marseille, et a dû quitter l'Algérie où elle résidait depuis de nombreuses années ; que, nonobstant la circonstance qu'il n'y ait pas eu changement de résidence administrative, laquelle était déjà fixée à Marseille ainsi qu'il a été dit ci-dessus, un tel changement d'affectation constituait une modification de la situation personnelle de l'agent, laquelle devait être soumise pour avis à la commission administrative paritaire, en application de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984, susvisée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; que l'administration n'invoquant ni l'urgence ni les circonstances expliquant l'impossibilité de respecter cette garantie procédurale, la décision d'affectation en date du 12 octobre 1995 est entachée d'un vice de procédure et aurait dû être retirée ; qu'il suit de là que la décision de rejet du recours gracieux exercé par la requérante contre la dite décision ne peut qu'être annulée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 14 octobre 1999, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision en litige ;

En ce qui concerne la requête d'appel n°99MA02370 :

Considérant, en premier lieu, que le mémoire présenté par Mme X et enregistré au greffe du Tribunal administratif de Marseille le 13 septembre 1999, s'il portait les références des deux procédures engagées en première instance, ne comportait aucun élément nouveau susceptible de concerner la demande enregistrée sous le n° 973500 ; que les premiers juges n'étaient, dès lors, tenus ni de viser ledit mémoire ni de le communiquer ; qu'il suit de là que le jugement susvisé n'a pas été rendu selon une procédure irrégulière ;

Considérant, en second lieu, qu'après avoir précisé que les fonctionnaires ne disposent d'aucun droit à mutation sur un poste géographique donné, les premiers juges ont estimé que, compte-tenu de l'avis défavorable émis, pour des raisons de sécurité, par l'Ambassadeur de France à Alger sur cette demande de mutation et de la situation de famille de l'intéressée, laquelle est divorcée et sans enfant, la décision de refus en litige n'était entachée ni d'erreur manifeste d'appréciation, ni de violation du droit à mener une vie familiale au sens de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que Mme X n'apporte, en appel, aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande enregistrée à son greffe sous le n° 973500 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative en condamnant l'Etat, à verser à Mme X une indemnité de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1 : Le jugement n° 964870 rendu par le Tribunal administratif de Marseille le 14 octobre 1999 est annulé.

Article 2 : La décision implicite de rejet du recours exercé par Mme X contre l'arrêté du directeur de la comptabilité publique en date du 12 octobre 1995 décidant de l'exclure des rotations sur le site d'Alger et de l'affecter uniquement sur le site de Marseille est annulée.

Article 3 : La requête d'appel en registrée sous le n° 99MA02370 est rejetée.

Article 4 : L'Etat est condamné à verser à Mme X une indemnité de 1.500 (mille cinq cents) euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Délibéré à l'issue de l'audience du 11 mai 2004, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

Mme GAULTIER, premier conseiller,

assistés de Mlle FALCO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 8 juin 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Joëlle GAULTIER

Le greffier,

Signé

Sylvie FALCO

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Classement CNIJ : 36-05-01-02

C

N° 99MA02355 99MA02370 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA02355
Date de la décision : 25/05/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme Joëlle GAULTIER
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : GUINARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-05-25;99ma02355 ?
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