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06/04/2004 | FRANCE | N°00MA00501

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 06 avril 2004, 00MA00501


Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 mars 2000, sous le n° 00MA00501, la requête présentée pour Mme Monique X, demeurant ..., par Me MOSCHETTI, avocat au barreau de Nice ;

Mme X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 15 octobre 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 8 janvier 1996 par laquelle le recteur de l'Académie de Nice a procédé à des retenues sur traitement pour la période du 10 décembre 1995 au 7 janvier 1996, de la décis

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Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 mars 2000, sous le n° 00MA00501, la requête présentée pour Mme Monique X, demeurant ..., par Me MOSCHETTI, avocat au barreau de Nice ;

Mme X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 15 octobre 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 8 janvier 1996 par laquelle le recteur de l'Académie de Nice a procédé à des retenues sur traitement pour la période du 10 décembre 1995 au 7 janvier 1996, de la décision du 16 janvier 1996 par laquelle le recteur de l'Académie de Nice l'a informée de la mise en oeuvre d'une procédure d'abandon de poste, de l'arrêté du 24 mars 1998 la radiant du corps des professeurs certifiés ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et d'indemnisation ;

Classement CNIJ : 36-10-09

C

2°/ d'annuler lesdites décisions avec toutes conséquences sur sa rémunération et sa reconstitution de carrière ;

3°/ de condamner l'Etat à réparer le préjudice subi et à lui verser 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Mme X soutient :

- que le courrier du recteur du 16 janvier 1996 constituait une décision faisant grief dès lors qu'il contenait une menace précise pour elle ;

- que, s'agissant de la décision du 24 mars 1998 la radiant des cadres, l'article 28 de la loi du 11 janvier 1984 rappelle que le fonctionnaire doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique sauf si l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre un intérêt public ;

- qu'en l'espèce, l'administration, en la nommant titulaire remplaçante rattachée au lycée AUDIBERTI à Antibes à compter du 12 octobre 1995, alors qu'elle était titulaire académique, n'a pas défini la nature des obligations de Mme X dans le respect de son statut ;

- que c'est donc à bon droit qu'elle a refusé les postes qui lui ont été proposés ;

- que par ailleurs, après mise en disponibilité, le licenciement ne peut être décidé qu'après refus de trois postes et après consultation de la commission administrative paritaire ;

- que la suspension de son traitement à compter du 29 janvier 1996 justifiée a posteriori par un prétendu service non fait a constitué un véritable chantage ;

- qu'il n'a jamais été tenu compte de ses voeux d'affectation ;

- que son affectation au collège RISSO, en l'absence de tout arrêté dûment signé par l'autorité compétente, puis au collège de Saint-Jeannet, en l'absence de tenue régulière de la commission administrative paritaire, étaient irrégulières ;

- qu'en réalité ces mutations constituaient des sanctions qui n'étaient pas justifiées dès lors que la décision de ne pas la renouveler dans ses fonctions de présidente du jury de DELF ne reposait sur aucun motif de nature à la justifier ;

- que si Mme X avait commis une faute, elle aurait dû être sanctionnée immédiatement et non deux années plus tard ;

- qu'elle n'a jamais été mise en mesure de fournir ses explications et n'a jamais manifesté l'intention de démissionner ;

- qu'en la plaçant artificiellement en situation de service non fait, l'administration a pu la radier des cadres sans les garanties de la procédure disciplinaire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 6 septembre 2000, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

- que Mme X ne développe aucun moyen nouveau contre la décision du 8 janvier 1996 ;

- que s'agissant du courrier du 16 janvier 1996, il ne constituait qu'une simple mise en garde non susceptible de recours ;

- que, s'agissant de l'arrêté ministériel du 24 mars 1998, la décision rectorale du 30 août 1995, qui n'a d'ailleurs pas été contestée par Mme X, de ne pas la renouveler dans ses fonctions de présidente du jury de DELF et celle de radiation des cadres sont des décisions distinctes et indépendantes ;

- que, en tout état de cause, elle n'avait aucun droit à ce renouvellement ;

- qu'elle n'a par ailleurs pas contesté ses affectations successives ;

- qu'à supposer même ces affectations illégales, elle avait le devoir, comme le prévoient les dispositions de l'article 28 de la loi du 11 janvier 1984, de rejoindre son poste ;

- qu'en ne le faisant pas, elle a rompu tout lien avec le service et que par suite le ministre a pu légalement la radier des cadres ;

Vu, enregistré le 2 novembre 2000, le nouveau mémoire présenté par le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Il fait valoir en outre que la requête de Mme X lui paraît tardive ;

