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06/04/2004 | FRANCE | N°00MA00809

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 06 avril 2004, 00MA00809


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 avril 2000, sous le n° 00MA00809, présentée par M. Denis X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement, en date du 10 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a statué sur ses demandes en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision rattachant M. X à la fonction TC 01D, et la demande dirigée contre le refus de notation au titre de l'année 1994 ;

2°/ d'annuler le principe de la ges

tion par niveau ;

Classement CNIJ : 36-04-02

51-02-04

C

3°/ de prescrire les ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 avril 2000, sous le n° 00MA00809, présentée par M. Denis X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement, en date du 10 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a statué sur ses demandes en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision rattachant M. X à la fonction TC 01D, et la demande dirigée contre le refus de notation au titre de l'année 1994 ;

2°/ d'annuler le principe de la gestion par niveau ;

Classement CNIJ : 36-04-02

51-02-04

C

3°/ de prescrire les mesures à prendre à l'encontre de la SA France Télécom, avec fixation d'un délai d'exécution sous astreinte, tant en ce qui concerne le rattachement à la fonction TC 01D que l'absence de notation ;

4°/ de condamner France Télécom à lui verser une somme de 1.500 Fen application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient :

- que le tribunal n'a pas voulu se prononcer sur le principe de la gestion par niveau, opposé au requérant ;

- qu'il n'a pas examiné l'exception d'illégalité du règlement ;

- que M. X n'a pas eu droit à un procès équitable ;

- que la gestion par grade figure au nombre des droits fondamentaux des fonctionnaires ;

- que cela découle de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 ;

- que la gestion par niveau est contraire au principe d'égalité de traitement des fonctionnaires d'un même corps ;

- que M. X se réfère à ses mémoires produits en première instance ;

- que la demande était dirigée à titre subsidiaire contre la notification de rattachement de M. X à la fonction TC 01D en date du 12 janvier 1994, par voie de conséquence de l'illégalité de la gestion des fonctionnaires par niveau ;

- que son refus d'intégrer un grade d'exécution alors qu'il avait vocation à être agent de maîtrise interdisait de lui opposer en permanence cette proposition ;

- que le tribunal s'est fondé par des éléments de droit inexacts ;

- que les décrets du 25 mars 1993 ne fixent aucune liste ; qu'ils ne donnent pas au président de l'exploitant le pouvoir d'établir un classement intermédiaire et de gérer le personnel fonctionnaire d'Etat par niveau ;

- que la notion de classe II n'apparaît dans aucun texte ;

- que la classe II comprend trois niveaux, dont seul le troisième correspond aux agents de maîtrise ;

- que les premiers et seconds niveaux sont des emplois d'exécution ;

- qu'il y a obligation de notation annuelle pour les fonctionnaires, en application du décret n° 59-308 du 14 février 1959, article 3 ;

- que le statut de M. X ne prévoit pas de dérogation à ce principe ;

- qu'ainsi M. X devait être noté pour l'année 1994 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 octobre 2001, présenté par France Télécom, qui conclut au rejet de la requête ;

Elle soutient :

- que M. X n'apporte aucun élément nouveau susceptible de voir infirmer le jugement ;

- que six décrets ont fixé les statuts particuliers des corps correspondant aux nouvelles classifications ;

- que l'intégration dans ces corps implique la reclassification de chaque agent ;

- que la procédure comprend l'expression du choix de l'intéressé ;

- que la demande d'annulation du rattachement à la fonction de conducteur de travaux est irrecevable, une proposition d'intégration n'étant pas une décision ;

- que la note du 24 février 1997 est une mesure préparatoire au rattachement de l'intéressé ;

- que l'ensemble du personnel de France Télécom est soumis aux mêmes règles de gestion depuis 1991, qu'il s'agisse du personnel fonctionnaire ou du personnel contractuel de droit privé ;

- que M. X a conservé son grade de rattachement ;

- qu'en l'absence de disposition législative ou réglementaire antérieure au décret du 2 avril 1996 relatif à la notation des fonctionnaires de la Poste et de France Télécom, l'obligation de notation annuelle n'est entachée d'aucune illégalité ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 19 mars 2004, présenté par M. X, qui persiste dans ses conclusions ;

Il soutient en outre que le tribunal administratif a commis une erreur matérielle dans l'exposé de sa requête ;

Vu la note en délibérée produite par M. X le 25 mars 2004 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée ;

Vu le décret n° 59-308 du 14 février 1959 ;

Vu le décret n° 93-517 du 25 mars 1993 ;

