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04/05/2004 | FRANCE | N°99MA01339

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 04 mai 2004, 99MA01339


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 juillet 1999 sous le 99MA01339, présentée par M. Borge Jorgensen X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 94-384 en date du 27 mai 1999 du Tribunal administratif de Nice en tant qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 1985 à 1987, mises en recouvrement le 31 octobre 1990 sous les articles 9053111, 9053112 et 9053113, des majorations y afférentes e

t des frais qui lui ont été assignés par commandement en date du 19 mars 19...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 juillet 1999 sous le 99MA01339, présentée par M. Borge Jorgensen X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 94-384 en date du 27 mai 1999 du Tribunal administratif de Nice en tant qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 1985 à 1987, mises en recouvrement le 31 octobre 1990 sous les articles 9053111, 9053112 et 9053113, des majorations y afférentes et des frais qui lui ont été assignés par commandement en date du 19 mars 1991, pour un montant total de 794.244 F ;

2'/ de lui accorder la décharge desdites cotisations, majorations et frais ;

Le requérant soutient que l'administration a commis plusieurs violations des dispositions fiscales :

- violation des dispositions de l'article L.253 du livre des procédures fiscales, en ce que les impositions recouvrées n'ont pas fait l'objet d'un avis d'imposition. L'administration conteste en soutenant d'une part que cela n'a pas d'incidence sur la régularité de l'imposition, d'autre part que le moyen manque en fait : elle a bien expédié les avis à la dernière adresse même si elle n'est pas en mesure de le prouver ;

- violation des dispositions de l'article L.76 du livre des procédures fiscales, en ce que la taxation d'office des impositions recouvrées n'a pas été soumise à l'avis de la commission départementale des impôts ;

- violation des dispositions des articles L.69 et L.76 du livre des procédures fiscales pour détournement de procédure. La taxation d'office a été pratiquée selon les dispositions de l'article 168 du code général des impôts alors qu'une procédure L.10, L.16 et L.69 était en cours ;

- violation des dispositions des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales en ce que l'administration ne peut faire grief au contribuable de n'avoir point répondu à ses demandes, celles-ci lui ayant été adressées après l'envoi de la notification de redressement ;

- violation des dispositions de l'article 168 en ce que les bases minimums d'imposition forfaitaire ou d'applicabilité, selon l'année considérée, permettant à l'administration de substituer une évaluation forfaitaire au revenu imposable n'ont pas été atteintes ;

- le contribuable a pu apporter la preuve qu'il disposait de ressources financières suffisantes pour assurer son train de vie ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe le

29 février 2000, par lequel le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête par les motifs que :

- l'absence d'avis d'imposition, à la supposer établie, n'a pas d'incidence sur la régularité de l'imposition ;

- il n'y a pas eu application des dispositions des articles L.16 et L.69 ;

- l'instruction du 8 novembre 1974 ne peut être invoquée sur le fondement de l'article L.80 A ;

- la commission départementale des impôts n'a pas à être consultée en pareille hypothèse ;

- l'administration était en droit de faire application des dispositions de l'article 168 du code général des impôts, notamment compte tenu de la valeur locative de l'habitation principale de M. X lequel n'apporte pas la preuve que cette valeur est surévaluée ;

- la preuve de ce que le financement du train de vie a été assuré pour 1985 et 1987 à l'aide d'un emprunt qui a servi à financer l'acquisition de biens et des virements bancaires qui ne permettent pas d'écarter l'application du régime forfaitaire n'est pas apportée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ensemble le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 2004 :

- le rapport de M. Duchon-Doris, Président assesseur ;

- et les conclusions de M. BEDIER, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant en premier lieu que si le requérant soutient que les impositions litigieuses n'ont pas fait l'objet d'un avis d'imposition, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur la régularité des impositions lesquelles ont été mises en recouvrement le 31 octobre 1990 dans le délai légal de reprise ouvert par les notifications de redressements adressées le 9 décembre 1988 pour l'année 1985 et le 28 août 1989 pour l'année 1987 et dont il a eu connaissance au plus tard par la lettre du 19 mars 1991 du trésorier principal de Nice qui l'a conduit à présenter sa réclamation initiale ; que par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté sur ce point l'argumentation du requérant ;

