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09/03/2004 | FRANCE | N°99MA01638

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 09 mars 2004, 99MA01638


Vu, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 19 août 1999, sous le n° 99MA01638, la requête présentée pour M. Mohammed X, demeurant ..., par Me WEYL, avocat à la Cour ;

M. X demande à la cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 20 mai 1999, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par le ministre de l'agriculture, de la pêche et de la forêt à sa demande d'établissement d'un contrat écrit et limité la condamnation de l'Etat à la somme

de 3.000 F ;

2°/ d'annuler ladite décision ;

3°/ de condamner l'Etat à faire ...

Vu, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 19 août 1999, sous le n° 99MA01638, la requête présentée pour M. Mohammed X, demeurant ..., par Me WEYL, avocat à la Cour ;

M. X demande à la cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 20 mai 1999, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par le ministre de l'agriculture, de la pêche et de la forêt à sa demande d'établissement d'un contrat écrit et limité la condamnation de l'Etat à la somme de 3.000 F ;

2°/ d'annuler ladite décision ;

3°/ de condamner l'Etat à faire droit à ses conclusions indemnitaires de première instance avec intérêts légaux et à lui verser 5.000 F au titre de l'article L8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Classement CNIJ : 36-12-01

36-13-03

C

M. X soutient qu'en application des dispositions de la loi et du décret du 17 janvier 1986, tout recrutement d'agent contractuel doit faire l'objet d'un contrat écrit ; qu'il doit donc faire l'objet d'un contrat dont, en l'absence d'un terme fixé, le terme doit coïncider avec le début du contrat suivant ; que sa demande indemnitaire était recevable car chiffrable ; qu'il a droit au versement de la différence entre ce qu'il aurait perçu en qualité d'agent contractuel et ce qu'il a perçu en qualité d'agent vacataire et à la réparation du préjudice né de ce qu'il a été privé de garanties ; que par ailleurs il a droit à la reconstitution de sa situation administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 21 mai 2001, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'agriculture, de la pêche qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que M. X ne pouvait être recruté selon les dispositions du décret du 22 octobre 1968 qui soumet le recrutement d'agents contractuels à l'existence d'emplois vacants d'enseignants titulaires et qu'il pouvait être recruté en qualité d'agent vacataire pour une durée de 10 mois en application du décret du 17 janvier 1986 ; que le recrutement de M. X a été régularisé par le certificat de travail établi par le directeur du centre de formation professionnelle agricole de Marseille ; qu'en tout état de cause, à supposer la nécessité d'établir des contrats écrits, ces derniers ne peuvent englober les vacances scolaires d'été, ce qui équivaudrait à appliquer le décret du 22 octobre 1968 ; que, s'agissant des conclusions indemnitaires, M. X avait fait une demande préalable du versement de la différence entre ce qu'il aurait perçu en qualité d'agent titulaire (et non contractuel) et ce qu'il a perçu en qualité d'agent vacataire ; que, en tout état de cause, sa rémunération ne peut être fixée que par application du décret n°70-716 du 31 juillet 1970 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n°86-83 du 17 janvier 1986 ;

Vu le décret n°68-934 du 22 octobre 1968 ;

Vu le décret n° 70-716 du 31 juillet 1970 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2004 :

- le rapport de Mme LORANT, présidente assesseur ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 4 du décret n°86-83 du 17 janvier 1986 : L'agent non titulaire est recruté par contrat ou par engagement écrit. Pour les agents recrutés en application des articles 4, 5 et 6 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, le contrat précise l'article en vertu duquel il est établi, et, éventuellement, s'il intervient en application du 1° ou du 2° de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984. Outre sa date d'effet et la définition du poste occupé, ce contrat ou cet engagement précise les obligations et droits de l'agent lorsqu'ils ne relèvent pas d'un texte de portée générale ou d'un statut particulier. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, qui a été recruté en septembre 1991, puis en septembre 1992 par le directeur du centre de formation professionnelle agricole de Marseille pour exercer des fonctions d'enseignant à raison de 4 heures, puis de 10 heures par semaine, n'a fait l'objet d'aucun engagement écrit, en violation des dispositions précitées du décret du 17 janvier 1986 ; que le certificat de travail dont se prévaut le directeur du centre, établi a posteriori, ne peut constituer un tel contrat qui doit fixer a priori les conditions d'emploi ; que par suite, M. X était fondé à demander au ministre de tutelle la régularisation de sa situation par la signature d'un contrat écrit et que c'est illégalement que le ministre lui a opposé une décision implicite de rejet ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande sur ce point ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