Vu le décret n° 96-285 du 2 avril 1996 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 2004 :

- le rapport de M. ZIMMERMANN, premier conseiller ;

- les observations de M. Denis X ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le tribunal administratif a omis de statuer sur les conclusions et sur les moyens -non inopérants- contenus dans le mémoire enregistré le 28 décembre 1999 au greffe du Tribunal administratif de Marseille ; qu'il est ainsi entaché d'irrégularité et doit, dès lors, être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de ce mémoire ; qu'il y a lieu d'évoquer sur ce point et de statuer immédiatement sur la demande présentée devant le Tribunal administratif de Marseille par M. X ;

Considérant que M. X doit être regardé comme demandant l'annulation de la décision de gérer les personnels de France Télécom selon de nouveaux principes ;

Sur les conclusions relatives aux principes de gestion par niveau du personnel de rattachement des fonctions à des niveaux, et des postes à des regroupements de fonctions :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : le grade est distinct de l'emploi. Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l'un des emplois qui lui correspondent. , et qu'aux termes de l'article 3 du décret n° 93-517 du 25 mars 1983 : Le corps des collaborateurs et agents de maîtrise de France Télécom comprend le grade de collaborateur de premier niveau doté de dix-huit échelons normaux et de deux échelons exceptionnels, le grade de collaborateur de second niveau doté de seize échelons normaux et d'un échelon exceptionnel, et le grade d'agent de maîtrise doté de douze échelons. ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées que les niveaux sont des grades au sens de la loi du 13 juillet 1983 ; que, dès lors, le moyen tiré par le requérant de l'illégalité de la gestion du personnel par niveau et non par grade doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que la loi susvisée du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public des postes et des télécommunications, qui a créé deux exploitants publics, la Poste et France Télécom, doté chacun de la personnalité morale, a eu notamment pour objet de placer les fonctionnaires issus de l'ancienne administration des postes et télécommunications hors des catégories hiérarchiques de la fonction publique de l'Etat ; que les décrets pris pour l'application de cette loi ont créé des corps de fonctionnaires dits de reclassement, propres à chaque exploitant public, et ont reclassé dans chacun de ces corps les fonctionnaires concernés ; que le principe d'égalité entre les fonctionnaires d'un même corps n'implique pas que des fonctionnaires de même grade soient, lors de l'application d'une réforme statutaire prise en application de dispositions législatives, reclassés de façon identique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions figurant dans le mémoire enregistré le 28 décembre 1999 devant le Tribunal administratif de Marseille ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les autres conclusions de M. X :

Sur les fins de non-recevoir opposées par France Télécom à la demande de première instance :

Considérant que la demande initiale de M. X tendait à l'annulation de la décision de le gérer par une fonction à laquelle il avait été rattaché arbitrairement par France Télécom , de la décision de ne pas lui communiquer ses notes pour les années 1993 et 1994, de sa notation pour les années 1995 et 1996 ; que, dans une mémoire ultérieur, il a précisé qu'il demandait l'annulation de la réponse en date du 24 février 1997, des principes énoncés dans cette lettre du 24 février 1997, et de la notification de cette lettre ; que, si France Télécom soutient que sa demande n'était pas recevable, faute pour M. X de produire la décision attaquée, l'intéressé soutient sans être contredit qu'aucune décision expresse l'intégrant dans un des nouveaux corps des fonctionnaires de France Télécom n'ayant été prise par le président du conseil d'administration de l'exploitant, la lettre du 24 février 1997 doit être regardée comme la révélation d'une décision immatérielle cachée ;

Considérant qu'eu égard à ses termes et aux conditions dans lesquelles elle est intervenue, la lettre du 24 février 1997 du directeur des ressources humaines de France Télécom ne constitue ni une proposition ou un acte préparatoire à une décision de reclassement, ni une décision de reclassement, mais une réponse à une demande de renseignements ; que, si une telle réponse ne constitue pas un acte faisant grief, il ressort de cette lettre, d'ailleurs corroborée par les autres pièces du dossier, que M. X était géré selon les nouveaux principes des règles de gestion, sur le niveau du poste qu'il occupait lors de la proposition de rattachement ; qu'ainsi, comme France Télécom le précisait dans son mémoire en défense devant les premiers juges, d'une part M. X était rattaché à la fonction d'agent de supervision de niveau 1, fonction classifiée 2.1, et, d'autre part, tous les emplois, quel que soit le statut de l'agent, personnel fonctionnaire ayant conservé son grade de reclassement ou fonctionnaire ayant opté pour les nouveaux grades de reclassement, agent contractuel de droit public ou personnel contractuel de droit privé, relèvent de cette classification ; qu'ainsi, M. X, qui avait expressément refusé le rattachement à une fonction classifiée 2.1, était effectivement rattaché à une telle fonction, et géré en fonction de ce rattachement, et non de son grade d'origine ; que, par suite, M. X est recevable à contester la décision immatérielle qui ne lui a pas été notifiée, mais dont l'ensemble du dossier démontre qu'elle est appliquée, et qui a consisté à le reclasser dans un grade correspondant à une fonction d'exécution requérant une technicité particulière, sans responsabilité d'encadrement, alors que les conducteurs de travaux, grade qu'il détenait, étaient placés à la tête des équipes lourdes composées de plusieurs agents, avec les responsabilités correspondantes ;

