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03/05/2004 | FRANCE | N°01MA01749

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 03 mai 2004, 01MA01749


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 6 août 2001 sous le n° 01MA01749, présentée par la société civile professionnelle d'avocats Givors-Blanc-Seloron, pour M. Christophe X, demeurant ... ;

Le requérant demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 964431 du 5 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 1996 par lequel le ministre délégué à la jeunesse et aux sports lui a interdit d'encadrer contre rémunération les descentes de c

anyon ;

Classement CNIJ : 30

C

2'/ d'annuler l'arrêté susmentionné du minist...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 6 août 2001 sous le n° 01MA01749, présentée par la société civile professionnelle d'avocats Givors-Blanc-Seloron, pour M. Christophe X, demeurant ... ;

Le requérant demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 964431 du 5 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 1996 par lequel le ministre délégué à la jeunesse et aux sports lui a interdit d'encadrer contre rémunération les descentes de canyon ;

Classement CNIJ : 30

C

2'/ d'annuler l'arrêté susmentionné du ministre délégué à la jeunesse et aux sports ;

3°/ de condamner l'Etat à lui payer une somme de 30.000 F (4.573 ;47 euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la Commission nationale d'enseignement des activités physiques et sportives (CNEAPS) était irrégulièrement composée lorsqu'elle a été amenée à examiner sa situation ;

- que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'article 12 du décret du 28 novembre 1983 fixant les règles de quorum ne pouvait trouver à s'appliquer, la composition de cette commission étant précisément fixée par l'article 3 du décret du 31 août 1993 ;

- que l'administration n'a pas respecté les règles qu'elle s'était elle-même fixées par l'instruction du 7 mars 1994 qui prévoit une procédure d'injonction ou de mise en demeure avant qu'un arrêté de fermeture ou d'interdiction d'exercice puisse être pris ;

- qu'il n'a pu disposer du temps nécessaire pour préparer utilement sa défense ;

- que les griefs ne lui ont pas été communiqués préalablement à la procédure, la seule circonstance qu'il ait pu en prendre connaissance lors de la consultation de son dossier étant à cet égard insuffisante ;

- qu'un deuxième rapport a été établi après son audition par la CNEAPS dont il n'a pas eu connaissance et dont il n'a pu discuter le contenu ;

- que la mesure prise à son encontre ne constitue pas une mesure de police, mais une sanction ;

- que la motivation de l'arrêté, qui n'indique pas les éléments précis et objectifs retenus par le ministre pour caractériser la mise en danger de la sécurité est insuffisante ;

- qu'il n'est nullement démontré que les négligences qu'il a commises un jour précis dans des circonstances précises, caractérisent un comportement dangereux de manière constante et définitive ;

- qu'ainsi, la sanction d'interdiction définitive d'exercer prise à son encontre en raison d'un incident unique est excessive et, par là même, entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- qu'un premier arrêté portant interdiction d'exercer avait déjà été pris par le ministre, qui ne pouvait le sanctionner une deuxième fois à raison des mêmes faits ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré au greffe de la Cour le 24 avril 2002, présenté par le Ministre de la jeunesse et des sports, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la requête n'est pas recevable faute d'être accompagnée du timbre prévu par l'article

L.411-1 du code de justice administrative ;

- que lors de l'examen de la situation de M. X, plus de la moitié des membres de la CNEAPS étaient présents ;

- qu'ainsi, le quorum était atteint sans qu'il y ait lieu de tenir compte des catégories entre lesquelles les membres de cet organisme sont répartis ;

- que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'instruction du 7 mars 1994 n'a pas valeur réglementaire et ne peut être opposée à l'administration ;

- que, de plus, cette instruction ne porte pas sur l'application de l'article 48 I de la loi du 16 juillet 1984, mais sur la procédure de déclaration et de contrôle des établissements d'éducation physique et sportive et des éducateurs ;

- que M. X a consulté son dossier, ainsi qu'il y avait été invité par courrier du 28 août 1995 ;

