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30/03/2004 | FRANCE | N°01MA01962

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4 ème chambre-formation à 5, 30 mars 2004, 01MA01962


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 août 2001 sous le n° 01MA01962 présentée pour la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes, dont le siège social est 13, rue des Emeraudes, à Lyon (69457), représentée par son président, domicilié es qualité au dit siège, par la S.C.P. d'avocats UETTWILLER-GRELON-GOUT-CANAT et associés ;

Elle demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 12 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Biot à lui restit

uer la somme de 1.500.000 F qu'elle lui a versé au titre de la réalisation par la ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 août 2001 sous le n° 01MA01962 présentée pour la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes, dont le siège social est 13, rue des Emeraudes, à Lyon (69457), représentée par son président, domicilié es qualité au dit siège, par la S.C.P. d'avocats UETTWILLER-GRELON-GOUT-CANAT et associés ;

Elle demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 12 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Biot à lui restituer la somme de 1.500.000 F qu'elle lui a versé au titre de la réalisation par la commune du raccordement au réseau public d'assainissement d'un terrain lui appartenant destiné à être loti ;

Classement CNIJ : 39-01-03-005

68-024-03

C

2°/ de condamner la commune à lui restituer la dite somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 1996 et des intérêts des intérêts ;

3°) de condamner la commune de Biot à lui payer la somme de 18.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation ; que le tribunal ne pouvait légalement, après avoir constaté l'existence d'équipements publics, considérer que la prise en charge de leur financement était susceptible d'incomber au lotisseur et ceci, en dehors des cas prévus par les articles L.332-6 et suivants du code de l'urbanisme ; que le fait que la contribution au financement d'équipements publics ait été versée sur la base d'une convention ou encore unilatéralement offert n'a aucun effet exonératoire sur l'obligation de restitution dès lors que ladite contribution ne relève pas de la liste exhaustive des contributions fixées par le code ; que les conventions mettant à la charge d'un opérateur des dépenses d'équipements publics ne relevant pas de la liste exhaustive des dépenses prévues par le code de l'urbanisme sont entachées de nullité ; que les conventions tendant à négocier l'application des règles des documents d'urbanisme sont nulles par leur objet ; que, dès lors que l'objet même de la convention vise à mettre à la charge de l'opérateur une dépense d'équipement public sans lien avec les dispositions des articles L.332-6 et suivants du code, le paiement est réputé sans cause ; que le fait que la participation ne soit pas inscrite dans les autorisations d'urbanisme mais procède d'un contrat ne constitue en rien un obstacle à l'application de l'article L.332-30 du code ; qu'au contraire, c'est lorsque la participation aux équipements publics ne relève pas des articles L.332-6 et suivants du code qu'elle ne peut en aucun cas être supportée par le lotisseur ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 19 avril 2002, présenté pour la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes ; celle-ci persiste dans ses écritures ; elle sollicite en outre la capitalisation des intérêts, plus d'une année s'étant écoulée depuis sa dernière demande en ce sens ;

Vu le mémoire en défense enregistré au greffe le 7 octobre 2002, présenté pour la commune de Biot représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal du 12 avril 2001, par la SELARL d'avocats BURLETT-PLENOT-SUARES-BLANCO ; elle demande à la Cour, d'une part, de rejeter la requête et, d'autre part de condamner la S.A. DEVIQ Rhône Alpes à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué est suffisamment motivé ; que la société DEVIQ lui a proposé une offre unilatérale de participation financière dans le but de raccorder un terrain lui appartenant au réseau public d'assainissement ; que ce contrat est une offre de concours ; que la réalisation de cet ouvrage public a eu un intérêt évident pour la société ; que le contrat est licite puisqu'il a une contrepartie ; que les dispositions du code de l'urbanisme n'excluent pas l'offre de concours par le lotisseur au financement d'un équipement public devant bénéficier au lotissement ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 13 décembre 2002, présenté pour la S.A. DEVIQ Rhône Alpes ; celle-ci persiste dans ses écritures ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 24 février 2004, présenté pour la S.A. DEVIQ Rhône Alpes ; celle-ci persiste dans ses écritures ; elle demande en outre que la capitalisation des intérêts soit effectuée pour la première fois au 7 juillet 1997 puis, à nouveau, à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure ;

Vu la note en délibéré, enregistrée au greffe le 3 mars 2004, présentée pour la commune de Biot ; celle-ci persiste dans ses écritures ; elle soutient en outre que la requête est irrecevable, tant en appel qu'en première instance, faute d'avoir été présentée par ministère d'avocat ;

Vu la note en délibéré, présentée par la S.A. DEVIQ Rhône Alpes ; celle-ci persiste dans ses écritures ; elle soutient en outre que les litiges liés à la répétition de l'indu en matière de participations d'urbanisme sont dispensés de ministère d'avocat ; que le défendeur étant une collectivité territoriale il en est également de même ; qu'à aucun stade de la procédure le tribunal administratif ne l'a invitée à régulariser sa requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2004 :

- le rapport de M. FIRMIN, premier conseiller ;

- les observations de Me LAMORLETTE pour la société DEVIQ Rhône Alpes ;