Vu, enregistré le 13 mars 2001, le mémoire en réponse de Mme X, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens, en chiffrant à 100.000 F le montant de ses dommages et intérêts ;

Elle soutient en outre que durant ses quatre années comme présidente du jury de DELF, elle a donné toute satisfaction ;

- que le recteur aurait dû soutenir Mme X dans l'exercice des responsabilités qu'il lui avait confiées ;

- qu'en refusant de renouveler ses fonctions en se plaçant sur le terrain de la faute, il lui appartenait de respecter les règles de la procédure disciplinaire ;

- que la série de décisions qui a été prise à compter de la rentrée 1995 avait manifestement pour but de l'évincer de l'Education Nationale ;

- que l'affectation au lycée AUDIBERTI constitue une mutation sanction qui aurait dû être motivée ;

- que l'administration n'a pas tiré toutes les conséquences en matière de traitement de la décision en date du 6 août 1996, de retrait d'une première décision de radiation des cadres en date du 3 juin 1996, alors que son traitement était régulièrement versé par le ministre au rectorat ;

- que le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur la légalité de la décision du 19 mars 1996, la suspendant de toute fonction et de tout traitement ;

- qu'aucun poste ne lui a été proposé pendant les 12 mois qui ont précédé son brutal rattachement au collège RISSO ;

- que les dispositions de la circulaire du 11 février 1960 relatives aux formalités applicables en matière d'abandon de poste n'ont pas été respectées ;

Vu, enregistré le 3 mai 2001, le mémoire confirmatif en défense présenté par le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie ;

Vu, enregistré le 14 septembre 2001, le mémoire en réplique présenté pour Mme X, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre qu'elle n'a jamais été destinataire d'un prétendu arrêté du 1er septembre 1997, l'ayant placée en situation d'exclusion temporaire de fonctions du 1er septembre 1997 au 23 mars 1998 ;

- qu'elle n'a jamais soutenu avoir un droit acquis à demeurer présidente du jury DELF ;

- qu'elle n'a pas été affectée à des postes correspondant à son statut ;

- qu'elle a fait l'objet d'une véritable cabale menée à son encontre ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n°85-1059 du 30 septembre 1985 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 2004 :

- le rapport de Mme LORANT, présidente assesseur ;

- les observations de Me MOSCHETTI pour Mme X ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, professeur certifié de lettres modernes, a été nommée par arrêté ministériel en date du 17 juillet 1990 en qualité de titulaire académique dans l'Académie de Nice, sur la zone de remplacement de Toulon La Seyne, à compter du 1er septembre 1990 ; que le recteur de l'Académie de Nice ayant mis en place un centre d'examen en vue de la délivrance du diplôme élémentaire de langue française (DELF) au collège international de Cannes, elle a été nommée, par arrêté rectoral du 24 septembre 1991, présidente du jury du diplôme élémentaire de langue française et reconduite dans ses fonctions au titre des années 1992-93, 1993-94 et 1994-95 ; que par ailleurs, elle avait été affectée pour ordre au rectorat de Nice à compter du 1er septembre 1992, par arrêté rectoral du 15 mai 1992 ; que par courrier du 30 août 1995, à la suite d'un différend entre l'intéressée et le directeur du collège international de Cannes, le recteur l'a informée qu'il ne serait pas procédé au renouvellement de ses fonctions de présidente de jury du DELF ; que Mme X a été affectée à compter de la rentrée 1995 en qualité de titulaire remplaçante et rattachée au lycée AUDIBERTI d'Antibes ; qu'à compter de cette date, elle a refusé les postes de remplacement qui lui ont été proposés ; qu'elle a fait alors l'objet d'une décision du 8 janvier 1996 opérant une retenue sur traitement du 18 décembre 1995 au 7 janvier 1996 inclus pour absence de service fait puis a vu ses traitements suspendus à compter du 29 janvier 1996 ; qu'après une première mise en oeuvre d'une procédure d'abandon de poste, dont l'intéressée avait été informée par courrier du 16 janvier 1996, cette procédure a été abandonnée ; que cependant Mme X a persisté dans son refus de rejoindre les affectations qui lui étaient proposées ; qu'ayant fait l'objet de trois mises en demeure les 7 et 15 janvier 1998 puis le 4 février 1998, restées sans effet, d'avoir à rejoindre son poste à Saint-Jeannet, elle a été radiée du corps des professeurs certifiés pour abandon de poste par arrêté ministériel du 24 mars 1998 ; que Mme X a demandé au Tribunal administratif de Nice l'annulation de la décision du 8 janvier 1996, du courrier du 16 janvier 1996, de l'arrêté du 24 mars 1998 et la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice subi ; que Mme X fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté ladite demande ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le tribunal administratif, en se prononçant sur la légalité des décisions de suspension de salaires, doit être regardé comme ayant examiné la légalité de la décision du 19 mars 1996 ; que par suite le jugement attaqué n'est pas entaché d'omission à statuer et n'est pas irrégulier de ce chef ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 16 janvier 1996 :