- qu'il a pu discuter les griefs retenus contre lui, dans la mesure où il s a consulté son dossier contenant le rapport d'enquête et a été auditionné, à plusieurs reprises par les fonctionnaire de la direction départementale de la jeunesse et des sports des Alpes-Maritimes ;

- que le rapport établi après la réunion de la CNEAPS ne faisait qu'étayer les éléments contenus dans le premier rapport ;

- qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait sa communication à M. X ; que l'arrêté litigieux est suffisamment motivé en fait et en droit ;

- que la mesure prise constitue une mesure de police destinée à préserver la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants ;

- que les négligences commises par M. X, d'ailleurs établies par un arrêt définitif de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, constituent des manquements aux règles les plus élémentaires de sécurité de la part d'un professionnel ;

- qu'eu égard à la gravité de ces faits, la mesure prise à l'encontre du requérant n'est pas disproportionnée ;

- qu'elle ne revêt pas non plus un caractère général et absolu puisque le canyoning ne constitue pas l'activité principale du requérant ;

que le premier arrêté du 28 août 1995 a été pris dans le cadre de la procédure d'urgence et ne faisait pas obstacle à ce qu'un deuxième arrêté fût pris sur le fondement de l'article 48 I 1er alinéa ;

- que M. X ne peut, par suite, soutenir que l'arrêté qu'il attaque a été pris en violation de la règle non bis in idem ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 modifiée ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le décret n° 93-1035 du 31 août 1993 ;

Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2004 ;

- le rapport de M. Alfonsi, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Christophe X relève appel du jugement du 5 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 1996 par lequel le ministre délégué à la jeunesse et aux sports lui a, sur le fondement de l'article 48-1 de la loi susvisée du 16 juillet 1984, interdit d'encadrer contre rémunération les descentes de canyon ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée en défense :

Sur la légalité externe de l'arrêté du 3 mai 1996 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 31 août 1993 : Il est institué auprès du ministre chargé des sports une commission nationale de l'enseignement des activités physiques et sportives ; qu'aux termes de l'article 3 de ce même décret : Lorsqu'elle formule des avis en application des articles 43 et 48-1 de la loi du 16 juillet 1984 susvisée ou du second alinéa de l'article 2 du présent décret, la commission comprend les dix-huit membres suivants : 1. Six représentants de l'Etat : a) Le directeur des sports ou son représentant, président ; b) Un représentant du ministre chargé de l'éducation nationale ; c) Un représentant du ministre chargé de l'emploi ; d) Le délégué aux formations du ministère chargé de la jeunesse et des sports ou son représentant, vice-président ; e) Un directeur technique national désigné par le ministre chargé des sports ; f) Le rapporteur général de la commission technique d'homologation des titres et diplômes de l'enseignement technologique mentionné à l'article 2 du décret du 8 janvier 1992 susvisé ; 2. Six représentants du mouvement sportif : a) Le président du Comité national olympique et sportif français ou son représentant ; b) Cinq personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence, proposées par le conseil d'administration du Comité national olympique et sportif français, dont un représentant d'une fédération au sein de laquelle existe un organisme chargé de diriger des activités de caractère professionnel et deux représentants de groupements sportifs employant des éducateurs sportifs ; 3. Six représentants des personnes exerçant les professions intéressées nommés par le ministre chargé des sports sur proposition des organisations syndicales les plus représentatives. Siègent avec voix consultative des rapporteurs choisis parmi les fonctionnaires du ministère chargé des sports, qui présentent à la commission les dossiers soumis à son examen (...) ; que ni les dispositions du décret du 31 août 1993, ni aucune autre disposition réglementaire ne fixe de règle particulière de quorum pour cette commission ; que, par suite, et ainsi que l'a exactement relevé le tribunal administratif, le quorum doit être apprécié en application de l'article 12 du décret susvisé du 28 novembre 1983, selon lequel : A défaut de dispositions réglementaires contraires, le quorum est égal à la moitié du nombre des membres titulaires composant l'organisme dont l'avis est sollicité (...) ; que, dès lors qu'il est constant que lors de l'examen de sa situation, dix membres sur les dix-huit que comporte cette commission étaient présents, M. X n'est pas fondé à soutenir que cet organisme a siégé dans une composition irrégulière ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la convocation devant la commission nationale de l'enseignement des activités physiques et sportives adressée à M. X n'ait pas indiqué les griefs retenus à son encontre n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure dès lors qu'il est constant qu'il a eu connaissance, notamment par la consultation de son dossier, de l'ensemble des faits qui lui étaient reprochés avant la réunion de cette commission ; que le délai qui s'est écoulé entre l'envoi de cette convocation et la réunion de la commission a, en l'espèce, été suffisant pour lui permettre de préparer utilement sa défense ; que si un second rapport a été établi par le directeur départemental de la jeunesse et des sports des Alpes-Maritimes après que la commission nationale de l'enseignement des activités physiques et sportives eut entendu M. X, l'administration n'était pas tenue de le lui communiquer préalablement à l'intervention de la décision litigieuse, dès lors que ce document, destiné à éclairer la décision du ministre en répondant aux arguments de défense présentés par le requérant et son conseil, ne faisait état d'aucun élément ou grief que le requérant n'aurait pas déjà été mis à même de discuter ;