- les observations de Me SUAREZ pour la commune de Biot ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant que par un acte authentique, signé le 20 décembre 1990, la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes s'est rendue propriétaire d'un tènement immobilier d'une superficie de 63.260 m², sur lequel elle entendait édifier un ensemble immobilier, situé au lieu dit « Les Castellins » sur le territoire de la commune de Biot ; qu'afin de bénéficier de la règle d'urbanisme la plus favorable à son projet elle a conventionnellement offert à la commune de Biot de lui verser une somme forfaitaire de 1.500.000 F destinée à permettre à cette dernière de réaliser le réseau d'assainissement nécessaire à la desserte de son projet ; que, toutefois, la S.A. DEVIQ Rhône Alpes ayant ultérieurement estimé indue cette participation en a poursuivi la restitution devant le Tribunal administratif de Nice en complétant cette demande par des conclusions tendant à l'indemnisation de frais financiers chiffrés par elle à la somme de 213.486,73 F ; que la S.A. DEVIQ Rhône Alpes relève appel du jugement du 12 juin 2001 du Tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté la première de ces demandes ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.332-6 du code de l'urbanisme, seul applicable à la date de la demande de la société : « Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : 1° Le versement de la taxe locale d'équipement prévue à l'article 1585 A du code général des impôts ou de la participation instituée dans les secteurs d'aménagement définis à l'article L.332-9 ; 2° Le versement des contributions aux dépenses d'équipements publics mentionnées à l'article L.332-6-1. Toutefois ces contributions telles qu'elles sont définies aux 2° et 3° dudit article ne peuvent porter sur les équipements publics donnant lieu à la participation instituée dans les secteurs d'aménagement définis à l'article L.332- 9 ; 3° La réalisation des équipements propres mentionnés à l'article L.332-15. Les taxes ou contributions qui sont obtenues ou imposées en violation des dispositions du présent article sont réputées sans cause ; les sommes versées ou celles qui correspondent au coût des prestations fournies sont sujettes à répétition. L'action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement des taxes ou contributions ou de l'obtention des prestations indûment exigées. Les sommes à rembourser portent intérêt aux taux légal » ;

Considérant qu'il est constant qu'à la date de la délivrance des autorisations de lotir et de construire à la S.A. DEVIQ Rhône Alpes, la taxe locale d'équipement avait été instituée dans la commune de Biot ; que si la commune de Biot a été amenée à modifier le tracé de l'extension de son réseau d'eaux usées devant desservir le quartier dit « des Issarts » à l'occasion du raccordement des parcelles propriété de la S.A. DEVIQ Rhône Alpes, il résulte de l'instruction que ledit réseau collecte également les constructions riveraines de son tracé ainsi que le lotissement d'un autre opérateur ; que, dans ces conditions ledit réseau d'assainissement, qui ne bénéficie pas à titre principal à l'opération de la société requérante, ne saurait être qualifié d'équipement propre à ladite opération ; qu'il suit de là que la prise en charge par la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes des dépenses d'équipements publics en cause, même si elle résultait d'une offre unilatérale de la dite société, était interdite par les dispositions de l'article L.332-6 ci-dessus rappelées qui sont d'ordre public et était dès lors sans cause au sens des dispositions du même article ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. DEVIQ Rhône Alpes est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à la répétition de la somme versée par elle ; qu'il y a lieu de condamner la commune de Biot à lui reverser la somme de 1.500.000 F (228.673,53 euros) ;

Considérant que la S.A. DEVIQ Rhône Alpes à droit aux intérêts au taux légal de la somme de 1.500.000 F courant à compter du 28 juin 1996, date d'enregistrement de sa demande au greffe du Tribunal administratif de Nice ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 28 juin 1996 ; qu'à cette date il n'était pas dû une année d'intérêts ; qu'en revanche cette demande ayant été utilement réitérée le 7 juillet 1997 et une année au moins d'intérêts étant dus à cette date, il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil de faire droit à cette demande ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de Biot doivent, dès lors, être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la S.A. DEVIQ Rhône Alpes et de condamner la commune de Biot à lui payer la somme de 1.000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 12 juin 2001 du Tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu'il a rejeté la demande présentée par la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes tendant à la restitution de la somme de 228.673,53 euros (deux cent vingt-huit mille six cent soixante-treize euros et cinquante-trois centimes).

Article 2 : La commune de Biot restituera à la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes la somme de 228.673,53 euros (deux cent vingt-huit mille six cent soixante-treize euros et cinquante-trois centimes) avec intérêts au taux légal à compter du 28 juin 1996. Les intérêts échus le 7 juillet 1997, seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Biot tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La commune de Biot versera à la S.A. DEVIQ Rhône Alpes la somme de 1.000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme DEVIQ Rhône Alpes, à la commune de Biot et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 2 mars 2004, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS et M. MOUSSARON présidents assesseurs,

M. DUBOIS, M. FIRMIN, premiers conseillers,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 30 mars 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Jean-Pierre FIRMIN

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 01MA01962


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4 ème chambre-formation à 5
Numéro d'arrêt : 01MA01962
Date de la décision : 30/03/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. FIRMIN
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : SCP UGGC et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-03-30;01ma01962 ?
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