Considérant en deuxième lieu qu'aucune disposition du livre des procédures fiscales ou du code général des impôts ne prévoit l'intervention de la commission départementale des impôts directs et du chiffre d'affaires en cas d'application, comme en l'espèce, de la procédure d'évaluation forfaitaire du revenu global imposable d'après certains éléments du train de vie prévue par les dispositions de l'article 168 du code général des impôts ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté le moyen de M. X tiré du défaut de consultation de ladite commission ;

Considérant en troisième lieu que M. X soutient que l'administration aurait violé les dispositions des articles L.69 et L.76 du livre des procédures fiscales par détournement de procédure dès lors que la taxation d'office a été pratiquée selon les dispositions de l'article 168 du code général des impôts alors qu'une procédure L.10, L.16 et L.69 était en cours ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, dans le cadre de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'administration a adressé à M. X, d'une part, sur le fondement de l'article 168 du code général des impôts, une notification n° 2180 tendant à la taxation à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1985 en fonction de certains éléments du train de vie dont il a accusé réception le 12 décembre 1988, d'autre part, au titre des années 1986 et 1987, une demande d'information modèle n° 751, portant sur ses biens patrimoniaux et deux demandes n° 2060 portant sur les éléments de son train de vie dont il a accusé réception le 22 décembre 1988 ; qu'enfin M. X s'est vu notifié, en date du

28 août 1989, deux notifications n° 2180 portant également évaluation forfaitaire minimale de son revenu imposable des années 1986 et 1987 sur le fondement de l'article 168 précité ainsi qu'une notification n° 3924 récapitulative des revenus imposables au titre des trois années litigieuses, lesquelles n'ont pas été retirées ; qu'il résulte de l'ensemble des faits de procédure ainsi rappelés que l'administration a clairement mis en oeuvre, dans le respect des règles de la procédure contradictoire, les seules dispositions de l'article 168 du code général des impôts tendant à substituer au revenu déclaré au titre de chacune des années d'imposition litigieuse l'évaluation forfaitaire minimale du revenu imposable d'après certains éléments du train de vie ; que dès lors, le moyen tiré de ce que l'administration aurait mis en oeuvre la procédure de demande d'éclaircissement ou de justifications de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ou la procédure de taxation d'office qui manque en fait, ne peut être que rejeté ;

Considérant en quatrième lieu qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit à l'administration de procéder à l'évaluation forfaitaire du revenu d'après les éléments du train de vie dans le cadre d'un examen approfondi de situation fiscale personnelle ; que si M. X entend se prévaloir, à cet égard, d'instructions administratives en date du 8 novembre 1974 et du 1er mars 1979 indiquant aux agents dans quelles circonstances ils doivent avoir recours aux dispositions de l'article 168 du code général des impôts, ces textes relatifs à la procédure et qui ne constituent que de simples recommandations aux agents dans l'exécution de leur mission ne peuvent être utilement évoqués sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ; que dès lors, c'est encore à bon droit que les premiers juges ont rejeté sur ce point l'argumentation du requérant ;

Sur la mise en oeuvre des dispositions de l'article 168 du code général des impôts au titre de l'année 1985 :

Considérant qu'aux termes de l'article 168 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au titre de l'année 1985 : 1° En cas de disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et ses revenus, la base d'imposition à l'impôt sur le revenu est portée à une somme forfaitaire déterminée en appliquant à certains éléments de ce train de vie le barème ci-après, compte tenu, le cas échéant, des majorations prévues au 2, lorsque cette somme est supérieure à 45.000 F. Pour l'application des dispositions qui précèdent, la valeur locative est déterminée par comparaison avec d'autres locaux dont le loyer a été régulièrement constaté ou est notoirement connu et, à défaut de ces éléments, par voie d'appréciation... 2 bis. La disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et les revenus qu'il déclare est établie lorsque la somme forfaitaire qui résulte de l'application du barème (...) excède d'au moins un tiers, pour l'année d'imposition et l'année précédente, le montant du revenu net global déclaré... ;