En ce qui concerne leur recevabilité :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges que M. X avait dans sa réclamation préalable sollicité de l'Etat le versement d'une somme de 30.000 F (soit 4.573,45 euros) à parfaire ainsi que toutes sommes résultant de la régularisation de sa situation et notamment à titre de réparation de son préjudice résultant de la différence entre les rémunérations qu'il avait effectivement perçues en qualité de vacataire et celles auxquelles il aurait eu droit en qualité de contractuel recruté conformément aux dispositions du décret du 17 janvier 1986 ; qu'ainsi cette réclamation était chiffrée, et que, tant devant le tribunal administratif que devant la cour, sa demande tendant à la condamnation de l'Etat est recevable ;

En ce qui concerne leur bien-fondé :

Considérant que M. X est fondé à demander l'indemnisation du préjudice né pour lui de sa rémunération sous forme de vacations alors qu'il avait droit, en application des dispositions du décret du 17 janvier 1986, à la signature d'un contrat écrit ; que, dès lors, il y a lieu de condamner l'Etat à lui verser une indemnité correspondant à la différence entre le montant des rémunérations qu'il aurait dû percevoir pour les services qu'il a accomplis et le montant des rémunérations qu'il a perçues sous forme de vacations ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X ait été recruté, eu égard au nombre d'heures d'enseignement qu'il a effectué, qui ne correspondent pas à un emploi budgétaire individualisé au cours des années litigieuses, pour occuper un emploi vacant de professeur titulaire en application des dispositions précitées du décret du 22 octobre 1968 ; que, dès lors, il n'est pas fondé à demander le bénéfice des dispositions de ce décret pour le calcul de l'indemnisation qu'il sollicite ; qu'en revanche, eu égard à son service qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, était de 4 heures, puis de 10 heures d'enseignement par semaine au titre des années 1991 et 1992, il doit être regardé comme ayant accompli un service incomplet en application des dispositions du décret du 31 juillet 1970 fixant les dispositions applicables aux maîtres auxiliaires des lycées et collèges agricoles, qui prévoit que : Entrent dans la catégorie des maîtres auxiliaires et sont soumis à l'ensemble des dispositions applicables à ces personnels tous les maîtres chargés par le ministre de l'agriculture, et à titre essentiellement précaire, (...) de donner pendant tout ou partie de l'année scolaire un enseignement constituant un service incomplet. ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. X, outre 700 euros au titre du préjudice moral, la différence entre les traitements perçus à raison de sa qualité de vacataire et ceux qu'il aurait perçus en qualité de contractuel recruté sur le fondement du décret n°70-716 ; que la somme ainsi fixée portera intérêts à compter du 23 avril 1993, date de sa demande préalable, lesquels intérêts seront eux-mêmes capitalisés au 19 août 1999, date à laquelle cette capitalisation a été demandée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a limité cette condamnation à 3.000 F de ce chef ;

Sur les conclusions tendant à la reconstitution de sa situation administrative :

Considérant que M. X étant un agent recruté par contrat à durée déterminée, n'a pas de droit à un déroulement de carrière ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. X une somme de 700 euros au titre de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La décision implicite de rejet du ministre de l'agriculture, de la pêche et de la forêt est annulée.

Article 2 : L'ETAT versera à M. X, outre 700 euros au titre du préjudice moral, la différence entre les traitements perçus à raison de sa qualité de vacataire et ceux qu'il aurait perçus en qualité de contractuel recruté sur le fondement du décret n°70-716.

Article 3 : La somme ainsi calculée portera intérêts à compter du 23 avril 1993. Ces intérêts seront capitalisés au 19 août 1999 pour porter eux-mêmes intérêts.

Article 4 : L'ETAT versera à M. X la somme de 700 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus de la requête de M. X est rejeté.

Article 6 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 20 mai 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 3 février 2004, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

M. ZIMMERMANN, premier conseiller,

assistés de Mme LOMBARD, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 9 mars 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Nicole LORANT

Le greffier,

Signé

Marie-Claire LOMBARD

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 99MA01638


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA01638
Date de la décision : 09/03/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme LORANT
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : WEYL-PICARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-03-09;99ma01638 ?
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