Considérant, en troisième lieu, que M. X ne peut utilement se prévaloir de l'instruction du 7 mars 1994 qui, en tout état de cause, n'a pas pour objet et n'aurait pu avoir légalement pour effet de subordonner la décision litigieuse à une procédure de mise en demeure ou d'injonction préalable non prévue par les dispositions législatives ou réglementaires qui la régissent ;

Considérant, en dernier lieu, que la décision litigieuse, qui énonce avec précision les faits retenus par le ministre pour justifier l'interdiction faite à M. X d'encadrer à titre onéreux les descentes de canyon, est suffisamment motivée ;

Sur la légalité interne de l'arrêté du 3 mai 1996 :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 48-1 de la loi susvisée du 16juillet 1984 : Le ministre chargé des sports peut, par arrêté motivé, prononcer à l'encontre de toute personne dont le maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants l'interdiction d'exercer, à titre temporaire ou définitif, tout ou partie des fonctions mentionnées à l'article 43 et de prendre les titres correspondants ;

Considérant que pour interdire à titre définitif à M. X, par son arrêté du 3 mai 1996, d'encadrer contre rémunération les descentes de canyons, le Ministre délégué à la jeunesse et aux sports s'est fondé sur les négligences et imprudences graves commises par l'intéressé à l'occasion d'une descente du canyon dénommé le Clue du Raton le 13 août 1995, au cours de laquelle trois adolescents ont trouvé la mort ;

Considérant que, dans le cadre des pouvoirs de police qui lui sont conférés par les dispositions précitées de la loi du 16 juillet 1984, le Ministre délégué à la jeunesse et aux sports a pu, eu égard à la gravité des manquements aux règles élémentaires de sécurité commises par M. X à cette occasion, légalement estimer que son maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité des personnes qu'il était susceptible d'encadrer à l'occasion d'une telle activité et décider, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, de conférer à cette interdiction un caractère définitif ;

Considérant que la décision attaquée n'a pas le caractère d'une sanction mais d'une mesure de police exclusivement destinée à protéger la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants de l'activité sportive en cause ; que, par suite et en tout état de cause, M. X ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il aurait illégalement fait l'objet d'une double sanction au motif que, par un précédent arrêté du 28 août 1995, le Ministre délégué à la jeunesse et aux sports lui avait, à raison des mêmes faits, interdit d'exercer contre rémunération les activités mentionnées à l'article 43 de la loi du 16 juillet 1984 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à rembourser à M. X les frais, non compris dans les dépens, qu'il a exposés à l'occasion de la présente instance ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. Christophe X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au Ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Délibéré à l'issue de l'audience du 29 mars 2004, où siégeaient :

Mme Bonmati président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur,

M. Alfonsi, premier conseiller,

assistés de Mlle Ranvier, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 3 mai 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Jean-Fra nçois Alfonsi

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 01MA01749


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA01749
Date de la décision : 03/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. ALFONSI
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : SCP GIVORD BLANC SELORON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-05-03;01ma01749 ?
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