Considérant que M. X soutient que l'administration ne pouvait mettre en oeuvre, au titre de l'année 1985, l'évaluation forfaitaire prévue à l'article 168 du code général des impôts dès lors qu'elle n'établit pas, en prenant en compte une valeur locative fantaisiste de sa résidence principale, que la condition légale de disproportion d'un tiers entre le train de vie du contribuable et les revenus déclarés était remplie ; qu'il résulte toutefois de l'instruction d'une part que le revenu net déclaré par M. X au titre de l'année 1984 et de l'année 1985 s'élève à la somme de 43.200 F, d'autre part que pour l'évaluation du train de vie du contribuable, l'administration a retenu au titre de la résidence principale du requérant, la villa dont il est propriétaire ... et qu'en l'absence de locaux comparables, elle a déterminé sa valeur locative par voie d'évaluation directe ; que pour ce faire, elle a retenu le prix de cession de l'immeuble le 5 janvier 1988, soit 4.300.000 F, auquel a été appliqué le coefficient d'érosion monétaire pour déterminer la valeur de la villa en 1984 (1,12) et 1985 (1,06) et un taux de rentabilité du capital immobilier de 6 %, aboutissant ainsi à des valeurs locatives de 230.000 F au titre de l'année 1984 et de 243.000 F au titre de l'année 1985 ; que M. X, qui ne soutient pas que la méthode par comparaison directe était possible et ne propose pas une méthode de détermination plus précise de la valeur locative réelle de sa résidence en se référant à la valeur locative cadastrale mentionnée sur son avis d'imposition, ne démontre pas le caractère excessif de cette évaluation ; qu'il suit de là que la somme forfaitaire résultant de l'application du barème excède pour l'année d'imposition litigieuse et pour l'année qui la précède, d'au moins un tiers le revenu net global déclaré au titre de chacune de ces années ; que par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté le moyen de M. X tiré de ce que l'administration ne pouvait mettre en oeuvre les dispositions de l'article 168 du code général des impôts ;

Sur la preuve du financement du train de vie du contribuable :

Considérant qu'aux termes de l'article 168, tel qu'il résulte de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 : 3. Le contribuable peut apporter la preuve que ses revenus ou l'utilisation de son capital ou les emprunts qu'il a contractés lui ont permis d'assurer son train de vie ; que cette mesure a été étendue aux contribuables taxés au titre des années antérieures à l'année 1986 par réponse ministérielle n° 18.737 parue au J.O. A.N. du 8 février 1987, opposable à l'administration, ainsi qu'elle le reconnaît elle-même, sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant en premier lieu que si M. X soutient que son train de vie a été assuré par un emprunt qui lui aurait été consenti en 1982 pour un montant de l'ordre de 2.150.000 F par la Finanz et Investmenbank à Zurich, il résulte de ses propres écritures que ledit prêt a servi au financement de divers investissements immobiliers et mobiliers effectués en France au cours des années 1982 à 1987 ; qu'en l'absence d'autres éléments permettant de justifier de l'utilisation de tout ou partie de cet emprunt pour le financement de son train de vie au titre des années litigieuses, son argumentation sur ce point ne peut être que rejetée ;

Considérant en second lieu que si M. X soutient également qu'il aurait bénéficié au titre des années encore en litige, pour le financement de son train de vie, de virements en provenance de sa banque à Zurich attestés par des bordereaux joints à sa requête, il n'établit pas que ces virements d'un montant de 91.000 F pour 1985 et de 260.000 F pour 1987, dont il n'indique pas l'origine et la source, correspondraient à des revenus, à l'utilisation d'un capital ou à des emprunts ; que par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté l'argumentation du requérant sur ce point ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Nice rejetant sa demande en décharge des cotisations d'impôt sur le revenu contestées ;

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 30 mars 2004, où siégeaient :

M. Bernault, président de chambre,

M. Duchon-Doris, président assesseur,

M. Dubois, premier conseiller,

Prononcé à Marseille, en audience publique le 4 mai 2004.

Le rapporteur

Signé

Jean-Christophe Duchon-Doris

Le président,

Signé

François Bernault

Le greffier,

Signé

Danièle Giordano

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Classement CNIJ : 19-04-01-02-03-05

C

N° 99MA01339 8


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : COULOUMA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Date de la décision : 04/05/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 99MA01339
Numéro NOR : CETATEXT000007586916 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-05-04;99ma01339 ?
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