Sur la légalité du rattachement litigieux, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi susvisée du 2 juillet 1990 : Les personnels de la Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui comportent des dispositions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas ci-après... Les personnels de la Poste et de France Télécom ne relèvent pas des catégories prévues à l'article 29 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée. ; qu'aux termes de l'article 21 du décret n° 93-517 du 25 mars 1993 : Pendant une période de cinq ans à compter de la date d'effet du présent décret, les fonctionnaires de la Poste ou de France Télécom qui exercent l'une des fonctions correspondant à l'un des grades des corps régis par le présent décret, telle que cette correspondance est établie comme il est dit à l'article 4 ci-dessus, ont vocation à être intégrés dans ce grade... Un délai d'option d'une durée d'un mois à compter de la date à laquelle ils reçoivent notification de cette proposition est ouvert aux intéressés pour accepter cette intégration. L'intégration est prononcée par décision du président du conseil d'administration de l'exploitant public concerné. ;

Considérant qu'il est constant que M. X n'a pas accepté la proposition d'intégration qui lui était faite ; qu'aucune décision expresse du président du conseil d'administration de France Télécom prononçant son intégration, malgré ce refus, dans un corps de fonctionnaire régi par le décret du 25 mars 1993 ne lui a été notifiée, et n'aurait d'ailleurs pu légalement être prise ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que la décision non écrite de le gérer selon les règles applicables au corps de collaborateurs et agents de maîtrise de France Télécom, au grade de collaborateur de premier niveau, et qui l'empêche de postuler utilement aux avancements auxquels il aurait pu prétendre en qualité d'agent de maîtrise est illégale, et à en demander l'annulation ;

Sur la notation de 1994 :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 11 février 1959 : La note chiffrée prévue à l'article 24 de l'ordonnance du 4 février 1959 est établie selon une notation de 0 à 20 par le chef de service ayant pouvoir de notation après avis, le cas échéant, des supérieurs hiérarchiques du fonctionnaire à noter. ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : Il est établi, pour chaque fonctionnaire, une fiche annuelle de notation. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X n'a pas été noté en 1994 ; que, par suite, il est fondé à soutenir que ce refus est irrégulier ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre à France Télécom de procéder, dans un délai de trois mois, à la notation de M. X au titre de l'année 1994 ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre à France Télécom de reclasser M. X dans le grade de conducteur de travaux, qu'il détenait lors de l'intervention de la décision annulée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner France Télécom à verser à M. Denis X la somme de 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Marseille en date du 10 février 2000 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de M. X dirigées contre les décisions de principe révélées par la lettre du 24 février 1997 relatives à la gestion par niveau du personnel de France Télécom.

Article 2 : La décision non écrite révélée par la lettre du 24 février 1997 de rattacher M. X à la fonction d'agent de supervision de niveau 2.1 est annulée.

Article 3 : La décision de ne pas noter M. X au titre de l'année 1994 est annulée.

Article 4 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Marseille en date du 10 février 2000 est réformé en tant qu'il est contraire à la présente décision.

Article 5 : Il est enjoint à France Télécom de réintégrer M. Denis X dans son grade de conducteur de travaux, et de procéder à sa notation pour l'année 1994.

Article 6 : France Télécom versera une somme de 200 euros à M. X au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande de M. X devant les premiers juges est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. Denis X, à France Télécom et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 23 mars 2004, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

M. ZIMMERMANN, premier conseiller,

assistés de Mlle FALCO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 6 avril 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Franck ZIMMERMANN

Le greffier,

Signé

Sylvie FALCO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 00MA00809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00809
Date de la décision : 06/04/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: M. Franck ZIMMERMANN
Rapporteur public ?: M. BOCQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-04-06;00ma00809 ?
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