Considérant que, ainsi que l'a jugé le Tribunal administratif de Nice, le courrier par lequel Mme X a été informée qu'une procédure d'abandon de poste était susceptible d'être engagée à son encontre n'a pas le caractère d'une décision faisant grief ; que par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions dirigées contre ce courrier comme irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mars 1998 :

Considérant qu'aux termes de l'article 28 de la loi susvisée 83-634 du 13 juillet 1983 : Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. ;

Considérant que le décret susvisé du 30 septembre 1985 relatif à l'exercice des fonctions de remplacement dans les établissements d'enseignement du second degré dispose que Des personnels titulaires sont nommés pour assurer, dans le cadre de la circonscription académique, conformément à leur qualification, le remplacement des fonctionnaires appartenant aux corps (....) des professeurs certifiés (....).

Ces personnels ont pour mission :

a) Soit d'occuper, pour une durée qui ne peut être inférieure à celle d'une année scolaire un emploi provisoirement vacant ;

b) Soit d'assurer la suppléance, de courte ou moyenne durée, des agents qui, tout en demeurant titulaires de leur poste, en sont momentanément absents ;

Considérant, en premier lieu, que Mme X n'était pas, durant la période où elle exerçait les fonctions de présidente de jury de DELF, en position de disponibilité mais de mise à disposition du rectorat pour exercer lesdites fonctions ; que par suite, elle ne peut se prévaloir de ce que, ainsi que le prévoit l'article 51 de la loi susvisée du 11 janvier 1984, Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés en vue de sa réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ;

Considérant en second lieu que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme X a été nommée par arrêté ministériel en date du 17 juillet 1990 en qualité de titulaire académique dans l'Académie de Nice, sur la zone de remplacement de Toulon La Seyne, à compter du 1er septembre 1990 ; qu'ainsi elle avait la qualité de titulaire académique remplaçante ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que son affectation à compter de la rentrée scolaire 1995 en qualité de titulaire remplaçante sur la zone de remplacement d'Antibes serait contraire à son statut et constituerait une rétrogradation par rapport aux fonctions antérieurement exercées, qui l'aurait autorisée à refuser de rejoindre les postes sur lesquels elle a été affectée ; que par ailleurs les autres irrégularités qui auraient entaché la décision de ne pas la renouveler dans ses fonctions de présidente du jury de DELF, ni celles qui auraient entaché ses affectations successives, à les supposer établies, ne peuvent être regardées comme de nature à rendre ces décisions manifestement illégales et de nature à compromettre gravement un intérêt public ; que par suite Mme X, si elle avait le droit de contester lesdites décisions par la voie d'un recours pour excès de pouvoir devant le Tribunal administratif de Nice, était néanmoins tenue de rejoindre les postes sur lesquels elle avait été affectée ; qu'en refusant de les rejoindre malgré les nombreuses mises en demeure dont elle a fait l'objet, qui lui précisaient clairement les risques qu'elle encourait, elle a pu être regardée à bon droit comme ayant rompu tout lien avec son service, et comme étant en situation d'abandon de poste, nonobstant les explications dont elle accompagnait ses refus et qui ne constituaient pas des motifs légitimes de ces refus ; qu'ainsi le ministre pouvait légalement prononcer sa radiation des cadres sans observer les formalités prescrites en matière disciplinaire ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions de suspension de traitement :

Considérant qu'il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme X sur ce point par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :

Considérant qu'aucune des décisions attaquées n'étant entachée d'illégalité fautive, les conclusions de Mme X tendant à être indemnisée du préjudice en résultant ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme X étant la partie perdante dans la présente instance, ses conclusions présentées de ce chef ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X et au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Copie en sera adressée au recteur de l'Académie de Nice.

Délibéré à l'issue de l'audience du 23 mars 2004, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

M. ZIMMERMANN, premier conseiller,

assistés de Mlle FALCO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 06 avril 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Nicole LORANT

Le greffier,

Signé

Sylvie FALCO

La République mande et ordonne au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 00MA00501


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00501
Date de la décision : 06/04/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : MOSCHETTI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-04-06;00ma00501 ?
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